12 | Un coup de couteau dans le coeur.
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Le matin se levait, apportant avec lui le chant des oiseaux encore en vie. André était réveillé depuis deux heures maintenant et il surveillait les environs tandis que Daryl se reposait. Il avait fait un cauchemar pendant la nuit et quand il s'était réveillé, il avait insisté pour prendre la place de Daryl, qu'il dorme un peu.
Maintenant, quand il le voyait dormir, il n'avait pas du tout envie de le réveiller. Et pourtant, ils devaient partir.
André attendit encore, les yeux rivés sur le premier niveau de l'entrepôt qui s'éclaircissait de bleu pastel au fil des minutes. Seuls les bruits de la nature encore ensommeillée chantaient à ses oreilles. Les morts et leur requiem sinistre s'étaient évanouis dans l'air, les dangereuses voix les suivants. Il aimait ces parenthèses, entre la vie et la mort, c'était l'œil du cyclone, le vide dans l'Univers.
Dans ces moments là, son cerveau ralentissait pour laisser à son esprit la quiétude dont il avait tant besoin. Avant, quand sa vie était l'Enfer, André avait prit l'habitude de se lever avant le soleil et de le regarder commencer sa course dans le ciel. La vie qui s'éveille, la nature qui bourgeonne, le silence avant le bruit. Ces instants l'avaient toujours apaisé, grâce à eux, sa tête était maintenue dans cette sage nébuleuse.
André entendit parfaitement Daryl se réveiller, alors quand ce-dernier s'assit à côté de lui, il ne fut pas surpris.
- Bonjour, dit-il tranquillement sans cesser de faire attention aux chants des oiseaux. Tu as bien dormi ?
- Hm ? S'lut.
André lui lança un coup d'œil.
- Pas du matin ?
Il reçut un mouvement de tête pour toute réponse. Alors il se tu et laissa Daryl se réveiller.
- On va y aller, marmonna finalement Daryl après quelques minutes.
- Je t'attends, répondit André en s'étirant.
Daryl s'était levé et du bout de sa chaussure avait mit un petit coup dans la hanche d'André.
- Debout, alors.
Il se leva et ajusta sa veste en cuir.
- Moi aussi j'vais te frapper tu vas moins faire le mariole, dit-il en le regardant de haut malgré les quelques centimètres qu'il avait en moins.
- J'attends de voir ça.
Après avoir vérifié comme il pouvait le premier niveau, Daryl commença à descendre par l'échelle, prestement suivit du mécanicien.
Il se débarrassa sans mal des quelques rôdeurs errants mais, alors qu'un d'entre eux s'approchait d'André - armé de son couteau dont il savait tout juste se servir -, il ne sembla pas enclin à lui prêter main forte. Au lieu de ça, il le regardait en fronçant les sourcils.
- J'suis pas sûr que ça soit la bonne pédagogie pour m'apprendre à me défendre contre des morts, Daryl, lança André alors qu'il reculait pour mettre de la distance entre lui et le rôdeur.
- Tu m'as déjà vu faire, répliqua celui-ci.
- Oui, des centaines de fois, mais y'a une différence entre voir et reproduire.
Le rôdeur s'approchait de plus en plus et bientôt André se retrouverait acculé au mur.
- Ne te laisse pas dominer par ta peur, informa Daryl sur un ton beaucoup trop détendu, vas-y à l'instinct. Ta vie contre lui.
André hocha la tête, toute son attention tournée vers le cadavre qui se trouvait un peu trop proche à son goût.
- C'est un peu comme les sbires de la Team Rocket, fit il à lui-même. J'peux bien réussir à buter un sbire de niveau 15 quand même.
Il était tout proche maintenant. Un peu trop proche à son goût, d'ailleurs.
André prit solidement place sur ses appuis - il s'était remémoré ses cours de judo où il était inscrit, enfant - et s'élanca en avant.
Tout se passa trop vite pour lui, avant même qu'il n'ait le temps de comprendre ce qu'il se passait, le voilà en train d'enfoncer sauvagement la lame de son arme dans le cerveau - sans doute fondu - du mort-vivant.
Essoufflé, il se redressa, les avant-bras couverts de sang et il regarda Daryl.
- J'ai réussi, dit simplement André.
Il le vit un sourire et se détourner pour s'enfoncer dans les bois. André leva les yeux au ciel, exaspéré par le comportement lunaire de Daryl puis s'activa à le suivre pour ne pas se retrouver seul.
Ils marchèrent longuement dans le silence du matin, la horde se trouvait dans la direction opposée à la leur - d'après Daryl -, André lui faisait confiance, au moins pour ce genre de chose. Comme il l'avait dit la veille, Daryl était bien meilleur que lui, il n'y avait pas photo.
Le soleil était en train d'atteindre lentement son zénith quand le ventre d'André se mit à produire des roulements tous droits sortis du plus profond de l'Enfer - à son sens -.
- J'ai faim, râla-t-il en accélérant le pas pour rejoindre Daryl qui marchait devant lui.
- T'as cas marcher plus vite, on devrait bientôt être arrivé.
- Déjà ? Mais ça fait même pas une heure qu'on marche.
Daryl lui lança un regard surpris.
- Ça en fait trois, André, rétorqua-t-il après quelques instants de silence.
André parût très étonné d'apprendre ça.
- Ah ? Vraiment ?
- Tu foutais quoi ?
- Je réparai des caisses, pourquoi ?
- Hein ?
- Bah, comme tu parlais pas, j'me suis occupé comme je pouvais. Donc j'ai fais des fais des visualisations de véhicules à remonter dans ma tête.
Daryl eut l'air décontenancé et il répéta bêtement :
- Hein ?
André fronça les sourcils.
- Tu t'paye ma tête, Daryl Dixon ? demanda-t-il, tout à fait sérieux.
- Tu déconne j'espère ? C'est plutôt à moi de t'demander ça.
- Et pourquoi donc ?
- Tu faisais des visualisations ?
- Oui, je viens de te le dire, qu'est-ce qu'il y a de si étrange, bon Dieu ?
Daryl fronça les sourcils.
- J'sais pas, laisse tomber.
André pinça ses lèvres d'une façon qui montrait bien que son ami avait bien fait de la fermer. Il n'appréciait pas beaucoup qu'on le prenne pour un imbécile.
- Il vaut mieux, en effet, dit-il pour clore la discussion.
D'une même idée, ils laissèrent ainsi le silence se réinstaller, seules leurs chaussures crissantes sur le tapis forestier et le chant de la nature résonnaient dans leurs oreilles.
Au bout de quelques mètres, Daryl fit une halte pour sortir une bouteille d'eau et un paquet de biscuits rassîts de son sac à dos.
André le rejoignit en peu de pas. Il le regarda, un peu surpris.
- Tu fais quoi ?
Daryl lui tendit ce qu'il tenait.
- Mange et bois, ordonna-t-il.
- C'est bon Daryl, on arrive bientôt. Je peux encore me retenir.
- M'en fous, mange et bois.
André leva les yeux aux ciel, un sourire désabusé sur les lèvres.
- Si tu veux tant gaspiller de la nourriture, mange toi. J'accepte juste de l'eau.
Et sur ce, il lui prit la bouteille des mains et la vida de moitié. Il s'arrêta d'ailleurs pile poile, Daryl se demanda s'il l'avait fait exprès ou si c'était un simple hasard.
Plusieurs minutes plus tard, ils repartirent. André n'avait pas cédé pour les gâteaux, Daryl s'en était presque énervé mais les choses n'avaient pas dérapées et ils avaient repris leur chemin entre les arbres.
Peu à peu la route commença à apparaître sur leur droite puis le toit de la station service en ruine également. Tous deux accélérèrent le pas, restant malgré tout attentifs aux sons les entourant.
La station service semblait déserte si on faisait abstraction des quelques autres rôdeurs perdus qui déambulaient ça et là. André et Daryl restèrent cachés dans la forêt en attendant d'analyser la situation qui se présentait.
Néanmoins, le soulagement qui les tinrent les lâcha bien vite lorsqu'André fit remarquer un problème qui avait tout de suite attrapé son œil.
- Daryl, la moto n'était pas garée là ?
Daryl aussi l'avait vu puisqu'il se tenait immobile les yeux vissés là où sa moto aurait dû se trouver, les points si serrés que ses phalanges blanchissaient.
- Ce sont les types qu'on a entendu. T'avais pas prit tes clefs avec toi ?
- Si, j'les ai, répondit néanmoins Daryl avec un peu trop de précipitation pour que ça soit crédible.
André avait très bien vu l'air de la honte se peindre fugacement sur ses traits. Avant de disparaître tout aussi vite.
- Ah ? feignit-il en réprimant un sourire moqueur. Bah montre les moi.
- Pourquoi ?
Le ton qu'il avait employé aurait dû alerté André pour la suite. Daryl avait craché ces mots avec tant d'agressivité qu'on ne pouvait se tromper quant à sa réaction si on le poussait à la vérité.
Mais la psychologie n'avait jamais été le fort d'André, le sien était la mécanique.
- Pourquoi quoi ? Je veux juste que tu me les montre.
- La moto n'est plus là d'toute façon.
- Donc il n'y a aucun problème à ce que tu me montres les clefs.
- Putain mais lâche moi ! s'écria Daryl qui, dans sa colère, ne remarqua pas les rôdeurs qui l'avaient entendu. Tu vas pas m'casser les couilles pour des clefs à la con ! Ça change rien que j'les ai ou pas ces putain d'clefs alors fous moi la paix !
Puis à la seconde où sa voix s'éteignait, André se jeta sur lui si vite qu'il n'eut le temps que de voir l'éclat de ses yeux noisette à quelques centimètres des siens avant d'être projeté sur le côté.
L'adrénaline se deversa en un flot électrisant dans son corps, Daryl bondit sur ses jambes et se précipita sur André qui se débattait férocement avec le mort qui allait se jeter sur lui. Dès la première ouverture, il planta son couteau dans le crâne mou, coupant court à ses claquements de dents.
- T'es malade ou quoi ? s'énerva encore plus Daryl quand son ami fut de nouveau sur ses pieds.
- J'viens de te sauver la vie alors un merci ne serait pas de trop.
- J'l'avait vu venir.
André le foudroya du regard, plus amusé pour un sou.
- Arrête de mentir Daryl, siffla-t-il. Je sais qu't'as pas les clefs ef que tu ne l'as pas vu venir. C'est pas grave, on s'en fous mais arrête vraiment de me prendre pour un con et viens m'aider à buter ces enculés qui se rapprochent un peu trop près de nous.
C'est ainsi que le mort le plus proche fut abattu, après le sermon du mécanicien qui s'affairait à lui embrocher le cerveau avec la lame de son couteau. Daryl l'avait immédiatement suivi, l'instinct prenant le dessus, ils s'étaient débarrassé des quelques morts qui jonchaient à présent le sol.
- Bon, on retourne à la prison à pied ? fit André en se redressant après avoir réussi à tuer le dernier.
Daryl ne lui répondit pas, il l'ignora et s'avança simplement vers la route.
- Ne m'répond pas surtout.
André lui emboîta le pas. Voilà que Daryl se mettait à faire la gueule. Après toutes les fanfictions qu'il avait lu, il se doutait que ses mots n'avaient pas plu à cet imbécile de tête de neuds. Mais tant pis, André allait le laisser bouder autant qu'il voulait, lui n'avait plus le temps pour ce genre de comportement. Si Daryl avait décidé d'être con, il le serait tout seul. André ne savait pas vraiment si c'était la bonne chose à faire compte tenue de leur relation qui semblait s'améliorer. Il avait lu des centaines de fanfictions et pourtant, il ne savait pas comment s'y prendre. La réalité des choses paraissait nettement différente. Daryl était différent. Ce n'était plus, ce n'était pas un personnage de fiction, à cet instant Daryl était plus que réel et il ne pouvait plus se baser sur des personnes qui lui inventaient une personnalité. Personne ne connaissait vraiment Daryl, mais lui avait la chance de pouvoir commencer à le connaître et il se rendait compte que le Daryl qu'il avait en face de lui était bien plus qu'un redneck badass et taciturne. Maintenant il voyait que Daryl Dixon était bien plus sensible, tourmenté et complexe que sa représentation fictive. Il était bien plus humain.
N'empêche que Daryl était presque guidé par ses traumatismes et André ne voulait pas laisser faire ça, pas avec lui. Il voulait voir Daryl, le vrai Daryl. Celui qui chante, qui a confiance, celui qui ne ce cache pas sous la peur et la colère.
Il n'était pas et ne voulait pas avoir le rôle de l'infirmier des cœurs. Lui aussi avait sa santé et ses traumatismes, il ne pouvait pas gérer en plus quelqu'un d'autre.
Mais pourquoi ne pas l'aider un peu quand même ? André avait besoin de quelque chose pour faire tourner son cerveau, il appréciait Daryl et voulais qu'il aille mieux, qu'il s'aime lui. C'était donc décidé, quand il arrivera à la prison il irait voir Merle et lui toucherais deux mots. Peut-être n'était-ce pas la meilleure des idées mais André n'en avait aucune idée, la psychologie n'était pas son domaine, il avançait à l'aveugle.
Un peu comme maintenant quand il remarqua un peu tard que sa vision se troublait et que ses jambes se dérobaient. Il s'effondra sur l'asphalte dans un bruit étouffé.
Daryl sursauta presque, il fit volte-face si brusquement que ses os craquèrent comme de la neige au petit matin. La seconde d'après, il s'était agenouillé auprès d'André inconscient et s'affairer à le porter pour le déplacer à l'ombre de la forêt. Tous ses muscles le firent souffrir quand il souleva le corps relâché, il sentit le soleil fracasser son crâne et brouiller ses yeux. La respiration courte, il vint le déposer sur une souche morte, à quelques pas de la route.
Daryl souffla de soulagement quand il le posa enfin. Non pas qu'André était lourd (bien au contraire, il était plus léger qu'à son arrivée), mais l'épuisement frappait Daryl de plein fouet, il était au bord de l'insolation.
Il sortit la bouteille d'eau de son sac - maudissant André au passage d'avoir bu la moitié d'un coup - et en imprégna le chiffon rouge qui pendait à sa ceinture. Il vint le poser sur le front de son ami après avoir écarter quelques mèches puis s'affaira à le faire boire. Ce ne fut pas une tâche aisée et une partie non négligeable s'échappa de la bouche d'André pour venir disparaître dans la terre. Daryl maudissait chaque gouttes perdues.
La situation était beaucoup plus grave qu'elle n'en avait l'air. Ils étaient à un jour et une nuit de la prison, ils n'avaient pas beaucoup de nourriture, encore moins d'eau, l'épuisement les accablait et pour couronner le tout, André venait de s'évanouir et lui se sentait au bord du précipice également.
Il s'accorda une pause le temps qu'André se réveille, il ne pourrait pas le porter encore longtemps et certainement pas sous l'un des premiers soleils de plomb de l'année. Daryl n'était pas un surhomme, c'était juste un homme normal, pas plus fort et pas moins fort que les autres gens de cette foutue planète. Enfin, vu les tarés qui se baladaient en ces temps, il se rassura en se disant qu'il n'était certainement pas pire que ces ordures.
C'est alors qu'il sentit la fatigue le submerger, et ce n'est qu'une fois que le bateau avait fait naufrage, qu'il entendit ces rires sinistres raisonnés dans ses oreilles. Un voyant rouge et clignotant s'allume dans sa tête, mais c'était trop tard maintenant, les pommes l'avaient cueilli.
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