1 | Bienvenue à ZombieLand.


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À la première heure du premier jour, André s'éveilla d'un sommeil cotonneux et gluant qui s'accrochait à son esprit en une multitude de filaments tenaces. Le monde fût sombre au début, comme un voile opaque au-dessus de son esprit.
Lorsqu'il finit par se dissiper, la lumière du jour divisée en fins fuseaux s'étirèrent à travers la pièce, découpant la pénombre et faisant scintiller l'air poussiéreux. Le chant des oiseaux dans le vent donnait au tableau une dimension étrangement onirique.

Un frisson lui électrisa la colonne vertébrale toute entière et il sût immédiatement que quelque chose ne tournait pas rond. Il avait une désagréable sensation, comme un remous s'accrochant à sa peau, un émoi dérangeant qui mettait mal à l'aise.
C'était si fin, si discret qu'il prit finalement sur lui, refoulant la déplaisante impression dans les recoins cachés de son esprit.

André se leva difficilement, il constata amèrement qu'il était entièrement courbaturé. Il réfléchit un instant mais fut incapable d'avoir la moindre idée de comment cela était possible. Il ne se souvenait pas d'avoir fait quoi que ce soit qui pourrait éventuellement lui provoquer ce genre de désagrément, et comme sa mémoire n'était plus de toute jeunesse, le problème passa lui aussi à la trappe.

Se relevant finalement tout à fait et après un attentif coup d'œil autour de lui qui ne l'avança pourtant pas beaucoup, il vit sa meilleure amie allongée sur le flan, à quelques pas de lui. Il fit un pas vers elle et la secoua négligemment.

- Mad, réveille-toi.

Un grognement sourd semblable à celui d'un ours dérangé en pleine sieste résonna dans la petite cabane les abritant.
Madeleine - Mad - papillonna des yeux quelques secondes avant de s'asseoir, la main soutenant sa tête.

- J'ai un mal de crâne ignoble, grogna-t-elle en regardant tout autour. On est où là ?

André haussa les épaules. Lui non plus n'en avait aucune idée.

- Qu'est ce que j'en sais.

- Pourquoi est-ce que le jour où je dors chez toi, on se réveille dans une vieille cabane moisie ? siffla Mad en se levant.

- J'en sais rien, j'suis pas Gandalf, je ne peux pas nous faire voyager dans le multivers en dormant.

- Gandalf ne peut pas faire ça, riposta-t-elle. T'as ton portable ?

André fouilla dans ses poches, imité par sa meilleure amie et en sortie un téléphone portable. Il tenta de l'allumer en vain.

- Il est à plat, grogna-t-il.

- Le miens aussi, repondit Mad sur le même ton alors qu'elle regardait l'objet entre ses doigts, dépitée.

Un silence plein de réflexion suivi, puis Mad le brisa :

- Bon, on a qu'à sortir, on verra bien.

Les deux amis se regardèrent et d'un commun accord, quittèrent la cabane.
Une forêt s'étendait à perte de vue, des arbres et rien que des arbres. André laissa échapper un soupire et se tourna vers Mad.

- De toute évidence nous sommes dans une forêt.

- Sans blague.

- Il nous reste plus qu'à bouger, hein. On ne va pas rester là indéfiniment.

Elle hocha la tête et tous deux se mirent en route.
Ils se déplacèrent un peu au hasard dans la forêt, échangeant quelques phrases de temps à autre mais restant silencieux le plus souvent.
L'air était moite malgré le matin, la tiédeur humide se collait à leurs peaux, à leurs gorges.
Mad se dit qu'elle avait vraiment envie d'une cigarette, elle sortit son paquet de tabac dans l'optique de rouler mais André fut plus rapide et lui proposa une industrielle de son propre paquet. Elle accepta avec joie et après en avoir prit une pour lui à son tour, il rangea son paquet et approcha sa tête de Mad afin qu'elle allume sa cigarette avec son briquet.

Ainsi, ils fumèrent pendant un instant (trop court à leurs yeux) avant que quelque chose ne les ramène brutalement à la réalité.
Ou quelqu'un.

Ce qui semblait être un enfant, approchait bizarrement d'eux en claudiquant, la tête tantôt penchée à droite, tantôt à gauche dans un mouvement de balancier hypnotisant.
André fronça les sourcils, Mad également. Leurs cerveaux au bord de l'implosion.

Quelque chose ne tournait réellement pas rond. Ce gosse ne marchait pas droit et ressemblait plus à un cadavre qu'à autre chose.

Le sang d'André se glaça et son cerveau se gela. Ils avaient passé toute la journée de la veille à regarder The Walking Dead et la réalité lui sauta au visage comme un diable hors de sa boîte.

Comment était-ce possible ?

Le rôdeur continuait à se rapprocher, André, tétanisé, n'esquissa pas le moindre geste. Il gardait ses yeux obstinément fixés sur l'enfant mort qui marchait vers lui.

Mad vit bien que son meilleur ami avait cessé de fonctionner. C'est donc elle qui endossa la responsabilité de lui sauver la vie.
Elle s'empara d'une branche précédemment brisée et fonça sur le cadavre, poussant violemment André au passage.

Il tomba par terre alors qu'elle enfonçait proprement son morceau de bois dans le crâne du rôdeur dans un bruit visqueux.
André se relèva péniblement alors que le corps tombait.

- Merci, souffla-t-il, ses yeux gris exorbités.

- Pas d'quoi.

Elle balança sa branche et s'accroupie au dessus du cadavre avec un mine dégoûtée.

- Bon, c'est quoi l'embrouille là ? lui dit-elle en touchant la joue noirâtre du mort-vivant.

- J'crois bien que c'est un rôdeur.

- Non jure. Le monde a subit une attaque chimique en une nuit ou on a été téléportés dans The Walking Dead ?

André lui lança un regard plus qu'éloquent et Mad fit la moue.

- Tu penses sérieusement qu'on est dans une série ? ricana-t-elle.

- Tu vois d'autres solutions ?

- Non mais c'en n'est pas une ça. C'est impossible, abruti.

- Ouais moi aussi ça me paraît gros. On a cas retourner à la cabane, peut-être qu'il y aura des indices ?

Mad haussa les épaules.

- Vas-y, on n'a nul part ailleurs où aller de toute manière.

André hocha la tête et ils firent demi-tour en silence. Ils étaient trop perdus dans leurs pensées pour échanger et le chemin du retour se passa heureusement sans encombre.

Ils retrouvèrent finalement la petite maison qui semblait être à l'abandon depuis bien longtemps. Ils y entrèrent et André trébucha malencontreusement sur un objet qui - remercions Mad - faillit le faire tomber si sa meilleure amie ne l'avait pas retenu in extremis.

- Fais gaffe ! railla-t-elle.

André la remercia d'un sourire et attrapa le briquet qui traînait dans sa poche.
Ils regardèrent activement autour d'eux, détaillant la maisonnette avec attention.

- Putain, c'est quoi ce bordel, murmura André en voiyant l'objet sur lequel il avait trébuché.

Un cendrier géant de la forme d'un soutien gorge en plastique rose, il était rempli de mégots maintenant gisant sur le parquet tâché.

Mad lui lança un regard incrédule, puis ses yeux glissèrent sur le cendrier faiblement éclairé.

- C'est pas le-

- Je crois bien que si, coupa-t-il la mine grave.

La veille ils avaient regardé cet épisode où Beth et Daryl se retrouvaient enfermés ici.

- Donc nous sommes dans The Walking Dead.

- On dirait bien.

Mad laissa échapper un soupir exaspéré.

- C'est impossible, dit-elle. The Walking Dead c'est une série. C'est de la fiction, pas de la réalité.

- J'suis au courant, merci.

- Non mais c'est pas possible, on a dû se tromper.

- Comment t'explique le rôdeur ?

- Je ne l'explique pas.

Mad se rapprocha d'André et croisa les bras sur sa poitrine.

- Bon admettons que t'ais raison.

- J'ai raison.

- La ferme, j'ai pas fini. Si nous sommes vraiment dans The Walking Dead, comment on rentre chez nous ?

André fit la moue.

- Mais qu'est-ce que j'en sais moi ? J'suis mécanicien des bagnoles moi, pas mécanicien de l'espace-temps.

- Évidemment, soupira-t-elle, bon on ne va pas rester là indéfiniment. J'l'aime pas cette baraque et on doit trouver des gens. Ils pourront sûrement nous aider.

- Ouais, surtout qu'on n'a aucune armes.

Mad s'assît en tailleur pour réfléchir et André l'imita. Quelques minutes s'écoulèrent alors qu'ils restaient immobiles, l'un en face de l'autre mais un rayon orangé filtrant d'une fenêtre vint éblouir le jeune homme.

- Il va bientôt faire nuit, dit-t-il plus pour briser le silence que pour réellement informer son amie.

Elle soupira.

- Et bien dormons, je ne pense pas qu'il soit très prudent de sortir de nuit.

- Je ne pense pas non plus.

Ils s'installèrent du mieux qu'il purent dans ce cabanon délabré et acrimonieux, se débattait tantôt avec leurs blousons, tantôt avec le sol sale et l'air gavé de poussière. Mad toussa trois fois, André hoqueta seulement.

Cette nuit là, après avoir assommé André pendant une heure avec ses jérémiades, Mad se retrouvait seule avec ses démons. Comme toutes les nuits quasiment, elle n'arrivait pas à trouver le sommeil, certaines choses semblaient ne pas changer peu importe là où ils se trouvaient.

Lorsque la lune entama sa douce redescente, elle parvint finalement à s'endormir. Elle ne dormi pas bien cette nuit-là, plus mal que les autres nuits en tout cas. Elle parla beaucoup et très fort, si fort qu'elle réveilla André qu'il bondit hors de sa couchette avant de comprendre vaguement - sa tête étant encore logée bien profond dans la purée de poids de son esprit - qu'il ne s'agissait que de Mad et qu'il n'y avait pas de quoi en faire toute une histoire. Ça lui arrivait tout le temps ce genre de cauchemar. Vraiment pas de quoi s'inquiéter.
Il se rendormit aussitôt.

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Au petit matin, les rayons du soleil s'insinuèrent innocemment entre les branchages et à travers la vieille vitre poussiéreuse. Elle vint chatouiller les paupières alertes d'André qui avait déjà commencé à émerger de son sommeil.
Il grogna, gigota, bascula à droite, puis à gauche, pour finalement réussir à se redresser en baillant, les yeux mi-clos et la face endolorie. Son mulet blond était toujours coiffé en pétard et ses joues étaient boursouflés, restées trop longtemps appuyées sur ses mains jointes (sur lesquelles de la bave s'était malencontreusement échouée).
Un peu plus loin, il vit Mad qui semblait dormir correctement. Elle ne bougeait et ne parlait pas, c'était déjà un point positif.
Il décida d'attendre un peu avant de la réveiller, ils avaient le temps après tout.

André s'installa confortablement dos au mur et et attrapa sa veste en cuir qui gisait par terre. On aurait dit la vieille serviette noire qui avait été lâchement abandonnée au fond du jardin de mamie Colette lorsque André ne devait pas être âgé de plus de 12 ou 13 ans.

André mit un petit moment avant de se rappeler les événements de la veille. Ils se trouvaient dans The Walking Dead, sans aucun moyen de savoir pourquoi ou comment ils avaient atterri là.

Il se releva finalement récupérant sa veste en cuir qu'il avait retiré pour s'en faire un oreiller, l'épousseta et la ré-enfila par dessus son t-shirt à l'effigie des Mötley Crüe, son groupe préféré. De quelques coups secs, il retira la poussière de son jean bleu délavé et troué aux genoux et s'approcha de Madeleine pour la réveiller.

- Allez debout, murmura-t-il, c'est l'heure d'y aller.

Elle grommella.

- André, fous moi la paix, on est en vacances.

André ricana.

- Désolé de te décevoir mais je te rappelle que nos vacances ont tourné à la catastrophe.

Elle ouvrit un oeil, grimaça, puis se leva d'un bon, les yeux comme des soucoupes.

- Quoi ?

- Feur.

- Je vais t'étrangler, tu le sais ça ?

- C'est vraiment pas le moment Mad, André croisa les bras sur son torse. On doit bouger maintenant.

- Et tu veux qu'on aille où ? À Woodbury ?

- Par exemple, oui.

Elle fit mine de réfléchir avant de pousser un long soupire de désespoir.

- T'es sûr que c'est une bonne idée ?

- T'en as une meilleure ?

- La prison peut-être.

- Mauvaise idée, on ne sait pas quand on est, Rick and co n'y sont peut-être pas encore.

- Bon, bah c'est réglé alors. On essaye de trouver Woodbury et après on avise, soupira Mad, peu enchantée à cette idée.

- La cabane est encore là vu qu'on y a dormi, et qu'on s'y est réveillé. Donc dans le pire des cas, on est dans la saison un ou deux et on est solo, mais si on a un peu de chances, on est dans la trois ou début de la quatre.

- Même si on est dans la saison un ou deux, il y aura du monde à Woodbury. C'est pour ça qu'on doit y aller. Ils y sont depuis le début quasiment.

- T'es sûr ?

- Pas vraiment, ce ne sont que des suppositions. Mais Merle a été embarqué par le Gouverneur dès les premiers épisodes, donc je pense que c'est bon, tu ne crois pas ?

- Ouais, t'as sûrement raison.

Mad marqua une pause pour enfiler son trench-coat noir par dessus son col-rouler de la même couleur avant de reprendre :

- Vu la gueule du rôdeur qui a failli te bouffer hier, je pense qu'on est au moins dans la deuxième. Il était plus très frais, l'ami.

- Tu crois ?

- Ouais, vraiment une sale tronche. T'étais trop occupé à te pisser dessus pour le voir ou quoi ?

- Ta gueule, j'me suis pas pissé dessus, siffla André en fronçant les sourcils.

Elle ricane et d'un vague mouvement du poignet, mit fin à la discussion. André hocha la tête et ils quittèrent la petite cabane.

Aucun d'eux n'avaient d'armes pour les protéger en cas de mauvaise rencontre - sauf peut-être les multiples briquets et autre babioles peu utiles en cas d'attaque de morts-vivants - qui jonchaient leurs poches mais aucune réellement dangereuse. La route s'annonçait longue, alors tous deux prirent leur courage à deux mains et s'enfoncèrent dans les bois, sur leur garde.

Ils marchèrent de longues minutes, trop angoissés par une potentielle attaque pour être capable d'échanger une vraie conversation.
Finalement, au bout d'une heure et demi sans altercations notables avec un quelconque rôdeur, c'est une Madeleine agacée qui brisa le silence.

- On fait quoi quand on arrive à Woodbury ?

André haussa les épaules.

- J'sais pas, on improvise ?

- Tu veux improviser alors qu'on va voir un psychopathe ? T'es sûr qu'il t'as pas mordu ce rôdeur ?

- Très marrant, railla-t-il. Non, mais j'en sais rien, t'as une idée toi ?

- On peut lui péter la gueule ?

- Et tu compte t'y prendre comment ? On n'est même pas armés.

- Vrai, mais il y a toujours des solutions.

- Oui et la solution c'est pas de vouloir lui péter la gueule alors qu'il peut nous aider.

- Tu pourrais te faire passer pour le fils de Merle.

André s'étouffa brusquement avec sa salive et mit un certain moment à reprendre son souffle, il fixa son amie avec des yeux exorbités.

- T'es malade ou quoi ?

- Non ça pourrait marcher, tu crois pas ?

- On parle de Merle Dixon là, siffla André. Merle Dixon, Mad. Tu te rends bien compte que peu importe le plan, s'il implique Merle et pas de la baston, il est voué à l'échec.

- Oui je m'en rends bien compte.

- Et alors ?

- Et alors, j'ai pas dis qu'il ne devrait pas impliquer de la baston.

André roula des yeux, un soupir d'agacement s'échappant de ses lèvres.

- On ne va pas se battre Mad, arrête un peu avec ça, bon Dieu. Et on a presque le même âge que Daryl, je passerais jamais comme étant le fils de Merle.

- N'importes quoi, il a au moins cinquante ans ce vieux schnock, ça existe les gens qui font des gosses à vingt ans tu sais.

- Quand bien même.

- Il suffit que tu dise que t'es son fils illégitime, qu'il t'as eut avec une travailleuse du sexe il y a trente ans et que depuis tu le cherche, c'est pas compliqué, non ?

Pour la énième fois de la journée, André soupira longuement.

- Soit, et après tu veux faire quoi ?

Madeleine afficha un grand sourire.

- On l'aide à retrouver Daryl et le groupe, tu pécho Daryl et moi Michonne et c'est bon.

- Tu vas me faire vriller avec tes conneries. C'est tout sauf un plan ça.

- Ah parce que t'as une meilleure idée ?

- Oui, on va improviser, ça sera moins infaisable que tes trucs de dingues.

Mad roula des yeux, faussement exaspérés.

- Très bien, on improvise, mais n'hésite pas à me faire savoir si mes plans t'intéressent.

- Il y a peu de chance, répliqua André en lui offrant un grand sourire.

Madeleine allait rétorquer une remarque acerbe mais elle se ravisa finalement, ses yeux verts avaient accroché un point du paysage, retenant son attention.

- On est arrivé, je crois, souffla-t-elle en désignant un mur de pneus d'un mouvement de tête.

André hocha la tête et ils s'avancèrent jusqu'à sortir de la forêt et se mettre à découvert sur la route, pile en face des postes de gardes où une jeune femme - Haley - les regardaient, surprise.

- Eh ! s'écria Mad de sa voix forte. Tu peux nous ouvrir ? On est dehors comme tu peux le voir et on n'a pas d'armes. On vient en paix comme le dirait un certain Vulcan.

Haley ne put s'empêcher de faire les gros yeux, quelques longues secondes s'écoulèrent avant qu'elle ne se décide finalement à appeler quelqu'un. Une autre personne la rejoignit sur le toit et pour toiser les deux nouveaux venus du regard, interloqué. Puis il fit un signe à sa gauche et les grandes portes de Woodbury s'ouvrirent.

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