9. Recherche d'identité
—Levi, siffla Hanji, plus affolée qu'énervée.
Le dénommé ne marqua pas la moindre réaction, parfaitement détaché de cette situation pourtant peu commune. La réalité était toute autre mais il la gardait jalousement pour lui, au creux de ces deux magnifiques prunelles. Le miroir de l'âme se dévoilait face au policier, dépourvu de toute façade. Cette sincérité l'émue profondément et sans qu'il ne puisse y faire quoi que ce soit.
—Q-Qu'est-ce que vous dites ?
Levi déglutit, le regard fermement encré dans celui de son cadet. Sa présence imposait une aura indescriptible qui atteignit de plein fouet le jeune blessé. Qui pouvait bien être cet homme froid à l'allure intransigeante ? Que faisait-il ici et surtout, de quoi parlait-il ? La peur hérissa un frisson le long de l'épiderme hâlé du garçon alité.
—Je ne comprends pas, ajouta-t-il encore, accordant un regard au jeune médecin.
Cette dernière décida subitement de reprendre la conversation en main, craignant déjà le pire pour son patient :
—Tu n'as rien à craindre d'accord. Il n'y a aucun problème et le monsieur dit n'importe quoi.
—Arrête ça, Hanji ! coupa brutalement Levi, ses prunelles aciers tranchèrent celles de son homologue de toute sa rage.
Celle-ci sursauta, visiblement étonnée de ce soudain éclat de la part du lieutenant. Le trentenaire reprit, d'une voix posée et mesurant l'impact de chaque mot :
—Tu ne parles pas à un gosse de cinq ans et c'est moi qui suis chargée de l'enquête, alors laisse-moi m'en charger seul. Tu auras tout le temps de jouer les nounous plus tard.
La bouche du médecin se ferma immédiatement alors qu'elle accusait le choc. La surprise se lisait également sur les traits du blessé, toujours allongé sur le lit. Levi s'approcha alors, oubliant toute notion de prudence. Il n'y avait rien de dangereux dans sa démarche, que ce soit dans sa volonté ou dans sa manière d'agir. Pourtant, le jeune homme marqua un léger mouvement de recul, la peur ravivée dans son regard émeraude. Son ainé n'y prêta visiblement aucune espèce d'attention, reprenant avec sérieux :
—Je suis le lieutenant Levi et je suis chargé de l'enquête dont tu fais l'objet. Tu as été retrouvé il y a un peu plus de deux jours dans un hangar dans l'ouest de la banlieue. Le bâtiment a brûlé cette nuit et je suis là pour t'interroger dans les limites du raisonnable vu ton état.
C'est surtout parce qu'Hanji me l'a fait promettre avant d'entrer.
Les yeux du jeune garçon s'agrandirent avant qu'il n'acquiesce aussi vigoureusement que ses blessures le lui permirent. Une sorte de curiosité propre à son âge se peignit dans ses deux orbes. Levi peina à s'en détacher pour reprendre, abordant à contre cœur l'aspect pratique de sa venue :
—Je vais te poser des questions et prendre des notes. Je veux que tu sois sincère et que n'omettes rien de ce que tu sais. C'est clair ?
—Oui.
Le lieutenant sortit un calepin de sa poche ainsi qu'un petit stylo. Son expression s'était faite impénétrable, seule la gravité était autorisée à s'y inviter. Il s'enquit, fixant droit dans les yeux son vis-à-vis :
—Ton nom ?
—J-Je ...
Le visage du jeune homme se troubla, comme un accès brutal d'incompréhension, d'un souvenir trop flou pour être rappelé à soi. Il répondit finalement et après quelques instants de vaine réflexion :
—Je ne sais pas.
—Tu te fous de ma gueule ? s'emporta instantanément Levi, avant même de penser à ses paroles.
Hanji se rembrunit, étouffant un cri alors que le trentenaire repoussa cette cruelle impulsion toute au fond de lui. Les enjeux étaient trop grands, il ne pouvait se permettre une telle faiblesse doublée d'une erreur de jugement de cette envergure. Il se devait de maîtriser les éclats de son esprit épuisé et conserver ce calme froid qui le caractérisait jusqu'alors.
—J-Je n'arrive plus à m'en souvenir et ...
—C'est pas grave. Levi, il souffre certainement d'amnésie. Ses souvenirs reviendront probablement d'ici quelques jours, lança le médecin à l'égard des deux hommes et dans une optique pacificatrice.
L'adolescent opina encore une fois et, en cet instant plus que jamais, il sembla perdu. Son regard fixé dans l'infini, il dévisageait ce que personne n'était en mesure d'apercevoir. L'invisible pour le commun des mortels. Ses doigts se crispèrent sur les draps alors qu'un spasme de douleur le traversa.
Le lieutenant réfléchit plus posément, sans toutefois quitter son homologue du regard. Celui-ci lui inspirait quelque chose de particulier, de ces impressions que l'on ne saurait qualifier réellement. Une vague de compassion alliée à une rage sans fin, la contradiction infime d'un être dans toute sa complexité. Il se révéla ainsi, alors que des émotions humaines déferlaient sur son corps. Comment demeurer calme ? Comment poursuivre sa route sans le moindre écart de conduite ? Levi chassa ces interrogations fortuites avant de reprendre, aussi calme et froid qu'un reptile :
—Tu ne te souviens de rien ? Ni ce qui t'ait arrivé ni rien d'autre ?
Le jeune homme eut soudain l'air épuisé, comme si toutes ses forces venaient de disparaître ainsi, comme le mirage d'une force escomptée. Ses paupières semblaient lourdes même pour les personnes face à lui. Il venait à peine de s'éveiller et cette pensée frappa son ainé comme un regret, l'évidence que l'on préférait oublier.
—Non, je ne me souviens de rien, répondit le blessé, les sourcils froncés et les yeux humides.
Hanji était restée en retrait sans que son attention en soi déjouée. Elle surveillait son protégé sans qu'aucun détail ne lui échappe. Elle expliqua alors, employant ce ton professoral que tous lui connaissait :
—Tu n'as pas à t'en inquiéter. C'est quelque chose de commun et tu retrouveras certainement tes souvenirs d'ici quelques jours. Je comprends que ça peut être effrayant pour toi mais je t'assure que tu n'as rien à craindre. Ne te préoccupe pas de l'enquête dont Levi te parle ou de ce que tu n'arrives pas à te rappeler. Mes confrères et moi-même te préconisons surtout du repos, tout rentrera dans l'ordre après ça.
—Aish !
Levi n'avait pu retenir une exclamation de déni face à ce monologue improvisé. Le fait qu'Hanji fasse passer n'importe quoi avant son enquête l'agaça visiblement alors que ses yeux gris se plissaient pour toute réaction. Il replia son calepin et le rangea à sa place, à la fois déçu et énervé de ne pas être parvenu à ses fins. C'était à ses yeux une défaite, aussi ridicule soit-elle !
—C'est bon, je repasserai plus tard.
Le médecin esquissa un sourire devant cette manifestation inopinée de sagesse. Elle rajusta sa blouse, ce même rictus flottant sur ses lèvres jusqu'à ce que Levi ajoute :
—Facilite-nous la tâche gamin, on a besoin de ces informations !
La femme sourcilla face au manque de tact évident du policier. Voilà quelque chose que personne ne pouvait changer chez cet homme, malgré sa brillante carrière et ses aptitudes hors du commun. Une tare dont beaucoup de ses collègues se plaignaient d'ailleurs ouvertement et sans la moindre gêne.
Le lieutenant tourna alors le dos à son cadet, avec l'intention certaine de quitter la pièce. Hanji ajouta, prestement :
—Oui, il reviendra bientôt. En attendant repose-toi, une infirmière passera dans la journée.
Et ils s'éloignèrent, Levi ne prit même pas la peine de jeter un regard derrière son épaule. Cette entrevue aura été vaine et l'enquête demeurait au point mort. Mais, à l'instant où l'homme posa sa main sur la poignée de la porte, la voix du blessée retentit, bien plus fortement qu'auparavant :
—Attendez !
Le trentenaire se retourna vivement, fort de réflexes de défense tout naturel. Ses yeux flamboyaient dangereusement alors que l'attitude du jeune homme se faisait incertaine. Ses prunelles se troublaient d'une nuance plus foncée que son vert ordinaire, quelque chose de plus dangereux, comme une menace masquée. Le plus âgé lisait tout cela, alors que ses craintes renaissaient de leurs cendres. Voyant que son homologue ne reprenait pas, il l'encouragea plus ou moins efficacement :
—Quoi ?
L'adolescent semblait comme un animal prit au piège, une proie sans la moindre chance d'échappatoire. A moins que ce soit lui, le prédateur ? Cette pensée traversa furtivement Levi alors qu'il tachait de conservait son calme, de faire taire ces pulsions incompréhensibles.
Finalement et après d'insupportables secondes d'attente, le plus jeune reprit, plantant ses yeux dans celui de son ainé avec une assurance tirée de rien :
—E-Eren. Je m'appelle Eren.
ENFIN UNE REPONSE !
Forcée d'avouer que ce n'est pas non plus un grand pas en avant mais ça va aider l'enquête à prendre un nouveau départ. Encore une fois, Levi n'est pas très compréhensif mais ça va avec son caractère. Je ne suis clairement pas une adepte où ils tombent amoureux au premier regard (question de réalisme) :3
Le prochain chapitre s'intitule "Perte de contrôle" et sera très mouvementé. Pas mal d'action et Levi qui perd les pédales (si j'en dis plus, je bascule entièrement dans le spoil :p)
Kiss ~
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