8. Premier contact

            Il se libérait doucement de l'inconscience, se défaisant progressivement de son emprise. Il se retrouvait prisonnier de cet état étrange, entre la réalité et le songe.

Il ?

Quel était son nom ?

Cette pensée décousue frappa l'âme en éveil durement, comme un coup porté à l'improviste. Le néant profond qui composait son esprit demeurait certainement l'élément le plus inquiétant.

Qui était-il exactement ? Où se trouvait-il en cet instant ? Quelle était cette douleur sourde qui naissait dans ses entrailles ? Et surtout, qu'elle était la raison de cette rage dévastatrice et sans limite ?

Il se le demandait ainsi, perdu dans ce néant où transperçait la lumière. Cette dernière le submergeant soudain, en même temps qu'un éclair de souffrance pure le traversa. Ses paupières se soulevèrent doucement, d'une incroyable lourdeur. Il ne distinguait rien de ce qu'il l'entourait, rien qu'une couleur dominante. Une blancheur artificielle et désagréable.

Le moindre mouvement lui était interdit. Cloué au lit par des machines reliées à son organisme, l'incompréhension persistait. L'esprit embrumé par ce long sommeil, ses sens semblaient accablés d'une incorrigible lenteur. De quoi agacer n'importe quel être normalement constitué et il ne faisait pas exception. Les émotions tourbillonnaient en lui, enfermées dans cette enveloppe charnelle traitresse.

Ses prunelles émeraude étudiaient soigneusement la pièce vierge dans laquelle il se trouvait. Il ne connaissait rien de cet endroit et ce n'était pas ce qui le torturait le plus ...

Qui était-il ?

Quel était son nom ?

Cela ne lui inspirait rien de plus qu'une impression fugace et vague. Un sentiment indistinct qui grandissait en lui comme une pulsion irréfutable. Il serra les poings autour de la couverture, comme seul reflet de son trouble. La douleur ravivée se lui en déplaçait librement dans son corps, comme le pire de venin.

Bordel, mais que pouvait-il bien se passer ?

Quel était ce sentiment dru qui s'échappait de lui comme par tous les pores de sa peau ?

Un tremblement traversa l'échine du blessé alors que les « bips » de la machine s'emballaient brutalement. L'être entier fut pris de spasmes incontrôlables.

Dans cette lumière et alors que personnel hospitalier tardait à arriver, deux billes d'un vert incroyable brillaient, étonnamment fixes.

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Levi se rendait à l'hôpital, évitant judicieusement les embouteillages journaliers à cette heure matinale de la journée. Son regard rivé sur la route trahissait un manque d'attention évident. Les paroles d'Erwin ne le quittaient plus :

—Il s'est réveillé il y a environ une heure. Son cœur a fait un arrêt durant prêt d'une minute, l'équipe médicale à réussi à le sauver.

—Il est réellement en état de recevoir des visites ?

—Hanji ne m'a pas donné de contre-indication. Elle veut que quelqu'un vienne immédiatement en mentionnant qu'il serait préférable que ça soit toi.

—Evidemment ...

La tension qui habitait le lieutenant était palpable. Ses jointures blanchissaient sur le volant au fur-et-à-mesure qu'il s'approchait de l'hôpital. Un trouble grandissait en lui alors que l'ombre opaque du bâtiment se formait sur le bitume réchauffé par le Soleil matinal.

Les pneus crissèrent sur le sol alors que Levi se gara sans soigner sa venue. Il sortit prestement, traversant le parking visiteur à grandes enjambées. Les couloirs étroits et pâles étaient déserts et les pas du trentenaire résonnaient dans une grande partie de l'établissement. Il ne croisa personne, ni Hanji, ni quiconque pouvant le renseigner. Ce fait agaça le lieutenant plus que de raison alors qu'il arriva au lieu de rendez-vous.

Il était seul et un coup d'œil à sa montre lui indiqua que le médecin était effectivement en retard. Le pied de l'homme frappait nerveusement le sol, comme pour démontrer l'impatience qui le caractérisait. Il était de ceux qui avaient besoin, dans une journée, d'un minimum d'exercice physique. L'immobilité ne lui était pas préconisée, il la supportait en réalité très mal. L'inaction demeurait pire encore, la plus humiliante des défaites.

Lassé de cette vaine attente, Levi sortit son portable de sa poche et composa frénétiquement le numéro d'Hanji. Tandis que les sonneries s'enchaînaient, il se promit de lui faire regretter cet affront.

—Levi ?

—Qu'est-ce que fout espèce de binoclarde incapable ? J'attends depuis un quart d'heure !

Le médecin jura devant l'appareil alors que le combiné témoignait d'un mouvement non identifié. La voix masculine s'éleva à nouveau, pour toute excuse :

—Désolée, je ne pensais pas que tu serais là si vite et ... je n'ai pas vu le temps passé. Il s'est enfin réveillé et je voulais absolument lui ...

—Je m'en fous de tes explications, dépêche-toi de venir !

Et il raccroche, tout aussi sec. Un soupir lui échappa ainsi qu'une flopée d'insultes à l'égard de celle qui mettait sa patience à rude épreuve. Il passa sa main dans sa chevelure noire, s'appuyant sur le mur le plus proche. Son attente fut heureusement de courte durée puisqu'Hanji apparut, quelques instants plus tard, visiblement essoufflée.

—Il n'est pas ici, on l'a transféré autre part.

Levi opinant, suivant le rythme effréné du médecin alors qu'ils traversèrent ensemble plusieurs couloirs et escaliers.

—Erwin t'a tout expliqué ? demanda-t-elle, sans jamais ralentir.

—Ouais.

—Il s'est réveillé vers sept heures et demie, son cœur a lâché à ce moment-là. On a réussi à le sauver et il semble se remettre bien, c'est pour ça que je t'ai appelé. En vu de son état, on a préféré le déplacé mais il est toujours conscient à l'heure actuelle. Il faudra juste le ménager, il est encore faible.

—Ca va de soi, commenta Levi.

Ce dernier n'était pas exactement la part psychologique de la police et Hanji le savait. Le lieutenant se demandait pourquoi cette tâche était retombée sur lui, il n'avait pas le profil pour ou même les compétences requises.

Ils s'arrêtèrent finalement devant une porte restée close. Le médecin en profita pour donner ses dernières instructions, avec moins d'enthousiasme que tantôt :

—On ne pourra sûrement pas rester longtemps. C'est important pour créer un lien, il paraît vraiment perdu.

Levi leva les yeux au ciel, il n'était clairement pas la personne idéale pour espérer tisser des liens avec un potentiel témoin. A présent, Hanji ne semblait pas convaincue, incertaine de ce choix qu'elle avait elle-même formulé. Une moue troublait son visage alors que le lieutenant demeurait impénétrable. Le médecin ouvrit la porte doucement alors que cette dernière manifesta une infime résistance ainsi qu'un grincement.

La pièce était semblable à la précédente, incroyable de simplicité. Un lit unique trônait en son centre, accompagné de plusieurs machines, moins impressionnantes. L'ensemble était sobre et éclairé d'une lumière vive et désagréable. Le jeune homme installé sur la couche avait les yeux mi-clos, comme s'il luttait bravement contre le sommeil. Les deux adultes s'approchèrent prudemment, le médecin ne quittant pas le policier du regard.

Levi s'arrêta brusquement, à quelques pas du patient. Une distance de sécurité synonyme de prudence et de rien d'autre. Il rencontra alors les prunelles du garçon alité et en perdit toute pensée cohérente. Une couleur vive aux allures de forêts, des nuances incomparables et uniques. Le lieutenant n'avait jamais rien vu de tel ! Ces deux yeux posés sur lui reflétaient d'une terreur peu commune. Il s'en vit déstabilisé, pour une des premières fois de toute son existence.

Hanji ne vit rien de ce trouble, rien qu'un éclair étrange qui traversa les orbes gris du policier. Ce dernier se ressaisit immédiatement, reprenant par la même occasion des esprits.

Le jeune homme allongé observait les nouveaux venus sans comprendre. L'affolement qui le caractérisait n'avait rien de feint, il en souffrait réellement. Quand la voix de Levi s'éleva dans la pièce, il ne put s'empêcher de sursauter brutalement :

—Ecoute gamin, j'aurais quelques questions à te poser concernant ...

Un coup de coude judicieusement effectué dans les cotes du lieutenant le fit taire. La jeune femme le dévisageait, les sourcils froncés devant le manque de tact de son homologue. Ce dernier retint une remarque cinglante de justesse, élevant un sourcil.

—V-Vous êtes qui ? Où est-ce que je suis ?

—Tu es à l'hôpital et je suis Hanji, le médecin chargé de toi, répondit-elle, articulant chaque moi comme si elle avait affaire à un enfant en bas-âge.

Le garçon acquiesça lentement, chaque mouvement lui était douloureux. Son regard frappa à nouveau le lieutenant alors qu'il s'enquit à nouveau, tout aussi faiblement :

—Et vous ?

Levi échangea un coup d'œil avec Hanji avant même de songer à une quelconque réponse. Il reprit, avec ce calme olympien qui lui était caractéristique :

—Je suis le lieutenant Levi Ackerman. Je suis chargé de l'enquête actuellement en cours te concernant.

Rien ne pouvait décrire l'expression qui se peignit sur les traits enfantins du blessé. Un mélange saisissant de peur et d'incompréhension, une colère sourde naissant dans un être faible sans la moindre raison. Ce fut ce que le trentenaire put lire dans les yeux révulsés du jeune homme. Un cocktail d'émotions contradictoires et débridées. 


Voilà pour ce chapitre !

La première est du point de vu d'Eren (je le précise quand même, pour la clarté). Le reste introduit cette fameuse rencontre avec Levi qui n'est pas très psychologue s'il l'on peut dire :3

Le prochain chapitre se nomme "Recherche d'identité" et Levi met au clair ce qu'il se trame autour d'Eren, ce dernier ignorant tout de sa situation :) J'espère que cette partie vous a plu et que la prochaine saura être à la hauteur de vos attentes :3

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