47. Soutien et soulagement
Les choses s'étaient rigoureusement accélérées après la mort de Rhodes. Le coupable venait de décéder et les épaules de Levi ployaient déjà sous le joug des responsabilités. La brûlure du regard d'Erwin suffisait à lui rappeler ce qu'il risquait alors. La pression redescendait et, avec elle, l'adrénaline du danger qui laissait place au jugement de ses propres supérieurs.
Dans un concert de sirènes et de gyrophares, ils regagnèrent ensemble le commissariat et ce, après plusieurs heures. Il avait fallu rester sur place un long moment alors qu'une équipe médicale prenait en charge Eren et qu'une seconde s'occupait du corps inerte du coupable. L'effervescence à laquelle le trentenaire souhaitait s'effacer, au profit de l'ambulance qui avait quitté les lieux en tout premier, emportant son amant et l'insoutenable inquiétude avec elle.
Le commissaire surveillait son subalterne de loin, comme un parent pour un enfant un peu trop turbulent et susceptible de s'extraire à ses ordres. Levi ne tenait pas en place, nerveux et rongé par une angoisse véritable. L'euphorie et la terreur déclinaient au crépuscule. Les muscles douloureux, il avait pourtant décliné l'invitation des médecins et le regrettait à présent amèrement. Il ne manquerait pas de se rendre à l'hôpital le lendemain s'il ne se retrouvait pas derrière les barreaux avant cela.
Non loin, Petra observait son ainé avec intérêt. Elle le soutenait mentalement, renonçant à son envie de le féliciter pour son exploit. Les risques qu'avait pris le lieutenant étaient bien trop grands pour qu'elle se permette une telle fantaisie. Elle respectait donc muettement le retrait de l'homme qui, derrière son impassibilité, souffrait véritablement.
—Levi, le héla Erwin, d'une voix suffisamment forte pour se faire comprendre mais pas assez pour alerter les individus qui s'activaient aux alentours.
—Ouais ? répondit le susnommé, platement.
—Tu peux rentrer. Ca va encore durer une bonne partie de la nuit et ta présence n'est plus nécessaire.
Perplexe, le plus jeune masqua son trouble derrière une grande froideur, reprenant ses esprits avant de chercher à donner son accord à son vieil ami. Ce dernier ajouta, comme de juste :
—Va te reposer, j'aurai besoin de ton rapport dès demain.
—Seulement mon rapport ? Tu me fous pas en prison directement, ça te ferait gagner du temps !
Un soupir las ébranla la silhouette fatiguée d'Erwin qui s'approcha encore davantage de son homologue, s'assurant que personne ne puisse suivre le contenu de leur conversation. Il avança, calmement et en choisissant soigneusement ses mots :
—Nous verrons ça mais la prison te sera épargnée, à toi comme à Eren. Je te donne ma parole.
Cette fois, Levi ne protesta pas, étonné par les paroles de son ainé. Il tourna les talons sans rien ajouter de plus, rejoignant son domicile comme un automate après une rude journée de travail.
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La nuit avait été courte, trop certainement. Levi se réveilla aux aurores, se tirant péniblement des bras de Morphée. Son sommeil agité ne lui avait pas permis un repos optimal et il en souffrait déjà alors que son corps portait les stigmates des événements passés.
Par pur réflexe, il vérifia l'écran de son téléphone portable. Un message se détachait du reste, attirant immédiatement son attention pourtant endoloris par la fatigue :
Champ libre toute la matinée. Eren est réveillé et les visites sont autorisées. Son enlèvement a eu lieu à l'hôpital, comme ton rapport nous l'apprend.
Une moue confuse s'imprima sur le visage de l'homme. Erwin ne se préoccupait pas de formulations utilitaires, allant à l'essentiel par le biais de phrases courtes et concises. La dernière phrase illustrait d'ailleurs la prise de risque de son supérieur qui mentait volontairement à ses collègues. Une preuve de l'amitié qui les liait, presque inavouable.
Enfin, la journée put commencer. L'angoisse demeurait mais moins vive et Levi se leva d'un bond, prêt à faire face, quoi qu'il advienne.
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L'arrivée en trombe du lieutenant ne passa pas inaperçu au sein de l'établissement de soin. Hanji l'arrêta avant qu'il n'interroge la pauvre secrétaire, sachant pertinemment qu'il serait prêt à lui soutirer des informations par la force si cela se trouvait nécessaire.
Le médecin stoppa donc son ainé dans sa course, ses verres de couleur fumée masquant un regard souligné par des cernes violets. Elle s'adressa directement à son interlocuteur d'une voix rauque :
—Je t'y emmène.
—Un problème, la binoclarde ?
—La nuit a été longue, répondit-elle, du bout des lèvres.
Malgré son épuisement des plus évidents, elle mena Levi à la pièce où se trouvait Eren. Il s'immobilisa devant la porte close, un torrent d'émotions se déversant sur lui sans qu'il ne puisse y mettre un terme. Les événements des dernières heures lui revinrent en mémoire : le combat contre Eren, les paroles de Rhodes et, enfin, sa mort. Bientôt, il lui faudra rendre son rapport, foncer tête baissée dans les conséquences de ses actes. Mais il n'était pas encore temps, son amant l'attendait certainement et restait sa priorité.
—Comment il va ?
—Mieux certainement qu'il ne le devrait. On le garde encore cette nuit et il devrait pouvoir rentrer après.
Mais où rentrait-il ? Chez l'homme qui comptait désormais le plus à ses yeux ou en prison ? Le risque demeurait, grandissant, tordant douloureusement les entrailles du policier.
—Tu devrais consulter toi aussi ?
—Ca dépend si tu peux t'en occuper.
Hanji réfléchit à la proposition, sachant pertinemment que son homologue ne se laisserait ausculter par personne d'autres. Un privilège étrange aux yeux de beaucoup mais qui semblait qualifier leur relation qui n'avait jamais quitté le seuil de l'amitié. Un respect mutuel doublé par de nombreuses joutes verbales enflammées.
—Je t'attends dans mon bureau, annonça-t-elle avant de tourner les talons.
Levi empoigna la clenche avant d'appuyer fortement dessus, libérant l'accès. Au centre de la pièce se tenait Eren, comme l'évidence même le signalait. Il semblait petit dans son lit immense aux draps blancs. Son regard émeraude se déposa à la surface plane de celui de l'homme. Un soulagement sans nom s'invita dans les prunelles de l'être aimé qui balbutia :
—L-Levi ?
—Ça va, gamin ? s'enquit l'intéressé, peu coutumier de ce genre d'altercation.
Un léger sourire se forma sur les lèvres du blessé dont le visage portait les stigmates des coups, témoignant de la violence des coups. Malgré cela, le rictus du plus jeune était pleinement adressé à son agresseur dont la présence lui avait tant manqué.
—Ça va mieux maintenant, avoua-t-il, à mi-voix mais très sincèrement.
Troublé, Levi opina vivement sans savoir quoi ajouter. Mécaniquement, il se rangea sur l'un côté du lit, réduisant considérablement la distance entre leurs deux corps. Il s'assit sur la chaise prévue à cet effet avant qu'Eren ne reprenne, incapable de conserver le silence qui s'apprêtait à s'installer :
—Il est mort ? Hanji m'a dit que tu pourrais me répondre mieux qu'elle.
Le lieutenant manqua un sourire qui faillit se dessiner sur ses lèvres. Etait certainement plus sage qu'il explique lui-même ce qu'il s'était produit la veille. Après une brève réflexion, l'adulte dit, doucement :
—Il est mort, oui. Il voulait s'injecter le même sérum, le sérum titan. Il m'a tout expliqué avant que je le tue. Je rendrai mon rapport cette après-midi, si tu veux savoir.
—Je veux l'entendre de ta bouche.
L'homme déglutit péniblement sans manifester la moindre envie de confesser ce genre d'informations en cet instant. La fatigue bornait ses pensées à bien peu de choses et, visiblement, Eren partageait cet état. Ses mains posées sur les draps tremblaient légèrement alors qu'il renchérissait, avec vigueur :
—Pas maintenant ! Je ne suis pas certain de pouvoir l'entendre tout de suite.
D'un geste lent, la main du brun trouva celles de Levi et entremêla ses doigts aux siens. Le cœur de l'autre manqua un battement sans qu'il ne réagisse physiquement. Cela ne surprit en rien le plus jeune qui apprécia seulement la chaleur de ce contact. Il murmura, plus pour lui que pour son amant :
—Alors c'est terminé ...
Pour toute réponse, le policier serra les phalanges d'Eren avec fermeté, les pressant dans sa poigne. La gorge nouée, il hocha la tête avec lenteur.
—Vraiment terminé ? Tu as tenu ta promesse, alors ...
Cette fois, Levi se redressa, plantant son regard secoué de mille émotions dans celui émeraude. Il embrassa chastement les lèvres entrouvertes, rejetant son désir au profit de la symbolique de son geste. Immédiatement après, il déposa sa bouche sur le front brûlant du garçon, soufflant un doux baiser. Il tenait toujours sa main dans la sienne et ne parvenait pas à se résoudre à la lâcher.
—Je tiens toujours mes promesses, Eren.
Son doigt caressant des formules cycliques sur la paume du susnommé, envahis par cet instant de rare tendresse. Il brisa pourtant cette bulle en ajoutant avant de quitter la pièce pour de bon :
—C'est vraiment fini cette fois. Tu peux te reposer.
Eh oui ! C'est véritablement fini !
Rhodes Reiss est mort et il n'y a plus de véritable menace qui pèserait sur le dos de Levi et Eren. Si ce n'est ce dernier qui reste instable :p
On touche au but !
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