34. Risques et recherches

Eren suivit Christa sans la moindre angoisse. Au contraire, il n'avait pas souvenir de s'être un jour senti aussi confiant.

Lui qui représentait un danger, une menace grandissante pour tous ceux qui l'approchaient, acceptait de se sacrifier si cela s'avérait nécessaire. Si l'enfermement était la solution, il n'opposerait aucune forme de résistance. Ce serait mettre en sécurité des dizaines de centaines de personnes et, à cette échelle, sa misérable existence ne représentait rien !

Les rues étaient remplies de personnes de tout âge, des civils qui ne sauraient sans doute jamais rien de son fardeau. La voiture de la jeune infirmière, à peine détentrice du permis de conduire, se faufilait entre toutes les autres. Les embouteillages restaient supportables et ils s'approchaient progressivement de l'hôpital.

Les questions démangeaient les lèvres d'Eren bien qu'elles demeuraient anodines. Le silence dans l'habitacle résonnait comme une offense et l'autre semblait trop concentrée sur la route pour entamer une conversation. Le blessé se lança donc, moins assuré qu'il aurait souhaité l'être :

—Je ne devais pas revenir à l'hôpital normalement.

—Je sais, il n'y avait pas de suivi spécial mais Hanji s'est arrangée pour que tu puisses venir.

—Comme elle a pu faire ça ?

Un sourire éblouissant orna les lèvres rosées de Christa tandis que la voiture bifurquait à droite, sur le parking destiné aux membres du personnel. Elle se gara avant de répondre, ses yeux accrochant ceux du garçon :

—Elle t'a réservé une salle de consultation et je dois t'y emmener. C'est dans une partie plus calme alors personne ne remarquera ta présence. Ca ne durera pas longtemps, juste assez pour faire quelques examens et quelques tests.

Eren opina très lentement. L'idée était très bonne et il ne saurait le nier. Tout semblait si simple et pourtant, l'accusé courrait toujours, à la recherche de l'objet de ses expériences.

Ils pénétrèrent ensembles dans le hall de l'hôpital qui sembla bien trop familier au goût de celui qui avait été patient ici. L'infirmière salua plusieurs personnes sur sa trajectoire, munie d'un naturel époustouflant. Son homologue se contenta de se fondre dans le décor, étrangement de trop dans ce décor aux lumières artificielles et à la blancheur insolite.

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Levi n'avait pas perdu un instant lui aussi. Dès le départ d'Eren, il avait quitté son appartement pour rejoindre le commissariat. La missive de son supérieur l'intriguait énormément et ne pouvait qu'annoncer une mauvaise nouvelle.

Il pénétra dans l'endroit en effervescence mais refusa de s'y attarder. Il traversa les nombreux bureaux sans un traître regard, le pas rapide et la tête haute. Le lieutenant ne s'arrêta qu'une fois devant la porte du bureau d'Erwin, il marqua une seconde d'hésitation. Comme si cette figure inébranlable craignait ce que l'on avait à lui apprendre. La peur de l'inconnu et du pire !

Il toqua rapidement mais n'attendit pas de réponse avant de s'engouffrer dans la pièce chauffée et plongée dans la pénombre. Les volets étaient presque entièrement abaissés et le commissaire se tenait devant la fenêtre. Droit et tendu, les bras croisés derrière le dos, il attendait visiblement la venue de son subalterne. Il ne se retourna pas et la voix de ce dernier s'éleva déjà, comme dans un accès de spontanéité :

—Tu voulais que je vienne rapidement, Erwin. Dis-moi quelle est l'urgence.

—Levi, merci d'être venu aussi rapidement.

Il pivota sur lui-même, le visage étonnamment grave. Il laissa un silence s'installer juste assez pour que l'autre s'en fasse la remarque. Une distance immense les séparait et ni l'un, ni l'autre ne souhaitait s'en défaire. Le plus âgé reprit, après avoir dévisagé méticuleusement le lieutenant :

—Il n'y a pas d'urgence à proprement parlé. Petra a trouvé des informations étranges sur un profil suspect et j'aurais besoin de toi.

—Pourquoi ? s'enquit immédiatement le policier, étonné de se sentir autant sur la défensive.

—J'aimerais savoir si ça te rappelle quelque chose. Je pense poser la question à Eren dès son retour mais je voulais d'abord ton avis dessus.

Levi cacha à merveille la fierté toute naturelle qui l'envahit. Erwin contourna son bureau, empoignant une fine pile de dossiers. Il le déposa du côté de son homologue, étalant sensiblement les feuilles volantes sur la surface plane. Des informations y figuraient sous plusieurs formats : une carte d'identité, des diplômes, ou de simples recherches sur internet. Un seul regard suffit au cadet pour comprendre ce qu'il se présentait face à lui.

Un visage d'homme était photographié en noir et blanc, vieux d'une cinquantaine d'années. Ses joues rebondis cachaient une expression sérieuse, presque sombre. A côté, toutes ses caractéristiques étaient inscrites avec une soigneuse précision. L'homme lut à voix haute, d'une voix certaine malgré l'interrogation bien audible :

—Rhodes Reiss ?

—Oui, c'est un chimiste de renom qui a été mis à la retraite après l'explosion d'une partie de son laboratoire. Officiellement, il n'est plus capable d'exercer sa profession et son entreprise a dû fermer suite à cet accident.

Calmement et tout en prenant conscience des informations dissipées, Levi acquiesça. Le regard acéré de son ainé étudiait chacune de ses réactions, attendant une quelconque forme d'accord de sa part.

—Et tu penses que c'est l'homme que l'on recherche ?

—J'ai des raisons de penser qu'il s'agit bien de lui. Il a entièrement disparu aux yeux des autorités depuis un peu plus de quatre ans. Les dates correspondent à l'enlèvement d'Eren et on sait que quelqu'un a testé des produits sur lui. Il s'agit forcément de quelqu'un ayant de connaissances spécifiques et le profil correspondrait.

—Et personne ne sait où il se trouve actuellement ?

—Non, son logement est désert et il ne semble pas avoir de proches en vie, énonça le commissaire, articulant exagérément chaque mot.

Le supérieur se tenait à la table, réfléchissant visiblement activement à cette affaire. Elle s'avérait effectivement bien plus complexe qu'à première vue. Son intelligence pourtant redoutable se voyait mise en déroute et la solution s'éloignait au fur-à-et-mesure qu'elle apparaissait à ses yeux.

—J'ai mis une grande partie de mes hommes sur ces recherches. Il nous manque des éléments primordiaux dont le motif.

—La vengeance ? hasarda Levi, se redressant avec raideur.

Il passa sa main dans la partie rasée de son crâne, les cheveux courts accrochant ses doigts tout en gardant une certaine douceur. Il ferma les yeux et la fatigue le heurta solidement. Le repos ne pouvait que bêtement caractériser la nuit dernière et il en gardait des souvenirs plus marquants. Immédiatement, la vision d'Eren nu et offert à lui s'imposa à sa vision et il s'en voulut. C'était bien de ce garçon dont il était question et ce genre de penser n'aurait pas dû être sien. Il rejeta cette vague de culpabilité loin de lui, jugeant le moment trop peu approprié.

—C'est un motif recevable et la perte de son entreprise peut-être le déclencheur mais ça n'explique la raison de sa cible. Pourquoi avoir choisi Eren Jaeger pour ses expériences ?

Levi étudia lentement l'interrogation, n'y trouvant aucune forme de réponse concrète. Il sourcilla légèrement et seule cette expression pourtant minime investit ses traits. Erwin garda le silence un court instant, se nourrissant de la réflexion de son cadet. Ce fut ce dernier qui reprit en premier, répétant l'écho de ses pensées comme une chose totalement insensée :

—Il faut trouver le lien entre Eren Jaeger et ...

Le prénom de son amant colla avec difficulté dans sa bouche, roulant sous sa langue avant d'emplir le silence.

—Rhodes... Reiss ?

Le lieutenant ne put retenir l'horreur qui marqua ses traits. Comment avait-il pu ne rien remarquer plutôt ? L'évocation de ce nom de famille aurait dû l'aider à comprendre. Sa bouche s'entrouvrit en un O parfait ce qui acheva d'alerter son supérieur. Il interpella le plus jeune sans masquer son inquiétude :

—Levi, il y a un problème ?

—Je dois aller à l'hôpital tout de suite !


Hum. 

Oui, je viens tout à fait d'arrêter le chapitre à ce moment là. 

Pas de panique, il ne faudra attendre (que) une semaine pour avoir la suite sous les yeux. Un petit indice ? Ca devrait pas mal bouger !

A jeudi prochain ~

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