La boucle était bouclée.

Erwin savait tout et le rapport venait d'être remis. Hanji avait fourni le sien prestement et plus vite que jamais. Il n'y avait plus rien à faire à présent à part attendre. Cette pensée avait effleuré le commissaire qui avait ordonné à Levi de rentrer chez lui se reposer.

Et puis quoi maintenant ? Que faire pour combler l'absence et l'ennui ? Le lieutenant se le demandait sérieusement, alors qu'il traversait les rues bondées de la ville. L'incompétence se transformait en fardeau, un fléau devenu sien. Il y avait encore tant à faire, tant à découvrir mais il se retrouvait incapable d'avancer. L'enquête attendait et lui, ne pouvait simplement plus patienter !

L'esprit humain se muait en ennemi fugace. Les questions tournoyaient sans découvrir la moindre réponse, alarmées et alarmantes. Levi crut devenir fou, errant sans but au milieu de la foule. Ses sens lui hurlaient des ordres dépourvus de logique et il en était la parfaite victime.

Son visage demeurait impassible tandis qu'il marchait sans faiblir. Il tenait fermement dans sa main son portable, dans l'attente insoutenable d'un appel. Qu'espérait-il au fond ? Que le gamin refasse une crise et qu'il soit forcé d'intervenir ? Une volonté bien inhumaine en plus d'hypocrite ! Le lieutenant en était conscient sans son morigéner plus que de raison.

Un de ces corps anonymes le heurta violemment, manquant de le renverser sous le choc. Levi octroya un regard glacial avant de poursuivre son chemin. Il jura avant d'ajouter, un peu plus loin :

—Tch !

Il prit la décision de rentrer, refusant de s'interroger outre mesure. A quoi bon rester ici ? Cet amas de chair humaine de le dégoûtait profondément encore plus que leur omniprésence.

Levi pénétra aussi silencieusement d'une ombre dans son appartement plongé dans la pénombre. Seule l'odeur de refermée le força à ouvrir les quelques fenêtres menant à l'extérieur. Un ordre clair et méthodique régnait dans la pièce et un coup d'œil suffit au trentenaire pour constater que rien n'avait bougé. Ce geste était devenu un réflexe avec le temps, vestige de quelques années de service. Il déposa ses affaires soigneusement avant de soupirer profondément. Ce calme permanent lui rappelait un échec pas si lointain.

.............................................................

L'homme s'effondra finalement sur le lit, le corps en sueur. Il venait de passer son appartement au peigne fin, à la recherche de la moindre saleté. Il n'y avait rien de gratifiant à cela, mais son cerveau lui octroyait ainsi un court répit. Il avait par ailleurs consacré l'heure dernière à s'entraîner, usant de toutes les techniques physique en sa connaissance. Les arts martiaux en faisaient partis, indéniablement. Levi excellaient en chacune des ces pratiques et ce, malgré les récents hématomes.

Le regard rivé sur le plafond, seule la respiration du lieutenant demeurait audible. En réalité, sa lassitude persistait sans que la fatigue ne parvienne à la détruire. Le sommeil, lui aussi, semblait l'avoir abandonné, au plus grand des désespoirs.

Qui était exactement ce fameux Eren ? Quel pouvait bien être ses liens avec l'enquête en cour ? Quel était l'origine de cette crise de violence sans pareille ? Quels dégâts cela pouvait-il engendrer ? Que ce serait-il passé si le policier n'avait pas été là pour intervenir ?

Tant de questions se bousculaient dans l'esprit embrumé du lieutenant, se disputant la priorité. Le regard émeraude du patient se superposait au sien, redoutable de réalisme. Il y lisait une haine sans pareille ainsi qu'un besoin vital de tuer, aussi incompréhensible soit-il. Une forme des plus proches de la peur accrocha la silhouette allongée de l'homme. Un frisson le parcourut brutalement, de haut en bas.

Finalement, il gratifia un bref regard à son radioréveil posé à sa droite. Une heure trente-deux précisément. Le temps même semblait lui jouer des tours, prenant une pause dans son emploi du temps chargé. Levi jura avant de se relever d'un coup, ignorant le malaise qui se forma aussitôt. Il prit quelques affaires et quitta l'appartement sans plus de réflexion.

...........................................................

Le son des clés dans la serrure perturba momentanément le silence du commissariat. La pièce principale s'imposa au regard acier du lieutenant, plongée dans l'obscurité et vide tout gêneur.

Sans hésiter, il s'assit devant un des nombreux postes et alluma l'ordinateur face à lui. Il y avait tant d'enquêtes classées sans suite sur lesquelles il aurait pu se pencher. Pourtant, il n'en fit rien, délaissant ces quelques piles de dossiers en attente. Une seule affaire attirait son attention en cette heure tardive !

Levi passa sa main dans sa chevelure indisciplinée avant d'entreprendre de longues recherches. Il devait trouver l'identité d'Eren, et remonter la moindre piste. C'était là son objectif premier, celui qui investissait chacune de ses pensées. Il éplucha des dizaines de sites, remontant parfois des années en arrière en archives. Les gobelets s'entassaient sur son bureau, synonyme de son acharnement purement obsessionnel.

Le temps défilait cette fois et le trentenaire distinguait un court répit, une accalmie enfin atteinte. A la recherche d'une identité autre que la sienne, il s'y perdait totalement, sans recul ni regret. C'était idiot, insensé et pourtant, il ne s'en morigéna à aucun moment !

Son téléphone indiqua cinq heures, éclairant subitement toute la salle. Encore une nuit sans sommeil pour lui, une de plus ! La fatigue se faisait sentir ainsi, au détour d'une nuit d'errance sans la moindre réponse. Fallait-il s'en sentir déçu ? Une interrogation qui effleura Levi peut avant l'aube, comme l'éveil précédent le songe. Une ironie douteuse qu'il chassa, tel un rien.

Soudain, alors que les premières lueurs du jour s'infiltraient entre les volets fermés, l'attention de l'homme fut ravivée. Un événement improbable qui lui arracha une flopée de jurons :

—Putain de bordel de merde !

Devant ses yeux fatigués s'étendaient les premiers éléments d'une résolution. Les premières faces de cette dernière, inopinées et diablement méritées. Un faire-part de décès emplissait une des multiples pages ouvertes sur l'écran, une écriture italique y trônait :

En la mémoire de Carla Jaeger,

Partie trop tôt et reste dans nos mémoires.

Laisse derrière elle un unique fils inconsolable, Eren Jaeger.

Le texte s'éternisait sur de longues lignes encore, comme le souhaitait la funeste procédure. Levi ne s'y attarda guère, basculant dans un tout autre type de recherche. C'était là tout ce qui lui manquait, un nom abandonné là. Une histoire qui avait cessé de s'écrire ainsi, sans que personne n'y prête importance.

Le lieutenant enchaîna les sites, tout ce qui pouvait bien toucher à ce garçon devenu primordial pour la police. La respiration suspendue l'espace de quelques instants, les réponses s'enchainaient, ouvrant à de nouvelles de possibilités. Il savait que cela permettrait de remonter les pistes de ce Eren, de découvrir ses liens avec une potentielle association criminelle. Tout devint plus clair, moins complexe aux yeux du trentenaire.

L'esprit de Levi fonctionnait à toute allure malgré le manque de sommeil engendré. Une sorte d'adrénaline circulait en lui, sans que l'action ou le danger n'en soit responsables. Il aurait certainement pu en sourire, peut-être même en rire. Une euphorie le frappa en cette heure matinale, espiègle et tentatrice.

Fébrilement, l'homme attrapa son portable abandonné dans la poche de sa veste. Il composa le numéro de son supérieur, rassemblant par la même occasion ses idées. Ces dernières composaient un mélange informe et compact, dictées par la fatigue et le sentiment du devoir accompli. Après quelques interminables sonneries, la voix d'Erwin retentit, sourdement :

—Levi, il y a un problème ?

—J'ai trouvé l'identité du gamin et de quoi retracer son histoire, viens au plus vite !

Levi s'investit plus que nécessaire dans cette enquête, vous ne trouvez pas ?

Quelques petits éléments de réponses, bien timides, il faut se l'avouer. Il va encore falloir du temps à la police pour résoudre ce mystère (rien de bien méchant, une quarantaine de chapitres et c'est réglé :p). 

La suite se nomme "Rapport dans les formes" et je pense que le titre en dit déjà long sur le contenu :3 Une discussion très sérieuse attend Erwin (qui est de retour en chair et en os) et Levi ! 

Plein d'amour sur vous ~