Chapitre 1
"Durant des années je me suis bercée dans l'univers féerique qu'est le surnaturel. J'ai crû dur comme fer ce que je lisais dans les livres, ces mythes à propos de créatures incroyables dotés d'aptitudes extraordinaires pour la plupart.
Désormais, je dois effacer toute trace de celle-ci, jusqu'à m'interdire toute forme de rêverie. Je dois m'interdire beaucoup de choses : les films, les musiques, les livres... Au début, rien de ça ne m'enchantait mais je m'y habituerai. Mes parents ne comprennent pas ma décision. Pourtant, ce sont eux qui m'y ont poussée. "
Les dernières traces de mes écrits m'assaillirent à un moment que je ne soupçonnais pas. Je profitais du soleil des vacances d'été et de ma liberté pleinement retrouvée pour pouvoir dormir. Malheureusement, mon esprit ne semblait pas du même avis et m'obligea à me remémorer mes erreurs passées. La prison dont je me suis libérée, était une chose encore très imprégnée en moi, cependant je devais me concentrer sur mon futur.
Fraîchement diplômée de mon école, j'allais bientôt connaître la vie à l'Université. Mes parents m'ont toujours conseillée de fréquenter un bon établissement afin de pouvoir accéder au métier de mes rêves. C'est la réplique de beaucoup de parents qui en profitent pour diriger l'avenir de leurs enfants tel qu'ils le désirent. Ils ont fait la même chose pour moi; payer une grande école pour que je sois inscrite. Je n'ai pas eu d'autre choix que d'accepter et de faire tout mon possible pour réussir car malgré tout, ils se sont ruinés au travail.
J'arrêtais de penser à mon avenir pour sortir de mon lit. Le couloir entre ma chambre et les escaliers ne cessait de s'allonger un petit peu chaque jour au fur et à mesure que les souvenirs devenaient prisonniers de celui-ci. A l'époque, je m'imaginais tout un tas de choses au sujet de cet endroit; par exemple à mes six ans je suis descendue boire un verre d'eau et j'ai cru voir une créature maléfique. Je n'avais plus dormis dans mon lit pendant sept jours.
Comme à mon habitude, je le traversai et rencontrai mes parents, dans la cuisine, qui devaient être levés depuis longtemps. J'embrassai ma mère et saluai mon père qui lisait son fameux journal du matin. Le gros titre du jour ne m'avait pas l'air très joyeux, "La sécurité est-elle toujours présente ?" En toute honnêteté, je ne me suis jamais sentie protégée par quoi que se soit. Après tout, nous ne sommes jamais mieux servis que par nous-même.
-Tiens Taylor, as-tu entendu les nouvelles dernièrement ?
Je fronçais les sourcils et hochai négativement la tête sans comprendre de ce que me demandait mon père. Il baissa légèrement son journal pour me fixer puis se remit à sa lecture.
-Le petit d'en face a été retrouvé. Il est mort, annonça ma mère.
-Selon la police, ce sont des animaux sauvages.
-Mais ça fait longtemps qu'on les a expulsés, affirmai-je sûre de moi.
-Le Canada est grand ma chère et les autorités ne se préoccupent plus autant de ces bêtes qu'autrefois.
Ils avaient raison, une fois de plus. Je me contentais d'acquiescer face à ce qu'ils me disaient et de me servir mon petit-déjeuner. Une raison supplémentaire qui me poussait à penser que nous n'avons jamais réellement été protégés. Ma mère s'installa avec nous et énuméra les choses qu'elle devait faire dans la journée. Elle me proposa de venir faire les courses avec elle, ce que j'acceptai.
Je pus lire dans le journal de mon père que notre voisin n'était pas le seul à avoir été porté disparu et être réapparut dans cet état. Je ne le connaissais pas plus que ça et c'était triste à dire mais sa mort ne m'attristait pas plus que ça.
Quelques instants plus tard, j'attendais mes parents dans la voiture. Ma mère monta sur le siège passager et mon père à l'arrière. Je le conduisis jusqu'à son travail et partis au supermarché. Pendant le trajet, l'atmosphère était étrange, ma mère semblait être tracassée par quelque chose. Sans doute par manque de courage, je ne posais aucune question.
Adossée au cadis, je suivis ma mère à travers le magasin sans grande conviction. Et cela ne s'arrangea pas lorsqu'on croisa notre voisine, la mère du défunt. Cette jeune femme aux cheveux noirs corbeaux était de nature souriante et légèrement commère sur les bords. La mort de son fils l'avait radicalement changée, elle était blonde et ne souriait plus.
-Oh Madame Collins, nous sommes vraiment désolés pour Matthieu, s'excusa ma mère.
-Toutes nos condoléances, disais-je.
Ma mère me passa le reste de la liste tandis qu'elle discutait avec. Je sillonnais les rayons et terminai les courses en un temps records. Je me glissai dans la file d'attente et inspectai du coin de l'œil ce que faisait ma mère. J'entendis diverses discussions à propos de Matthieu et tous les autres, les avis se rejoignaient plus ou moins : c'était un tueur en série qui utilisait des bêtes sauvages. Juste à temps, ma mère arriva à la caisse et paya, ce qui m'évita le fameux stresse de la caisse.
-C'est vraiment triste ce qui est arrivé à ce pauvre Matthieu. Sa mère pense qu'ils auraient dû rester en France.
-Personne ne prédit l'avenir Maman et ceux qui le prétendent sont des charlatans.
Elle soupira puis ouvrit le coffre de la voiture. Ce soupir annonçait une discussion sérieuse sur ma liberté acquise depuis peu.
-Tu sais, je pense qu'il serait judicieux d'éviter de sortir pendant un moment.
Qu'est-ce que je disais ?
-En quel honneur ?
-On a discuté avec ton père et nous ne voulons pas qu'il t'arrive la même chose. Matthieu sortait tout le temps et pas avec des gens très fréquentables...
-Stop, la coupai-je. Je ne suis pas Matthieu, déjà que je ne sors pas beaucoup, je ne vais pas me priver du peu de liberté que j'ai. Et puis, je ne traîne pas avec ses amis. On se connaissait à peine, nous sommes littéralement l'opposés l'un de l'autre Maman.
Son visage fit une mine peu convaincue. Arrivées à la maison, on déballa les courses dans un silence absolue puis je montais dans ma chambre. Mon carnet blanc me narguait de l'autre bout de la pièce. Je m'approchais et enlevai l'immense couche de poussière qui s'était déposé au fil des années. J'ouvris la première page avec nostalgie. Je relisais mes premiers écrits au sujet du surnaturel. Chaque catégorie que j'avais faite, passant du plus banal au plus complexe, toutes les recherches de plusieurs années étaient inscrites dans ce ridicule carnet blanc.
L'une des pages m'irrita la peau, pas assez pour me faire saigner mais suffisamment pour avoir la sensation de brûlure.
J'espérai enfin voir la couleur de mon sang.
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