Chapitre 8 (1)

« Elle a beau me dire qu'elle va bien, je sais que c'est faux. Son sourire est différent, elle est en train de mentir. Et elle le faisait depuis longtemps. »

« Salut c'est Iliana ! Désolée, je ne suis pas avec mon téléphone en ce moment ! Je suis le genre de fille qui peut le perdre dans le sable sans s'en rendre compte... Appelez Evan, je suis certainement avec lui ! Si c'est toi, bah t'inquiète, je vais vite réapparaître ! Bisous ! »

Je soupire une nouvelle fois. J'adore sa messagerie, mais elle a le don de me faire sourire, comme celui de m'énerver. Je cherche à la joindre pour la quatrième fois, mais toujours aucune réponse. On devait se rejoindre après l'entraînement de basket qu'on a organisé pour Aiden, et elle devait rejoindre Lindsay pour parler au coach. Apparemment, il y a eu un changement de programme, la frimousse blondinette et parfaitement innocente de ma copine n'étant pas apparue vers la fin du jeu, comme à son habitude. Elle ne m'avait pas accueilli avec son petit sourire en coin, et ses yeux bleus pétillants. Pourtant, elle le faisait toujours.

Être en retard est carrément son genre, mais pas à ce rendez-vous, jamais. Je l'ai vue, avec Austin sur le bord du terrain puis avec le coach mais ça s'arrête là. 

— Les garçons, s'il vous plaît ! nous interrompt le coach.

Il est resté pendant tout notre petit match. Il adore voir son équipe jouer, même s'il n'est plus payé à l'heure qu'il est, ses joueurs sont et resteront sa priorité.

— Les sélections pour le capitaine de l'équipe auront lieu dans deux semaines, quant aux entraînements, ils reprennent dès lundi. Je veux absolument que vous soyez en forme et ne jouez pas aux cons ce week-end ! Je vous veux en un seul morceau, une de mes joueuses vient déjà de me lâcher, ça suffit pour aujourd'hui. C'est clair ?

Certains répondent par un oui, d'autres hochent seulement la tête pour signaler leur présence.

— Austin ? Tu n'as pas vu Iliana ? demandé-je une fois la séance terminée.

— Non, pourquoi ? me répond-il en se changeant.

— Je ne sais pas, elle ne t'a rien dit tout à l'heure ?

— Si, qu'elle allait parler au coach et qu'elle rentrait après. Pourquoi, tu devais la voir ?

— Carrément. On a une soirée de prévue.

— Je ne veux même pas savoir ce que vous allez faire, soupire-t-il.

— Ce n'est pas la question, je la trouve pas pour l'instant. On devait se rejoindre ici et allait ensuite chez elle pour prendre ses affaires.

— T'as essayé son téléphone ? conseille-t-il en haussant les épaules. 

— Elle ne répond pas.

— Comme d'habitude, soupire-t-il à nouveau.

— Bon, je vais bien finir par la trouver de toute façon.

— Dès que tu t'approches de l'heure des repas, hop, elle réapparaît comme par magie.

— T'es con, m'exclamé-je en riant.

On continue à se changer en se mêlant du plus de conversations possibles, comme après chaque entraînement d'ailleurs. On a de nombreuses choses à se dire, de vraies pipelettes !

— On va boire une bière sur la plage ? propose Aiden en laçant ses chaussures.

— Faut passer en acheter à l'épicerie de la 5ème avenue, ils ne regardent pas l'âge, renchérit un autre.

— Tu viens avec nous Evan ? me demande de nouveau Aiden en me regardant.

— Non, j'ai un truc de prévu avec Iliana, expliqué-je simplement.

— Oh ! Ils vont exploser le billard Austin ! s'écrie un des crétins de l'équipe.

Il se prend une chaussette, très certainement sale, en pleine figure.

— Ma demi-sœur n'est pas un bout de viande, arrête de parler d'elle comme ça ! tente de la défendre Austin.

— Mais du coup c'est de l'inceste ou pas si Austin a une relation avec elle ? demande un autre.

— Bah non, ils ne sont pas du même sang.

— Mais fermez-la en faite ! s'exclame Austin.

— Mais théoriquement ils sont quand même de la même famille et...

— De toute façon, la question ne se pose pas. Elle est en couple, les stoppe Aiden d'un seul coup.

Tous les regards vont vers lui et pendant un instant, plus personne n'ose parler. Juste avant que la chaussette sale s'envoie sur quelqu'un d'autre.

— Bien vu, et c'est moi son copain alors allez-vous en avec vos bières hors de prix, m'exclamé-je, fier.

A mon grand étonnement, ils partent un à un avec leurs sacs en riant, de vrais gosses...

— Tu m'envoies un message quand tu l'as retrouvée hein ? m'interpelle Austin avant de sortir.

— Aucun problème. Elle doit être avec ses amis, je te tiens au courant.

— À plus.

Les derniers partent alors que je termine de m'habiller. Une fois toutes mes affaires fourrées dans un sac, je m'apprête à quitter définitivement le gymnase lorsqu'un énorme bruit me fait rebrousser chemin, m'obligeant à passer la tête par la porte afin d'entendre d'où il provient et surtout, d'en identifier la source. 

— Iliana ? T'es là ? interrogé-je à voix haute.

J'avance jusqu'au vestiaire des filles et la trouve finalement assise sur un banc, en train de se ronger l'ongle du pouce. Légèrement courbée, la tête baissée, elle écoute de la musique,  à plein volume. Le regard perdu dans le vide, et une chaussure en moins, ses affaires sont éparpillées par terre sans explication.

— Iliana, qu'est-ce que tu fais toute seule ? chuchoté-je en m'avançant vers elle.

Je reconnais Mad World qui résonne à travers ses écouteurs, justifiant son manque de réaction. Elle est incapable de m'entendre avec un volume pareil délivré. Je pose ma main sur son genou pour lui signaler ma présence le plus délicatement possible. Pourtant, elle ne bouge pas, ses yeux restant fixes, sauf lorsqu'elle cligne des paupières. Je continue à l'appeler mais aucune réaction de sa part ne me répond.

— Qu'est-ce que tu as Iliana ? Parle-moi.

Elle referme sa main sur la mienne. Je profite de son « instant de lucidité » pour retirer son écouteur et reprendre le contrôle de son attention.

— Ça ne va pas ? murmuré-je.

— Pas trop, non.

— Qu'est-ce que tu as ? Dis-moi.

— Pourquoi ? me demande-elle simplement en levant les yeux.

Ses beaux yeux, habituellement bleus, sont à présent rougis et totalement détruits.

— Tu as pleuré ? Iliana qu'est-ce qui t'arrive ? C'est ta cheville, tu as mal ?

Elle secoue la tête alors que je pose ma main prudemment sur son point faible. Ma petite amie se tend instantanément et souffle du bout des lèvres :

— Doucement.

— Tu as mal ? redemandé-je.

— Un peu, avoue-t-elle tout bas.

— Qu'est-ce que tu as fait ?

— Je suis tombée, et j'en ai mis partout, regarde mes affaires, y'en a partout, il faut que je les range et que...

— C'est rien. Ce ne sont que des affaires, on s'en occupera après, assuré-je en caressant sa main.

— Mais regarde, y'en a partout, insiste-t-elle.

— Ce n'est pas grave du tout, ok ?

— Ok.

Je quitte sa main pour aller déposer la mienne sur sa joue avant de prendre son poignet doucement.

— Tu es sûre que tu es tombée, personne ne t'a fait du mal ?

— Non, j'ai glissé... Tu sais ce que c'est les filles qui sortent de la douche. 

— Si quelqu'un ose te faire du mal je te garantis qu'il ne restera pas vivant longtemps.

— Le sol de ce vestiaire pourri est le seul responsable, rit-elle.

— Quel con, souris-je qu'à moitié convaincu.

— Tu l'as dit.

Elle s'avance un peu plus sur le bord du banc, quand à moi je suis toujours agenouillé à côté d'elle. Ses mains encerclent mon visage et elle dépose un petit baiser sur le coin de mes lèvres. Puis avec grâce, elle se glisse dans mes bras et je l'encercle à mon tour.

— Pourquoi moi, hein ? Alors que tu as toutes les Courtney, les Montgomery et les Lindsay que tu veux, pourquoi tu choisis la petite Iliana paumée ?

— Parce que c'est elle que j'aime.

— Moi aussi je t'aime.

Elle me sourit à ce moment là. Pourtant elle a beau me dire qu'elle va bien, je sais que c'est faux. Son sourire est différent, elle est en train de mentir. Et elle le faisait depuis longtemps...

֍

— Je passe me changer et après on peut y aller, d'accord ?

— On fait comme ça. Je t'accompagne, comme ça je pourrai faire coucou à tes parents.

— Si ça peut te faire plaisir, rit-elle.

On claque les portières chacun notre tour avant d'entrer. Elle boitille en montant les escaliers pour atteindre la porte d'entrée.

— Tu devrais mettre de la glace dessus, lui conseillé-je.

— Tout va bien.

— Tu boites, Iliana. Mets un peu de glace dessus avant de partir.

Elle roule des yeux en passant le couloir pour rejoindre le salon.

— Iliana, coucou ! nous accueille Carolina.

— Vous allez quelque part ? demande-t-elle en regardant les sacs de voyage entassés près de l'entrée.

— Oui, on part à New York pour trois jours pour Célia, explique-t-elle.

— Ah oui, c'est vrai, réplique Iliana en haussant les épaules.

— Bonsoir, dis-je doucement.

— Oh, Evan ! Je ne t'avais même pas vu ! Comment vas-tu ? Tu veux boire quelque chose peut-être ? propose-t-elle gentiment. 

— Non, ça va, merci.

— Papa est rentré ? demande Iliana en sortant le lait du frigo.

—  Andrew est dans son bureau.

À peine a-t-elle prononcé ces mots qu'il entre dans le salon avec nous.

— Ah, vous êtes là vous deux. Salut chérie, ajoute-t-il à l'intention de sa fille en embrassant son front.

— Vous restez dîner ? nous propose Carolina.

— Non, on a  d'autres projets, explique Iliana avec une voix mystérieuse, en liant nos doigts entre eux.

Je ne peux que lui sourire. Elle ajoute rapidement sous le regard de son père.

— Mais ne t'en fais pas, ça sera pas trop long je rentre tôt pour une « bonne nuit de sommeil » histoire d'être prête à partir tôt demain matin.

— Demain matin ? Pourquoi qu'est-ce que tu as de prévu demain matin ? demande son père en ouvrant un message sur son téléphone.

— Comment ça  « qu'est-ce que j'ai prévu » ? Ma...

— Attends une minute chérie c'est le boulot, il faut que je réponde. Ils n'arrivent pas à comprendre qu'une fois parti du cabinet, ma journée est terminée. C'est fou, ils ne saisissent jamais ce qu'on leur dit du premier coup, c'est quand même pas compliqué à comprendre. Avoir un déplacement ce n'est pas la fin du monde, râle-t-il en pianotant sur son écran. 

Je me penche vers Iliana, qui ne répond pas à ma tentative. En réalité, je vois simplement ses yeux se remplir de larmes. Je me tends, et m'approche d'elle en passant mon bras derrière son dos.

— Hey, ça ne va pas ? demandé-je à voix basse.

— Tu prends un avion demain ? demande-t-elle en ignorant ma question, et en s'écartant.

— Oui, je pars à San Francisco, pour un déplacement, explique simplement son père. 

— Tu te fous de ma gueule, c'est ça ?

— Iliana mais enfin, qu'est-ce qu'il te prend ? s'agace-t-il face au ton employé par sa fille.

— Tu n'es qu'un égoïste. Un connard d'égoïste, crache-t-elle simplement.

— Je t'interdis de me parler sur ce ton Iliana !

— Je te parle comme je veux ! Putain mais c'est quoi ton problème, tu ne peux pas être la pour moi, au moins une fois dans ta vie ?

— Mais qu'est-ce que tu racontes enfin... bien sûr que je suis présent pour toi. Je m'organise depuis des semaines pour alléger mon emploi du temps afin de rester avec toi la semaine prochaine lorsque tu ne pourras plus poser le pied à terre.

— Sauf que tu as une semaine de retard, je me fais opérer demain. Pendant que tu voleras vers San Francisco. Putain, mais il n'y a donc personne qui m'écoute dans cette maison ! Personne n'en a rien à foutre, ce sont elles qui ont raison ! s'écrie-t-elle en plaquant ses mains contre son visage.

— Ma puce, c'est demain ton opération ? l'interroge Carolina d'une voix douce.

— Oui, et j'en ai encore parlé hier à table ! Preuve que personne ne m'écoute jamais. Mais bon, ce n'est pas grave, je vais me débrouiller. J'irais en bus, à cloche-pied, crache-t-elle.

— Iliana, je ne peux pas décaler mais je pensais sincèrement que c'était la semaine prochaine, je te le promets ! se justifie inutilement son père.

— C'est bon, ne te fatigue pas. Je ne sais même pas pourquoi je suis étonnée en fait, murmure la jeune fille, incrédule.

Je n'ose pas bouger, et encore moins dire quoi que ce soit. Un silence de mort s'abat sur le domicile, alors qu'Austin choisit ce moment précis pour faire son entrée.

— Salut ! lance-t-il en refermant derrière lui.

— Austin, tu tombes bien, lui répond sa mère visiblement soulagée.

— Tu vois, je suis sûre que si il avait été question de Célia ou d'Austin tu t'en serais souvenu, accuse-t-elle son père avec froideur. Je suis certaine que si un de tes vrais enfants avait été concerné, tu t'en serais occupé avec sérieux. Mais dommage, ce n'est que moi. On m'a dit de faire des efforts et c'est ce que j'ai fait, je suis venue ici contre gré. Maintenant, il est grand temps que tu te souviennes que tu as aussi une autre fille.

Elle contourne tout le groupe de personnes agglutinées dans le salon et monte les escaliers avec difficulté. Visiblement blessée par la situation, j'aperçois déjà quelques larmes rouler sur ses joues.

— Iliana... l'appelé-je doucement en avançant vers elle.

— Je vais me doucher et prendre des affaires, après on s'en va, me lance-t-elle sans un regard.

Incapable d'ajouter le moindre mot, je la laisser monter les marches jusqu'à disparaître de ma vue. Ses parents quittent la pièce précipitamment, s'enfermant dans leur chambre, lancés dans une discussion des plus mouvementées. 

— Qu'est-ce qu'il s'est passé tout à l'heure ? me demande Austin une fois ses parents absents.

— Iliana s'est disputée avec son père, expliqué-je simplement.

— Encore ? Qu'est-ce qu'il a fait cette fois ?

— Il a oublié qu'elle se faisait opérer demain, du coup il n'y a pas d'adulte disponible pour elle.

— Venant d'eux, ça ne m'étonne même pas. On fera sans, qu'est-ce que tu veux... Mon père est vraiment nul avec elle, je n'arrive pas à comprendre pourquoi il agit ainsi, il pourrait faire un effort.

— Je pense aussi, elle n'est pas non plus dans une bonne phase, il faut la comprendre, essayé-je de la défendre. Je vais aller la voir.

Austin hoche la tête, avant de me laisse partir. Je rejoins dans sa chambre et la retrouve assise sur son lit, absorbée par ses pensées, coudes posés sur les cuisses et la tête légèrement inclinée.

— Qu'est-ce que tu fais ? demandé-je en riant.

La voir dans cette position m'a toujours amusé.

— Je réfléchis, répond-elle simplement, avant d'hausser les épaules.

— Et ça t'arrive souvent de réfléchir en sous-vêtement en sortant de la  douche ?

Et mon dieu, qu'est-ce qu'elle est belle ainsi.

— Non, seulement lorsque mon père me traite comme de la merde, ironise-t-elle, cinglante. 

Iliana n'est jamais vulgaire, seulement lorsqu'elle est en colère. Elle est le genre de personne absolument calme et sereine, ayant simplement ses sujets à éviter.

— Je ne sais pas ce que j'ai fait de mal pour qu'il me traite comme ça. Il n'arrive toujours pas à digérer le fait que je sois une fille, chuchote-t-elle en glissant son visage entre ses mains.

— Pourquoi tu dis ça ? l'interrogé-je sans comprendre.

— Je sais très bien comment est mon père, et je sais aussi que le 20 novembre 2006, il n'a pas perdu le bon enfant. Il aurait préféré me perdre moi plutôt que mon frère.

— Ne dis pas des choses comme ça Iliana, c'est ton père et il...

—  Et il n'a aucune excuse. Je le sais depuis des années, il ne m'aimera jamais comme il a aimé Will, jamais il ne me regardera avec autant de fierté. Mais je me suis faite à l'idée il y a bien longtemps déjà, je sais qu'il préfère Austin et qu'il ne le cachera jamais, même par respect pour moi. Quant à Célia, c'est sa petite dernière, c'est normal qu'il l'aime bien plus. Moi, je ne suis que sa première fille, l'essai, le brouillon de la famille parfaite. Même si je me suis faite à l'idée... C'est dur, avoue-t-elle à voix basse.

— Tu es loin d'être un brouillon Iliana, ne dis pas des choses que tu ne penses pas ou que tu n'es pas. Moi je te trouve parfaite et si ta famille n'est pas à la hauteur de tes attentes, très bien, ce n'est pas grave. Tu t'en formeras une autre parmi tes amis et les personnes qui t'aiment réellement telle que tu es, la rassuré-je en m'asseyant à ses côtés.

Elle sourit avec délicatesse, et pose ses lèvres doucement contre les miennes.

— Merci, termine-t-elle en se relevant. Tu veux bien m'aider à mettre ma robe ?

— Tu devrais t'habiller plus chaudement... Changement de programme oblige, la conseillé-je.

— On ne va plus manger au restaurant ? comprend-elle. 

— Non, tu n'avais pas envie d'y aller, je me trompe ?

Elle baisse la tête, gênée.

— Non, c'est vrai. Désolée, je sais que ça te faisait plaisir et...

— Je suis heureux parce que je sais que je vais passer un moment avec toi, et non parce que je vais manger une entrecôte et des frites en terrasse. Des macaronis au fromage sur un canapé ça me va tout aussi bien.

— Mince, j'ai terminé les derniers hier, souffle-t-elle ironiquement.

— Peu importe, j'ai déjà tout prévu. Tant que c'est avec toi, je suis sûr que ça sera parfait.

Elle sourit une nouvelle fois, me faisant confiance aveuglément, pour simplement se laisser porter pour cette fois.

֍

On redescend vingt minutes plus tard, tombant sur la famille au grand complet réunie dans le salon. Je les regarde les un après les autres, sans trop savoir ce qu'ils attendent de nous à cet instant.

— Qu'est-ce que tu fais dans cette tenue Iliana ? lui demande son père, l'air de rien.

— Comme si la façon dont je m'habille t'importait, murmure-t-elle en enfilant son manteau.

— Tu pourrais t'habiller mieux pour sortir, on a tous fait un effort.

— On ? Pour aller où ? s'indigne-t-elle sans comprendre.

— Vu que Célia et moi partons à New York et Andrew à San Francisco, on s'est dit qu'une petite sortie en famille ne serait pas une mauvaise idée. En plus, vous allez être seuls pendant trois jours alors... explique doucement Carolina.

— Une famille, mais quelle blague, soupire Iliana. Oui, pourquoi pas, aller manger au restaurant tous ensemble pour me faire oublier votre oubli ça me semble parfait.

— Iliana, ça suffit, gronde son père.

— Je suis ravie que tu te souviennes encore de mon prénom, papa. Je peux encore t'appeler comme ça au moins ? réplique-t-elle avec méchanceté.

— Arrête ça tout de suite, tu ne va pas recommencer ton cirque, lui répond-il.

— Pourquoi ? Tu veux me faire une petite critique sur la manière dont j'ai été élevée ? Un petit conseil peut-être ? Sauf que tu n'es pas en position de dire quoi que ce soit, papa. Parce que tu ne pourras jamais rattraper treize ans d'absence, pas même avec des Porsche ou tous ces autres cadeaux hors de prix. Tu ne peux pas acheter ton absence et me faire oublier avec de l'argent, tu le sais ça ?

— Iliana, on fait tous des efforts par rapport à la situation difficile que tu vis en ce moment. Je sais que c'est compliqué pour toi mais il faut aussi que tu y mettes du tien, assure-t-il.

— Que j'y mette du mien ? Mais tu ne vois pas que je suis la seule à faire des efforts ? Tu te contentes de subir ma présence, rien de plus. Et désolée, mais pour ce qui est de ce repas familial, je vais passer mon tour cette fois. Je ne suis ni d'humeur festive, ni d'humeur familiale, ce n'est pas le moment.

— Iliana, s'il te plait, on ne va pas vous voir pendant trois jours et tu te fais opérer demain, j'aimerais passer un minimum de temps avec toi et a...

— Fais comme avant papa, pendant trois jours, oublie-moi. Ne cherche pas à me contacter, et encore moins à m'appeler. Ne t'occupe pas de moi, on verra ça plus tard. J'ai vécu treize ans sans mon père, je peux bien attendre trois jours de plus, déroule-t-elle avec aplomb.

Ses mots résonnent les uns après les autres dans la pièce, tel un venin qui semble se disperser dans leurs veines. Même Austin est d'une pâleur incroyable. Elle a été abandonnée par la personne qui devait lui apporter le plus d'amour, retirer cet équilibre et la priver de cette chance ne pouvait que la marquer à jamais.

— On peut y aller ? me demande-elle avec détermination en tendant sa main vers moi.

Je confirme d'un signe de tête et nous sortons par la baie vitrée. C'est elle qui m'emmène vers le fond du jardin, dominant l'océan visiblement  agité.

— On peut attendre une minute de plus ? J'ai besoin de voir la mer... déclare-t-elle en soufflant.

— On allait justement là-bas, expliqué-je en prenant sa main à mon tour, pour la serrer contre moi. 

On descend les marches en pierre pour rejoindre la plage. Une fois en bas, la maison au dessus de nos tête, dominant la mer tel un phare indiquant notre chemin, Iliana lui fait dos et retire ses Converse bleues puis ses chaussettes afin d'enfouir ses pieds dans la sable froid.

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Hey ! Voilà le deuxième chapitre du week-end !

Vu que j'ai « pris le pli » maintenant je posterais le samedi et le dimanche (la semaine c'est tout simplement impossible 😂)

Qu'avez-vous pensé de ce chapitre ?

Je posterais la deuxième partie dans l'après-midi ✌🏻

Il est quand même mignon notre petit couple, non ?

Faut bien ce soutenir parce qu'avec un père pareil 😓

A tout à l'heure pour la suite 😉

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