Chapitre 5 (2)

[Je bricole un sourire arrogant avant de tourner les talons vers le parking.
Pour de bon cette fois.]

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— Gère-là, je t'en supplie, elle est insupportable, gémit mon ami en me voyant arriver.

— Mais non, je suis sûre que tu y arrives très bien Josh, souris-je à sa hauteur.

Je lui fais la bise, puis cherche des yeux mon amie.

— Putain, j'en ai un ! Josh, rends-moi mon sac tout de suite ! s'écrie justement la principale intéressée.

— Je ne la vois pas, mais je l'entends par contre, constaté-je.

— Comme toujours. C'est ce qui décrit le mieux ma jumelle je te rappelle.

— Josh, file-moi mon sac tout de suite que je lui mette un autocollant en plein sur le pare-brise à cet enculé !

— Calme-toi, soupire son frère.

— Non, il n'a pas de carte alors qu'il est sur une place ! Une de mes places !

— Iliana est là, ajoute-t-il en ignorant totalement les paroles de sa sœur.

— C'est pas vrai, Iliana ! s'exclame-t-elle d'une voix plus aiguë que d'habitude.

La furie aux cheveux blonds arrive rapidement, en tendant les bras vers moi pour me faire un câlin. Et oui, encore une blonde. La grande majorité de mes amies le sont, une vraie communauté !

— Tu m'as trop manqué Cha', chuchoté-je contre elle.

— Toi aussi ! On n'a pas passé une minute ensemble des vacances, c'est dingue quand même !

— Je sais que vous ne vous êtes pas vues depuis une éternité, mais on va finir par être en retard. Disons que Charlie est encore plus lente ces derniers temps... soupire son frère.

— Bah pousse-moi, on ira plus vite, râle-t-elle.

Josh roule des yeux, et se place derrière son fauteuil pour la conduire, comme la majeure partie du temps.

— Tu as bien vérifié que Courtney n'avait pas pris ma carte de secours, hein ? Elle l'a déjà fait pour pouvoir se garer plus près de l'entrée et j'ai horreur de ça.

— Je sais, ne t'inquiète pas.

— Si, je m'inquiète. Tu me gonfles déjà, j'espère qu'on ne sera pas dans la même classe tête de nœud. Je ne te supporterai jamais une année de plus.

— As-tu seulement fermé la voiture ? l'interrompt son frère sans relever.

— Oui, c'est ma voiture, qu'est-ce que tu crois !

— N'importe quoi, c'est moi qui conduis, je te rappelle.

— Tu es mon chauffeur du con.

— Bien sûr, et pourquoi pas ton taxi ?

— Exactement c'est ton statut. Déjà, tu peux te garer où tu veux, alors sans commentaires !

— Seigneur qui m'a donné deux sœurs ? C'est insoutenable ! se lamente-t-il.

J'éclate de rire, les enfants Maxwells ayant toujours été des enfants avec du caractère. Aussi loin que mes souvenirs le permettent, c'est toujours Charlie qui a dominé le lot, malgré son handicap.

— Bon, accélère, je veux aller voir les listes et ça a déjà sonné !

— Tu es lourde aussi... Je t'avais dit pas de gaufres mais tu n'écoutes jamais. Après qui se coltine la loutre ? C'est moi, comme toujours !

Elle lui tape les doigts, et avance toute seule à présent, visiblement vexée par sa remarque.

— C'est le fauteuil qui est lourd, pas moi, s'excuse-t-elle.

— Non, je crois plutôt que c'est le gros cachalot qu'il y a dessus.

Elle attend qu'il la dépasse, et en profite pour lui rouler sur le pied. Son frère pousse un cri strident avant de lui donner une tape sur la tête.

—Mais stop tous les deux ! Je vous ai vus depuis quoi ? Deux minutes ? Je n'en peux déjà plus ! J'espère qu'on ne sera jamais comme vous Austin et moi !

— Ne t'inquiète pas, ça viendra avec le temps ma belle, nuance Josh avec un clin d'œil.

— Hors de mon chemin le clochard ! crie sa sœur en le pointant du doigt.

Elle nous devance d'au moins deux mètre, toujours aussi élégante. Des cheveux coupés carrés et parfaitement lisses et clairs, une peau pâle et des yeux gris. Exactement comme son frère et sa sœur, de parfaits petits clones.

— Bon allez, mes paroles ont été entendues par Dieu, je ne suis pas dans ta classe ! s'écrie Charlie le poing en l'air.

— C'est tellement triste, séparer des jumeaux, qui a osé ? couine Josh.

— On est faux jumeaux. Ça fait absolument toute la différence.

— On n'a aucune différence, on est pareil.

— Non, je suis une fille, tu es un gars. Je suis belle, tu es moche. C'est tout.

— Charlie, je...

— Ne cherche pas, j'ai raison. Sur ce, je vais dans ma classe.

Elle s'en va avec une dignité incroyable, et j'éclate de rire à nouveau. Un jour cette enfant dominera le monde et causera notre perte à tous. J'en suis certaine.

— Tu viens, on va vraiment se faire virer dès le premier jour ! m'interpelle mon ami.

— On est dans la même classe ? m'étonné-je.

— Cache ta joie surtout !

— Ahhh ! C'est trop génial ! surjoué-je.

Il se moque de moi en passant son bras autour de mes épaules pour me guider jusqu'à notre salle de cours, pleine à craquer bien sûr. Il ne reste que deux places, bien distantes l'une de l'autre. Un garçon seul au deuxième rang attiré mon attention. Josh et moi bataillons déjà depuis plus de vingt minutes pour le convaincre de changer de place avec nous.

— Allez mec, sois sympa ! Tu veux bien te reculer d'un rang pour nous laisser la table ? tente, inutilement, Josh.

— Non, désolé. Je ne bougerai pas.

Allez Iliana, joue les garces. De toute manière il n'attend que ça...

— C'est quoi le problème ? Tu es tout seul et tu utilises une table de deux, alors tu vas t'assoir autre part et tu nous laisses nous mettre ici, m'impatienté-je.

Les gens de ce lycée pensent toujours que tout est permis. Pourtant, malgré ma voix autoritaire, le garçon semble s'en moquer royalement, envoyant les arguments au tapis.

— Désolé, fallait s'y prendre avant. Si tu veux, tu peux venir t'asseoir juste à côté de moi, ma jolie, mais je ne bougerai pas.

Je cligne des yeux deux fois de suite. Mes joues commencent à virer au rouge, bouillant littéralement de l'intérieur.

— Je ne vais quand même pas me mettre à côté de ma sœur ! s'exclame Josh comme dernier argument.

— Chacun ses problèmes. Moi, il est hors de question que je me mette à côté de mon ex-copine. On est d'accord sur ce point.

Josh l'assassine du regard alors qu'il part s'assoir à côté de sa jumelle. Je sens que ça fait trop de « jumelle » dans votre tête. Les Maxwells sont des triplets, il y a Courtney, Josh et Charlie. Trois fois plus de bonheur et de combats entre frère et sœurs !

Moi, je me pose à côté de ce type, qui me gratifie d'un sourire presque arrogant.

— Tu boudes ? quémande-t-il avec ce même petit sourire.

Je croise les bras sur ma poitrine en regardant le tableau, une fois mes affaires sorties sur le bureau.

— C'est juste une place, se justifie-t-il.

— Alors pourquoi tu fais chier si c'est « juste une place » ?

— Parce que j'aime bien embêter les jolies filles. Quelle question.

Je soupire en voyant le professeur entrer, mettant fin à cet échange inutile.

— Il y en aura d'autres au prochain cours, pas besoin de paniquer, hausse-t-il les épaules.

— Alors pourquoi tu stresses ? m'énervé-je.

— Un point pour toi. C'est ma place, c'est tout. Tu changeras au cours suivant.

Je lui jette un regard en coin, un air déçu collé au visage. Ce garçon est vraiment tout ce que je déteste dans ce lycée, du genre qui se croit tout permis parce qu'il a de l'argent et parce qu'il a des couilles au sens propre.

Des cheveux châtains et des yeux gris, une carrure assez imposante et des traits bien dessinés, il n'a absolument rien d'exceptionnel. Pas de quoi la ramener, vous pouvez me croire.

— Bonjour, je suis Monsieur Stuart et je suis votre professeur principal cette année. J'enseigne la littérature et la culture anglaise, mais vous le savez déjà. La plupart d'entre vous m'ont eu l'année précédente, mais cette année risque d'être coriace, vous allez devoir travailler dur. Avant tout, comme chaque pré-rentrée l'exige, les documents administratifs que je vais vous distribuer pendant deux heures sont à me rentre pour demain.

Il descend de son estrade ridicule et apporte la tonne de papiers.

— Monsieur Miller, je vous prierais de vous assoir convenablement, j'ignore comment se tenaient les français en cours mais certainement pas comme cela. Redressez-vous immédiatement.

Avec un soupir, mon charmant voisin se redresse sur sa chaise pour se tenir droit. Je retiens un rire entre mes lèvres, alors qu'il me fusille du regard.

— Tu trouves ça drôle banana Split ? scande-t-il.

— Banana split. Très originale comme insulte, ça fait trop mal, répliqué-je.

— Tu as vu tes cheveux ? Moi c'est la première chose à laquelle je pense en les voyants.

Je soupire à mon tour. J'ai hâte que la journée se termine, de pouvoir partir d'ici et me tenir aussi moins possible que permis de ces idiots-là. J'ai du mal à le supporter, notre rencontre datant d'il y a pas plus de dix secondes.

— Ces places seront définitives. Vous n'êtes pas ici pour bavarder avec vos amis.

— C'est une blague, lâché-je un peu plus fort que je ne l'aurais voulu.

Mon professeur se retourne et me regarde de haut, j'en deviens écarlate.

— Un problème mademoiselle Midden ?

J'esquisse un vague non de la tête.

— J'ai été indulgent, vu les évènements de l'année dernière. Maintenant, le problème semble résolu. Je n'accepterai plus ce genre de comportement dans mon cours, c'est bien clair ?

Mon cœur s'emballe à l'instant même où il évoque le sujet.

Je confirme d'un mouvement flou, sentant mes joues brûler intensément, plus par colère que par gêne cette fois. Mes mains se resserrent sur mes genoux, et j'enfonce mes ongles dans le tissu pour m'empêcher de répondre. Parce qu'il parle de ma mère.  Je ne répondrai pas avec des mots courtois et gentils à ce sujet, c'est sûr.

Les voilà qui recommencent. À cet instant je pouvais sentir chacun des regards de mes camarades me transpercer et me détailler avec pitié.

— Extrêmement clair, articulé-je la gorge et dents serrées.

Mon voisin se met à rire, mais je ne bouge pas, contrôlant uniquement mon souffle devenu fou.

— Cessez de rire Aiden, c'est des plus insolent.

Notre professeur s'éloigne avec sa pile de papiers, mais c'est trop tard. Je suis déjà loin. L'exil qu'on m'impose dès que mon histoire est prononcée me retient prisonnière, je m'y noie. Ce paradis ensablé est perdu, oublié. Elle me manque bien plus que je ne souhaiterais l'avouer...

J'ai perdu absolument mon calme et ma bonne humeur en une phrase. Les mots de trop. J'ai horreur qu'on utilise ma mère comme prétexte, alors je continue de fixer le tableau noir, pour  tempérer cette tempête, nichée contre ma poitrine.

— Je crois que je me suis trompé. Banana split n'est pas un surnom fait pour toi. Tomate ou poivron serait plus adapté.

Je souffle ouvertement en m'adossant au mur, la tête posée sur la main. Incapable de revenir, perdue dans mes pensées. Ce poison glisse dans mes veines, gagne mon cœur comme depuis le départ, depuis cette vague...

La rentrée est un cauchemar. Je n'avais pas envie de reprendre et d'affronter ce genre de vaguelettes. Malgré leur petite taille, elles ravivent ma douleur et font saigner mon cœur. Elles provoquent les plus grandes marées, prêtes à tout submerger sans s'arrêter.

Comme un mutisme déclenchant à nouveau mes peurs passées, j'esquisse un sourire, et recommence à mentir pour oublier.

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Hey ! Voilà la deuxième partie du chapitre 5 !
(plus court que le précédent)

Les jumeaux sont enfin arrivés !
Sans parler d'Aiden qui fait déjà des siennes 😎

Le prochain chapitre sera de son point de vue sur la même situation, vous verrez qu'il ne percevra absolument pas les choses sous le même angle !

J'espère que vous chapitre vous a plu !

A demain 😎

Des bisous, Lina 😉

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