Chapitre 11


« Chaque mot provenant de sa bouche accélère mon rythme cardiaque tout comme mes souvenirs hantent déjà mon esprit tel le plus puissant des poisons que la Terre ait connu. »

— Si vous vous sentez prête, je pense que nous pouvons commencer.

Je hoche la tête, prise d'un frisson incontrôlable. Pourtant il fait bon, la température de la chambre est idéale, je n'ai aucune raison valable d'avoir froid. La peur me noue le ventre, et voilà qu'elle se manifeste autrement à présent.

Une seule pensée m'obsède depuis notre arrivée : j'aimerais que ma mère soit là, assise à mes côtés pour me rassurer et me tenir la main. Je n'ai presque pas dit un mot depuis que je suis arrivée, pratiquement pas adressé la parole à Austin. Et depuis qu'on est entrés dans cette chambre toute blanche, mon cœur bat plus fort, c'est pire bien qu'avant.

Pourtant rien n'est nouveau, tout m'est familier. Cette machine là, reliée à ma poitrine par des électrodes, celle qui est branchée au brassard autour de mon bras, je connais la fonction de chacun de ces engins de torture capables de me maintenir en vie, tout comme prévenir ma mort à ceux qui m'entourent, comme elles ont prévenu la sienne. Même l'aiguille figée dans ma peau ne m'est pas inconnue, je...

— Iliana ?

Je reporte mon attention sur le médecin, ce même spécialiste qui m'a souri le premier il y a quelques mois, m'annonçant que je ne pourrai plus bouger pendant un bon moment, que j'avais désormais des pièces en métal dans mon corps pour mieux le faire fonctionner. Cette même personne qui m'avait dit, « c'est fini, tu n'as plus à avoir peur. Ta maman est là, elle pourra te voir dès que tu seras parfaitement éveillée ».

C'est peut-être ça, la vérité. Je ne me suis pas encore « éveillée », ma mère va apparaître miraculeusement en emportant avec elle ces derniers mois cauchemardesques et tous les malheurs inimaginables qui ont déferlé sur moi depuis cette vague. 

— Tu as des questions ? m'interroge-t-il.

— Aucune, répliqué-je.

Brusque, bien trop brusque Iliana. Tu ne dois pas répondre trop vite, tu le sais.

Il me sourit gentiment, alors je lui offre le même signe en guise de réponse.

Il reste un médecin Iliana. Tu ne dois pas faire confiance aux médecins, pas après ce qu'ils ont fait.

— On va viendra bientôt te chercher, termine-t-il. Si jamais tu as le moindre problème, n'hésite pas.

Il désigne le bouton d'appel d'un regard, et j'affirme que tout ira bien la seconde suivante. Les hôpitaux ne m'ont jamais fait peur, ils me rappellent simplement des périodes compliquées de ma vie que je ne désire pas ressasser.

Inconsciemment, je commence à triturer mes pouces, notamment ces fichus contours d'ongles. C'est devenu comme un mécanisme, plus qu'un toc, un peu comme une habitude « rassurante » d'une certaine manière. Chacune des petites peaux qui dépassent me stresse, je ne peux m'empêcher de les retirer, parfois jusqu'au sang s'il le faut.

— Arrête... me murmure doucement Austin en posant sa main sur la mienne.

— Quoi ?

— Tes doigts, arrête. Regarde, tu saignes.

Je m'essuie avec un mouchoir, en le pressant contre la petite plaie.

— Tu vas avoir des cicatrices après.

Il n'a pas vu l'état de mes doigts. Des cicatrises, j'en ai partout, ce ne sont ni les premières ni les dernières. Celles-ci seront simplement visibles contrairement aux bleus qui tapissent mon cœur.

— Tu as peur ? m'interroge-t-il tout bas.

— Un peu, avoué-je. Je ne suis pas vraiment du genre casse-cou. Avant ma cheville, je ne me suis rendue qu'une fois ici, mais je ne m'en souviens pas du tout...

... j'étais tellement petite, et c'était pour mon frère. C'est apparemment la dernière fois que je l'ai vu. Et il n'est jamais revenu. Bien que les circonstances soient différentes, cette idée me traquasse subitement, si bien que je ne peux m'empêcher de poser la question.

— Est-ce que tu penses que je peux mourir, Austin ? demandé-je sérieuse tout à coup.

— Mourir ? Mais enfin je... non, il n'y a aucune raison ! Pourquoi tu dis ça ?

Je hausse les épaules, c'est vrai quoi après tout, une opération reste une opération. Je pourrais tout à fait m'endormir et ne plus jamais me réveiller. Je pourrais mourir, aujourd'hui et avoir laissé toutes ses horreurs comme messages d'adieu à mon père. Je pourrais disparaître dans quelques minutes. Cette idée me donne froid dans le dos.

— Tu ne vas pas mourir aujourd'hui, c'est sûr. Toi, tu mourras très vieille avec pleins de rides sur ta tête, me rassure-t-il avec un beau sourire arrogant.

Comme ma mère aurait dû faire ? On n'avait pas encore baissé tous nos doigts, il en restait encore beaucoup et pourtant...

— Tu veux que j'aille chercher quelqu'un pour que tu lui poses directement la question ? Peut-être que l'avis d'un médecin te rassurerait, propose-t-il, visiblement soucieux.

— Non, surtout pas. C'était une question conne, ne t'inquiète pas. Je n'ai pas encore fini de t'embêter, affirmé-je en souriant faussement.

Il y a encore une dizaine de questions que j'aurai aimé poser, malheureusement, je n'ai rien dit. Les mots n'ont jamais franchi mes lèvres, j'ai bien trop peur qu'ils n'abîment mon masque, mon bouclier, ma sûreté. Je ne dois inquiéter personne, c'est comme ça. 

C'est mieux pour eux, et pour moi.

— Tu veux un câlin ? me propose mon demi-frère en tendant une main vers moi.

— Je n'ai pas besoin d'un câlin Austin, je vais bien, expliqué-je en prenant sa main.

— Et moi alors ? Je veux être rassuré ! poursuit-il. Ma petite sœur se faire opérer, c'est effrayant pour moi d'attendre alors que toi, tu feras juste la sieste.

Je souris malgré moi. Même si ses expressions m'embêtent, je le laisse s'assoir sur le lit, et me prendre doucement dans ses bras. Les miens trouvent leur place naturellement, signe que je commence à avoir confiance en lui d'une certaine manière.

— Tu as trop d'égo pour admettre qu'il te fait du bien mon câlin, chuchote-t-il à mon oreille.

Je reste dans ses bras un petit moment, assise sur le lit en tailleur, lui sur le bord. Mon menton posé sur son épaule, il frotte mon dos avec douceur.

— Merci, murmuré-je en me séparant de lui.

Ça peut paraître étrange mais mes angoisses se tarissent un petit peu, me laissant en paix pour les quelques minutes suivantes, l'esprit allégé et un fin sourire plaqué contre les lèvres. 

֍

— Oh... vous êtes venue accompagnée de votre frère ? nous interrompt-on dans notre conversation.

— Demi-frère, rectifie-t-on d'une même voix.

L'infirmière éclate de rire, en s'avançant vers mon lit.

— Votre demi-frère veut-il bien me laisser la place ? demande-t-elle avec gentillesse. 

— Oui, bien sûr qu'il va le faire, répliqué-je en le chassant du lit.

— Nous sommes bientôt prêts de notre côté, poursuit-elle. Et vous, comment vous sentez-vous ?

Mentir ou dire la vérité ? Délivrer un beau mensonge alors que je suis surveillée de tous les côtés et que mon corps tout entier peut me trahir rien qu'avec un battement de cœur plus rapide que le précédent ? Mentir alors qu'Austin sait que je ne suis pas aussi sereine que je le prétends ou dire la vérité sous peine d'avouer ma peur et donc briser l'assurance que je me suis forgée depuis des mois ?

— Un peu stressée je crois, avoué-je à demi-mot.

J'entends Austin marmonner quelque chose, alors que j'ose à peine lever les yeux vers l'infirmière qui doit déjà noter chacune de mes faiblesses dans son calepin.

— C'est parfaitement normal, ne vous inquiétez pas, me rassure-t-elle avec un sourire.

— Normal ? demandé-je incrédule.

— Bien sûr, c'est normal d'avoir peur, ce n'est pas quelque chose d'anodin une opération, ajoute-t-elle d'une voix douce et bienveillante.

Je hoche la tête, surprise d'avoir une réaction qualifiée de « normale » pour une fois. Elle me laisse avant de partir un fond d'eau avec deux gélules qui semblent être des calmants. Je les prends devant elle, comprenant que c'est la première partie de l'anesthésie. Je ne cherche en aucun cas à déroger à la règle, concernant ma santé j'obéis sans rien dire et sans poser de questions. Je n'y connais rien de toute façon.

— C'est bientôt à vous, c'est une question de minutes, m'indique l'infirmière en sortant. Vous devez impérativement rester allongée à partir de maintenant.

Je hoche de nouveau la tête, incapable de prononcer le moindre mot. Ma gorge est tellement serrée, c'est tout juste si l'air arrive à passer.

— Tu as reçu un message d'Evan, me dit Austin mon portable dans les mains. Il part de Santa Marina et il t'embrasse.

Je souris, attendrie par son geste. Tout comme lui, Mahé et Josh m'ont aussi envoyée des messages, sans oublier mon beau-père et le silence radio de mon père.

— Pourquoi t'as mon téléphone au fait ? m'étonné-je avec le sourire.

— Je lisais tes messages, m'explique-t-il sans gêne.

Je roule des yeux, en lui dictant ma réponse. Il s'occupe de le rédiger sans rechigner, se contentant de m'apporter son aide.

— Tu peux t'en aller si tu veux, commencé-je en croisant mes mèches entre elles, soigneusement coincées entre mes doigts.

— Tu es pressée de te débarrasser de moi ? répond-il avec un sourire malicieux.

— Tu attendras que j'aille au bloc avant de partir ?

— Oui, et que ton copain arrive. Après je m'en vais, promis, sourit-il.

Je joue avec le bracelet en plastique autour de mon poignet en attendant la suite des événements. Une vingtaine de minutes plus tard, un brancardier m'installe sur un autre lit pour m'emmener avec lui. On arrive dans une salle de transfert, où Austin nous suit sans rien dire, tenant néanmoins fermement ma main dans la sienne. Mon esprit déjà plus qu'embrumé, je me m'attache à son contact telle une véritable bouée de sauvetage. Mes paupières sont lourdes, et ne demandent qu'une chose : se fermer sans lutter.

Mais je ne peux pas dormir, pas maintenant.

— C'est ici que vous nous quittez, indique-t-on à Austin.

C'est ici que vous nous quittez mademoiselle, m'informe-t-on gentiment.

Je prends une grande inspiration, et mon demi-frère ressert sa poigne. Il me rassure d'un regard, avant de me murmurer à l'oreille qu'il est là, et que tout ira bien.

Ma respiration semble bloquée, comme si je pouvais arrêter le temps par ce geste. Je garde sa main prisonnière de la mienne, visiblement incapable de me séparer d'elle.

— À tout à l'heure, essaie de rappeler à ton copain de m'envoyer un message pour me tenir au courant. Tu peux faire ça pour moi ? chuchote Austin d'une voix rassurante.

Voulez-vous qu'on appelle quelqu'un mademoiselle ? Qu'on tienne quelqu'un au courant ?

Je hoche la tête en lui souriant gentiment.

Je secoue la tête, incapable de sourire.

— Ça va le faire, tu vas voir, me rassure-t-il encore en caressant mes cheveux. 

Je fais oui de la tête, n'arrivant pas à dire le moindre mot. Il me détaille toujours avec ce sourire rassurant, alors je cherche dans ses yeux de l'inquiétude, de la peur. N'en trouve aucune trace, son sourire m'envahit gagnant du terrain sur ma propre angoisse. Il me regarde un moment avant de s'écarter, je dois être affreuse à voir avec les yeux cernés et les cheveux en bataille. Il m'embrasse quand même sur la joue, toujours avec un sourire.

Ça va aller, je te le promets. Tout va bien se passer, tu verras, tenté-je de la rassurer en passant mes doigts dans ses mèches blondes. 

J'aimerais lui en dire plus, mais je suis incapable de trouver les mots qu'il me manque. Je la détaille, mes lèvres serrées l'une contre l'autre. Je devrais sourire, la rassurer, mais je n'y arrive pas. Mon regard rempli d'une inquiétude folle semble envahir mon corps tout entier, ne ressentant que de la colère et de la peur. Aucune trace de joie, ou d'espoir, mon angoisse grandit, et gagne mon cœur fragile. Je la regarde un moment, comme pour mémoriser chaque détail qui la constitue. Même inconsciente, elle reste magnifique, les yeux clos et les cheveux blonds ordonnés autour d'elle. Je me penche et dépose un bisou tendre sur sa joue, essayant au possible de lui offrir un sourire.

— Combien de temps ça va durer ? demande Austin en s'adressant au médecin.

Dans combien de temps je vais la revoir ? questionné-je.

— D'ici deux heures, en comptant le temps de réveil qu'elle va prendre.

Je ne pourrai pas vous répondre mademoiselle. Ce genre d'intervention est aléatoire, ça peut durer trois heures comme huit. Tout dépend de la gravité et du temps de réveil qu'elle va prendre.

— Fais pas ta marmotte hein ? Tu ouvres vite les yeux et hop, tout le monde est content, rit-il.

Elle sera rapide, je le sais, assuré-je. Elle ne me ferait pas peur comme ça.

— Promis, assuré-je.

Ma voix résonne comme une certitude dans cette pièce immaculée de blanc.

Son sourire me rassure de nouveau, au milieu de cet endroit aux murs maculés d'un blanc assassin.

À tout à l'heure maman, murmuré-je.

— À plus tard Iliana, me chuchote-t-il.

Puis, il s'éloigne, ses pas résonnant entre ces murs.

Puis, je recule, me laissant tomber contre le mur. Un bruit de chute remplit la pièce, rythmé par mes sanglots.

Que va-t-il se passer maintenant ? Que vont-ils lui faire quand elle disparaîtra de ma vue, derrière ses grandes portes solides et parfaitement stériles ?

Qu'est-ce qu'il se passe maintenant ? Qu'est-ce qu'ils vont me faire alors que cet homme m'éloigne de mes repères en m'entraînant vers ce monde inconnu qui se cache derrière les portes battantes ?

Ils l'éloignent de moi, l'emportant dans un monde parallèle différent du mien, et ce lorsqu'elle a besoin de moi. Plus que jamais à cet instant.

Ils m'éloignent, m'enfermant dans un monde effrayant qui n'est pas le mien. Un monde que je ne veux pas découvrir. J'ai besoin d'elle, plus que jamais.

Qu'est-ce qu'ils vont lui faire maintenant ? demandé-je en refoulant ma panique.

— Qu'est-ce qu'ils vont me faire ? paniqué-je en l'implorant du regard.

— Ils vont bien s'occuper d'elle. Ils vont la soigner ma belle.

— Ils vont bien s'occuper de toi. Ils vont te soigner ma jolie.

Mais elle allait bien... sangloté-je.

— Mais je vais bien, m'exclamé-je les larmes aux yeux.

Chut... Tu n'as pas à avoir peur, ça va aller, m'assure-t-on.

— N'aie pas peur, tout ira bien. Ça sera fini en un rien de temps, sourit l'infirmière.

Est-ce qu'elle peut mourir ? demandé-je timidement.

— Est-ce que je peux mourir ? soufflé-je.

Ne pense pas à ça, tu t'inquiètes pour rien.

— Ça ne sert à rien de penser à ça maintenant, c'est du stress inutile.

Pourquoi aucun de ses mots ne me rassurent ? Pourquoi font-ils battre mon cœur plus vite encore ?

Pourquoi mes mots résonnent ? Mon cœur bat plus fort, je le sens. Chaque mot provenant de sa bouche accélère mon rythme cardiaque tout comme mes souvenirs torturent mon cerveau à cet instant.

Tu dois faire confiance aux médecins.

— Tu peux faire confiance aux médecins.

Tout est de leur faute.

Ils vont sauver ma mère.

Je ne peux pas, je ne suis plus  naïve, je refuse d'y croire encore...

Je dois le faire, pour elle, y croire plus que tout au monde.

Je passe les portes de l'enfer, il est trop tard pour revenir en arrière.

Vous devriez aller dans la salle d'attente, ça sera plus confortable.

— On va vous installer sur la table d'opération. Ça ne sera peut-être pas aussi confortable que votre lit, mais on va faire au mieux, m'indique-t-on.

Je me perds entre les vouvoiements et les tutoiements... Confondant toutes les personnes présentes.

Mon cœur implose lorsque je marche comme une automate, abandonnant ma mère seule à son sort, seule avec des personnes qu'elle ne connaît pas.

Mon cœur explose lorsqu'on me manipule comme une marionnette, abandonnée et seule devant tous ces inconnus qui me détaillent.

On m'installe dans une chambre à part, où je reste blottie dans un coin, beaucoup trop inquiète pour faire quoi que ce soit de plus.

On me cale sur cette table froide, un fin drap recouvrant mon corps effrayé et immobile, beaucoup trop angoissée pour faire autre chose.

— Tu es bien Iliana Midden et tu as bien 17 ans ? me demande-t-on.

Non, ce n'est pas moi, je dois rentrer chez moi ! Laissez-moi partir !

— Oui, articulé-je.

— Tu es là pour une ablation du matériel médical, c'est bien ça ?

Je hoche la tête faiblement, sentant mon sang quitter mes joues en une fraction de seconde.

— Hey... qu'est-ce qu'il y a ? murmure-t-on en se penchant dans ma direction.

Je regarde autour de moi, affolée par cette quantité de machines que je ne connais pas. Bon sang, ce n'est pas dans mes habitudes de paniquer ou d'avoir peur pour des choses aussi minimes que ça ! Pourtant mon souffle s'accélère et mes mains deviennent moites, sans parler de ma vue, brouillée par des larmes...

— Ce n'est rien, me calme-t-on en me tapotant les joues. Tu n'as pas à avoir peur, d'accord ? Ce sont les machines qui t'effraient ?

Je ne réponds pas, me décomposant devant tous ces bruits, ces odeurs, ces personnes que je ne connais pas. Un inconnu vient poser mes mains autre part que leur précédente position, blotties contre ma poitrine. Il pose ses doigts sur moi, collant des électrodes je supporte. Je perçois les instruments tinter puis mon cœur qui résonne dans la pièce.

— Tu vois ça ? C'est une machine qui nous indique si ton cœur bat normalement. Celle-là, c'est pour ta pression artérielle, dit-il en désignant le brassard du tensiomètre. Et enfin l'appareil que tu as au bout du doigt, c'est pour vérifier que tu ne manques pas d'oxygène. Toutes ses machines font beaucoup de bruit mais elles sont inoffensives. Elles ne te feront aucun mal, tu n'as pas à avoir peur.

On me pose une perfusion sans s'attarder sur les détails et on commence à me bourrer d'antalgiques. Je n'ai sincèrement jamais eu aussi peur de toute ma vie,  ni même senti mon cœur battre de cette manière. Si je pouvais partir en courant, je ferais certainement le sprint de ma vie.

— Bah alors qu'est-ce que vous lui avez fait à cette demoiselle ? Elle est toute pâle ! réplique le chirurgien avec un sourire franc.

Mademoiselle vous vous sentez bien ? Vous êtes très pâle.

— Un petit coup d'émotion avant de commencer, lui répond-on.

Rien, ce n'est rien. Je ne sais pas pourquoi je pleure, murmuré-je.

— Vous avez le droit d'avoir peur, mais ça va très bien se passer, me répète-t-on.

Je suis sûre que ça va aller.

— Injectez-lui le premier produit contre la douleur.

Mais qu'est-ce qu'ils me donnent depuis tout à l'heure si ce n'est pas des antalgiques ?

L'infirmière presse ses doigts contre mon poignet, prenant mon pouls.

Le médecin scrute l'écran et les courbes colorées indiquant ma panique grandissante.

— Mais qu'est-ce que vous lui avez dit enfin pour qu'elle soit effrayée comme ça, rit-il en enfilant une paire de gants.

Je fais non de la tête, sans vraiment savoir pourquoi. Un autre médecin s'approche de moi avec un masque. Déjà ? Non, je ne suis pas encore prête... Je ne veux pas qu'on m'endorme ! J'ai changé d'avis !

— Ecoute-moi attentivement, me tutoie l'anesthésiste. C'est de l'oxygène que tu vas respirer doucement. On va te donner les médicaments pour t'endormir en douceur. Tu vas penser à quelque chose de joyeux, à un moment heureux que tu as vécu avec des amis ou e, famille.

Maman...

— Un moment qui te fait sourire et que tu veux bien revivre encore, continue-t-il.

Je n'ai rien qui me vient en tête, là, tout de suite ! Evan, il faut que je pense à lui ou à la mer, les vagues, le surf...

— Tu veux bien le tenir toi-même ?

Ma main se referme sur le masque à oxygène, qu'il guide jusqu'à mon visage. Je prends une profonde inspiration comme on me l'ordonne.

N'angoisse pas, ça va aller.
Tu ne dois pas paniquer, tout va bien se passer.
Pense à ce que maman dirait.
Répète-le encore.

Le sable reste toujours blanc, murmuré-je dans une dernière lueur de lucidité.

Ma conscience se perd en route, ma main tombant sur le côté tout comme ma tête, maintenue avec délicatesse par la paume d'un médecin. Mes yeux s'ouvrent de nouveau, résistant aux médicaments qui paralysent mes veines et tétanisent mes muscles, luttant comme une folle contre les drogues, par manque de confiance. Je sais ce qu'ils ont fait à ma mère, je suis consciente de ce qu'ils pourraient me faire.

— Laisse-toi aller Iliana, me chuchote une voix familière.

Lutter devient presque douloureux, on encercle ma main en la caressant.

— Laisse-toi faire ma chérie, tu ne crains rien, je suis là.

Maman...

— Laisse-toi partir, je surveille. Ils ne te feront pas de mal.

Ils vont recommencer, je le sais...

— Ne t'inquiète pas ma puce, je suis là, personne ne te fera de mal.

Ma mère ou l'illusion que j'en ai s'incline pour m'embrasser la joue. Ses lèvres sont chaudes, tout comme son visage est coloré, quelques unes de ses mèches me chatouillent le visage. Alors je ressers sa main, ne souhaitant pas qu'elle m'abandonne à nouveau.

— N'aie plus peur Iliana, tu es en sécurité. Je te le promets.

Dans un dernier effort, mes lèvres dessinent un sourire triste. Le long de mes joues, quelques larmes dégringolent. Mes paupières se ferment, et des paumes me tournent avec douceur, j'arrête de lutter me laissant tomber dans la brume.

Ma main toujours accrochée solidement à celle de ma mère.
Protégée et aimée, je m'abandonne à l'inconscience.

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Hey ! Voici le deuxième chapitre du week-end !

Alors ? Quelles sont vos réactions ?

Personnellement c'est un chapitre que j'adore et j'ai pris beaucoup de plaisir en l'écrivant 😁

On en apprend un peu plus sur ce qu'il s'est passé avec sa mère, grâce au souvenir d'Iliana.

Un peu tordue sur les bords 😂

Est-ce que vous préférez :
- un chapitre le week-end et un la semaine ?
- ou alors plutôt comme en ce moment, tout le week-end ?

J'attends vos avis avec impatience !

Des bisous, Lina 😘

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