Chapitre 10

« Mais la mer, une fois qu'elle nous a jeté son sort, nous tient dans son filet pour toujours. »

Le sel colle sur mes lèvres, déposant un goût divin sur celles-ci. Mes cheveux blonds, décolorés par le soleil s'emmêlent contre mon visage, alors que je déchire la surface de l'eau.

Je suis libre, je suis moi-même. Je suis à ma place.

Je retiens ma respiration avant de rompre une nouvelle fois la gravité. L'ensemble du corps immergé, je profite du silence sous-marin avant de réaliser une brasse supplémentaire.

Chacun de mes mouvements est d'une légèreté paradisiaque, tout comme mes mèches, qui gravitent autour de mon corps. Mon leash me rappelle à l'ordre, me tirant vers la surface.

Avec un sourire radieux, je retiens ma respiration et me relève, refusant la stabilité offerte par ma planche. Au ralenti je m'élance, prenant ma première vague avec légèreté et passion.

Qu'est-ce que ça me manque...

Plus tard, un petit rire s'envole aussi haut que le ciel le permet. Un rire d'enfant, sincère qui s'entend de moins en moins et qui se perd au fil du temps.

Tu n'as pas à avoir peur Iliana, tu sais que je serai toujours là pour toi ma chérie.

Mais maman, parfois les gens partent dans le ciel, explique la petite fille blonde aux cheveux très longs. Assise en tailleur dans le sable, ses yeux bleus sondant ceux de sa maman en quête d'une réaction.

La jeune femme blonde aussi, mais aux traits un peu plus tendus passe sa main avec tendresse sur sa joue en calant toutes les mèches en bataille de sa fille.

Ma chérie, je suis là, et je le serai toujours. Quel âge as-tu ? Combien de doigts ?

La petite fillette réfléchit un instant avant de lever trois petits doigts.

Tu vois... tu es encore toute petite. Ces choses là ne se passent pas maintenant, elles se passent bien plus tard ne t'inquiète pas.

Dans combien de doigts ?

Beaucoup trop, dit sa maman mimant avec sa bouche, qu'elle lui mange les doigts l'un après l'autre.

La petite éclate de rire, en se débattant doucement.

Mais Alice elle dit que parfois les mamans elles montent au ciel et qu'elles ne reviennent plus jamais. Est-ce que c'est vrai ? demande l'enfant avec sérieux.

Alice ne dit que des bêtises, les mamans ne partent jamais vraiment. Elles restent pour toujours, ici, montre la jeune maman en déposant ses doigts sur la peau de sa fille, au-dessus de l'organe qui la fait vivre et aimer passionnément.

Dans mon cœur ?

Bien sûr ma chérie.

Elle dit aussi que c'est dangereux ce que toi tu fais, dans l'eau.

Dans la mer ?

Oui, elle dit qu'un jour tu ne reviendras pas, et j'ai peur.

Oh... ma chérie... Tu ne dois pas avoir peur de la mer. C'est le meilleur élément. Le mien tout comme le tien. C'est justement ça qui est merveilleux. A la fois, ça peut être magnifique et calme. Mais à d'autres moments, elle peut-être agitée de vagues et de courants dangereux. Mais la mer, une fois qu'elle nous a jeté son sort, nous tient dans son filet pour toujours. murmure-t-elle.

— La sable reste toujours blanc, répond l'enfant en souriant joliment.

Exactement. Tu dois t'en souvenir toute ta vie Iliana, peu importe ce qu'il se passe.

La petite fille touche son collier machinalement, un toc nerveux qu'elle gardera en elle pour toujours.

Iliana ! Viens jouer avec moi !

Elle regarde sa mère, cherchant son approbation.

Allez, va rejoindre ton frère.

Avant qu'elle ne se lève, les bords si parfaits de l'image se brouillent et deviennent confus. Avait-elle vraiment dit tout cela ? Etaient-ils vraiment sur une plage à ce moment-là ? Avec son frère aussi ?

Les détails du souvenir commencent à s'effacer lentement sous l'effet du temps. Même dans des moments aussi importants que ceux-là, la mémoire n'est jamais éternelle. Par rapport aux écrits qui restent toujours présents. Est-ce vraiment arrivé ou bien est-ce une histoire qu'on a dû lui rappeler ? Après toutes ces années, c'était la seule chose qui avait changé. La petite blonde avait grandi et obéissait maintenant aux lois de la mer. Mais sa plus grande peur n'était pas les hautes vagues qui avaient emporté sa mère. Sa plus grande crainte était de l'oublier.

֍

— Tu ne dors pas ? me chuchote Evan, le visage dans mon cou.

Son souffle chaud caresse mon oreille. Allongée tout contre lui, dans la position des cuillères, mon corps prend en quelque sorte la forme du sien.

— Non, je n'arrive pas.

— Mauvais rêve ?

— Beau souvenir plutôt, murmuré-je.

Il dépose un petit bisou sur ma joue.

— Tu veux en parler ?

— Non, il n'y a pas grand-chose à dire de toute façon.

— D'accord, chuchote-t-il.

Je me mets sur le dos, tirant la couette bien haut sur ma poitrine dénudée. Je passe les minutes suivantes à jouer avec mon collier, le même qu'il y a treize ans, lorsque je n'étais qu'une petite fille et que mon frère était toujours là, lorsque ma mère me rassurait encore, en me disant qu'elle serait toujours là pour moi. Je continue d'y croire, mais en voyant évidement les choses d'un autre œil.

— Je vais me chercher un verre d'eau, je reviens.

— Tu veux que j'y aille ?

— Non, c'est bon. Mais je veux bien que tu me passes mon tee-shirt par contre.

Je l'enfile à la hâte, ce dernier étant souvent porté pour dormir avec un short justement parce qu'il est tout déformé. Il m'arrive à la mi-cuisse et c'est très bien comme ça.

— Je reviens, dis-je de nouveau en passant la porte.

Le parquet du palier grince sous mes pieds lorsque je franchis la porte, la maison est parfaitement silencieuse, inanimée. J'asperge mon visage d'eau froide, comme pour me prouver que je ne rêve plus, que ce n'est qu'un souvenir enfoui dans ma mémoire. Je pose ma serviette sur le meuble et m'assois sur le bord du lavabo avec mon verre d'eau entre les mains.

Je m'étire la nuque en faisant craquer légèrement mes os, involontairement. Depuis que je suis tombée sur ces marches en acier et que j'ai entendu tous les os de ma cheville se briser, même sous l'emprise de l'alcool je me souviendrai de ce bruit toute ma vie. Depuis le moindre petit craquement m'est insupportable, même le bruit des doigts qu'on étire, ça me glace le sang. J'ai horreur de ça.

Je passe la majeure partie de ma « pause/insomnie » sur ce lavabo. Je triture ma cheville dans tous les sens sans arrêt, comme un besoin étrange de sentir ce « défaut » qui fait partie de mon corps depuis des mois. Je guette la montre pour pouvoir continuer de boire, toujours avec mon verre d'eau et je co...

— Mais qu'est-ce que tu fais Iliana ? m'apostrophe la voix de mon demi-frère.

— Je bois, ça ne se voit pas ? chuchoté-je.

— Alors c'est bon ? Vous avez bien couché ensemble ?

— Austin ! l'agressé-je avec violence.

— Chut, tu vas réveiller toute la maison ! s'énerve-t-il. Tu ne vas pas me faire croire que t es une Sainte, si ? 

— Je ne vais certainement pas parler de ça avec toi, et encore moins au milieu de la nuit, rétorqué-je.

— Tu n'es pas drôle ! Je suis certain que toi, Iliana Midden tu es tout sauf chaste.

Je rougis aussi rapidement que possible, parce que parler de ça avec Austin... c'est décidément trop bizarre.

— Elle rougit en plus la petite sainte-nitouche ! C'est con qu'on soit frère et sœur tous les deux, dans d'autres circonstances et à un autre moment, peut-être que...

— Arrête, tu me dégoûtes ! m'écrié-je.

— C'est de l'inceste de ton point de vue ? Parce qu'en soit on n'a aucun lien de sang, du coup ce n'est pas vraiment...

— Mais qu'est-ce que vous avez donc avec cette question à la fin ?! m'énervé-je.

— Vous vous êtes protégés au moins ? Parce que je ne veux pas que ma petite sœur soit enceinte à son âge ! dit-il en souriant.

— Stop ! Premièrement, je ne suis pas ta sœur, deuxièmement, je suis plus grande que toi, et troisièmement, ma vie privée ne te regarde absolument pas !

— Ta vie en générale peut-être un peu, mais c'est vrai que ta vie sexuelle pas trop, remarque-t-il.

— Austin, arrête. Je te jure que je...

— Tu es peut-être vraiment une sainte en réalité et parler de ça, je vois bien que ça te perturbe e...

— Oui, parler avec quelqu'un que je ne connais pas très bien de ma vie sexuelle me perturbe ! Qu'est-ce que tu crois ? D'autant plus que la personne en question a une vie sexuelle inexistante ! explosé-je.

Il s'apprête à répliquer, mais se tait, visiblement à court d'arguments. J'éclate de rire, rapidement suivie par lui. Pliés en deux, on dialogue avec des bruits assez étranges pendant un moment, alors que nos fous rires diminuent peu à peu.

— Une vraie garce, capitule-t-il en se tenant le ventre.

— Mais non., j'ai bien compris que tu m'adorais, ne fais pas semblant, répliqué-je en souriant.

— C'est juste que c'est tellement soudain, tout ça, mime-t-il.

— Le fait de découvrir une demi-sœur ? Je suis d'accord. Mets-toi à ma place, j'en ai deux pour le prix d'un ! dis-je en lui montrant mes doigts.

— Tu ne vas pas me dire que Célia t'embête quand même !

— Non, mais toi tu vaux des millions en terme de « je fais chier les gens ».

— On me le dit souvent, c'est bizarre ça, ironise-t-il.

Je calme mon rire, en continuant à boire sous le regard suspicieux d'Austin.

— Plus sérieusement, j'ai longuement parlé avec papa tout à l'heure, reprend-il.

— Devant tout le monde au resto j'imagine, y compris ta mère et Célia ?

— Non, juste tous les deux, me rassure-t-il.

— Il m'a encore critiquée c'est ça ? supposé-je en roulant des yeux.

— Pas spécialement. En réalité, c'est moi qui l'ai pris à part pour lui parler. Tout ce que tu as dit est vrai, je l'ai moi aussi remarqué. Et j'ai horreur de voir mon père comme ça avec toi alors que théoriquement, c'est plus ton père que le mien, avoue-t-il, gêné. Ce que je veux dire c'est qu'il n'y a aucune raison pour que notre père soit plus attentif envers moi et se comporte comme un père uniquement avec nous. Je trouve ça débile et tu ne mérites pas ça.

— Tu sais, j'ai l'habitude maintenant. Comme je l'ai déjà dit, j'ai passé treize ans sans lui alors quelques jours en plus ou en moins, ce n'est rien.

— Non Iliana, tu n'as absolument pas à lui trouver des excuses, il a tort. Il n'a absolument pas à se comporter comme ça, c'est tout.

Je contente de triturer mes doigts. Il a raison, mais ce n'est pas non plus son rôle de me parler de ça. C'est mon père qui doit réagir, pas lui qui doit lui rappeler qu'il a une fille. Malgré tout, ça me touche qu'il comprenne.

— Bref, il veut t'emmener demain matin. Même s'il ne le montre pas, tes mots l'ont touchés. Même s'il n'osera jamais te l'avouer, il sait que tu as raison dans un sens.

— Pour moi ca ne changera rien. Il est hors de question qu'il m'emmène demain, répliqué-je en croisant les bras. 

C'est beaucoup trop facile d'envoyer son fils m'avouer tout ça plutôt que de me le dire en face.

— Alors je t'emmènerai moi, conclut-il.

— Certainement pas, c'est loin, c'est tôt... et je vais me débrouiller. Je l'ai toujours fait alors je peux continuer une fois de plus.

— Ce n'est pas négociable. Je t'emmène demain à l'heure que tu veux, ce n'est pas un problème Iliana.

— Je... je sais pas trop quoi dire en fait, avoué-je simplement en baissant la tête.

— Je prends tous les mercis, dans n'importe quelle langue ! C'est tout ce qu'il le faut. Par contre va te coucher et arrête de boire comme ça, c'est flippant ! Tu as une grosse journée qui t'attend demain.

Il caresse délicatement mes cheveux avant de me pousser doucement vers ma chambre pour m'inciter à obéir. 

— Tu es sûr que tu veux m'emmener ? tenté-je une dernière fois.

— Mais oui, allez, va dormir Iliana.

— Bonne nuit, le salué-je avant de sortir de la salle de bain.

Je m'apprête à retourner dans mon lit, lorsque je reviens en arrière.

— Austin ? l'interpelé-je. 

— Quoi encore ?

— Il faut qu'on soit partis à 6h.

Il encaisse le coup avec une grimace.

— Bordel un samedi quoi... murmure-t-il.

— Quoi ?

— J'ai dit : pas de problème je serai là !

— J'ai cru entendre autre chose, souris-je face à son regard.

— Bon, laisse tomber, au dodo maintenant. C'est clair comme ça ?

— Oui, bonne nuit !

Je retourne dans le lit et retrouve instantanément la chaleur de la couette. Une chaleur savoureuse et presque protectrice d'une certaine manière. Evan s'est évidement endormi, son souffle et le bruit de sa respiration envahissant et contrôlant la pièce tout comme le silence. A peine glissée entre les draps, Evan passe ses bras autour de ma taille et m'attire à lui comme un aimant. Calée contre son torse, je m'endors bercée par son souffle sans penser à tout ce qui m'attend demain...

֍

— Je t'ai laissé mes clés sur le bureau, Célia et Carolina s'en vont dans moins d'une heure et mon père ne devrait pas tarder. Alors tu peux partir quand tu veux, expliqué-je à voix-basse.

— Tu es sûre que tu ne veux pas que je t'emmène ? demande-t-il à moitié endormi.

— Non c'est bon, Austin s'en occupe. Tu viens me chercher par contre ?

— Evidement, répond-il. Vous avez décidé quand qu'il t'emmènerait ?

— Hier soir, je l'ai croisé en allant chercher un verre d'eau, expliqué-je.

— Lorsque tu étais en culotte avec juste un tee-shirt ?

— Ce moment-là oui.

— Super, donc s'il t'a regardée partir il a v...

— Tu sais Evan, je ne vais pas me lancer dans des discussions pareilles à 5h30 du matin mais je vis avec Austin depuis plus de trois semaines. Alors entre voir mes jambes nues et voir ma tête le matin, je préfère largement qu'il aperçoive un bout de mes jambes. Malheureusement pour moi, c'est bel et bien ma tête qu'il voit au petit déjeuner.

— Mouais, grogne-t-il peu convaincu.

— Qu'est-ce que tu veux qu'il fasse de toute manière ? Personnellement, je m'en fiche. Mes jambes sont très jolies et s'il a envie de les regarder, il fait ce qu'il veut. En plus, je te rassure qu'il n'a jamais baissé les yeux.

Il baille en se frottant les yeux.

— J'y vais, rendors-toi, ça vaut mieux, chuchoté-je avant de déposer un baiser sur ses lèvres.

— Je suis sûr que ça va très bien se passer, ne t'inquiète pas pour ça.

— Je sais, affirmé-je en souriant.

Cette fois c'est lui qui m'embrasse avant de s'enrouler dans la couette étoilée. J'enfile mes Vans en refermant prudemment la porte derrière moi. Ça devrait faire l'affaire.

— Salut, annoncé-je en descendant les escaliers.

— Coucou, me lance Carolina en refermant un des sacs de voyage déposés à l'entrée.

— Salut miss, me répond Austin en me faisant la bise.

— Tu n'es pas encore habillé ? paniqué-je.

— J'y vais là. Promis, je me dépêche.

Je lui tire la langue en terminant de descendre les dernières marches. Puis, le bouscule involontairement d'un coup d'épaule et il m'assassine du regard.

— Iliana, ton copain dort encore ? me demande mon père.

— Oui, répliqué-je froidement.

— On n'a jamais vraiment parlé de règles pour toi et ton copain et j'aimerais que...

— Tu veux vraiment me parler de règles maintenant ? le coupé-je.

Il se contente de fermer son téléphone, et de ne surtout rien répondre.

— C'est bien ce qu'il me semblait, répliqué-je.

— Tu ne tiens certainement pas ce côté insolent de moi, déclare-t-il en essuyant l'écran sur son tee-shirt.

Si ma mâchoire pouvait se décrocher de mon visage, elle serait sûrement déjà au sol.

— Non, tu as raison, mais ce n'est pas de l'insolence. C'est un mécanisme de défense que j'ai développé involontairement pour éviter de fuir les problèmes comme toi tu le fais si bien. Et de pour ne pas reproduire les mêmes erreurs que mon soi-disant père, lâché-je à toute vitesse.

Il se contente de me regarder dans les yeux. Je reste abasourdie face à son manque de réaction.

— Un bisou ? me demande une petite voix fatiguée dans mon dos.

L'interruption de ma demi-sœur suffit à calmer mes nerfs. C'est tellement inhabituel venant d'elle, qu'il ne faut en aucun cas gâcher ça.

— D'accord, souris-je en me penchant vers elle.

Elle en dépose un rapidement sur la joue, et sourit à son tour.

— Les avions ils montent très haut et ça dure très longtemps le vol. C'est encore plus haut que les buildings, ajoute-t-elle.

Faire des voyages doit être tellement difficile pour elle. Ecouter son CD sur la mer en boucle pour ne pas perdre le cap, dessiner à longueur de temps pour éviter de trop penser à ce qui l'entoure est aussi de rigueur.

— Certainement, répliqué-je.

— Un building c'est très haut parce qu'il y a beaucoup d'étages et de personnes dedans. Même que les voitures sont minuscules parce que les buildings sont très hauts mais pas aussi hauts que les avions.

— Ah oui ?

— Les avions c'est très, très long pour le voyage.

— J'ai quelque chose pour toi, pour faire passer le temps justement, la coupé-je.

— Un cadeau ? me demande-t-elle.

— Oui, un cadeau.

— Pour moi ?

— Pour toi, souris-je.

— Mais ce n'est pas encore mon anniversaire et ce n'est pas Noël non plus. Alors pourquoi j'aurais un cadeau si ce n'est ni Noël ni mon anniversaire ?

Elle fronce les sourcils, et je la vois déjà cogiter à toute vitesse.

— Parce que j'avais envie de te faire plaisir.

Je lui tend le livre ramené par Mahé de New York, le déposant entre ses petites mains.

— C'est un livre de New York ? demande-t-elle en me regardant des étoiles plein les yeux.

— Oui, et regarde, il y a plein de feuilles à la fin, tu vas pouvoir dessiner toutes les rues. Regarde, par exemple là c'est...

Times Square. Et sur celle-ci c'est Wall Street.

Elle sourit, visiblement ravie. Même si elle ne dit pas merci, je sais qu'elle est plus que contente de ce cadeau.

— Qu'est-ce que c'est que ce gros livre ? demande sa mère en écarquillant les yeux.

— C'est un cadeau, un cadeau qu'Iliana m'a fait pour me faire plaisir. Et son cadeau c'est un livre, un gros livre avec plein de rues de New York pour que je les dessine avec du noir et du jaune pour les taxis, dit-elle toute excitée.

— Du calme Célia. Tu veux vraiment le prendre ? l'interrompt-elle.

— Je vais pouvoir dessiner dans l'avion les rues de New York comme Wall...

— Mon dieu, il va vraiment falloir que je porte ce dictionnaire ?

Mais de rien, je t'en prie. Moi aussi ça me fait plaisir de lui offrir des cadeaux.

— C'est toi qui lui a acheté ça ma puce ? me demande-t-elle.

J'ai horreur qu'elle m'appelle comme ça. C'est vraiment au-dessus de mes forces, je ne le supporte pas.

— Oui, une amie à moi y est allée pendant les vacances et j'ai pensé que...

— Tu as très bien fait, c'est très gentil de ta part, conclut-elle.

Je hoche la tête en me relevant, regardant rapidement Célia, déjà plongée dans son livre en train de déplier les cartes routières et les photos...

Je me laisse tomber sur le canapé en regardant ma montre. On doit absolument partir dans moins de 15 minutes vu la route qu'on a...

— Tu ne veux pas manger quelque chose Iliana ? me demande mon père.

Je me redresse en le fusillant du regard. Il est sérieux ?

— Je ne peux pas, je dois être à jeun pour l'opération, soufflé-je.

— Tu ne peux pas boire non plus ?

— Non, répliqué-je agacée.

— Et à quelle heure est ton opération ? demande-t-il, visiblement perdu.

— À 11h.

Austin descend, enfin prêt. Instantanément, je le rejoins dans l'entrée, munie de mon sac à dos et prête à partir.

— Je serai arrivé normalement, continue mon père. Tu veux bien m'appeler lorsque tu seras dans ta chambre, une fois bien réveillée ?

Je ne sais pas ce qui m'énerve le plus, entre le fait que ça soit moi qui doive lui téléphoner ou le fait qu'il joue au père inquiet qu'il n'est pas. Mes poings se serrent l'un contre l'autre.

— Austin t'enverra des nouvelles, avancé-je.

— J'aimerais t'entendre, toi, ajoute-t-il.

— Austin t'enverra des nouvelles c'est déjà suffisant, je maintiens avec fermeté.

— Iliana...

— C'est tout ce qui t'importe, alors tu auras de mes nouvelles via ton fils, qui te confirmera que je suis bien vivante.

— Ne le prend pas comme ça s'il te plaît, commence-t-il. Et ne dis pas des choses pareilles Iliana, tout va très bien se passer.

— Je sais, je n'ai pas besoin que tu me le dises pour que ça me rassure, d'accord ? Il t'enverra des nouvelles, point final. Je ne te téléphonerai pas, fais-toi une raison, ordonné-je, à présent furieuse.

Austin pose sa main dans mon dos en me poussant doucement vers la sortie, comme pour essayer de mettre fin à la discussion.

— Si j'avais pu être avec toi tu sais bien que je l'aurais été, insiste mon père.

C'est la parole de trop, je vais péter les plombs si je reste une minute de plus face à lui.

— Oui, comme depuis treize ans. Tout se passera bien, et si jamais ce n'est pas le cas, tu peux considérer que je suis morte en étant fâchée contre toi.

Mes mots me brûlent les lèvres, leur cruauté étant aussi vive qu'un puissant poison. Une vague de tristesse passe dans le regard de mon père, qui baisse la tête. Mon cœur se serre contre ma poitrine alors que je commence à regretter d'avoir ouvert la bouche.

Je suis froide et insensible lorsque je lui parle. Je suis arrogante et insolente dès qu'il s'agit de lui répondre, et ça me désole. Alors je tourne pourtant les talons avec une seule pensée.

Je n'aime pas la petite peste derrière laquelle je me cache pour éviter de montrer que son absence m'a blessée, détruite, marquée de cicatrices indestructibles, même face à mon plus grand ennemi.
Le temps.

֍

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Hey ! Salut à tous !
Comme chaque week-end, un nouveau chapitre !

Comment a été votre semaine ?

On retrouve une petite Iliana plutôt froide et bien en colère...

En même temps vu le père qu'elle a...

Heureusement que d'autres sont là.

Comme Austin 😘

J'au hâte de vous partager le prochain chapitre. Je veux pas spoiler l'affaire, mais quelques réponses vont apparaître 😎

Qu'avez-vous pensé de ce chapitre ?

A suivre... 😏😈

Des bisous, Lina 😘

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