1.

Point de vue de Kayla

2 ans après le prologue...

Je me réveille en sursaut. Je me tiens la poitrine en respirant lourdement. J'essaie de me calmer. Il ne faudrait pas que je réveille Calum à cause d'un cauchemar.

-Hey, tout va bien?

Je souffle et tourne la tête vers lui.

-Je t'ai réveillé? Désolée.

-Tu n'as pas à t'excuser. Qu'est-ce qu'il y a? Ça va?

Je hoche la tête.

-J'ai juste fait un cauchemar. C'est tout. Rien de grave.

-Tu veux en parler?

Je souris, contente du fait qu'il se soucie de moi. Je m'abaisse vers lui et l'embrasse légèrement avant de m'étendre sur le dos.

-Nan, c'est bon. De toute façon, je m'en souviens même pas. Ça devait être un de ses rêves où on a la sensation de tomber alors que finalement non. Lui dis-je.

-Si tu le dis. Viens vers moi un peu.

Je pouffe et pose ma tête sur son torse pendant qu'il pose une main sur ma hanche. Cette proximité me rassure suffisamment pour m'endormir rapidement.

Au petit matin, je me réveille la première. Comme d'habitude. Je me hisse hors du lit et me prépare pour la journée. Pendant que je me coiffe, je consulte mon horaire de la journée. Aujourd'hui, j'enseigne durant deux périodes. Une le matin et l'autre l'après-midi. Je profiterai de mon temps libre pour régler certaines modalités au sein de la meute.

Calum se réveille à son tour et s'approprie la salle de bain. Lui aussi doit partir travailler. J'en profite pour préparer le petit déjeuner. Des œufs avec des tranches de bacon. Je sens rapidement des bras m'entourer la taille.

-Va plutôt placer la table, toi. Lui dis-je.

-Pourquoi? Je suis bien, là. Dit-il en embrassant mon cou.

-Cal... On doit faire vite...

-Je sais, je sais.

-J'y pense, tu connais ton texte?

-Pas complètement, mais ça avance! La première de la pièce n'est que dans deux mois... J'ai encore pleinement le temps! En ce moment, nous sommes toujours en période de lecture.

Je hoche la tête, tout de même suspicieuse. Calum travaille au sein d'une troupe de théâtre et bien qu'il aime ça, il a tendance à dévaloriser l'importance réelle de la chose. En tout cas, j'espère qu'il se reprendra.

-Oh, au fait, j'oubliais! Mes parents nous invitent chez eux le week-end prochain pour un petit brunch familial. M'informe-t-il avant d'aller placer la table.

-Le week-end prochain, tu dis? Ça va être serré, un peu... Il y a Harriet qui doit se transformer pour la première fois samedi. Je dois être là pour bien encadrer son expérience.

-Ça devrait prendre combien de temps?

-Aucune idée. Chez les enfants, une première transformation peut durer entre quelques minutes et plusieurs heures. On fera ça au petit matin le samedi.

-D'accord. Il faudra juste espérer arriver dans les temps.

-Non, je sais ce qu'on peut faire. Toi, tu te rends chez tes parents sans moi et tu leur diras que j'aurai un peu de retard. On ne les fait pas attendre comme ça.

Je sers les assiettes et nous mangeons avant de poursuivre notre préparation. C'est Calum qui sort le premier en me souhaitant une bonne journée tandis que je cherche encore ma paperasse de prof. Par la suite, je quitte à mon tour et me rend au lycée où j'enseigne. J'y travaille que depuis deux ans. Pour le moment, j'aime bien ce que je fais. On m'a toujours répété que ce sont les cinq premières années qui sont difficiles alors si les trois autres restantes se passent aussi bien, le reste devrait bien se dérouler.

J'arrive dans ma classe et jette mon café avant de m'installer à mon bureau, devant la classe. Les portes ne sont pas encore ouvertes, alors le lycée est encore silencieux. J'en profite pour placer mes affaires et allumer l'ordinateur pour diffuser la matière à enseigner ce matin. Bien vite, les cloches sonnent et les élèves commencent à entrer dans le bâtiment. Ça s'entend. Je vérifie que le tableau interactif fonctionne. Lorsque tout est en place, j'ouvre la porte de la classe et les premiers élèves rentrent.

Une fois que c'est la fin du cours, j'attends que tous les élèves soient sortis avant de sortir ma paperasse de la meute. Je rédige notamment l'attestation de première transformation : ce papier sera signé par les parents du louveteau concerné et par celui-ci. Il ne me reste qu'à le faire acheminer au conseil pour qu'ils puissent y apposer le sceau, rendant la chose officielle. Je reçois un appel sur mon portable. C'est l'Alpha des coyotes, Auliame.

"Allo?"

"Salut Kayla, ça va?"

"Oui, bien sûr. Toi?"

"Oui, évidemment."

"Super, tu appelles pour l'accord, c'est ça?"

Il confirme. Tous les ans, il faut qu'on renouvelle notre alliance. Depuis la période de la guerre contre Valère, nous tenons à garder une trace matérielle de notre coalition. Nos deux meutes se portent bien, tout le monde s'entend.

"Donc, on se dit toujours jeudi soir pour la signature, c'est ça?"

"Oui, c'est parfait. Je vais informer mon conseil pour qu'il rencontre le tien."

"Moi aussi. Ils discuteront des modalités de l'accord ensemble. Il y a quelque chose que tu veux changer?"

"De mon côté, pas vraiment. Ma meute est assez contente avec ce que nous avons."

"Super! On se voit jeudi dans ce cas."

"À jeudi."

Je raccroche et envoie un message au conseil. Ensuite, je contacte Alistair pour lui rappeler. Celui-ci me téléphone et je hausse un sourcil. Il n'a pas compris quelque chose?

"Ali?" Demandais-je dès que j'avais décroché.

"Salut! Dis, on court toujours ce soir?"

Je souffle.

"Bien sûr, tu peux emmener Éléa aussi, je viens avec Cal."

"Ouais, elle ne peut pas ce soir. Je t'expliquerai là-bas. Si vous voulez, vous pouvez même passer à la maison après la course. Y'a Quinn qui doit passer de toute façon."

"Je lui en parlerai, mais à mon avis, il ne devrait pas refuser! Moi, je viens dans tous les cas."

"Super! Donc à tout à l'heure!"

"À plus tard, Ali!"

Je raccroche et termine de remplir des papiers pour la meute avant de sortir pour manger. Au niveau des autres professeurs, je m'entends bien avec eux. Malheureusement, l'écart entre les générations est assez marqué alors je ne suis pas très proche d'aucun de mes collègues. Je profite donc de ma sortie pour aller porter les papiers que j'ai rédigés au conseil. Ils vérifient que tous les détails sont là avant d'apposer leur sceau. Je suis en train de partir quand Émery m'interpelle. 

-Oui? 

-Tu devras bientôt passer chez Mylène. Ça va faire six mois.

-Oh, c'est vrai! Elle est disponible quand? 

-Laisse-moi vérifier... Elle est libre mardi prochain à 10 heures. Ça te va?

-Oui, ça marche! Merci! Faut que je file, j'ai bientôt un cours à donner!

-Parfait, on se revoit jeudi.

Je sors de chez lui et retourne au lycée pour donner ma deuxième leçon du jour. Je fais sortir deux garçons qui n'arrêtent pas de parler au milieu du cours. Ce n'est pas vrai que je vais être dérangée. À la fin de celui-ci, je réponds à la question d'une des premières de classe de ce groupe concernant le prochain devoir et range mes affaires pour quitter le lycée et rentrer chez moi. En attendant que Calum rentre, je prépare le prochain examen, qui aura lieu dans deux semaines. J'en suis à la quinzième question quand je l'entends enfin rentrer. 

-Salut mon cœur, tu es prête?

-Presque!

-Super, je me prépare et je te rejoins. 

Je hoche la tête même en sachant qu'il ne me voit pas et je termine de rédiger ma question. Je sauvegarde le document et le retrouve en train de déposer ses affaires. Il relève la tête vers moi et viens à ma rencontre pour m'embrasser. Seulement, ça n'arrive pas parce que j'éclate de rire.

-Qu'est-ce qu'il y a de drôle? Me demande-t-il. 

-Tu es certain de ne pas avoir oublié quelque chose? Demandais-je en flattant mon menton.

Il apporte sa main à son visage et comprend. Il a oublié de retirer la fausse barbe du personnage qu'il joue. 

-Alors je me suis promené en ville avec ce truc... Laisse-moi encore deux mi... AÏE!

Je rigole de plus belle. Je lui ai arraché la fausse barbe d'un seul coup. Pour un effet de réalisme, celle-ci était fixée sur son visage à l'aide d'une colle spéciale. Il frotte les deux côtés de son visage avec ses mains. Je lance la barbe sur le lit et me mets sur la pointe des pieds pour poser un baiser sur son nez. 

-Tu ne m'en veux pas, j'espère? Demandais-je en lui faisant les yeux doux.

Il râle.

-Non, mais une chose est sûre, tu seras ma fin.

-Mieux vaut moi qu'une autre, pas vrai? 

Il fait mine de douter et je suis momentanément outrée. Il me prend dans ses bras et embrasse le sommet de ma tête.

-Bon, allez, faut qu'on y aille. Ali doit nous attendre. 

Je hoche la tête et nous quittons la maison après avoir verrouillé la maison. Nous nous dirigeons vers la forêt, à notre point de rencontre habituel. Alistair y est, assis sur une roche, dans sa forme de loup. Ses habits sont posés à côté d'un arbre. En nous voyant, il grogne. On l'a fait attendre, il n'y a pas de doute. 

Calum et moi nous déshabillons rapidement dans le but de nous transformer aussi.

-Mais c'est pas trop tôt! Vous étiez en train de baiser ou quoi?

-Je ne baise pas avec Kayla, je lui fais l'amour. Réplique Calum.

Je grogne. Il comprend et se tait. C'est un des avantages d'être une alpha : mon autorité est respectée de tous. Qu'on le veuille ou non.   

-Non, on ne batifolait pas. Désolée, Ali. Alors, on la fait, cette course? 

Les garçons opinent et presqu'aussitôt, je prends la tête. Je commence peut-être à prendre de l'âge, mais je suis toujours aussi rapide qu'avant. De toute façon, je n'ai que 24 ans, j'en ai pour encore plusieurs années avant de commencer à m'affaiblir de ce côté-là. 

Pendant que je cours, je tourne la tête pour voir où en sont les garçons. Alistair est directement derrière moi, comme d'habitude. Calum, lui, se trouve plus loin, ce qui est normal. Même si ses capacités peuvent se doubler quand je suis là, il reste un loup transformé. Par conséquent, il doit constamment redoubler d'efforts pour atteindre notre niveau. Il y arrive, mais quelques fois, il se fait uniquement plaisir et va à son rythme, comme c'est le cas présentement. Je finis par m'arrêter, pas le moins du monde épuisée, mais pour les attendre. 

-Franchement, les garçons. C'est beaucoup trop facile.

-T'as juste à arrêter de gagner tout le temps et là on verra. Réplique Alistair.

-Dis plutôt que le fait que tu perdes face à moi t'enrage toujours autant.

Voyant qu'il ne répond pas, je jubile intérieurement.

-Bon, on y retourne? Faudrait pas faire attendre Éléa. Leur dis-je.

-Oui, allons-y. 

Nous retournons là où nous avons laissé nos vêtements et redevenons tous humains. Nous prenons quelques minutes le temps de reprendre suffisamment de forces pour nous rhabiller. 

-Au fait, qu'est-ce que tu voulais nous dire? Demandais-je à Alistair.

Celui-ci sourit. Je le sens mal.

-Tu devras attendre d'être à table. C'est une surprise.

-Mais non! Tu sais à quel point je déteste ça! 

-Crois-moi, tu vas adorer. Mais pas tout de suite.

Je râle, mécontente. Nous nous dirigeons vers la maison qu'il partage avec Éléa. Ils ont emménagé ensemble officiellement quand ils ont fini l'université, à peu près durant la même période que Calum et moi. Il faut dire que du côté des finances, notre meute se débrouille assez bien pour offrir aux membres leur propre maison. Dans notre cas, vivre en compagnie d'autres personnes dans un immeuble à appartements ou dans un condo pourrait être dangereux pour plusieurs raisons : notamment celle qu'on pourrait découvrir ce que nous sommes. 

Lorsque nous sommes chez eux, Éléa nous accueille en nous faisant la bise et en nous invitant à rentrer. Je sens déjà qu'il y a quelque chose de différent, mais je n'arrive pas à mettre le doigt sur ce que c'est. Quinn nous rejoint rapidement, s'excusant pour son retard. Nous nous installons à table. Pendant le repas, nous discutons de plusieurs sujets en profitant de ce qu'a préparé Éléa. Nous terminons le dessert quand Alistair nous demande le silence.

-Si nous vous avons fait venir ce soir, c'est pour vous annoncer une grande nouvelle. Vous serez les premiers mis au courant.

-Bah ça suffit, arrête de nous faire attendre! Crache le morceau! S'impatiente Quinn.

Je lui jette un regard. Apparemment, je ne suis pas la seule qu'Alistair s'est permis de tourmenter. En le regardant de nouveau, je le vois en train de sourire à Éléa qui fait la même chose de son côté. Sincèrement, moi aussi je commence à m'impatienter.

-Alors... OK, je suis désolé, mais putain que c'est marrant de vous voir tous pendus à mes lèvres...

-ALI! Crions-nous tous en cœur. 

-D'accord! D'accord! Comme je le disais...

-Je suis enceinte. Révèle Éléa d'une traite.

Je tourne précipitamment la tête vers elle.

-QUOI? Répétais-je avec les autres.

-Mais Élé! On avait convenus que c'était moi qui leur dirais! Se plaint Alistair.

-Tu as pris trop de temps mon chéri. Je suis désolée, mais même moi ça me saoulait. 

-Attends, attends... L'autre imbécile va vraiment avoir un enfant? C'est ça que tu nous dis, là? Demande Quinn.

-Merci de douter de mes capacités de père... Tu sauras que je suis très doué avec les enfants! 

-Oui, pour leur faire faire des conneries. 

Il souffle puis tourne sa tête vers moi.

-Et toi? Qu'est-ce que tu en dis? 

-Ce que j'en dis? Franchement, mes félicitations pour vous deux! C'est super! J'espère que c'est moi la marraine, hein?

-Euh...

Et puis, une nouvelle pensée me vient en tête. Éléa n'est pas une louve. C'est une coyote.

-Mais j'y pense... Ça veut dire que ce petit sera un hybride! 

-Un hybride? C'est faisable ça? Demande Calum.

-Mais oui, gros idiot. Tu es devenu un loup-garou et c'est vraiment le genre de chose qui peut te surprendre? 

-Ouais bon, d'accord... Mais qu'est-ce que ça veut dire mis à part le fait qu'il sera moitié-moitié? 

-Le bébé devra faire partie d'une de nos deux meutes. Il va falloir trancher. Il faut en parler au conseil. Éléa, tu viendras avec Ali à notre réunion jeudi. Ton conseil y sera aussi, pour renouveler l'alliance. On abordera la question à ce moment-là. 

-Entendu.

Et maintenant, un nouveau stress vient de se rajouter. L'arrivée d'un hybride, ce n'est pas rien. 

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Et voilà! Premier chapitre! J'espère qu'il vous a plu! :)