15.
Point de vue d'Éléa
Je suis tellement inconfortable. Mes chevilles sont attachées ensemble par une chaîne métallique reliée à un tuyau alors que mes poignets sont menottés à un tuyau un peu au-dessus de ma tête. Je gigote en raison de l'inconfort, parce que je sais que je n'ai aucune façon de me défaire de là sans me mettre à risque.
Je ne sais pas depuis combien de temps je suis ici. La dernière chose dont je me souviens, c'est d'avoir été à la maison, où je passais l'aspirateur dans le salon. J'étais seule et j'attendais qu'Alistair rentre. Ensuite, je me réveille ici. Entièrement seule et livrée à moi-même. Dire que je ne comprenais rien ne s'approche même pas du sentiment que j'ai éprouvé en découvrant cet endroit.
En plus, si je n'avais pas été enceinte, je sais que j'aurais pu facilement m'enfuir. Mais comme je ne veux pas prendre le risque de faire du mal à mon bébé en me transformant ou en utilisant ma force, je me contente d'essayer de trouver une position moyennement confortable. J'ai un peu peur, mais j'essaie tout de même de garder mon sang-froid. Ce n'est certainement pas le moment de céder à la panique.
Je finis par arrêter de bouger et observe les lieux pour essayer de trouver quelque chose qui puisse m'aider à me sortir d'ici. Seulement, il n'y a rien dans cette pièce. Non seulement il n'y a aucune fenêtre, mais à l'exception de l'ampoule et de la seule porte, la pièce ne comprend que de la plomberie. Je soupire. Je suis réellement prise au piège. Mes ravisseurs ont clairement pensé à tout, à croire que ma détention était prévue depuis un bail.
La porte finit par s'ouvrir au bout d'un moment et je mets quelques instants à m'habituer à cette lumière pour enfin distinguer la personne qui vient de faire son entrée. C'est un homme. Je ne l'ai jamais vu, mais je vois qu'il m'apporte un plateau de nourriture, ainsi qu'un verre d'eau en plastique. De ce que je vois, rien de ce qu'il porte ne peut m'aider à l'assommer, ou même à me délivrer. À l'exception de la nourriture, je vois que tout ce qu'il apporte est en plastique. Il s'assied devant moi.
-Je t'apporte à manger.
-Super, et je fais comment? Je te rappelle que je suis attachée.
-Je vais te nourrir. Et voyant ta condition, tu serais vraiment très mal disposée pour refuser.
Je capitule. Il a raison. Je ne sais pas comment tout ça va se terminer, mais tant et aussi longtemps que je vais bien, je dois m'assurer que les choses demeurent ainsi. Et puis, même si je ne l'avouerai pas à voix haute, je meurs de faim. Il me fait donc manger ce repas et boire le verre d'eau.
-Merci. Lui dis-je à contrecœur.
Il ne répond pas et quitte la pièce en refermant la porte. Je me retrouve une fois de plus seule. Une certaine période de temps que je n'arrive pas à estimer défile jusqu'à ce que la porte ouvre de nouveau. Cette fois, je reconnais sans problème la personne qui vient d'entrer.
-Bonjour, Valère. Que me vaut cet honneur? Demandais-je ironiquement.
-Bonjour, Éléa.
Il s'approche de moi de plus en plus, suivi par deux hommes qui referment la porte.
-Détachez-lui les poignets.
Ils le font et je me les masse tour à tour en le regardant d'un œil mauvais. La circulation sanguine peut enfin reprendre son cours dans mes bras.
-Qu'est-ce que je fais ici? Où suis-je?
-Ma chère, je ne vais certainement pas te dire où tu te trouves. Même si tu n'as aucun moyen de communiquer avec l'extérieur, il est plus sûr que je ne te dise rien.
Je respire lourdement. Il m'énerve. Ce traître.
-J'ai envie de pisser, vous savez. Leur dis-je.
-Très bien. Jeffrey va t'escorter aux toilettes. Mais je te préviens tout de suite. Tu tentes quelque chose, ça va mal tourner pour toi.
-Vous oseriez faire du mal à une femme enceinte?
-Nous n'aimerions pas en arriver là, mais si c'est nécessaire, nous le ferons.
Je souffle et hoche la tête. C'est déjà ça, qu'ils me permettent de me rendre aux toilettes. Je ne vais rien faire. Du moins... Pas encore.
On me détache les pieds et l'un des hommes, sûrement le dénommé Jeffrey, m'aide à me lever avant de m'escorter aux toilettes en me tenant l'avant-bras. J'entre finalement dans la dénommée pièce avec lui.
-Écoute, ça me dérange pas que tu sois ici avec moi, mais aurais-tu l'obligeance de te retourner pendant que je fais ma petite affaire? Demandais-je.
Sans broncher, il cède à ma demande et se retourne. J'en profite pour m'asseoir sur la cuvette et j'en profite pour regarder la pièce. Cette pièce est assez petite et la fenêtre est trop petite pour qu'une personne puisse passer au travers. Je vois des brosses à dents et une cabine de douche, mais rien de plus. Encore une fois, rien que je puisse emporter pour aider mon évasion. Super.
Une fois que j'ai terminé, je m'essuie rapidement et me lave les mains. Je rince mon visage et je brosse rapidement mes cheveux avec mes doigts. Ensuite, je décide de me brosser les dents, toujours à l'aide d'un doigt. Ce n'est pas très efficace, mais ça fera l'affaire.
-C'est terminé, maintenant?
-Oui.
Jeffrey attrape de nouveau mon avant-bras et me tire avec lui pour me ramener dans cette pièce. On me rattache les pieds immédiatement. Ma liberté de mouvement n'aura été que très courte.
-Maintenant, tu veux bien me dire ce que je fais ici? Tant qu'à avoir été invitée contre mon gré, j'aimerais au moins connaître la raison de ma présence.
Valère sourit et s'accroupit devant moi.
-Tu te poses encore la question? Tu ne sais vraiment pas ce que tu fais ici? Me demande-t-il.
-Je me doute bien de la raison, c'est à cause de l'attaque que tu prévois. Mais pourquoi moi?
Il pouffe.
-Pourquoi? Parce que tu es une personne stratégique pour les deux meutes. Je fais d'une pierre deux coups pour leur mettre de la pression.
-En quoi je suis stratégique, exactement?
-Tu ne piges vraiment rien, hein?
-Tes explications sont loin de ce que je qualifierais de "clair".
Il secoue la tête avant de reporter son regard sur moi.
-Tu fais partie de mon ancienne meute et ton âme sœur est le bêta de la meute des loups. Tu es donc liée à ces deux meutes. En plus, tu es enceinte, ce qui fait de toi un membre vulnérable qui n'est aucunement en mesure de se défendre et qui ne va rien tenter en matière d'évasion. C'est donc inquiétant pour les deux côtés parce que je pourrais faire quelque chose qu'ils ne seront pas en mesure d'arrêter... Et toi non plus.
-Tu comptes me faire du mal?
-Si tu te tiens tranquille, non. Et puis, tu m'es plus utile vivante que morte, on ne va pas oublier ce point.
-Oh, mais que c'est généreux. Ironisais-je.
D'un seul coup, ma tête part sur le côté. La joue me brûle, mais je retourne de nouveau ma tête vers Valère.
-Par contre, une gifle ne te fera pas plus mal que ça, une fois de temps en temps. Si tu te montres insolente, tu sais à quoi t'attendre. N'oublie pas que ma patience a des limites. Tu sais très bien ce que je suis en mesure de faire quand je suis dans une colère noire.
Je ne réponds pas et me contente de le fixer. Lorsqu'il était Alpha... Oui, je sais ce qu'il peut faire. D'un signe de tête, on menotte de nouveau mes poignets à un tuyau, mais cette fois, c'est un peu plus confortable puisque mes mains ne sont pas au dessus de ma tête. Valère s'éloigne de quelques pas.
-Je vais t'expliquer comment se dérouleront tes journées à partir de maintenant. Tu auras trois repas par jour et un maximum de cinq pauses toilettes, en raison de ta condition. Tu n'as pas le droit de sortir d'ici et encore moins de tenter de contacter l'extérieur ou de t'enfuir. Sinon, il y aura des représailles.
-OK... Et qu'est-ce qu'il en est de l'hygiène corporelle? Je peux bien me laver, mais je ne vais tout de même pas garder ces vêtements.
-On te rapportera ce qu'il te faut. Si tu penses que nous avons envie de gérer une femme enceinte malade, tu te trompes.
Ils commencent à s'éloigner pour quitter la pièce, mais je les interpelle.
-Qu'est-ce vous comptez faire de moi? Et surtout, quand vous allez perdre, comment les autres pourront-ils me retrouver?
Il rigole sinistrement.
-Comme si c'était près d'arriver. Tes amis n'ont aucune chance.
Sans rajouter quoi que ce soit, il quitte la pièce avec ses acolytes qui referment la porte. Je soupire. Je ferme les yeux, essayant de créer un lien avec Alistair. Je le sens super inquiet et surtout, en colère. Je sais qu'il a tendance à s'énerver quand il perd les moyens. Je me concentre en commençant par lui envoyer des ondes rassurantes. Si je veux tenter une communication, ne serait-ce que très courte, avec lui, il faut que nous soyons littéralement sur la même longueur d'onde. C'est d'ailleurs pour cette raison que ce genre d'échange n'est que très rare : déjà, ce mode de communication n'est utilisé que dans des cas d'urgence. Si on prend en compte ce fait, l'une des deux personnes sera déjà moins prompte à recevoir le message. Il faut donc que je le calme en lui faisant comprendre que je vais bien, même si je ne peux pas encore lui parler.
Je ne me presse pas et sens graduellement qu'il finit par se calmer. Quand je le sens assez détendu, je me concentre et essaie de voir s'il m'entend.
Alistair? Est-ce que tu m'entends?
N'ayant aucune réponse, je ne capitule pas. Je dois réessayer. Je le ferai autant de fois qu'il le faut. Il doit m'entendre.
Alistair. C'est moi, Éléa. Si tu m'entends, réponds-moi. Je t'en prie.
Je réessaie quelques fois jusqu'à finalement obtenir une réponse.
Éléa! Où es-tu? Tu vas bien? Est-ce que...
Ali, calme-toi. Si tu n'agis pas comme moi, la connexion va se couper.
Désolé... Mais ça me tue de savoir que tu es en danger.
Je souris, malgré moi.
Écoute, j'ai peu de temps. Je ne sais pas quand ils vont revenir.
Ils, c'est bien la bande de Valère, non?
Oui. Malheureusement. Mais ne t'en fais pas. À l'exception du fait que je suis attachée, ils ne m'ont rien fait de mal. Ils me nourrissent et me laissent utiliser la toilette autant de fois que nécessaire. Je vais bien.
Super, ça me rassure un peu. As-tu une petite idée de l'endroit où tu te trouves?
Non. Aucune. L'endroit où je suis retenue ne comporte pas de fenêtre. La seule chose que je sais, c'est que c'est une maison.
Ouais, ça ne nous aide pas vraiment dans nos recherches... Jusqu'à maintenant, nous avons fouillé toute la forêt à tes trousses et frappé aux portes de la moitié de la ville. Rien du tout. Personne n'a encore réussi à suivre ton odeur, et là où nous avons frappé, ce n'était que des humains normaux, donc innocents.
Je vois... On est vraiment dans une impasse, hein?
Apparemment... Tu me manques tellement. J'aurais vraiment préféré être avec toi...
Et moi donc... Je te promets que nous faisons notre possible pour te retrouver.
Tu n'as pas besoin de me le dire. Je vous fais entièrement confiance. Je sais que vous allez me retrouver.
Il s'apprête à me dire autre chose, mais je coupe net la communication quand j'entends le bruit de la porte qui me ramène à la réalité. C'est ce qui me permet de réaliser que ma tentative de connexion avec Alistair a duré plus longtemps que prévu. Je ne lui ai pas fourni d'information concrète, mais au moins, il va pouvoir rassurer les autres en leur disant que je vais bien. C'est déjà ça.
Je lève la tête. C'est le même type qui m'avait apporté à manger, un peu plus tôt. Seulement, contrairement à tout à l'heure, il détache mes poignets.
-On m'a avisé que tu pouvais manger par toi-même, mais je dois continuer de te regarder. Si tu oses...
-Mais oui, si j'ose faire quelque chose, ça va barder, j'ai compris. Est-ce que vous avez tous besoin de le répéter à chaque fois?
J'attrape la fourchette et commence à manger ce nouveau repas. L'homme m'observe manger sans aucune réaction.
-Puisque je suppose que tu seras celui qui viendra toujours m'apporter à manger... Est-ce que je peux au moins connaître ton nom?
-Pourquoi je te le donnerais?
-Bah, vous m'avez kidnappée et vous me retenez contre mon gré. La moindre des choses, ce serait que je puisse au moins apprendre l'un des noms.
Après un moment d'hésitation.
-Rufus.
Je hoche la tête. Je sais de qui il s'agit, Kayla et Alistair m'en ont tous les deux parlé.
-Alors c'est toi, le fameux Rufus...
Voyant qu'il ne répond pas, je continue à manger et à boire. Il ramasse le tout.
-Quelqu'un viendra bientôt t'escorter aux toilettes. Dit-il en rattachant mes poignets.
Une fois qu'il quitte la pièce, je souffle. Décidément, si mes prochains jours se résument à ça, je risque de m'ennuyer un maximum, en captivité.
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Première (ré)apparition de Rufus dans l'histoire! Et aussi, le point de vue d'Éléa qui est retenue. Au moins, vous savez qu'elle va bien, malgré les circonstances.
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