Chapitre 23 - La cérémonie de clôture (Léon)
Ce matin, j'ai reçu un message du président de la République.
Moi !
Quand j'ai vu le numéro s'afficher, et qu'en décrochant, on m'a annoncé que je parlais au secrétaire de l'Élysée, j'ai cru défaillir. Évidemment, étant donné que j'ai obtenu un beau palmarès depuis le début des jeux, j'avais déjà eu l'occasion de rencontrer Emmanuel Macron et de lui serrer la main. Mais là, c'était autre chose. Je ne serai pas si j'aurais d'autres occasions dans ma vie d'avoir un président au téléphone.
J'ai passé les derniers jours des jeux à assister aux compétitions des autres athlètes : BMX, athlétisme, judo. Apolline m'a accompagné sur plusieurs compétitions, mais elle était souvent de service. J'ai enfin pu profiter, comme un véritable spectateur. Bien sûr, à cause de la vidéo sur Tiktok, de la plainte et de la pression du public (on me demande partout des autographes), je passe difficilement inaperçu. Mais c'était bien quand même.
Hier, les journaux ont titré - un peu trop tôt d'ailleurs - que j'allais porter le drapeau pour la cérémonie de clôture. Cela n'est finalement pas le cas, mais à la place, le président m'annonce :
— Bonjour Léon, cela vous dirait de rapporter la flamme au stade de France ?
Je reste bête, sans trop savoir quoi dire.
Moi rapporter la flamme ? Moi, l'inconnu avant les jeux.
C'était tellement d'honneur, tellement improbable. Je n'aurais jamais imaginé ça.
— Bien sûr que j'accepte.
— Merci, Léon. Vous faites honneur à la France.
Qui refuse une telle opportunité ? Je me dois de faire honneur à ce pays, et à ces spectateurs qui m'ont acclamé durant la compétition.
En apprenant cela, mes parents se sont empressés de me dénicher un smoking. Je n'ai jamais porté un costume aussi beau. Sobre, noir, tout en élégance, c'est un costume trois pièces, avec un nœud papillon. C'est vêtu ainsi que je m'avance jusqu'à la vaste olympique, cette grande boule de lumière qui s'élève chaque soir dans le ciel pour être redescendu au matin. Fébrile les mains tremblantes, je tâche de garder contenance alors que je suis filmé par les caméras du monde entier.
Je pose mes mains sur la lanterne et récupère la flamme dans son écrin.
Je commence alors à remonter le jardin des tuileries.
Quelle sensation incroyable !
C'est fou d'être seul dans cet espace chargé d'Histoire (si on excepte les cameras). Un espace que des milliers de touristes et parisiens arpentent chaque jour, mais aussi de personnages issus du passé qui y ont vécu. Des reines, des rois, des princes, des princesses, des nobles et des paysans. J'ai l'impression de me repasser tous mes cours d'Histoire à cet instant. Je me sens pleinement français. J'appartiens à ce pays et à tous ces gens qui m'ont porté durant les jeux. Je me sens unis avec eux. Solidaire. Frère.
Je me demande toutefois si je vais devoir parcourir tout ce chemin à pied. Les tuilerie – le stade de France, ce n'est pas la porte à côté. À moins que je puisse y aller à la nage en passant par la Seine ? Heureusement, quand j'arrive devant la pyramide du Louvre, j'aperçois un taxi. J'ouvre la porte, la lanterne serrée contre moi et j'ai eu la joie de trouver non seulement le chauffeur, mais aussi Apolline et son père.
Tony Estanguet est assis à l'avant, tandis que sa fille m'attend sur la banquette arrière. Je me suis glisse à l'intérieur, le cœur battant. Mes doigts viennent automatiquement s'agripper autour de ceux d'Apolline. Mon cœur bat si fort dans ma poitrine qu'il menace d'exploser, même si je m'efforce de rester calme.
— Ça va ? me demande-t-elle.
Non, je stresse.
À l'avant, Tony éclate de rire, pendant que sa fille embrasse ma joue.
— Tu as remporté cinq médailles. Ramener la flamme, c'est presque une balade de santé à côté.
— Je préfèrerai refaire un 400m 4 nage à l'heure qu'il est.
Apolline me sourit et m'observe de ses grands yeux pleins d'amour. Elle porte une robe tout en dentelle et a relevé ses cheveux. Deux petites mèches pendant sur chaque côté et ses yeux sont réhaussés d'un trait de crayon noir. Devant, son père échange avec le chauffeur, nous laissant un peu d'intimité. Apolline caresse doucement mes doigts pour me rassurer, la tête pressée contre mon épaule.
— Tu es très beau en costume, tu sais.
Je souris à mon tour.
— Et moi qui pensais que tu me préférais torse nu, répliqué-je pour détendre l'atmosphère.
« Ou que tu préférais mes fesses » pensé-je en me souvenant de notre première rencontre dans les vestiaires. Apolline se met à rougir et lève les yeux au ciel avant de me donner un coup dans les côtes.
— Très drôle, Léon. Et parle moins fort, mon père est dans la voiture.
— J'ai tout entendu ! crie Tony. Je t'ai à l'œil, Léon. Ta popularité ne me fera pas oublier qu'Apolline est ma fille.
— Je suis majeur, Papa ! rappelle-t-elle pendant que je rougis à mon tour.
— Cela ne change rien.
Apolline soupire fortement avant de tourner ses Iris océans vers moi et de chuchoter à mon oreille :
— Tu es beau avec, et sans costume, murmure-t-elle. Mais ça, nous le saurons un peu plus tard.
Oh ! Est-ce une promesse ?
Je me mets à avoir chaud, très chaud, et c'est tout sauf approprié à la situation. Je rapproche la flamme contre moi pour cacher mon désir montant et me concentre sur la route. Paris défile sous nos yeux.
Enfin, le taxi s'arrête devant le stade de France et nous descendons. Apolline m'embrasse une dernière fois, un baiser rapide, plein de douceur.
— Tu vas y arriver, je le sais.
Je hoche la tête.
— N'oublie pas que je t'aime.
— Je t'aime aussi.
Elle me quitte et je suis son père en direction du stade pendant que ma petite copine rejoint les tribunes. Nous suivons un long couloir, puis grimpons des escaliers, avant de déboucher sur le cœur du stade.
C'est fou !
Là-bas m'attendent 80 000 spectateurs (rien que ça !). Une heure plus tôt, la cérémonie s'est ouverte sur un orchestre symphonique dirigé par une femme. La Marseillaise s'est mise à résonner dans le stade, puis tous les portes drapeaux sont rentrés, sans ordre ni logique. Pauline Ferrand et Antoine Dupont tenaient celui de la France. Un déferlement de pays, de sportifs, sourires aux lèvres, portant fièrement leurs couleurs, heureux de clôturer ces jeux qui nous ont porté durant plus de deux semaines. Ensuite sont venus les dernières remises des médailles et les représentants des volontaires et bénévoles, avant d'enchaîner sur une prestation que l'on m'a dit être incroyable avec des danseurs, dont un entièrement vêtus d'or, tel le Roi Soleil.
La France a fini cinquième du classement dans l'ordre des médailles, nous en avons obtenu 64, et parmi ces médailles, cinq sont les miennes et quatre scintillent de l'or que je rapporterai chez moi la semaine prochaine : à Toulouse.
— Ça va être ton tour, me dit Tony.
J'inspire, expire.
C'est comme avant une course, tout va bien se dérouler. Je dois juste faire redescendre la pression.
— Tu nous as fait rêver pendant ces jeux, Léon.
— Merci.
Un sourire étire les lèvres du président du comité olympique quand il pose une main sur mon épaule.
— Mais je te préviens, si tu brises le cœur de ma fille...
— Ça n'arrivera pas.
Notre histoire n'en est qu'à son balbutiement, mais je sais une chose. Jamais je ne ferai de mal à Apolline. Si notre romance doit s'écrire à distance, que cela ne nous convient pas, nous en discuterons, et y mettrons fin avant de nous blesser l'un l'autre. Mais si ça nous convient à tous les deux, et ce malgré les obstacles qui se dresseront sur notre route, je sais que nous pourrons les surmonter.
— Dans ce cas, tu as toute ma confiance et mon assentiment. Soyez heureux.
Je le remercie d'un hochement de tête, tout en serrant la lanterne contre mon cœur.
— Et profite de cette soirée. Ce que tu vis ce soir, on ne le vit qu'une fois dans sa vie... Alors va clôturer ces jeux, Léon. La France t'attend. Le monde t'attend...
C'est sûr que dit comme ça : zéro pression. Merci Tony !
Je fais de mon mieux pour calmer les battements frénétiques de mon cœur et m'avance dans le cœur du stade. Le silence m'enveloppe. Je sens des milliers de regard posé sur moi et avance, pas après pas vers mon destin.
Il est minuit lorsque j'entre dans le stade. Mon cœur bat au rythme des milliers de cœur, alors que je m'avance pour rejoindre la maire de Paris. Anne Hidalgo a remis le drapeau olympique à Thomas Bach (le président du comité international), qui l'a lui-même remis à la maire de Los Angeles, Karen Bass. C'était juste avant que Tom Cruise ne débarque du ciel, puis s'enfuit avec ledit drapeau pour rejoindre Los Angeles en vue des prochains jeux.
Du pur génie. Du pur spectacle. C'était grandiose.
Nous l'avons regardé sur un écran géant traverser Paris en moto puis grimper dans un avion, avant que j'arrive à mon tour avec la lanterne contenant la flamme olympique.
Mon cœur bat si fort.
Je m'avance vers Thomas Bach, sans respirer. J'ai le souffle court, mais le calme m'envahît. Comme avant une course de natation, je fais le vide dans mon esprit et rejoint le président du comité international.
— Tu es prêt ? chuchote-t-il.
Il le faut.
— Oui.
Ensemble, nous éteignons symboliquement la flamme. La voix d'Yseult nous accompagne en chantant My Way.
La flamme s'éteint.
Voilà, c'est terminé.
— Je déclare les Jeux de la 33e olympiade clos, annonce Thomas Bach.
« Et joyeux Hunger Games », pensé-je en écho.
Les hurlements et applaudissements s'élèvent dans le stade à cette annonce.
Je rive mon regard vers les tribunes, à la recherche de mes parents, de mon frère et d'Apolline. Mais il y a tellement de monde que mes yeux se perdent dans cette marée humaine.
Ce n'est pas grave, je sais qu'Apolline et ma famille sont là et que leurs cœurs battent aussi fort que le mien et les milliers de française et français venus assister à cette dernière cérémonie avant les jeux paralympiques.
*
Et voilà...
Le dernier chapitre est arrivé.
Je vous donne rendez-vous demain pour l'épilogue :'( Ça va me faire tout drôle de les quitter. Mais purée !!! Quelle cérémonie de clôture. Léon était si beau en costume.
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