Les terres gelées d'Athylwyth
Le septième jour, le temps devint glacial, et en fin de matinée les deux barques furent bloquées car le fleuve avait gelé sur toute sa largeur. La glace était trop épaisse pour être brisée. Finiarel fut déposé sur la berge pour explorer les prochains lacets du fleuve. Quand il revint plus tard dans la journée, il confirma la mauvaise nouvelle : le fleuve était paralysé sur plusieurs centaines de mètres. Au-delà, seuls les eaux les plus fougueuses et les moins navigables se dégageaient de la gaine de glace.
Sans savoir où ils pourraient reprendre la navigation, les voyageurs estimèrent que porter les embarcations n'était pas envisageable, d'autant plus que les rives enneigées et la glace ne permettaient pas de poser un pied sûr. La route de Mordryn était bloquée. Alors Erisdar, qui connaissait bien la géographie des royaumes, proposa un autre chemin :
« Le fleuve atteint Mordryn vers le nord-ouest. Mais de là où nous sommes, si nous marchons plein ouest, nous devrions pouvoir rejoindre la frontière en d'eux jours. De là-bas, nous trouverons une route jusqu'à la capitale de Dame Allisara.
- Les deux jours de marche que tu proposes seront en plein dans les terres d'Athylwyth, les terres perpétuellement hivernales ! Il y a sûrement plus prudent, rétorqua Ignasia. Nous ne sommes pas équipés pour ces températures !
- Je n'ai hélas pas d'autres choses à proposer, à moins de faire un détour par la rive nord, mais alors nous serons retardés d'une dizaine de jours.
- Au moins serons-nous à l'abri du froid.
- Malheureusement non, car lorsque le vent souffle ainsi depuis le royaume de l'hiver, la rive opposée est aussi balayée par le blizzard.
- Alors nous prendrons la route la plus courte. » trancha Weldenmaëla. « Si nous devons avoir froid, que ce soit le moins longtemps possible.
- Nous nous réchaufferons en marchant vite, et nous sortirons de ces terres au plus tôt ! » conclut Finiarel pour rallier le moral du groupe.
Ils abandonnèrent donc là les barques, en prirent leurs équipements, s'habillèrent de plusieurs couches de vêtements, et quand ils furent tous prêts, ils se mirent en marche à la suite d'Erisdar. Malgré son âge, le magicien avançait avec énergie dans la neige, et traçait un sillon dans lesquels les autres mettaient leurs pas. Ils formaient une file qui s'étira de plus en plus à mesure qu'avançait la journée.
Le plus mal lotis était Finiarel car, parti à la hâte du clan, il n'avait pas pu prendre autant de tenues que ses compagnons. Il attrapa rapidement froid et alors qu'il était l'un des meilleurs marcheurs, il dû se tenir en fin de file, soutenu par Ignasia. Cette dernière avait préparé un onguent pour protéger autant que possible du froid, mais faute d'ingrédients, elle n'avait pu en préparer qu'une petite quantité, et chacun s'était donc couvert le visage et les mains en priorité.
Pendant la traversée de ce bout du royaume d'Athylwyth, les voyageurs parlèrent peu : le bruit du vent dans les branches coupait toute discussion. Alors la voix qu'entendait Aiedail reprit ses leçons pendant la marche, mais la jeune elfe n'en retenait plus rien tant le froid l'engourdissait.
Le premier soir, ils s'arrêtèrent dans un vallon encaissé, qui les abritait du vent et de la neige, et repartir tôt le lendemain car Erisdar leur dit qu'il avait bon espoir d'atteindre les terres de Mordryn en fin de journée s'ils se dépêchaient. Mais peu après midi, une tempête se leva, et ils furent contraints de s'arrêter pour s'abriter. Ils trouvèrent quelques buissons denses où ils se couchèrent avec l'espoir que le temps leur permette de reprendre la route bientôt. Mais la tempête dura toute l'après-midi, et une partie de la nuit, et quand elle cessa, les voyageurs étaient transis de froid, trempés, et trop épuisés pour marcher.
Plus que tous les autres, Finiarel et Weldenmaëla étaient au plus mal. Le premier était glacé, la peau presque bleu, et il parvenait à peine à bouger les membres tant il tremblait. La cheffe du clan souffrait moins du froid que de l'épuisement. Elle tenta plusieurs fois de se relever, mais face au vent ses forces la lâchaient, et Ignasia dû chaque fois l'attraper pour l'empêcher de s'effondrer dans la neige. Les compagnons restèrent donc dans leur abris de fortune, maudissant le sort et le royaume de l'hiver.
Le lendemain matin, le ciel se calma, mais les voyageurs ne parvinrent pas à quitter leur abris, car les forces leur manquaient. Même Erisdar, mieux préparé et vêtu contre le froid que les autres, n'osa quitter l'abri, et ils sombrèrent tous dans la torpeur.
C'est alors qu'une brume épaisse coula sur eux, et dans la brume marchait un groupe de soldats à cheval. Comme ils passaient à côté de leurs buissons sans voir les voyageurs, la voix réveilla Aiedail :
« Aiedail lève-toi ! J'ai pu dévier ces cavaliers de leur route, c'est maintenant à toi de finir de sauver les tiens ! »
A ces mots, la jeune elfe se releva en titubant et agita les bras pour attirer l'attention des passants. D'abord stupéfaits de rencontrer quelqu'un dans ces terres gelées, ceux-ci accoururent porter secours aux voyageurs. Ils étaient des soldats chargés de la garde des frontières du royaume de Mordryn, et ils avaient été déportés de leur chemin par le brouillard. Ils emportèrent les cinq égarés sur leurs chevaux vers le village le plus proche. Aiedail, qui seule avait retrouvé quelques esprits, constata avec soulagement que neige disparaissait à mesure qu'ils s'éloignaient du cœur d'Athylwyth.
Après quelques heures de chevauchée, ils furent déposés au grand hall d'une petite ville du nom de Vlena. On leur prodigua immédiatement des soins, tout particulièrement à Finiarel et Weldenmaëla. Pendant ce temps, Aiedail se présenta à ceux qui s'occupaient d'eux, et fut conduite devant le dirigeant de cette ville, le seigneur Raenor. Elle lui présenta la raison de leur voyage, leur mésaventure en Athylwyth, et transmit ce qu'elle savait que serait la demande de sa mère à son réveil :
« Nous aurons besoin des soins de dame Allisara, car si les maux que nous avons subis dans les neiges peuvent être soignés par vos guérisseurs, ce qui accable ma mère et cheffe nécessite des pouvoir que seule votre reine seule pourrait avoir. »
Comme beaucoup, Raenor connaissait la réputation de la Princesse de Loec, et la tenait en grand estime. L'aider était à ses yeux de la première importance, et il envoya immédiatement un messager à sa suzeraine, pour solliciter son aide au nom des voyageurs.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top