Chapitre Bonus - "Que" mon colocataire

Surprise ! Il est déjà là ! 

Non, je ne l'ai pas fait corriger. Je voulais absolument que ma surprise soit totale. C'est un des chapitres de cette histoire qui a été le plus facile à écrire, et le plus émouvant aussi. Je vous cache pas que j'ai lâché des larmes à certains passages, c'était pas très beau à voir. 

Vous le constaterez bien vite, ce n'est écrit ni au présent, ni au point de vue de quelqu'un en particulier, même s'il me semble que ça tend plus vers les sentiments de Romy que ceux d'Oliver. Vraiment, ils vont me tuer un jour ces deux-là. 

Bonne lecture !! 

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Romy passa son trajet en voiture enfermée dans un silence que Paul n'osa pas briser. Il lui lançait des petites œillades de temps à autre pour voir s'il n'avait pas une ouverture qui lui permettrait de la calmer. Ce moment n'arriva jamais. La jeune femme lui adressa à peine un regard quand il la remercia avant de sortir de la voiture, puis repartit aussitôt en direction de son appartement.

Elle le trouva plongé dans le noir. Seule un petit rayon de lumière émanait de sous la porte de la chambre d'Oliver. Nonchalamment, elle retira ses chaussures qu'elle laissa traîner à côté du meuble, chose qu'elle était habituée à faire quand elle était de mauvaise humeur. Sans retirer sa veste, elle se dirigea vers la fenêtre du salon, qu'elle ouvrit. Elle tira à nouveau vers elle son paquet de cigarettes, et soupira en le voyant presque vide. Romy en alluma quand même une, et tira longuement dessus, les yeux rivés sur la pleine Lune. Quelle journée de merde. D'abord Schneider qui passait ses nerfs sur elle, épuisé par sa situation familiale, puis Paul qui se fait attaquer, pratiquement tuer, pour finir sur Oliver qui faisait la gueule, sans qu'elle sache pourquoi. Bien sûr qu'elle n'allait pas dire la vérité au pompier. Romy était du genre à garder les choses pour elle, surtout en présence d'inconnus, Ollie pouvait bien comprendre ça, non ?

- Tu comptes m'en parler quand ? demanda une voix calme, mais pas dénuée de froideur.

Romy sortit de ses songes et serra les dents, sa clope s'amenuisant entre ses doigts. Elle l'entendit faire un pas dans sa direction, mais ne se retourna pas pour autant.

- Parler de quoi ?

- Du fait que je sois que ton colocataire.

La bombe était donc lâchée. Elle devait donc faire en sorte que tout ça ne finisse pas en Hiroshima. Elle ne supporterait pas que cet appartement devienne les ruines de la plus belle relation qu'elle ait vécu, et de la seule qu'elle chérirait toute sa vie. Romy ne répondit cependant pas, tirant sur sa cigarette, inspirant lentement pour laisser la fumée brûler un peu plus ses poumons, expirant lentement.

- Oliver, tu penses vraiment que j'ai été sincère avec lui ?

- Oui. Je sais que t'as l'habitude de mentir aux gens que tu ne connais pas, mais je sais aussi que tu ne réponds jamais aussi vite aux questions qu'on te pose. Que ça soit pour mentir ou pour dire la vérité. Là, c'était pas ta tête qui a parlé. C'était ton cœur, et c'est ça qui fait mal.

Romy échappa un ricanement, écrasa son mégot dans le cendrier plein à craquer, et fit volte-face pour le toiser, dans le noir. Elle se sentit sondée par les yeux perçants de son colocataire. Pourtant, même si son malaise l'envahissait, elle se surprit à désirer sa proximité. Ce soir, ça serait impossible. S'ils devaient se rapprocher, ça serait pour en venir aux mains. Et cette fois-ci, Romy le laisserait gagner sans lever le petit doigt.

- Oliver...

- Je t'ai aimé Romy. Dans un sens même, je t'aime encore. Et ça, c'est très difficile pour moi. Tu sais pourquoi.

- Parce que tu m'aimes pour qui je suis, pas pour ce que je fais. Mais que...

Romy sembla chercher ses mots, la gorge serrée. Ça faisait plus mal qu'elle ne le pensait.

- Mais... ça fait partie de moi. Alors tu peux pas m'aimer. Tu pourras jamais.

D'autres mots voulurent sortir de la bouche de Romy, mais tout comme ses larmes, elle les retint.

- Romy... j'ai pas envie d'être que ton colocataire. Je supporterai pas de te perdre à ce point.

Ce furent les mots de trop pour elle. Oliver n'eut le temps d'esquiver que Romy s'approcha à grands pas de lui pour lui asséner une violente gifle.

- Idiot ! s'égosilla-t-elle. Idiot ! Je lutte depuis toujours pour ne pas te parler de ce que je fais, pour ne pas t'impliquer là-dedans, pour que tu ne me haïsse pas, pour que... pour que tu restes toujours avec moi. Parce que comme tu l'as dit : je t'ai aimé, comme une cinglée, et je t'aime encore, et j'ai besoin de toi pour pas sombrer. Si je suis encore une bonne personne c'est parce que t'es là, et que ma plus grande phobie, c'est que tu partes... et toi tu me dis ça ? Que t'as peur de me perdre et que tu veux pas être juste mon colocataire ?

Oliver resta sans voix. Comment répondre à cet appel au secours ? Comment sécher ces larmes ? Sa joue était encore cuisante, et il n'était pas très sûr d'avoir mérité cette baffe. Mais si ça pouvait la soulager, si pour une fois Romy pouvait vider son sac en entier sans se retenir ou réfléchir à ses mots, alors le jeune homme pouvait bien tout supporter, ça compris.

- T'as jamais été que mon colocataire, Ollie, murmura-t-elle, la voix brisée. T'es la personne que j'aime le plus au monde...

Le silence se fit dans le salon obscur, entrecoupé de sanglots discrets. Romy eut envie de fuir, loin, de s'enfermer à clés dans sa chambre et de ne plus en sortir. Non pas qu'elle eut honte de s'ouvrir à Oliver de cette façon, mais plutôt qu'elle était véritablement blessée que lui ait pu avoir des doutes sur l'importance et la place qu'il avait dans le cœur de la jeune femme.

Tout ça débordait. Romy n'en pouvait plus d'être la femme forte et inébranlable. Oliver ouvrit la bouche pour dire quelque chose, essayer de trouver les mots qui pourrait la consoler, mais les sanglots se firent soudain plus forts, plus hachés. La jeune femme pleurait si fort que sa respiration se coupait. Il ne lui en fallut pas plus pour ouvrir ses bras et y enfermer le corps frêle de la blonde. D'une main, il cala sa joue contre son torse, et glissa ses doigts dans ses cheveux détachés pour les masser doucement, attendant que la crise passe. Cette vision de Romy lui brisait le cœur.

- Je t'en prie, Oliver, ne doute plus jamais de moi... c'est la seule chose qui peut m'achever...

- Tu sais, chuchota-t-il pour ne pas brusquer l'ambiance d'apaisement, tu t'es trompée sur un point.

Le souffle de Romy se coupa brusquement, appréhendant ce qu'il allait lui dire.

- J'ai appris à accepter ce que tu fais. Je ne le cautionne pas du tout, mais comme tu l'as dit, ça fait partie de toi. C'est juste... c'est à cause de ça que je ne pourrais être avec toi comme je veux. Ça aussi, je l'ai accepté. Je ne pourrais jamais être avec toi parce que je ne veux pas être ce fardeau. Je refuse que tu te mettes en danger pour moi, Romy. Parce que t'es la personne que j'aime le plus au monde, et que j'ai besoin de toi. Pour toujours.

Un sanglot s'échappa de la gorge de la jeune femme. Elle tentait de les retenir du mieux qu'elle pouvait, mais la douleur était trop forte.

- Romy, murmura Oliver alors qu'il la prenait dans ses bras, t'es pas un robot, t'es une humaine. T'as le droit d'avoir des sentiments. T'as le droit de craquer. Alors vas-y, laisse tout sortir. T'es en sécurité avec moi.

Un fin sourire se dessina sur les lèvres de la jeune femme. Elle était en sécurité dans les bras de son ami. Ses sentiments étaient en sécurité. Romy pouvait lui confier sa vie entière les yeux fermés. Alors quand il glissa ses grands doigts calleux pour lui masser doucement le cuir chevelu, la serrant un peu plus fort contre lui, elle laissa les sanglots résonner dans le salon, les larmes tremper son pull, le mascara couler sur le tissu. Elle pleura si fort, si longtemps, que quand la crise fut enfin passée, les jambes de la blonde fléchirent, vides d'énergie. Épuisée, elle fut même incapable de lui demander pardon pour sa faiblesse. Et de toute façon, Oliver lui aurait dit que ce n'était rien, qu'elle avait le droit, et qu'il était heureux d'être là pour elle en toute circonstance.

Oliver soutint Romy jusqu'à sa chambre. Il la fit asseoir sur le lit, alluma la lampe de sol pour s'éclairer le temps de fermer le volet, puis retourna auprès d'elle pour l'aider à se coucher. Romy se laissa déshabiller sans broncher, laissant les dernières larmes couler silencieusement. Elle leva les bras pour qu'il lui enlève son pull, les baissa pour qu'il retire le soutien-gorge. La jeune femme se laissa faire comme un pantin, amorphe, et le suivit du regard comme un petit chien battu quand il quitta la pièce pour aller dans la salle de bain.

Il entra à nouveau dans la chambre quelques secondes plus tard avec un coton imbibé de démaquillant pour les yeux, et s'assit en face de la jeune femme nue.

- Dis-moi si je te fais mal, Romy, lui chuchota-t-il.

- Tu ne me feras jamais de mal, Oliver.

Le coton s'arrêta un court instant de frotter l'œil, et le jeune homme leva les yeux vers elle. Rares étaient les fois où elle prononçait son nom en entier. Bien souvent, ça sonnait comme la plus belle chanson d'amour qu'Oliver ait entendu, alors il se permit de savourer le moment avant de reprendre sa besogne. Il laissa ses doigts se promener sur les joues rouges de son amie, et quand il eut fini de lui enlever ses restes de maquillage, il posa les deux cotons souillés sur la pile de livres qui traînaient à côté du lit, et l'aida à enfiler son t-shirt et sa culotte pour la nuit.

Quand il se redressa, alors que Romy s'allongeait sous sa couette, elle saisit doucement la poche de son jean.

- Reste avec moi Ollie...

Oliver lui sourit, et brandit devant elle le coton.

- Je pars juste jeter ça, et j'arrive.

Elle le laissa filer, et quand il retourna dans la chambre, Romy dormait déjà sur le côté. Il éteignit la lumière, fit valser ses vêtements, et se glissa à son tour sous l'épaisse couverture avant de se coller contre elle.

Cette nuit-là, Oliver et Romy révèrent tous les deux de voir l'autre sourire, assis sous un cerisier en fleurs.  

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