Chapitre 3.1
« La semaine dernière, nous avons emmené la chose dans une forêt désinfectée, au sud-est de notre position. La créature a pu non seulement réaliser son premier vol qui était des plus fabuleux, mais a également développé la capacité de cracher du feu. Après une analyse approfondie, nous avons découvert une poche de dihydrogènes au-dessus de l'estomac de la bête qui s'enflamme au contact de l'air. Des mesures ont été mises en place pour inhiber cette capacité, nous ne voulons pas qu'elle l'utilise pour s'enfuir. »
Enregistrement du Professeur Edward Stones - Dossier numéro III - date inconnue
Les sirènes des différentes voitures de fonction retentirent dans la ville. Un nuage âcre s'élevait dans le ciel, cachant les rayons déclinant de l'astre solaire.
L'immeuble du Laboratoire de la Police venait de s'effondrer, comme un château de cartes. La police ignorait toujours la cause d'une telle tragédie. Elle grouillait autour, formant un périmètre de sécurité pour éloigner les curieux. Les pompiers venaient tout juste d'entrée en jeu et sortaient leur matériel, pour commencer à éteindre les quelques incendies qui parcouraient la zone.
Les ambulanciers s'éparpillaient au niveau des secteurs qu'ils pouvaient approcher, à la recherche de survivants potentiels. Le bilan des victimes était affolant. On déplorait déjà une cinquantaine de morts et au moins une centaine de blesser. C'était le chaos total.
Les hauts gradés de la police ordonnèrent le réquisitionnement de tous Dragons pouvant leur venir en aide. On pouvait compter sur de petits Dragons qui se faufileraient aisément entre les décombres, mais également sur des plus gros, qui grâce à leur force pourraient soulever les blocs de béton.
Ophira entrouvrit ses yeux et toussa à de nombreuses reprises. L'air était lourd de particule en suspension, qui irritait douloureusement ses organes pulmonaires. Son corps était recouvert d'une couche de poussières épaisses et ses beaux cheveux rouges avaient pris une teinte particulière.
La jeune femme releva son regarde vers Antanáklasi. Le Dragon avait protégé son amie de sa carrure impressionnante sans la moindre hésitation. Il grogna légèrement et s'ébouriffa comme il le pouvait, pour se débarrasser de toutes poussières. Antanáklasi sentit que quelques choses le déranger, il s'observa de ses yeux ambrés avant d'apercevoir une blessure. Il passa un énorme coup de langue sur la plaie béante au niveau de son flanc, proche de la ligne dorsale. Bien que répugnante, elle était sans danger pour le lézard géant.
— Merci Antanáklasi, sans toi je ne serais plus de ce monde, parla la jeune femme qui caressa la patte écailleuse du Dragon. Qu'est-ce qu'y a bien pu se passer ? Se questionna-t-elle.
Elle sortit de sous le torse du Dragon et examina ce qui l'entourait. A quelques mètres de sa position, gisait la partie inférieure d'un corps de type masculin, écrasé par le poids de débris colossaux. Elle ne prit pas le temps de vérifier s'il était encore en vie, car au vu de son état, il n'y avait aucune chance qu'il le soit. Elle détourna le regard du cadavre et continua d'observer les alentours. Il n'y avait rien, rien qui aurait pu l'aider un tant soit peu.
Gardant tout de même espoir, elle se mit tout de même à chercher une sortie potentielle dans les décombres du bâtiment.
Ophira souffla après une demi-heure d'investigation, aucune issue ne se présentait à eux. Elle supposa que la totalité du bâtiment s'était écroulé lors de l'explosion. Ils allaient devoir attendre que les secours dégagent une bonne partie des débris.
La jeune dracologue s'assit dans un coin, bras croisés sur son abdomen et réfléchit à leur situation. Les secours allaient mettre un certain temps avant de parvenir à eux, et encore, elle n'était pas certaine qu'ils arrivent avant que leur poche d'air ne s'épuise. Que pouvaient-ils bien faire pour se sortir de là ? Antanáklasi aurait pu faire fondre le tout, mais elle ne voulait pas blesser davantage de gens. Elle souffla d'agacement, elle allait être coincée ici un bon moment.
Six heures s'étaient écoulées depuis qu'Ophira s'était retrouvée dans cette situation. Elle s'était assise près du flanc du Dragon, espérant qu'on les retrouve assez vite. La jeune femme avait très vite déterminé par des calculs mathématiques, qu'ils ne leur restaient plus ou moins cinq heures d'oxygène avant d'en manquer.
Intérieurement, elle faisait tout pour préserver cet infime espoirs qui lui restait, mais une petite voix lui chuchotait qu'elle n'aurait pas autant de chance pour cette fois. La jeune femme sentit son cœur se comprimait, elle allait mourir ici sans avoir pu connaître le véritable amour, sans avoir pu parler une dernière fois avec ses parents. Elle retint les larmes qui voulaient s'échapper de ses beaux yeux émeraude, surtout en pensant à son pauvre ami qui était dans le même pétrin qu'elle.
Elle aurait voulu étriper le connard qui avait eu la bonne idée de faire exploser se laboratoire.
Antanáklasi boudait. Encore un contre-temps qui l'empêcher de sortir. Il exhala bruyamment, soulevant une grande quantité de particules devant lui. Il en inspira une partie et ouvrit grand la gueule, dévoilant une rangée de dents crénelées d'une quinzaine de centimètre. Il éternua, expulsant une grande quantité de morve de son nez.
Le voyant faire, Ophira affichait à la fois une moue dégoûtée et amusée. Ce dragon avait le don de lui remonter le moral.
Le bruit résonna longuement, peut-être que quelqu'un l'entendrait ? Il n'y avait peu de chance, au vu de l'épaisseur des décombres qui les entouraient, mais ils gardaient espoirs. Dès qu'Antanáklasi en aurait l'occasion, il partirait de là et vaquerait à son occupation préférée, la chasse.
***
Au-dessus de leur tête, les incendies avaient été éteints, et les premiers blessés envoyaient vers l'hôpital le plus proche. Un chapiteau blanc avait été dressé tout près de l'ancien bâtiment de la Police. Il renfermait la plupart des dirigeants de l'opération qui faisait tout leur possible pour arranger la situation.
À l'intérieur du-dit chapiteau, une dizaine de personnes étaient réunies autour d'un hologramme blanc. Le dispositif DHARE au-dessus de leur tête, le projetait sur la table de bois vernis et rendait ainsi le super-visionnement des opérations beaucoup plus simple. La société qui l'avait mis au point avait fait fortune grâce à cela. De nombreux emplois avaient pu être créés, faisant chuter le taux de chômage à 13%.
L'hologramme représentait trait pour trait le bâtiment effondré. Il pouvait être agrandi, comme rétrécit par le simple touché, ou bien positionnait comme on le voulait. Avec une certaine habitude, on pouvait très bien supprimer quelques parties du bâtiment pour y voir l'intérieur. C'était un véritable bijou de technologie et valait une petite fortune.
Un homme se distingua des autres et pointa son index noir en direction d'un bouton. Il appuya sur ce dernier et l'hologramme se mit à fleurir de petits points rouges.
— Ce que vous pouvez observer ici est en réalité le nombre de personnes encore vivantes, coincées sous les décombres. 17% d'entre elles sans susceptible d'être sauvées dans l'heure. Dans environ trois heures, on atteindra les 50%. Cependant, nos experts estiment que les trente dernières seront mortes avant qu'on arrive à elle.
— Et quand arrivera les Dragons-foreurs quémandés il y a plus de deux heures maintenant, s'indigna une petite femme ronde aux grosses lunettes bleues.
— Selon nos rapports, la cargaison aurait été attaquée. Aucun des huit spécimens n'aurait survécu. Pour le moment, aucun suspect n'a été interpellé, attesta un jeune homme qui réajusta sa cravate lorsqu'il eut fini de parler.
— C'est abominable ! S'emporta la petite femme. Qui a bien pu commettre un tel acte de barbarie ? Si cela continue ainsi, nous finirons par avoir des problèmes avec les Dragons. La paix entre nos deux espèces repose sur une confiance mutuelle très fragile.
— Nous le savons parfaitement Mme Anise, pas besoin de nous le rappeler. Nous faisons tout notre possible pour que la chose ne s'ébruite pas.
— Vous vous entendez parler ? Vous prenez les Dragons pour des animaux sans cervelles, mais ils sont bien plus que ça ! Ce sont des êtres dont l'intelligence surpasse largement celle de l'Homme. Regarder de plus près leur civilisation, leur coutume, leur savoir-faire et leur façon de vivre et vous verrez ! Cria la petite femme ronde dont la chevelure blonde ondulait dans son dos.
— Fermer-là maintenant ! Nous ne sommes pas ici pour assister à l'un de vos cours de comportementaliste, mais bien pour sauver des vies humaines.
La comportementaliste en question se tue, affichant un regard noir en direction de l'homme qui lui faisait face. Il ne voulait pas comprendre qu'il courait au danger en essayant de cacher cela. Les dragons n'allaient pas laisser passer ça. Ils leur avaient fait confiance, mais aujourd'hui elle s'effritait peu à peu. Les lézards volants connaissaient le sens du mot « meurtre » et dans leur communauté, il était sévèrement puni.
Un dragon qui commettait l'irréparable était jugé par leur Assemblée, et envoyait dans un lieu dont les humains ne connaissaient rien. L'hypothèse la plus probable était celle d'une espèce de prison dans un monde parallèle. Par contre si un dragon s'attaquait à un être humain, il était jugé par le conseil Dracologique et enfermait dans une prison surprotégée, dont les coordonnées étaient à ce jour inconnu. A l'inverse l'être humain meurtrier était abandonné nu, sur une île déserte, hostile et invivable. S'il arrivait à s'enfuir avant d'avoir été dévoré par des créatures inimaginables, il avait le droit de vivre. L'Assemblée ne voulait pas les envoyer dans leur dimension, afin de protéger le secret de son fonctionnement.
Le reste des dirigeants étaient restés muets pendant l'échange. Ils ne savaient pas vraiment où donner de la tête. Ils avaient tous deux raison dans un sens, mais personnes ne voulaient l'avouer.
— Bien, repris le dirigeant des opérations qui avait pour seul but, sauvé un maximum de vie humaine. Nous devons redoubler d'efforts pour sauver le plus de personnes avant qu'il ne soit trop tard. De ce fait, hâtez-vous pour reprendre le commandement de vos effectifs respectifs ! Partez maintenant ! Ordonna-t-il à ses compères qui s'empressèrent d'exécuter l'ordre.
Seul restait, la petite femme qui le fixait intensément. Elle ne voulait pas laisser faire une telle chose, pas après que tant de personnes se soient battues pour vivre en paix avec les Dragons. Elle allait devoir trouver un moyen d'y remédier, coûte que coûte. Il n'allait pas s'en titrer comme ça.
L'homme ne détourna pas le regard, il n'avait pas peur d'une femme. Elle n'était qu'une gêne comme tant d'autres, qu'il fallait faire taire une fois pour toutes.
***
Les Dragon-Foreurs sont une espèce cuirassées vivant principalement sous terre. Leurs ailes atrophiés en sont la preuve. Ils ont délaissé les cieux pour les sous sols moins dangereux. Peu commun dans la région, ils ont une préfèrence pour le Massif central.
Artiste inconnu
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