Chapitre 36 : Merci
Bonne lecture <3
— Stop.
Lin Mo écarquilla les yeux. Sa sœur frappa la grille de la paume, le regard déterminé.
— Xuoha Lan, j'ai dit stop. Vous mentez. Vous pensez vraiment que c'est ainsi que vous allez vous en sortir ? En vous attribuant des crimes ? Vous n'avez pas tué Maître Shen.
— J'AI TUÉ AH-ZHAN !
Il écrasa sa main sur le métal, faisant sursauter le plus jeune des Lin.
— Il est mort parce que mon père voulait me briser ! C'est de ma faute !
— C'est Xuoha Be qui s'en est pris à Maître Shen, pas vous ! Vous ne l'auriez même pas blessé. Vous teniez trop à lui pour ne serait-ce que le frapper. Arrêtez de vous blâmer, vous jouez le jeu de votre père !
Elle inspira profondément, puis posa la main sur la grille et serra le poing.
— Rétablissez-vous et battez-vous, encore. Vous pouvez vous en sortir si vous vous défendez. Ne baissez pas les bras.
Xuoha Lan lâcha un petit rire et se replaça contre le mur, plus calme, mais les yeux toujours aussi vides.
— Ne me donnez pas d'espoir, ça ne sert à rien. Ils vont m'exécuter. Je suis malade, je vous rappelle. Ils me bâillonneront encore.
— Je crois encore que les autres Jades vous jugeront avec justice.
— Je suis accusé de meurtre et ils ont des preuves. Je n'ai aucune chance. Et je vous ai déjà expliqué que finalement, je suis coupable.
Lin Zhou serra les dents.
— Vous ne l'avez pas tué.
— Vous me l'avez déj-
— Dites-le.
— Il est mort par ma faute !
— Non.
— Ah-Zhan-
— Je veux vous l'entendre dire.
Agacé, Xuoha Lan se tourna vers la grille et croisa le regard de la jeune femme, dont le poing était toujours pressé sur le métal.
— Pourquoi ? Pourquoi y tenez-vous tant ?
— Parce que c'est la vérité. C'est votre père qui l'a impliqué. Pas vous. Ce n'est pas vous non plus qui teniez l'arme qui a mis fin à ses jours. Alors vous ne l'avez pas tué. Dites-le, insista-t-elle.
Xuoha Lan carra la mâchoire.
— Je n'ai pas tué Ah-Zhan, articula-t-il distinctement.
— Bien. Faites-le rentrer dans votre tête et réfléchissez à un moyen de vous défendre une fois arrivé au tribunal. Nous vous laissons les biscuits.
Elle s'éloigna de la grille, se releva et épousseta ses robes, en balayant la crasse qu'elle avait accumulée lorsqu'elle s'était agenouillée.
Son frère glissa les pâtisseries entre deux fines barres de métal et l'imita, un peu plus incertain. Il sentait qu'il ne devait pas intervenir dans cette conversation et se contenta d'observer, inquiet. Il n'avait jamais vu Xuoha Lan craquer d'une telle manière et n'était pas persuadé que la manière avec laquelle sa sœur lui parlait était celle recommandée en cas de deuil.
— Xuoha Lan, lâcha soudain Lin Zhou.
Un grommellement étouffé lui répondit. Il devait sans doute avoir entamé les biscuits.
— Si je vous dis tout ceci, c'est parce que je veux vous aider. Vraiment.
— Je sais, souffla-t-il depuis l'obscurité. Je sais. Mais vous ne pouvez rien faire pour moi et je ne peux pas m'en sortir, cette fois. Ce que je pense de ma culpabilité ou de mon innocence n'y changera rien.
La jeune femme soupira, puis fit signe à son frère et ils repartirent dans le couloir, s'éloignant de la porte de la cellule sans un mot de plus.
Ils sortirent du sous-sol qui abritait les geôles et quittèrent le bâtiment qui se dressait à sa surface, descendant une volée de marches de marbre clair. De chaque côté, d'immenses loups dévoilaient leurs crocs de roche, les babines retroussées et les yeux figés sur les silhouettes qui arpentaient les allées dallées.
Lin Mo s'arrêta en bas des marches.
— Nous ne pouvons vraiment rien faire ? Lui non plus ?
Sa sœur souffla, le regard au loin. Elle joignit ses mains devant son ventre, et se tourna vers lui, le visage sombre.
— A mon avis, ce n'est pas qu'il ne peut pas.
Elle eut un sourire triste, et se remit à marcher.
— Je pense qu'il ne voit plus pourquoi il essayerait de s'en sortir.
*
— ... Et nous avons tenté de parler avec votre père, mais nous n'avons rien obtenu.
— C'était prévisible...
Xuoha Lan avala un autre biscuit, les yeux dans le vague. Il faisait toujours aussi noir, alors qu'il regarde le mur ou le vide, cela faisait peu de différence.
— Combien de jours avant mon départ ?
— Probablement... un seul. Vous partiriez demain, si l'on en croit la vitesse des préparatifs.
Il posa l'arrière de son crâne contre le mur, fermant les paupières.
— C'est probablement la dernière fois que nous nous parlerons, alors. Avec le départ, ils viendront me... voir... plus souvent. Pour s'assurer que je serai affaibli.
Lin Zhou secoua la tête, même s'il ne pouvait pas la voir.
— Nous nous parlerons encore car vous allez vous en sortir. Vous allez plaider face aux Jades.
— Vous savez comme moi qu'ils ont les preuves qu'il leur faut. Et mon père fera le nécessaire.
Il lâcha un soupir, et reprit un biscuit, le grignotant sans rien dire de plus. Il était parvenu à maîtriser ses émotions, mais un rien pouvait le faire basculer. Il lui arrivait de se réveiller en sursaut, des larmes plein les joues, après un songe où il avait revu la mort de Shen Sizhan. Il lui fallait alors plusieurs minutes, peut-être heures, pour s'en remettre et se composer une attitude plus calme.
Lin Zhou avait vu ce changement comme une bonne chose.
— Où est Lin Mo ?
— Il couvre mon absence.
— Vous devriez partir. Il ne faudrait pas qu'on vous trouve en compagnie d'un meurtrier.
— Je sais choisir mes fréquentations, merci. Je resterai le temps qu'il faudra.
— Nous n'avons rien de plus à dire et les gardes vont bientôt revenir. S'ils vous voient...
Il laissa sa phrase en suspens, mais Lin Zhou savait ce qu'il taisait. Elle pinça les lèvres.
— Vous ne serez plus écoutée du tout si vous êtes surprise à ma porte, insista-t-il. Vous ne pourrez plus rien tenter, alors.
« Comme si vous croyiez réellement que je peux changer quelque chose... » songea-t-elle.
— Vous voulez simplement me chasser, n'est-ce pas ? De quoi avez-vous peur ? Que je voie quelque chose que je ne suis pas censée voir ?
Xuoha Lan rouvrit les yeux, les dents serrées.
— Non, mais vous n'avez aucun intérêt à être vue ici. Et s'ils pensaient que vous êtes complice ? Tout le monde sait que je vous aidais à enseigner aux disciples.
— Je n'ai rien à voir avec la mort de-
— Mais vous n'avez aucune preuve. Nous étions ensemble. Je ne peux décemment pas être votre alibi, railla-t-il.
Il remballa les biscuits restants, les passa par les interstices de la grille, puis s'éloigna et s'assit contre un mur plus loin dans la cellule. Il se fondit dans l'obscurité et Lin Zhou le chercha en vain dans le noir.
— Xuoha Lan, pourquoi vouloir que je parte si vite ? insista-t-elle.
Seul un soupir lui répondit. Puis, un seul mot.
— Adieu.
Elle serra les poings.
— Me repousser ainsi est puéril ! Vous pouvez me parler, vous pouvez me faire confiance. Vous le savez.
— Saluez votre frère de ma part, s'il vous plaît. Prenez soin de vous, Lin Zhou.
La sincérité qu'elle entendit dans cette simple phrase la toucha plus qu'elle ne l'aurait pensé. Ses paupières commencèrent à brûler.
— Xuoha Lan...
— Merci, pour tout ce que vous avez fait. Pour ne pas m'avoir repoussé ce jour-là, lorsqu'Ah-Zhan nous a présentés. Pour m'avoir gardé à vos côtés. Pour m'avoir offert votre amitié.
Il inspira et Lin Zhou se mordit la lèvre, les yeux clos avec force.
— Merci de me croire, articula-t-il. Merci d'avoir voulu me sauver.
Elle essuya rageusement une larme.
— Je souhaite vraiment que nous nous revoyions... dans une autre vie, murmura-t-il.
Lorsque Lin Zhou finit par quitter la porte de la cellule, serrant entre ses mains tremblantes le petit sachet rempli de biscuits, elle abandonna l'idée de cacher l'eau salée qui lui coulait sur le visage.
***
🥺
J'espère que vous allez bien... Ces chapitres ne sont pas joyeux...
Je vous fais la bise, tenez bon. Peut-être que Lanou s'en sortira, Lin Zhou y croit !
A demain ❤️
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