Chapitre XII

— Alors c'est lui, ton nouveau prince charmant, cracha le dénommé Charles en le dévisageant.

— Non, Charles, c'est pas lui, intervint une voix à ses côtés, Henry ne ressemble pas à ça.

Le roux haussa un sourcil. Qu'est-ce qu'ils venaient foutre là, à la fin ? Ils venaient pour Adam ou pour Henry. Il n'y comprenait pas grand chose. Il lança un regard dans son dos mais rien n'avait changé. Adam était toujours accroché à Julien, l'air paniqué, et leur professeur de boxe n'arrivait pas. Il plia légèrement les jambes, commença à serrer les poings. Ils étaient dans une position délicate. Si seulement Henry pouvait se dépêcher un peu.

— Bon... il est bien gentil le rouquin, mais on va pas se regarder en chien de faïence pendant trois heures. Adam, viens. Je fais ça pour ton bien, tu sais ?

— Lai-laisse-moi tranquille, Charles, souffla le lycéen.

— Je t'ai de venir. Obéis. Sauf si tu veux que je tabasse tes potes. Ils ont beau être boxeurs, on sait qu'ils ne feront pas le poids.

Aaron grimaça. Ce Charles avait apparemment bien préparé son coup. Mais il n'aimait pas du tout la manière dont il parlait à Adam. Il avait pourtant l'habitude de donner des ordres ou de voir d'autres en donner, il avait l'habitude de voir des soumis se faire menacer d'une punition s'ils n'obéissaient pas immédiatement. Ici, il parvenait à sentir toutes les menaces sous-jacentes dans la voix de Charles, il sentait l'humiliation, la violence. Quoi qu'il ait envie de faire, ce n'était pas dans l'intérêt de Adam. Ce garçon le mettait vraiment en rage. Il se préparait à se battre quand il aperçut du coin de l'œil le jeune garçon en train de passer près de lui, ses épaisses boucles auburn tombant dans ses yeux bleus. Il se figea. Pendant un instant, il eut l'impression de voir Hugo à sa place, suivant en tremblant son père hors de leur appartement pour le protéger. Il eut envie de lui crier d'arrêter, de bouger pour le retenir, mais rien ne vint. Il restait immobile et muet, pris dans un cauchemar. Était-il donc incapable d'aider ceux à qui il tenait, même lorsque ce n'était qu'un petit peu ?

— Ne vous avisez pas de venir lui faire du mal, grogna soudain une voix qui le sortit de ses pensées, ou je m'occupe de votre cas.

Encore un peu hébété de s'être laissé envahir par la panique, il se tourna légèrement et découvrit Henry. Ce dernier avait passé un bras autour des épaules de Adam et l'avait plaqué contre son torse pour l'empêcher d'avancer. Ses yeux aciers lançaient des éclairs au fameux Charles, lui intimant silencieusement de disparaître de sa vue avant qu'il ne se mette réellement en colère. Mais le chef du groupe d'adolescents se contenta de hausser un sourcil amusé et de désigner Adam avec sa barre de fer avant d'expliquer avec un sourire malsain :

— Je ne sais pas trop à quoi tu t'attends en sortant avec lui, le vieux, mais il ne risque pas de coucher avec toi. Tu ferais mieux de le laisser. On a des choses à régler, lui et moi, et je préférerais que ce ne soit pas fait dans la violence.

— Je sais déjà tout ça, répondit froidement Henry en resserrant sa prise sur Adam, ça ne change rien. Tu ne penses pas que je suis venu sans prévenir les flics ? À votre place, je dégagerai avant d'avoir des ennuis. Et si je vous vois traîner de nouveau par ici, je n'hésiterai pas à les rappeler.

Le garçon aux cheveux noirs grimaça et baissa son arme. Il sembla réfléchir quelques secondes puis soupira. Il fit signe à ses amis de le suivre et se retourna. Toutefois, avant de partir, il lança un nouveau regard à Adam.

— Il se lassera, Adam. Tu ferais mieux de me donner ce que je veux. Si tu le fais, je te promets que je ne te ferais plus de mal.

Il s'éloigna enfin et Aaron put relâcher toute la pression qui venait de s'accumuler dans ses muscles. Il remit le bracelet de Hugo à son poignet, caressant distraitement le cuir pour se calmer. À peine Henry eut-il relâché Adam que Julien se précipitait vers son meilleur ami pour le prendre dans ses bras. Le bouclé se mit à sangloter contre lui et leur professeur passa une main rassurante dans ses cheveux. Il détourna le regard de la scène. Il ne voulait pas voir ça. Il n'avait pas été là pour retenir Hugo, lui, il n'avait pas été là pour lui dire que tout allait bien. Il serra les poings. La culpabilité était si pesante. Si seulement il était resté avec lui ce jour là.

— Aaron, tu veux bien prendre Julien avec toi ? Je vais ramener Adam chez lui.

Il hocha la tête. Adam protesta à cette annonce et Henry le prit dans ses bras. Après quelques secondes à essayer de le rassurer silencieusement et voyant que ça ne marchait pas, il finit par céder.

— Tu viens chez moi. Rentrez chez vous les garçons.

— M-mes parents... ?

— Tu n'as qu'à dire que tu es chez moi, ma mère nous couvrira, s'exclama Julien avec un sourire.

Adam hocha doucement la tête. Aaron soupira. Il ne savait pas pourquoi Adam lui rappelait autant Hugo. Sûrement parce qu'il avait le même air un peu frêle, le même manque de confiance en lui. Pas qu'il était en train de tomber amoureux de lui, loin de là, mais il ne pouvait pas s'empêcher de penser à son petit-ami en sa présence. C'était aussi douloureux que c'était apaisant. Il ferma les yeux. Qu'est-ce qu'il ne donnerait pas pour l'avoir à ses côtés dans l'immédiat ? C'était atroce de ne pas savoir comment il allait.

— Parfait ! Ronniiiie, tu me ramènes, demanda Julien.

— Ouais, sale gamin. Mais une seule allusion à mon copain et je te fais ravaler tes gants, soupira-t-il avec un sourire amusé et légèrement triste.

— Je serais muet comme une carpe !

Le roux leva les yeux au ciel et fit signe au lycéen de le suivre vers sa voiture. Quand ils furent à l'intérieur, il sortit son téléphone. Il l'avait entendu vibrer plusieurs fois pendant que Henry et Julien tentaient de rassurer Adam mais il n'avait pas voulu le prendre. Ses yeux s'éclairèrent à la lecture des messages et il ne put retenir un sourire.

— Je suis attendu. On va devoir se dépêcher, expliqua-t-il à Julien en démarrant.

— Écoute, je sais que tu veux pas en parler mais... Tu es comme un grand frère pour moi, Aaron, et je m'inquiète.

— Tu n'as pas à t'en faire, Julien. Vraiment. Des personnes veillent sur moi et elles vont m'aider à le retrouver. Ça ira bientôt mieux.

— Promis ?

— Promis.

Le brun sourit légèrement et tourna le regard vers la fenêtre, regardant la route qui défilait. Son aîné le déposa au bas de son immeuble avant de repartir chez lui. Les messages qu'il avait reçus étaient de Jean. Il était ici et, apparemment, il y avait du nouveau. 

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