. VIII .


«Much stronger than forever»


Ce soir-là, le château du roi William ouvrit ses portes à plus d'une cinquantaine de prétendants pour Clara. Des princes, des veufs, des nobles de tous les horizons vinrent tenter leur chance. La nuit venait de tomber et, déjà, les festivités commençaient.

La princesse ne s'était pas encore montrée. Elle voulait attendre que tout le monde soit arrivé... Pour formuler son vœu d'amour pour Derek ! Quand cela sera fait, elle partirait -avec quelques gardes, au cas où- le rejoindre et le ramènerait pour l'épouser ! Elle trépignait d'impatience.

Son père n'avait pas lésiné pour cette soirée royale : tout le palais brillait de mille feux grâce aux gigantesques chandeliers de cristaux, un tapis de velours rouge avait été déroulé, d'harmonieux bouquets de fleurs jonchaient les longues tables bien poussées contre les murs, tout avait été astiqué du sol au plafond. Un grand orchestre jouait sans relâche un air mélodieux qui invitait les invités à se mettre à l'aise. William était aux anges ; il allait marier sa fille ! Après tout ce qu'elle avait traversé, elle allait enfin trouver un peu de gaieté. Rien ne pouvait plus le réjouir ! Il pourrait partir sans crainte...

Clara, postée devant une fenêtre du second étage, guettait la lune et les nombreux carrosses qui défilaient dans l'allée. Elle portait une longue robe jaune et une mince tiare dorée. Elle avait enfilé des gants assortis à sa robe ; ce soir, elle saluerait ces princes, mais seul un pourrait lui baiser la main...



Pendant ce temps, dans l'horrible clairière enchantée, le cygne aux yeux verts tapait énergiquement la surface gelée du lac à la seule force de son bec ! Bien que la lune était cachée par d'épais nuages, ses trois amis flamands-roses vinrent l'aider !



Le dernier retardataire, un comte d'une île nordique, arriva. Les portes se fermèrent. Les musiciens cessèrent doucement de jouer, pour laisser le son de trois trompettes intimer le silence pour accueillir les hôtes du bal :

- Sa Majesté le roi William !

Le vieux roi, fort bien apprêté et tout souriant, apparut sur sa chaise roulante. Son intendante le guida jusqu'à son trône où elle l'installa, sous les applaudissements de tous.

- Son altesse la princesse Clara !

De plus grands applaudissements l'accueillirent. Gracieuse comme une danseuse, Clara se présenta à tous. Elle s'éclaircit la voix. Alors qu'elle s'apprêtait à réciter son court discours, trois coups à la porte retentirent soudainement. Clara leva les yeux au ciel. William jeta un coup d'œil accusateur à son intendante, qui regarda Melchior, qui haussait maladroitement les épaules, la liste des invités en main. Le portier alla voir. Loin de se laisser déconcentrer, la princesse inspira un grand coup. Et se figea. Elle vit le portier la fixer avec insistance en désignant le nouvel arrivant avec la tête. Son regard dévia vers le concerné, qui lui souriait. Son cœur loupa un battement et elle ne sut par quelle force ses jambes purent la porter. Comme hypnotisée, elle fit quelques pas dans sa direction. Tous s'écartèrent de son chemin pour lui permettre d'approcher le dernier convive que tous dévisageaient. Elle se planta enfin face à lui, très émue.

- Que... Je...

Il lui ouvrit les bras.

- Je suis là, Clara.

Ignorant les murmures interrogateurs des insignifiants prétendants, la princesse lui sauta au cou ! Derek lui rendit son étreinte.



- Cela ne sert à rien, cette glace est trop solide... soupira Tono.

Les autres flamands-roses abandonnèrent lentement leur besogne, tandis que le cygne s'acharnait, le bec en sang, à creuser le lac gelé.

- Derek, arrête...

Il n'écoutait pas. Il ne voulait pas recevoir sa princesse sous son apparence de cygne !



Clara s'écarta légèrement de Derek. Il portait un élégant costume noir et ses cheveux bouclés étaient très tirés en arrière.

- Comment... Je pensais que tu ne pouvais quitter ce...

- Rien ne pouvait me garder loin de toi. dit-il.

- Mais... Et la sorcière ?

- Elle n'est point là. Profitons de notre soirée, avant que le soleil ne se lève.

Les yeux brillants, Clara sourit de toutes ses dents. Elle croyait rêver. Elle prit le bras de son prince, l'entraîna au centre de la pièce, adressa un signe aux violonistes qui se mirent à jouer et dansa.



Réalisant son inutilité et l'acharnement du cygne, Biscri se mit à gratter la glace avec sa patte. La surface se fissura sur-le-champ !

- J'ai réussi !!! cria l'animal.

Surpris, ses compagnons à plumes observèrent : sous le gel, l'eau du lac mouvait et fracassait son toit ! La glace vola en éclats et les flots furent libérés. Les flamands-roses cherchèrent la lune dans le ciel. Une trompe d'eau s'éleva hors du lac et forma un ovale... Encore un coup de la sorcière ! Derek s'approcha de l'étrange phénomène d'eau et, dedans, distingua des formes familières ; le grand salon du palais du roi William, très éclairé, une foule de nobles qui encerclait un couple qui dansait... Clara ! Clara et... Lui ?

- Impossible...



Clara et Derek dansèrent, les yeux dans les yeux. William et Melchior n'arrivaient plus à réfléchir : qui était ce prince ? Il ressemblait dangereusement au défunt fils de feu la reine Juliette... Mais cela ne pouvait pas être lui. Il était... Qui dansait avec l'héritière ? Personne ne le savait. Sauf elle. Qu'elle croyait !



- Mais qu'est-ce que...

- C'est fou... Tu ne nous avais pas dit que tu avais un frère jumeau, Derek !

Houl mit un coup à Biscri ! Les oiseaux regardaient, impuissants, le miroir d'eau qui diffusait la soirée du bal. La princesse dansait avec un double de Derek ! C'était l'œuvre de la sorcière ! Misère ! Ils craignaient la suite... Tout était perdu.



- Clara ? N'as-tu pas une délicieuse demande à me faire ? glissa Derek.

- Si, bien sûr !

Ils arrêtèrent de danser et se tinrent par la main. La musique cessa.

- Mesdames et Messieurs. commença-t-elle. Père. Merci de votre présence ici, ce soir. J'ai une annonce à vous faire. Aujourd'hui est un grand jour ; j'ai trouvé mon époux.

Mécontent, un prince jeta son chapeau à ses pieds et s'en alla, sous l'indifférence de l'assemblée, ébahie par cette soudaine annonce. William fit signe à son intendante de le conduire jusqu'à sa fille.

- Je voudrais vous présenter mon futur roi !

Elle planta son regard dans celui de l'imposteur.



- Notre union unira nos deux royaumes pour en faire le plus prospère de l'Histoire !

Le cygne secouait imperceptiblement la tête, confus :

- Non...

- Je voudrais profiter de cette nuit pour lui prouver mon amour et faire le plus puissant et le plus magique des vœux...

- C'est un piège, Clara !! cria-t-il vainement.



- ... Devant vous, devant le monde entier, je fais la promesse d'aimer...


Cela ne pouvait pas être possible ! C'était une illusion !


- ... Pour l'éternité...


- Non !


- ... Derek !


- Clara !!

À ce cri, la structure d'eau s'effondra dans sa source. Les nuages révélèrent la lune. Le calme semblait écrasant. Les trois flamands-roses, incapables de bouger et de prononcer le moindre mot, tremblaient en regardant le cygne. Derek avait les yeux humides, fixés vers l'horizon. Il avait perdu. Il déploya subitement ses grandes ailes immaculées et fila vers le ciel.



Des applaudissements et des exclamations de joie retentirent dans tout le palais. Les prétendants cachaient leur déception de ne pas être l'heureux élu mais se réjouissaient tout de même de l'annonce de la princesse. William pleura de joie. Clara enlaça amoureusement Derek.

- À présent, rien ne pourra nous...

Tout à coup, les lumières de la salle s'éteignirent et les vitraux des fenêtres éclatèrent avec fracas ! Les convives sursautèrent et se turent instantanément. Les portes s'ouvrirent toutes seules (et balayèrent le portier) et une tempête s'éleva à l'intérieur du palais ! Terrorisée, la moitié des convives prirent la fuite par les portes de derrière ! Une étrange silhouette se dessina à l'entrée. C'était une femme aux cheveux rouges. Othella !

- C'était trop facile !! articula-t-elle, triomphante.

Puis elle entra dans le palais, comme si elle était chez elle. Elle examina un peu les lieux :

- Je vais me plaire, ici...

Puis son regard tomba sur l'héritière.

- Bonsoir, petite princesse. Nous nous rencontrons enfin...

Elle exécuta une révérence faussement cérémonieuse en pouffant. Clara la dévisagea :

- Qui êtes-vous ?

- Je suis... Celle qui t'a fait déclarer ton amour à un autre...

- Un autre ? De quoi parlez-vous ? Derek est...

- Derek est mien ! coupa-t-elle, hargneuse, mais avec un certain sourire.

Clara la détailla et réalisa qui elle était ! Elle saisit la main de Derek et la serra.

- Vous... C'est vous ! L'affreuse sorcière ! Vous n'avez pas le moindre pouvoir ici ! Il est libre ! J'ai fait un vœu d'amour éternel ! J'ai fait le vœu d'aimer Derek !

Othella ricana.

- C'est qu'elle le répète, cette idiote !

Elle riait tant qu'elle se cramponna le ventre. Clara était mal à l'aise mais tentait de ne montrer aucune trace de crainte.

- Tu as fait un vœu, certes... Mais pas à ton Derek !

- Que...

Derek se mit soudainement à genoux pour baiser la main de la princesse, quelque peu tourmentée. Elle le laissa faire. Mais quand il redressa la tête, ses yeux avaient une teinte jaunâtre. Il sourit machiavéliquement et poussa un terrifiant croassement ! Clara se dégagea tout de suite, tandis que le corps de l'héritier rapetissa, sous les yeux effarés de tous ! Puis, dans un nuage de plumes noires, il devint corbeau ! William perdit connaissance. Clara eut le souffla coupé et ne put crier. Elle jeta un regard de désespoir vers Othella.

- Tu aurais du me le laisser... fit-elle, méprisante. À cause de toi, Derek s'éteint !

- Non !!!

Tout le palais trembla, Clara se rua sur la sorcière mais passa à travers elle et tomba lamentablement sur le sol. L'image de la sorcière partit en fumée et s'évapora. Clara demeura interdite. Les yeux écarquillés, elle se mit à réfléchir très rapidement. Cette femme était Othella, la lanceuse de sorts ! Le vœu n'avait pas fonctionné ! Et Derek n'était pas... Qu'en avait-elle fait ? Des gardes vinrent l'aider à se remettre debout. Elle ne parvenait pas à pleurer. Qu'allait-il advenir ? Les princes qui n'avaient pas fuit s'approchèrent pour la soutenir, elle se dégagea. Elle courut à la porte et fixa le ciel : la lune, pleine, était haute. Elle fronça les sourcils, arracha sa stupide tiare et siffla son cheval !



Victime de la gravité, le cygne retomba lourdement dans un arbre, dégringola sur les branches épineuses, se blessa les ailes et s'écroula sur le sol ! Il se releva et tituba sur ses pattes, sans savoir où aller. Il n'arrivait plus à respirer correctement. Il était condamné ! Ses yeux s'humidifièrent.

- Clara...



Les doigts crispés sur la crinière de sa monture, Clara fonçait à travers les bois !

- Derek !!!


Le cygne avançait péniblement.

- Clara... gémit-il.

Il ne voulait pas mourir dans cette clairière ! Sur son poitrail blanc apparut un cercle doré...



Le cheval de Clara bavait quand il atteignit la barrière rocheuse... Où la cascade ne coulait plus ! Horrifiée, la princesse courut !!

- Derek ?!

Elle ignora le froid et l'humidité de la nuit, se cogna dans chaque pierre, sa robe s'accrocha à chaque épine, mais rien, rien, ne l'arrêta !

Sauf l'inquiétant chant de cygne qui résonna faiblement dans la pénombre. Son cœur loupa un battement. Elle reconnut ce son : c'était le cri d'un cygne qui mourait.

- Derek !!



Le cygne étincela et retrouva sa forme humaine. Appuyé contre un arbre, Derek fit un pas... Et s'écrasa contre le sol de pierre. Inerte.



- Derek ?!

Elle sentit quelque chose lui tapoter la hanche et sursauta : c'était un flamant-rose. Avec un air dévasté, il lui fit signe de le suivre. Elle ne réfléchit pas et obéit. Il la conduisit vers un reste de portail de pierre détruit, dont il ne restait que l'escalier et l'encadrement mural. Elle poussa un cri quand elle aperçut le corps de son fiancé !

- Derek !!

Elle se précipita vers lui et chercha un signe de vie.

- Non, non, non, non, non, non, Derek, réveille-toi, parle-moi, ouvre les yeux, je t'en prie, Derek, réponds-moi...

Elle lui soutint le dos et tenta de le relever.

- Derek, Derek, s'il te plaît...

Le prince ouvrit laborieusement les paupières. Leurs yeux embués se rencontrèrent.

- Clara... Tu es là... souffla-t-il.

- Qu'ai-je fait... Derek... Pardon, pardon...

Elle dégagea ses mèches de son visage et le caressa. Il était gelé. Il lui sourit, pour la rassurer.

- Je ne sens plus rien...

- Tiens bon, Derek ! Nous... Je... Le vœu, je... C'était...

- Je le sais... Merci, Clara... Grâce à toi, je peux partir serein...

- Non ! Je t'en prie...

Il s'accrocha faiblement à ses épaules et déposa un ultime baiser sur ses lèvres.

- ... Je t'aime...

Sur ces mots, une larme coula, ses yeux vert se figèrent et le prince s'éteignit. Sa tête tomba en arrière et il ne bougea plus. Clara se paralysa.

- ... Derek ?

Elle le regarda, chamboulée. Il était mort.

- Non... DEREK !!

Elle enfouit sa tête dans le cou de son aimé et fondit en larmes. Cela ne pouvait pas être vrai ! Elle venait tout juste de le retrouver ! On ne pouvait le lui prendre ! À la limite de la folie, elle hurla vers le ciel :

- J'ai fait ce vœu pour lui... Vous entendez ?! Je n'ai fait ce vœu que pour lui !

Ses plaintes se perdirent dans ses sanglots. Il fallait qu'il se réveille ! Comment pourrait-elle vivre sans lui ? Qu'allait-elle devenir ? Non ! C'était impossible ! Il ne pouvait s'en aller ainsi ! Il était prince ! Il était destiné à régner ! Il lui était destiné ! Pourquoi lui ? Elle voulait le sauver ! Elle avait échoué... Elle serait éternellement inconsolable...

- Un si beau jeune homme...

Clara fut si surprise par cette voix qu'elle se releva sur-le-champ pour en chercher la source ! Hélas, elle ne vit personne !

- Quel gâchis... Il aurait pu devenir le plus splendide des rois.

- Vous ne le connaissiez pas !! hurla-t-elle, entre deux sanglots.

- Ha ha ha. Et toi, Princesse ? Tu as déclaré ta flamme à la mauvaise personne.

- Par votre faute, charogne !!

Un rire éclata juste derrière elle. Elle se retourna et vit Othella, qui venait d'apparaître. Par réflexe, elle se plaça devant le corps de Derek.

- Il nous a quittés exactement comme sa mère ; seul, comme un animal, parce que tu es arrivée trop tard...

- Silence !

- Il est mort libre, n'est-ce point ce que tu voulais ?

- Je le voulais, lui ! Vous l'avez...

- Ne fais pas la malheureuse, tu vas le rejoindre. Son royaume est tien et bientôt...

Trop occupée à évoquer sa future grandeur, Othella ne fit pas attention à Clara qui lui fonça dessus et la renversa ! Elle la saisit par le col et la plaqua par terre ! Othella poussa un cri de surprise ! La colère et le chagrin donnaient à cette princesse une force insoupçonnée !

- Vous ! Avec vos diaboliques enchantements, vous...

Elle comprit quelque chose et ses yeux se remirent à briller.

- Vous avez le pouvoir de le ramener !?

- Correct...

- Faites-le !

- Ha ha, à tes ordres, princesse !

Elle la gifla du revers de la main pour la dégager. Clara roula sur des ronces.

- Seulement si tu arrives à me battre !

Sur ce, un coup de tonnerre retentit et, dans un nuage de fumée rouge, la sorcière se métamorphosa en une sorte de terrifiant grand lynx noir ! Elle poussa un cri d'ours et une paire d'ailes géante, semblables à celles des chauves-souris, se déployèrent dans son dos ! Clara se figea d'effroi. La créature ailée ! C'était elle ! Aux pouvoirs redoutables ! Qui n'est pas ce qu'elle semble être !! Elle n'eut pas le temps de penser à quoi que ce soit : la créature vola vers elle ! Clara prit la fuite ! Comment combattre ce monstre ?! Elle n'avait pas d'arme et que pouvait-elle contre de la magie noire ?! Elle était partie sans ses soldats ! Elle était perdue ! Mais hors de question de se rendre ! La survie de Derek en dépendait ! Alors elle affronterait cette sorcière ! 

Coûte que coûte ! Elle réfléchit à un plan : quel était son point faible ? Elle se prit les pieds dans une racine et s'écrasa par terre ! Elle se releva et inspecta les environs : plus de trace de la créature ! Elle resta aux aguets. Rien derrière, rien devant, rien à droite, rien à gauche, alors... Ciel ! Elle se souvint trop tard que la créature avait des ailes et se sentit saisie par les épaules et emportée dans les airs ! Non, pas ça ! Elle ne voulait pas mourir si facilement ! Elle s'agrippa à temps aux terribles serres de la bête au moment où elles la lâchèrent ! Mécontente, la créature la secoua pour la faire lâcher prise. Mais Clara tenait bon, malgré la vitesse ! C'est quand elle fut au-dessus du lac qu'elle se décida à se laisser tomber ! Elle plongea dans l'eau glacée en espérant que la créature la suivrait pour l'y noyer ! Mais elle resta à voler en rond dans le ciel, parée à attaquer ! Frigorifiée, la robe lourde, Clara sortit du lac et se dépêcha de saisir des pierres qu'elle jeta hargneusement vers la bête. Cette dernière la regarda un moment et ressentit une certaine pitié envers elle. Croyait-elle vraiment pouvoir l'avoir à coups de cailloux ? Ce n'était pas sérieux... Pour qui la prenait-elle !? Elle fut fort déçue : elle pensait que cette altesse caractérielle lui offrirait un affrontement tant soit peu intéressant ! Tant pis ! Après tout, elle n'était qu'humaine ! Elle fonça sur elle. Clara se prépara à être frappée de plein fouet ! Quand un flamant-rose émergea d'un buisson et lui lança un long bâton bien connu ! Son arc ! Elle le réceptionna à l'instant que la bête la renversa !

Plaquée sur le dos, Clara vit la créature ouvrir la gueule, prête à la dévorer ! Elle brandit son arc au dernier moment et la gueule de la bête le brisa en deux ! Clara regarda pitoyablement les deux morceaux de son arme, tandis que la créature recrachait les échardes qu'elle avait avalées. Puis elle replongea ses crocs vers le visage de l'héritière pour, cette fois, ne pas la louper ! Tout se passa très vite ; tentant le tout pour le tout, Clara se redressa et, usant de toute la force de ses bras, planta ses deux bouts de bois pointus dans la poitrine de son ennemie ! 

La créature ailée se raidit et, voyant sa blessure, afficha un regard désespéré. Elle ne put rien faire d'autre. Clara ne tremblait point. La clairière devint insupportablement silencieuse. 

Othella tomba au ralenti sur le côté. Sa monstrueuse dépouille se changea en poussière dès qu'elle effleura le sol ! Clara resta stupéfaite. Tout était calme ! Était-ce fini ? Elle s'assit et observa, incrédule, le tas de poussière se faire emporter par le vent. 

Est-ce que... Avait-elle réussi ? Elle se releva, hagarde, et, sans attendre, courut à la recherche de celui qui comptait le plus à ses yeux.

- Derek !

Elle retrouva son corps comme elle l'avait laissé. Elle s'en approcha à pas lents, hésitante.

- Derek ?

Elle s'agenouilla près de lui, mit ses mains sur ses épaules et posa sa tête sur sa poitrine, attentive à un battement de cœur... Qu'elle n'entendit pas.

- Derek...

Elle ferma les poings, abattue. Elle ne put retenir ses larmes.

- Derek... Mon brave prince... Cette sorcière ne te fera plus jamais de mal, je te le promets... Je t'aime tant... Je t'en prie... Reviens-moi...

Elle resta la tête couchée contre son torse, incapable de faire le moindre mouvement. C'est alors qu'elle remarqua que l'obscure clairière s'éclairait légèrement... De la poussière dorée tomba du ciel. Croyant à une attaque, Clara se coucha sur Derek ! Mais ces minuscules étincelles glissaient lentement autour d'eux. Les branches des arbres se mirent à bourgeonner, les buissons s'étoffèrent et leurs épines disparurent, de la verdure apparut sur chaque bloc de pierre, des oiseaux entonnèrent un chant à l'unisson... Dans un coin, entre ses deux acolytes, Biscri leva les ailes pour recevoir cette pluie magique... Et resta flamant-rose ! Ce bois ensorcelé retrouvait ses couleurs ! Il était libre !

- Clara ?

Clara sursauta : Derek la contemplait.

- Derek ?!

Un sourire radieux collé au visage, il haussa deux fois les sourcils. La princesse se jeta à son cou, en éclatant en pleurs de joie ! Son prince était de retour ! Il rit et la serra plus fort contre lui !

- Tu es vivant, tu es vivant, quel miracle !

Toujours enlacés, ils se mirent debout et s'examinèrent.

- Tu es blessée !

- Ça a marché ?

- Clara, tu m'as sauvé !

- Je...

Ils s'embrassèrent passionnément. Ils s'appartenaient. Enfin. Ils s'étaient retrouvés. Ils avaient vaincu le sort. Combattu les forces maléfiques. Ils allaient rentrer ensemble. Et rien ne pourrait plus jamais les séparer.

- Clara...

Derek lui tint les mains et mit un genou à terre. Clara rougit et se retint de pouffer ; elle savait ce qui allait suivre. Il lui faisait sa demande en mariage. Ici. Sans alliance. Sans témoin. Alors qu'ils étaient sales et fatigués. Mais cela lui était égal. Ils avaient assez attendu !

- Veux-tu m'épouser ?

- Oui ! dit-elle sans hésiter, les larmes aux yeux.

Ils se serrèrent à nouveau dans les bras, gonflés de bonheur.

L'aurore se leva. Sa fiancée lovée contre son torse, Derek ferma les yeux et apprécia de ressentir cette lueur. C'était terminé.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top