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Des semaines plus tard

Cela fait maintenant un moment que je suis emprisonné ici. Je ne sais pas exactement combien de temps, au moins plusieurs semaines, ça, c'est certain, mais combien exactement ? Aucune idée...

Les savants qui me détiennent ici ont découvert que mon pouvoir venait de mon sang, ils ne savent pas pourquoi cela m'arrive, ni ce que ça fait exactement, mais apprendre que cela venait de mon sang que c'est potentiellement transmissible les a fait redoubler d'effort.

Ils m'ont fait des tests de plus en plus... inhumains, c'est le seul moyen de décrire cela, inhumain, juste inhumain.

Ils ont cru que je pouvais me régénérer, ils m'ont donc écorché une partie du bras droit et la chair a repoussé, plus dur que jamais. La douleur a failli me faire m'évanouir, la peur et le dégoût de voir ma peau à vif m'a rendu malade un long moment, mais ce n'était que psychologique, apparemment, mon corps étant "en parfait état".

Ils se sont dits que je pouvais faire repousser mes membres et organes manquants, ils m'ont arraché deux doigts de la main gauche. Ils n'ont toujours pas repoussé, bien sûr, pas vraiment du moins. Je ne les vois pas, mais je les sens. Les autres les voient et les sentent. J'attrape des objets avec des doigts qui ne sont pas, qui ne sont plus et qui sont pourtant plus forts qu'avant, plus destructeurs, plus robustes, bien moins fragiles... Ils ne le savent pas, bien sûr. Il vaut mieux qu'ils ne sachent pas, je pense... je ne dois jamais leur faire confiance, jamais, jamais, jam–
Cela a fait bien moins mal que l'écorchement d'ailleurs, mes nerfs ayant apparemment diminué ma sensation de la douleur et ils le font à chaque fois qu'un de ces types en blouses s'approche de moi. C'est très très inconfortable de sentir son corps s'engourdir, de sentir ses sens perdent leur sensibilité, même temporairement, comme si on devenait spectateur de son propre corps, comme si ce n'était pas mon corps qui subissait ça, tout en sachant que c'est bien moi, c'est très étrange, très très étrange...

Une autre expérience a lieu aujourd'hui, que vont-ils tester sur moi cette fois-ci ? Peut-être vont-ils tenter de me tuer ?
Je secoue la tête, me répondant tout seul.
Non non, ils ne tenteront jamais ça. Si je meurs, ils n'auront plus personne, rien de plus qu'un cadavre en décomposition. Ils vont sûrement tenter tout ce qu'ils peuvent imaginer qui ne tue pas, pour l'instant en tout cas.

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Le garde est là, le même que d'habitude, le même que toujours. Comme les autres, il ne voit en moi qu'une expérience scientifique, qu'un rat de laboratoire, qu'une bête ressemblant à un humain...

Il ne dit rien, pas un "Bonjour", pas un "Suis-moi", il ouvre ma porte, ma prison, puis, se retourne, avançant dans une direction, cette direction, sans m'attendre. Il sait que je ne peux rien faire de toute façon. Il sait que je n'ai aucune échappatoire. Il sait que je vais donc le suivre...

Je marche en silence, le rattrapant facilement.

Draken Arkales et ses sbires m'attendent dans la salle. Il y a de nombreux bocaux en verres maintenant, ils en remplissent au moins un par expérience, c'est donc normal.

La salle est d'ailleurs un peu plus remplie à chaque fois que j'y viens, de nouveaux équipements, de moins en moins usés, de nouvelles personnes et d'autres choses. De temps en temps, c'est la salle elle-même qui semble s'agrandir, ce n'est arrivé qu'une fois jusqu'à présent, mais cela m'étonnerait que cela n'arrive pas à nouveau. 

Je me couche sur le même lit muni d'attaches, cela semble être la seule chose qui ne change pas. En même temps, ils paraissent toujours commencer par me tester là-dessus, parfois, ils me prélèvent aussi quelque chose, souvent du sang, d'ailleurs.

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Je me réveille, les savants, et surtout le chef fou, me regardent avec intérêt. Qu'est-ce qu'ils m'ont prélevé cette fois ?
Je sors du lit, m'examine du regard. Il me manque toujours que deux doigts à ma main, ce n'est pas ça. Mes bras et mes jambes sont toujours là. Je me tâte le reste du corps, mais rien ne semble manquer, même si je ne fais absolument pas confiance à mon sens du toucher. Pas depuis qu'il m'affirme que mes doigts manquants sont parfaitement présents.

Je me tourne vers les scientifiques, cherchant le ou les nouveaux bocaux. Ils ont l'impression de remarquer mon regard interrogateur, car leur mue interrogative se transforme en grand sourire, l'excitation présente dans leur regard ne changeant pas du tout.
Un des blouses blanches agite le bocal dans sa main, attirant mon regard vers lui.
...
...
Mon cerveau semble s'arrêter, mon cœur cesser de battre pendant que j'essaye de comprendre ce que je vois de mes deux yeux... Qu'est-ce que je vois ?
...
...
Un autre œil.

Ma tête tourne dans tous les sens, cherchant un miroir ou n'importe quel objet réfléchissant me permettant de comprendre ce qu'il se passe, de nier cette réalité qui ne peut pas être vrai. Je vois parfaitement bien ! JE. NE. PEUX. PAS. AVOIR. UN. ŒIL. EN. MOINS !

Eh bien si...

Ma main se pose sur ma bouche, tentant de m'empêcher de vomir. Je vois... je vois... je vois mon œil, la cavité de mon œil, vide, entièrement vide... C'est dégouttant, déroutant, juste ignoble.
Je ferme mon œil gauche, mais je continue à voir. Je vois mon orbite vide avec mon orbite vide. Comment est-ce possible ? Pourquoi est-ce possible ? C'est bien bien pire que mes doigts, mais est-ce le pire ? Que vont-ils me faire ? Où vont-ils s'arrêter ? À quel moment va t-on, enfin, me laisser mourir ? Est-ce que je peux vraiment mourir ?

Des larmes coulent de mes deux yeux. Elles sont toutes salées.

–Il semble qu'il n'y aucun changement quoi qu'on lui enlève.
Il ne me regarde plus.

Aucun changement ? Quelle blague !
Bien sûr, je ne peux rien dire, même si j'aimerais crier. S'ils savaient, ils feraient d'innombrables tests sur les "bouts manquants"...

–On va pouvoir passer à la prochaine phase maintenant. Nous allons tester sa puissance sanguine sur–
Un des savants à qui il parle se racle la gorge, l'interrompant.
–Monsieur, il est encore là.
Il me pointe du doigt.

Le maître du lieu regarde le garde m'accompagnant, le gratifiant d'un regard noir. Le garde semble paniqué, m'appelle et me force à le suivre jusqu'à ma cellule.

Au moins, de ce que j'ai compris, il me semble qu'il devrait y avoir bien moins de tests que d'habitude ? Enfin, de test aussi dérangeant du moins. À moins, qu'ils ne tentent avec de plus grandes quantités de chairs manquantes pour trouver ma limite ??? Non non non, pas possible, ce n'est pas ça, c'est certain, c'est certain. C'est certain, non ??

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Cela fait plusieurs jours maintenant que rien ne s'est passé, qu'aucune expérience ne s'est déroulée, aucune sur moi, en tout cas. Peut-être se contentent-ils du sang qu'ils m'ont prélevé, pour l'instant ?

Il semble que je devrais vraiment apprendre à la fermer, même mentalement...
J'entends des bruits de pas dans ma direction, assurément le garde qui m'amène à la salle d'expérimentation.

Je me couche, comme à chaque fois, sur la table. Ils m'attachent, mais ne m'endorment pas cette fois-ci. Je ne suis pas sûr de si ce changement est une bonne ou une mauvaise chose, à vrai dire.

J'entends un autre bruit de pas arriver. Il y a une nouvelle personne ? En vérité, la question serait plutôt "Pourquoi ils l'attendent ?"
De ce que j'ai compris, c'est Draken Arkales le personnage le plus important de ce laboratoire donc, soit c'est quelqu'un d'encore plus haut, soit c'est un "client", quoi que puisse être ce que celui-ci pourrait bien vouloir, soit c'est... quelqu'un comme moi...

Trois gardes arrivent dans la salle, poussant une table d'expérience semblable à celle où je me trouve. Sur la table, se trouve un enfant qui doit avoir une vingtaine d'années, donc bien plus âgée que moi.

–Bien, enfin là. Placez-le à côté de l'autre.

Et, c'est ce qu'ils font. Si je n'étais pas totalement enchaîné, je pourrais facilement le toucher.
Contrairement à moi qui reste très calme, lui ne cesse de se débattre, essayant de s'échapper, espérant y arriver. Il s'habituera, c'est ce que j'ai fini par faire, malheureusement...

–Commençons le test.
Annonce Draken se fichant totalement des tentatives désespérées de l'adolescent.

Un d'eux me pique avec une seringue, prélevant un peu de mon sang. Rien de bien étrange jusque-là. Enfin, ils m'ont déjà pris pas mal de sang depuis que je suis là, mais j'imagine qu'ils veulent "juste" du sang frais.

Il continue en injectant mon sang à l'intérieur de l'autre "participant". J'imagine qu'ils veulent tester ce que mon sang fait sur d'autres humains, puisqu'il est censé contenir mon pouvoir ?

Il semble que rien ne se passe ? Pourtant, nous ne sommes pas détachés et les savants ne bougent pas d'un pouce.

Ah ! Quelque chose se pa–
Ma tête tourne tandis que je me vomis presque dessus. Il... l'autre... Il est en train de... de changer ! Sa tête est devenue verte, son corps est tordu dans tous les sens, il crie, de douleur, de peur, de souffrance.

–Il est déjà mort.
Je murmure persuadé que je ne me trompe pas, sans même savoir comment je le sais. Je le sais, c'est tout.

Et, comme je le pensais, il est mort. Son corps a fini par imploser, ne laissant derrière lui qu'une table de métal tâchée de sang et d'autres fluides en tout genre, seul souvenir que quelqu'un a pu être ici à un moment...

Mon bras droit a, en me tournant, cassé son attache, me permettant de tourner la tête assez loin pour ne pas me vomir dessus, c'est le sol qui reçoit tout. Les parties "fantômes" de mon corps me font atrocement mal, comme s'ils me disaient que c'était ma faute si l'enfant est mort, que j'aurais pu, dû, faire quelque chose, quoi que ce soit. Quelque chose heurte ma... tê... t... e...

Fin du chapitre

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