Chapitre 2 : Un cadavre bien ennuyeux
Ce matin-là, les ouvriers de l'entreprise de construction arrivèrent devant les grilles délimitant le chantier du nouveau centre de balnéothérapie qui allait attirer une clientèle plutôt fortunée dans un avenir proche. A l'heure actuelle, le terrain où pousserait le bâtiment principal ressemblait plutôt à un champ de guerre. La parcelle, jouxtant la propriété du maire, avait été défrichée et il allait falloir creuser assez profondément pour les piscines et bassins qui allaient composer l'offre des lieux.
Le contremaitre était sous pression. Le maire en personne avait investi dans le projet et il ne pouvait pas se permettre le moindre retard sous peine de perdre de futurs chantiers dans la région. Après un bref briefing autour de l'habituel café matinal, ses troupes se répartirent selon les postes annoncés quelques instants plus tôt. Satisfait, il étala à nouveau les plans et, avec son adjoint, décida des différentes équipes qu'il allait falloir engager pour la suite des travaux.
Jean-Paul, grutier de métier depuis bientôt trente ans, s'était réveillé de fort méchante humeur ce matin. Hier soir, il s'était à nouveau pris la tête avec sa femme pour une sombre histoire de rideaux élimés. Elle lui avait une nouvelle fois reproché son soi-disant avarice qui s'apparentait plutôt, selon lui, à des économies. S'il voulait réaliser son rêve de retraite au soleil dans quelques années, il ne pouvait pas se permettre la moindre dépense inutile. En se dirigeant vers la parcelle qui leur avait été attribuée, il continuait de grommeler dans sa barbe...
- Qu'est-ce que tu dis ?, lui demanda le jeune Milo qui l'accompagnait partout depuis des jours.
- Rien, répondit-il sèchement à son jeune apprenti avant de s'adoucir devant son air interloqué. Que dirais-tu de prendre la grue en main aujourd'hui ?
Le jeune homme, en formation sur le terrain depuis quelques jours, sauta de joie devant l'opportunité d'enfin mettre en pratique ce qu'il avait appris et cela eut le don de faire retrouver le sourire à Jean-Paul. Ce n'était pas tous les jours qu'on lui demandait de former un jeune aussi motivé par ce dur métier.
S'emparant de la clé de l'engin, Milo se jeta sur le siège du conducteur et entama une série de manœuvres pour se positionner sur la partie du chantier qu'ils allaient devoir creuser aujourd'hui. Quelques instants plus tard, la pelle était en action sous la direction experte de Jean-Paul.
Au bout d'un quart d'heure à peine, ce dernier leva brusquement la main faisant du même coup stopper son apprenti qui descendit de la grue rapidement, la peur au ventre d'avoir fait une bêtise. Il retrouva Jean-Paul accroupi devant le trou. Sur les dents de la pelle pendaient des lambeaux de tissu à moitié décomposés.
- N'approche pas !, lui ordonna le grutier, pâle comme un linge. Va vite chercher le contremaitre !
Milo courut aussi vite qu'il put et interrompit la réunion de chantier :
- Il faut que vous veniez !, s'écria-t-il tout en essayant de reprendre son souffle. Il y a un problème.
Le contremaitre sortit rapidement pour constater l'arrêt de toutes les machines aux alentours. Il sentit un frisson lui parcourir l'échine. Pourvu qu'il n'y ait pas eu d'accident ! Cela ne pourrait que lui apporter une mauvaise publicité et il n'avait vraiment pas besoin de ça. Il marchait sur des oeufs avec ce chantier.
- Que se passe-t-il ? Pourquoi vous êtes-vous arrêtés ?, demanda-t-il à son grutier, inquiet.
Le visage blême, ce dernier se contenta de lui désigner la fosse fraichement creusée. Le contremaitre se pencha et, émergeant de sous la terre retournée, il aperçut un crâne qui le regardait de son œil vide.
Il pâlit à son tour. Il y avait effectivement un problème et cela risquait de lui faire prendre bien du retard sur son planning...
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