/6/
Les jours s'étaient étirés, semblables aux ombres longues d’un crépuscule sans fin. Sirius se sentait comme un spectre, errant à travers le château, une silhouette fragile et brisée, noyée dans des pensées trop lourdes pour être portées. Les regards de Remus, les gestes pleins de bienveillance, ces petites attentions qui avaient marqué leur silence partagé… tout cela tournait dans son esprit, chaque sourire de Remus comme un rayon de lumière qu’il fuyait pour ne pas y être trop exposé.
Mais aujourd'hui, quelque chose était différent. La distance, l’indifférence qu'il s’était efforcé d’ériger entre lui et le monde semblait plus lourde, plus cruelle. Et plus il essayait de s'échapper, plus il ressentait ce vide intérieur, cette souffrance qu’il ne pouvait plus ignorer. La nuit précédente, la douleur avait été trop forte, trop poignante. Il avait fini par céder, se laisser engloutir par le tourbillon, par la tempête de pensées sombres qui l’envahissaient chaque nuit.
Ce matin, au lieu de se cacher, au lieu de fuir comme d’habitude, il se leva avec une impulsion qu’il ne comprenait pas tout à fait. Il avait besoin de parler. De dire ce qu’il n’arrivait pas à faire sortir.
Quand il entra dans la chambre de Remus, il était encore à moitié engourdi, un mélange de confusion et de colère bouillonnant dans sa poitrine. Remus était là, assis sur son lit, un livre entre les mains, mais ses yeux étaient rivés sur Sirius dès qu'il entra. Leurs regards se croisèrent, et Remus, comme toujours, sembla chercher quelque chose derrière la façade froide que Sirius essayait de dresser.
Sirius, pris de vertige, se sentit soudainement vulnérable. Ce qui était habituellement si facile à ignorer, ce poids dans sa poitrine, ce poids dans son cœur, semblait trop lourd pour être porté plus longtemps. Il n’arrivait plus à respirer.
— *"Remus…"* Sa voix était brisée, presque inaudible, mais Remus n’eut aucun mal à l’entendre. Il reposa son livre et se leva immédiatement.
— *"Qu’est-ce qui se passe, Sirius ?"* demanda Remus, les yeux emplis de la même inquiétude douce qui le caractérisait toujours. Il s’approcha lentement, hésitant, comme s’il avait peur de faire un faux mouvement.
Sirius se mordit la lèvre inférieure. C’était comme si tout ce qu’il avait refoulé, tout ce qu’il avait gardé à l’intérieur, s’apprêtait à exploser. Ses mains tremblaient, sa respiration s’accélérait.
Il se tourna vers Remus, les yeux remplis d’une douleur qu’il ne pouvait plus dissimuler. Un instant, il se sentit perdu, comme un enfant perdu dans la foule, mais la vision de Remus, si proche, si douce, lui donna la force de continuer.
— *"Remus, je..."* Il s’arrêta, incapable de trouver les mots. Il sentit sa gorge se serrer. Il ferma les yeux, et un soupir lourd échappa de ses lèvres. *"Je n’ai plus la force de me cacher. De faire semblant. De prétendre que tout va bien."*
Remus ne dit rien, mais son silence était plus parlant que n'importe quel mot. Il attendait. Et cela en disait long.
Sirius se sentait comme un volcan prêt à entrer en éruption, les mots, les émotions, tout se bousculait dans sa tête. Il ne pouvait plus supporter ce poids. Plus aucun mot ne pouvait suffire à apaiser ce qui brûlait à l'intérieur de lui. Alors il laissa échapper ce qu'il avait retenu si longtemps, comme une confession qui lui brûlait les lèvres.
— *"Je t’aime, Remus."*
Les mots résonnèrent, lourds, puissants, mais simples, comme s’ils avaient été là tout le temps, tapis dans l’ombre, attendant juste le moment où Sirius oserait les faire sortir. Il n’avait jamais dit cela à voix haute. Il n’avait jamais imaginé que ce jour viendrait. Mais maintenant qu’il l’avait dit, il se sentit étrange, comme si une partie de lui venait de se briser, de se libérer.
Remus resta figé, les yeux rivés sur Sirius, un éclair de surprise traversant son regard. Il n’avait jamais imaginé que Sirius dirait ces mots. Pas à lui. Pas maintenant. Pourtant, à cet instant, quelque chose se brisa dans la froideur qu’ils avaient mis entre eux. Il s’approcha lentement de Sirius, sa main effleurant son bras, ses yeux remplis de douceur.
— *"Tu n’as pas besoin de te cacher, Sirius,"* murmura Remus. *"Je… je t’aime aussi. Ça a toujours été le cas. Depuis… depuis le début."*
Sirius, dans un élan de vulnérabilité, ferma les yeux, une lueur de soulagement et de douleur dans le regard. Il n’avait jamais cru que Remus ressentirait la même chose. Il n’avait jamais cru que quelqu’un pourrait l’aimer après tout ce qu’il avait fait, après tout ce qu’il avait laissé derrière lui.
Mais Remus était là, toujours là, avec lui.
Sirius tendit la main et la posa sur le bras de Remus, une prise faible mais pleine de signification. Il n’avait pas besoin de mots maintenant. Ils se comprenaient, tout simplement. Un silence confortable s’installa entre eux, un silence doux, presque sacré. Et dans ce silence, Sirius se laissa enfin aller.
Les mains de Remus se posèrent sur ses hanches, et doucement, sans précipitation, il l’attira vers lui. Les lèvres de Sirius s’entreouvrirent, et dans ce mouvement hésitant, ils se rapprochèrent, leurs fronts se touchant, leurs respirations se mêlant. Les gestes de Remus étaient pleins de tendresse, comme s’il avait peur de briser quelque chose de fragile.
— *"Je suis là, Sirius. Je serai toujours là."* murmura Remus, et c’était tout ce qu’il avait besoin de dire.
Les lèvres de Sirius effleurèrent doucement celles de Remus, puis leurs bouches se rejoignirent, lentement, timidement d’abord, puis avec plus de douceur, plus de certitude. Le baiser était tout sauf pressé. C’était un baiser d’amour, de compréhension, de guérison.
Sirius sentit son cœur se serrer dans sa poitrine. C’était tout ce qu’il avait toujours voulu, mais qu’il n’avait jamais cru pouvoir avoir. Dans les bras de Remus, il ne se sentait plus brisé. Il se sentait entier, enfin.
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