Prologue
Aidann fixait d'un air absent le bol d'eau clair, où reposait son peigne carmin. Tenant les tissus de ses amples manches d'une main, il prit de l'autre le peigne aux dents de pierre. Son éternelle natte défaite, ses cheveux tombaient en une cascade ébène jusqu'à ses pieds - effleurant de leurs pointes huilées le sol de marbre.
- Aidann, tu n'y arriveras pas tout seul. Laisse-moi t'aider, pleurait une voix dans son dos.
- Merci.
- Mon fils, quelle apprubte décision tout de même, partir, loin des tiens. Et pourquoi ! Je ne le sais toujours pas !
Les mains maternelles - longues et pointues d'ongles rouges sang - avaient saisit le peigne. Transformé par ce nouveau propriétaire, il semblait mordre les cheveux, tirer les courbes lisses sans douceur.
- Je te l'ai déjà expliqué.
- Oui, enfin, Douce Mirabaille ! Voir le bout du monde n'est pas une raison valable !
Aidann gardait son regard sur le sol, et sentait sa nuque trembler sous les tiraillements de plus en plus violents. La voix continuait ses plaintes, chargée de vieilles larmes.
- Quelle cruauté, voilà maintenant que tu veux couper cette sublime chevelure, que ta mère à nourrit d'huiles précieuses aux raisins et aux roses, et de tout cet amour ! depuis ta tendre enfance ...
Aidann ne répondit rien, une mèche tomba devant ses yeux baissés. La mère tremblante la ramena rapidement sous son emprise, et ses ongles éraflèrent légèrement le front silencieux.
- Enfance de laquelle tu n'es d'ailleurs toujours pas sortit ! Ton visage est encore imberbe, tes yeux sont encore si grands, et tu veux déjà me quitter ! Vraiment, je ne devrait pas te laisser partir !
- Je peux finir seul, maintenant. Merci.
- Quelle froideur ! Oh, Aidann, peut-être ne te reverrais-je jamais ! Laisse-moi te prendre dans mes bras.
Une paire de bras blanc jaillit de son dos, et ensérèrent son coup, le plaquant contre un corps maigre et tiède. Les ongles pourpres courraient sur les joues d'Aidann, palpant chaque recoin de son visage, comme pour en mouler la forme - où les rondeurs de l'enfance persistaient.
- Ne me quitte pas, oh, Aidann ! Ne me laisse pas seule !
- Nous avons déjà eu cette conversation, s'emporta l'enfant taciturne, qui s'arracha à l'étreinte bouleversée. Tu n'es pas seule, tu as deux autres enfants, dont il sagirait peut-être de t'occuper ! Et je ne parle pas seulement de leurs cheveux, ajouta-t-il devant le regard humide et plein d'incompréhension.
- Comment peux-tu me dire pareilles choses, mon fils ! Oh, AIdann, Aidann ! T'ais-je fait naître pour que tu me quitte ?
***
On dit qu'Aidann est partit, avec un baiser pour son frère, des pleurs silencieux pour sa soeur - ses chères têtes blondes. Il avait tranché ses cheveux, tranché ses liens, tranchés ses souvenirs. Il partait, pour l'ailleurs, car il le fallait, et il le savait. Sa chair et son être encore si jeune tremblait du départ, non pas de peur, mais d'impatience: Aidann su alors, qu'il ne serait jamais fait pour autre chose que pour partir.
Certains l'aurait croisé dans le désert, les Epouses, qui bien vite le remirent sur sa roue - c'était un enfant, peut-être, alors assoiffé et affamé, surement, mais un homme, et il devait partir. Aidann ne restait jamais. On dit qu'il aurait croisé une vieille diseuse de bonne aventure, à Kraaal, la Ville au débouché du désert immense. Il l'aurait emmené, avec son époux, partir - il est des êtres comme ça, qui part le regard se retrouvent liés, qui part l'âme savent qu'ils doivent partir, maintenant, ensembles. Et puis, cette petite esclave - Sinaya - insolente, qui fuyait les Epouses. Petite fille, si fière et pleurnicharde, elle préférait la liberté crue que les serres de la destinée traditionnelles des gardiennes du désert. Aidann avait détaché ses chaines sans un mot, et l'avait emmené. Ce drôle de groupe ne passait certes pas inaperçu, dans les villes et les désert, puis un jour, ils partirent vers là où on ne part jamais - on ne parla plus d'eux.
Plus tard, Sinaya, penché sous le poids de l'âge, racontera qu'ils étaient arrivés devant la frontière émeraude, là où le sable accouche les fleurs, où les rivières rongent la terre, et où la verdure épousait le ciel. L'air, disait-elle était comme l'odeur d'un puit neuf, si pur et si fort, qu'elle se croyait avoir atteint les altitudes les plus hautes. En souriant, elle se rappelait ses grosses jupes colorées - qu'elle avait volé un jour à une fillette aux dents du bonheur - qui s'empêtraient dans les flaques de boue et s'accrochait aux mousses collantes. On dit que sous ces arbres, il faisait toujours froid et presque nuit, et que là-bas, entre les fleurs blanches et les cris d'oiseaux aux plumes comme des feuilles, habitent les êtres-diaphanes.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top