Épilogue

Et voilà...

L'histoire arrive à sa fin. Et j'ai tellement aimé écrire cette petite romance entre Emil et Raphaël que ça m'a donné envie de poursuivre l'aventure avec eux *.*, sur une suite en mode "romance de Noël".

Qu'est-ce que vous en pensez? Cela vous plairait qu'il y ait une suite?

En attendant, je vous laisse avec l'épilogue, pour vous donner un petit avant goût...

*

Décembre,

Quatre mois plus tard.

            La neige tombe sur la capitale. C'est rare qu'il neige à Paris. On commence à avoir froid dans notre minuscule appartement parisien, sous les toits. Capucine a insisté pour allumer les chauffages, malgré la hausse du prix de l'électricité. Elle dit qu'il vaut mieux payer plus cher que de mourir d'hypothermie.

            Mes parents n'ont pas été ravis que j'arrête l'école de commerce. Mon père m'a demandé plusieurs fois si c'était vraiment ce que je voulais. Voyant que j'étais déterminé, il a fini par accepter – d'autant plus lorsque j'ai reçu ma notification positive d'inscription à l'université. Je pense qu'il n'acceptera jamais l'idée que je veuille faire de l'écriture mon métier. Alors, pour le rassurer, je m'efforce de lui répéter que je compte être éditeur ou libraire. J'ai quand même repris l'écriture d'un roman, tout en continuant de rédiger mon journal intime. Ce côté introspectif me fait du bien. Et qui sait, peut-être découlera-t-il sur l'écriture d'une romance estivale, fortement inspirée de mon histoire d'amour avec Emil un jour. Certes, écrire ne me rendra pas riche, ni célèbre. Ce sera sûrement difficile, mais au moins je serai heureux, entouré de livres et à ma place.

            Emil m'encourage dans ce sens, il m'encourage toujours dans tout ce que je fais.

            Lui évolue en dent de scie. Il y a des jours où il va très bien et continue d'être le garçon joyeux et optimiste que j'ai rencontré en Bavière. À d'autres moments, il a si mal à la tête qu'il se mure dans le silence. Je ne le lui reproche pas, c'est sa façon de gérer, et je ne suis pas là pour le soulager, je peux seulement l'écouter. Il tente de réguler sa prise d'antalgique. Je lui ai fait promettre de m'en parler s'il se sentait replonger. Il est retourné aux Beaux-Arts en septembre. Ses professeurs continuent de louer ses talents pour le dessin. Il m'envoie souvent ses croquis et il n'en finit pas de m'impressionner.

            J'aime tout ce qu'il fait de toute façon.

            Mais il me manque.

            J'ai beau l'appeler tous les jours, parler avec lui toutes les heures, échanger des milliards de SMS, d'émojis cœur et de gifs où des chatons mignons se prennent dans les bras, rien n'y fait. Le bretzel tatoué sur mon poignet ne cesse de me le rappeler. J'ai tapissé ma chambre de photos de nous, de photos de lui, de photos de cet été. Il doit venir juste après les fêtes de Noël, à Paris. Cela fait des semaines, des mois, que je compte les jours. Il y a même un calendrier épinglé sur le réfrigérateur. Capucine se moque quand je marque une croix dedans, au réveil.

            J'ai décidé de le présenter à mes parents et d'annoncer notre relation.

            Cela me fait stresser d'imaginer Emil avec eux. Mais il faut bien que je leur dise pour lui et moi. Je veux que ce soit fait avant la fin de l'année même si cela m'enrage de devoir le faire. J'imagine sans mal la réaction de mon père ou de mon frère, j'ai du mal à imaginer celle de ma mère et de ma sœur, et je me demande comment Pépé et Mémé – du côté paternel - se comporteront face à ma « révélation ». Mal, sans doute. Déjà qu'ils ont eu du mal avec l'idée que j'arrête l'école de commerce, alors que les parents de Maman m'ont encouragé.

            Cela étant, je peux me tromper. On n'est jamais à l'abri d'une bonne surprise, pas vrai ? J'ai quand même du mal à croire qu'ils nous féliciteront, comme les parents d'Emil l'ont fait. Je dois, dans la même soirée, leur annonce que je suis gay – ou du moins, que j'aime Emil, et que je m'interroge de plus en plus sur ma sexualité -, et que je sors avec un garçon. Je ne devrais pas avoir à faire ça, les hétérosexuels n'ont pas à vivre ça, mais je ne veux pas vivre caché toute ma vie.

            Je ne veux pas cacher Emil à ma famille.

            Si notre histoire n'avait duré qu'un été, qu'elle s'était étiolée avec le temps et la distance, que je m'étais aperçu que cela n'avait été qu'une parenthèse, d'aimer un garçon, peut-être l'aurais-je fait. Mais maintenant que je sais que nous sommes capables de supporter des mois de séparation, en nous manquant toujours, et sans nous lasser de passer des heures au téléphone, je veux leur dire que je suis amoureux d'Emil. Je veux tout leur raconter. Même si ça me fait flipper. Même s'ils n'ont sans doute pas envie d'entendre cela. Terminer, l'époque où Raphaël n'osait pas dire ce qu'il avait sur le cœur et s'assumer devant ses parents. Je suis moi, à présent. Ils doivent m'accepter comme je suis car j'en suis fier.

            Je compte bien profiter de mon amoureux encore très longtemps. De ce garçon qui fait battre mon cœur à mille à l'heure à chaque fois que je vois son nom s'afficher sur mon écran.

            Et justement, mon portable sonne.

            Un sourire aux lèvres – comme toujours lorsque la bouille d'Emil se dessine –, je clique sur le téléphone vert pour décrocher. Sa voix, à l'accent bavarois si prononcé, me répond d'un air enjoué :

            — Guten Tag, mein Liebling.

            — Bonjour, mon amour, répond-je sur le même ton.

            Il paraît surexcité. Ça lui arrive souvent, encore plus depuis qu'il est de retour aux Beaux-Arts. Parfois, je jalouse les modèles qu'il dessine ou les statues qu'il passe son temps à aller voir dans les musées. Surtout qu'il y a va souvent avec Axel et qu'il continue à m'agacer sans raison. J'ai promis d'emmener Emil au Louvre quand il sera là. Je suis jaloux, mais je sais me maîtriser, surtout face à du marbre - moins face à Axel – et moi, au moins, je suis chaud quand il me touche.

            — J'ai envie d'aller boire un café avec mon Parisien préféré, lance-t-il à l'autre bout du fil.

            J'éclate de rire. Ce genre de phrase, c'est du Emil tout craché. Je nous visualise tous les deux en terrasse, façon Emily in Paris. Je pourrai mettre ma marinière, lui s'achèterait un petit béret et on boirait un verre de vin rouge face à la Seine.

            — Pour cela, il faudrait que mon petit Bavarois soit à Paris, répond-je en souriant.

            — Qui te dit qu'il ne l'est pas ?

            Mon cœur s'emballe.

            Qu'est-ce qu'il vient de dire ?

            Non ! Ce n'est pas vrai, il n'aurait pas...

            — Emil..., commencé-je.

            — Raphaël ? répond-il sur le même ton.

            — Qu'est-ce que tu as fait ?

            — Il se peut que j'aie avancé mes vacances de quelques jours. Mes parents sont partis à Berlin pour Noël avec Olga, je n'avais pas très envie de jouer les Berlinois.

            — Ne me dis pas que tu es à Paris ?

            — Ça ne te ferait pas plaisir ?

            Mon cœur s'emballe encore plus.

            Emil à Paris. Emil ici. Maintenant.

            Emil in Paris.

            — Où es-tu ? murmuré-je.

            — Ouvre la fenêtre.

            — Tu ne sais pas où j'habite.

            — Capucine m'a envoyé votre adresse. 

            Je me retourne vers ma meilleure amie. Assise sur le canapé, elle regarde le film My Dear Fuck*** Prince pour la deuxième fois. Moi, je l'ai déjà vu trois fois. Une fois avec Emil, une fois seul et une fois avec elle. Henry et Alex me plaisent toujours autant, j'avais dévoré le livre, j'aime tout autant le film. Je n'étais pas 100% emballé sur le choix du casting au départ, mais j'avoue qu'il y a une vraie alchimie entre les personnages. Leur romance me rappelle Emil et moi, même si je ne suis pas fils de présidente et que lui n'est pas prince.     

            J'attrape ma peluche cygne. Elle est toujours posée sur mon bureau, en souvenir de notre visite à Neuschwanstein, et je la lance sur Capucine qui pousse un cri en se retournant.

            — Eh ! s'écrie-t-elle.

            — Tu savais qu'Emil venait ici ? Tu lui as donné notre adresse ?

            — Je n'allais pas le laisser errer dans Paris. Un Allemand, seul dans le métro, c'est dangereux. Souviens-toi que les Français sont tous persuadés que les Allemands sont des nazis.

            — Tu aurais pu me le dire ! m'offusqué-je.

            — Et gâcher sa surprise romantique ? Hors de question. Il est là ?

            — En bas de l'immeuble.

            — Qu'est-ce que tu attends pour aller le chercher ? Tu veux qu'il meure de froid ?

            Je me lève et m'avance vers la fenêtre. Je l'ouvre. Le bruit des voitures m'agresse aussitôt. L'air est loin d'embaumer le parfum des Alpes et du lac Tegern. Ici, on respire surtout les relents des voitures, les restes de cette journée pluvieuse, où le brouillard recouvre les toits de Paris.

            Je me penche à la fenêtre. Emil me fait un signe.

            Mon cœur manque un battement.

            — Alors, qu'est-ce que tu en dis ? chuchote-t-il.

            J'avais oublié que mon téléphone était toujours plaqué contre mon oreille.

            — Je dis que tu es fou, répond-je en souriant.

            — Oui, fou de toi, mein Liebling ! s'exclame-t-il, en criant au bas de l'immeuble cette fois. Allez ! J'ai amené Auguste.

            Il récupère quelque chose à ses pieds. Il s'agit du bonsaï. Auguste, les branches écartées, les cheveux touffus et verts, me salue depuis le trottoir.

            — Descends vite me retrouver, que je puisse t'embrasser, reprend Emil, portable contre son oreille.

            — Tu m'as manqué, murmuré-je.

            — Tu m'as manqué aussi.

            Et là, comme dans un film, je raccroche, ouvre la porte sans la refermer – Capucine gueule -, dévale les escaliers grinçants des six étages sans ascenseur, puis me précipite vers la porte d'entrée. L'air froid m'agresse, les bruits et la pollution aussi. Qu'importe, la seule chose qui compte, c'est ce garçon, debout sur le trottoir, un sac à dos sur l'épaule, un bonsaï dans la main.

            Il me sourit en me voyant sortir de l'immeuble comme un bourrin.

            Je lui rends son sourire.

            On sourit comme deux idiots.

            Deux idiots amoureux, dans la ville de Paris.

            La ville des amoureux.

            La ville romantique.

            Emil s'approche de moi. Il pose Auguste sur le sol, entre nous.

            — C'est ton tour de le garder, la nourrice n'est plus disponible.

            — Je t'aime.

            Il relève la tête, des étoiles dans les yeux. Je n'ai rien d'autre à lui dire, je ne veux rien dire d'autre. Je l'aime. Tellement fort.

            Il ouvre les bras, je viens m'y réfugier, m'imprégnant de son odeur de pin et de lac, de soleil, même en plein hiver. Il m'enlace, me caresse le dos, m'embrasse dans le cou. Puis le menton, les joues, le nez, la bouche. Je me perds dans ses baisers, les mains dans ses cheveux blonds. Front contre front, nous nous regardons. Il m'a tellement manqué. 

            — Je t'aime, soufflé-je.

            — Je t'aime aussi, Raphaël.

            Je l'embrasse encore. On reste plusieurs minutes à s'embrasser sur le trottoir, inconscient des bruits de klaxon ou des regards des passants. Inconscients du monde qui nous entoure. On s'aime. C'est tout. C'est simple. C'est merveilleux.

            Emil frisonne.

            À ce moment-là, je reprends conscience avec la réalité. Nous sommes dans la rue, à Paris. Nous ne sommes pas en Bavière, où personne ne se souciait de savoir qu'Emil et moi étions ensemble. Un frisson me prend, moi aussi, pas pour les mêmes raisons. Je glisse ma main dans la sienne et tente de masquer mon trouble par un sourire.

            — Viens te mettre au chaud. On va préparer un chocolat.

            — J'ai emmené des bretzels pour le goûter, m'indique-t-il en montrant son sac.

            — Tu penses toujours à tout.

            — Surtout aux bretzels. 

            — Tu sais quand même que ce ne sont pas des pâtisseries que l'on prend au goûter, n'est-ce pas ? Il va falloir que je te fasse découvrir les macarons de chez La Durée.

            — C'est salé ?

            — Sucré.

            — Comme toi ?

            Ses petites fossettes creusent ses joues de malice.

            Il ramasse Auguste, je récupère son sac.

            Nous quittons la rue, direction le sixième étage et mon 20m².

            Emil est mon première amour.

            Emil est l'amour de ma vie.

            Emil est ma plus belle romance d'été.

            Alors, tout devrait bien se passer à Noël... Non ?


Référence à la série Emily in Paris.

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