Chapitre 17 - Notre petit coin de paradis




Le soir, Emil met une buche à brûler dans le poil pour nous réchauffer.

                 Nous terminons la quiche, avec des tomates. Emil grignote un bretzel en guise de dessert. J'ai beau lui expliquer qu'il ne s'agit pas d'une pâtisserie, il ne m'écoute pas. Il reste allongé contre moi dans le canapé, somnolant, pendant que nous suivons la saison 2 de Hearstropper, qui vient de paraître sur Netflix.  À chaque fois que Nick et Charlie s'embrassent, mon cœur fond. On promet de regarder My Dear Fuck*** prince ensemble la semaine prochaine. J'attends avec tellement d'impatience ce film. J'ai tellement aimé ce roman. Je le raconte à Emil, il m'écoute, puis lance un autre épisode. Il s'endort la moitié du temps, comme chaque fois que nous regardons un film. Je n'ai jamais vu quelqu'un dormir autant et avec tant de facilité. Comme un bébé.

                 Le lendemain, la journée ressemble à la première. Nous déjeunons sur la terrasse, face aux Alpes, dans le silence. Emil dessine, pendant que je lis. Parfois, nous relevons la tête de nos activités et nos regards se croisent. Il se mordille la lèvre inférieure, je le dévore du regard. Nous refaisons l'amour en fin de matinée, avant de manger une part de cake et de terminer les tomates. Emil propose aussi de finir le gâteau au chocolat. Ça creuse d'aimer.

                 Le temps s'écoule doucement. J'aimerais qu'il se fige. Que nous restions pour toujours ici, dans notre petit coin de paradis, dans cet endroit où il m'a fait l'amour pour la première fois. Ou je lui ai fait l'amour la deuxième fois. Où nous nous sommes aimés et donnés l'un à l'autre.

                 À chaque fois que je le regarde, mes yeux le dévorent d'amour. Il est beau. Certains diraient que je ne suis pas objectif, mais je m'en fou. Qu'est-ce qu'on en a à faire d'être objectif quand on est amoureux ?

                 Je pensais que j'aurais plus de craintes. Pas forcément de faire l'amour, mais de faire l'amour avec un garçon. Je pensais que ce serait différent de ce que j'imaginais avec une fille. C'était différent. C'était mieux. Pas parce que c'était un garçon.

                 Mais parce que c'est Emil.

                 Je n'ai pas eu peur. J'ai fait taire mes pensées et j'ai accueilli toutes ces sensations. Toutes mes émotions. La deuxième fois était encore meilleure, différente. J'expérimente de nouvelles sensations. Emil est un bon professeur, patient, gentil. Olga a tort, Lukas aussi : il est parfait. La première était unique. Tout est toujours unique avec Emil.

                 — Tu veux qu'on aille se balader ?

                 À quatorze heures, Emil me propose une randonnée. J'ai envie de retourner dans la chambre et de faire la sieste contre lui, ou autre chose, mais je hoche la tête et accepte. Une balade nous fera du bien. Nous n'avons quasiment pas quitté la Hausberg depuis que nous sommes arrivés. Emil m'entraîne vers un chemin de terre étroit et caillouteux, qui remonte vers un sommet où j'aperçois de la neige. Il me rassure, nous n'irons pas si haut, nous allons juste un peu crapahuter dans les hauteurs. Mes cuisses sont vites en feu. Pas que mes cuisses d'ailleurs. C'est la faute d'Emil. 

                 Je sens son regard s'attarder sur mon dos, et plus bas, alors que je grimpe. Il ricane derrière moi, je me retourne pour le fusiller du regard, avant de m'adoucir devant son regard bleu rempli d'amour. Il accélère pour me rejoindre, m'embrasse sur la joue et prend ma main. Notre ascension nous conduit au sommet d'une crête, après une bonne heure et demie de marche. Je suis essoufflé, je meurs de soif. Heureusement, Emil a pensé à prendre une bouteille d'eau et des barres de céréales. Je grignote, assis dans l'herbe rase.

                 — Regarde !

                 Emil tend son bras devant moi. Je rive mon regard vers l'endroit indiqué. Au loin, j'aperçois une marmotte, qui siffle. Emil met ses mains l'une dans l'autre et siffle en retour. Elle tourne sa tête poilue vers nous, ses moustaches dressées, l'oreille tendue.

                 — Tu ne trouves pas qu'elle ressemble à la marmotte Milka ?

                 — Toutes les marmottes ressemblent à celle de Milka, reconnus-je.

                 — C'est vrai.

                 Son poil est d'un brun clair, son corps trapu, ses oreilles rondes. Elle se baisse et s'enfuit pour disparaître dans la montagne. Emil glisse un brin d'herbe derrière son oreille, je passe mon bras par-dessus ses épaules.

                 — Tu as eu tes parents au téléphone ? me demande-t-il.

                 Je maugrée. Je n'ai aucune envie de parler de mes parents. On est bien ici, tous les deux. Je ne pense pas à Paris, je ne pense pas à mes études, ni à mon père, ni à ma mère. Je ne pense à rien.

                 — Oui, murmuré-je.

                 — Tu leur as parlé pour l'école ?

                 — Pas encore.

                 — Et pour nous ?

                 Je ne réponds pas. Emil joue avec un autre brin d'herbe. Il ne tourne pas la tête vers moi. Je sais ce qu'il pense. Du moins, je m'en doute. Ses parents sont au courant pour notre relation, il n'aime pas l'idée de vivre caché, mais ce n'est pas la même chose pour les miens. Ils n'ont jamais imaginé que je puisse être autre chose qu'hétérosexuel – moi-même, je ne l'avais pas imaginé – alors comment leur avouer ? Je crains leur réaction et je ne suis pas prêt à leur révéler que j'aime un garçon. Je n'ai pas honte d'aimer Emil, mais je ne sais toujours pas qui je suis. Je ne sais pas si je suis gay ou bisexuel. Je ne sais pas si j'ai envie de mettre un terme sur tout ça. Je suis juste moi. Mais je ne peux pas leur dire « Je suis moi, j'aime Emil et je veux arrêter mes études. Voilà. Passez-moi le sel maintenant, s'il vous plait ».

                 Alors, je repousse encore le moment de parler. Il nous reste trois semaines et quelques jours avant que je ne rentre à Paris. Trois semaines et quelques jours durant lesquels j'aimerais profiter de lui. Je ne veux pas penser à l'après. Je ne veux pas réfléchir à la suite de notre relation. Emil n'en parle pas non plus. On vit juste ce qu'on a à vivre, ici et maintenant. L'instant présent. Je n'ai pas envie de me projeter dans l'avenir. Il me fait peur. 

                 Je suis professionnel dans l'art du « repousser à plus tard ce que je pourrai faire maintenant ». Alors je verrai ça ultérieurement.

                 Emil siffle avec son brin d'herbe. Je joue avec ses cheveux blonds. Il pose sa tête contre mon épaule et ferme les yeux. Sa main remonte vers sa tempe qu'il masse. Quand il fait cela, je sais qu'il a mal à la tête, sans qu'il ne le dise. Cela ne lui était pas encore arrivé depuis que nous sommes ici. En général, il a mal en fin de journée chez lui.

                 — Tu as déjà pensé à voir un neurologue pour tes migraines ?

                 L'idée qu'Emil ait quelque chose de grave me fait peur. J'y ai plusieurs fois pensé.

                 Il éclate de rire et se redresse. Je me rends compte de l'absurdité de mes paroles après les avoir prononcé. Son père est neurologue, évidemment qu'il a vu quelqu'un.

                 — J'ai fait des IRM et des scanners, explique-t-il en soupirant, mon père craignait que j'aie quelque chose de grave à un moment donné, mais non, je n'ai rien. Ce sont justes des névralgies, causées par mon bras et mon épaule. Des restes de l'accident, des nerfs qui se pincent à certains moments et qui irradient jusqu'à mes tempes et ma tête.

                 — Tu ne peux pas prendre des cachets pour te soulager ?

                 — Je prends des ibuprofènes.

                 Il s'interrompt, ses yeux fixent le vide. Une part de moi se sent rassuré à l'idée que les cachets qu'il avale, chaque fois qu'il part se cacher dans la cuisine, ne sont rien d'autre que des antalgiques. Cela dit, ça n'a pas l'air de lui faire beaucoup d'effet. Il en prend parfois plusieurs par jour, et continue d'avoir mal. Je passe ma main sur sa nuque et commence à masser sa tête. J'ai appris à le faire au cours des jours. Je sais où appuyer pour le soulager. Il ferme les yeux et se laisse faire.

                 — Tu veux t'allonger ?

                 Il hoche la tête et se laisse tomber contre moi, la tête sur mes cuisses. Je glisse ma main dans ses cheveux et effectue des petits ronds sur sa peau, délicatement. Il soupire de bien-être. Je caresse son front et l'embrasse.

                 — Je risque de m'endormir, soupire-t-il.

                 — Tu dors tout le temps.

                 — Appelle moi Milka, la marmotte.

                 — Milka, c'est le chocolat, pas la marmotte.

                 — Celle-ci s'appelle Milka. 

                 Il me fait rire.       

                 Emil ferme les yeux pendant que je le masse. J'aime le regarder dormir, tant qu'il est près de moi et dans mes bras. Il s'endort. Je caresse son visage et continue mon massage. J'aurais dû prendre de la menthe poivrée pour le soulager. Quand son souffle se fait plus léger, je m'allonge à côté de lui et pose ma tête sur son torse. Je ferme les yeux aussi. Le sommeil ne vient pas, mais j'aime entendre sa respiration sifflante et le sentir contre moi. Je retire les brins d'herbe dans ses cheveux, je caresse l'angle de sa mâchoire et son petit nez. Je pourrais rester ainsi durant des heures, à le contempler...

                 Nous redescendons vers seize heures. Il nous faut une heure pour retrouver le chalet. Emil propose que nous regardions encore un épisode d'Hearstropper. Je lance l'épisode pendant qu'il prépare un feu dans la cheminée.

                 — T'as vu, je suis un homme, un vrai ! Je fais du feu ! s'écrie-t-il quand la bûche s'embrase.

                 — T'as coupé le bois aussi ?

                 — Euh... Non, mon père l'a acheté et amené avant qu'on vienne.

                 — Je suis déçu, j'avais envie de te voir une hache à la main. Les bucherons, c'est plus ce que c'était !

                 Il éclate de rire et viens trouver refuge dans mes bras. Je caresse ses doigts, il pose sa tête sur mon épaule tandis que l'épisode démarre. Les cœurs flottent autour de Nick et Charlie. Je suis sûr qu'il flotte autour de nous aussi. J'embrasse sa tempe.           

                 Emil sent le feu de cheminée. J'adore ça.

*

                 La nuit est tombée depuis plusieurs heures. Je me suis endormi après Emil, mais un bruit me tire soudain du sommeil. Je tourne la tête et tend ma main, pensant rencontrer le corps de mon amoureux. Je tâtonne à côté de moi. Emil n'est pas là. Je tente de me rendormir, abruti par la fatigue de cette longue journée à ne rien faire – à par une petite rando -, puis à faire l'amour et à manger, en me disant qu'il est sûrement aller aux toilettes.

                 Un autre bruit me fait ouvrir les yeux. Quelque chose vient de tomber. Ou plutôt, de se casser. Je me redresse, cligne des paupières.

                 — Emil ? appelé-je.

                 Personne ne me répond. Saisi par un mauvais pressentiment, je repousse ma couette. Le drap d'Emil est rejeté, comme s'il s'était enfui dans la précipitation. Je le rappelle, toujours aucune réponse. Un nouveau bruit me fait sursauter, des couverts viennent de tomber. J'attrape ma veste, j'enfile et sors dans le salon. Il est vide. Les bruits proviennent de la cuisine. J'avance doucement. J'espère que personne ne s'est introduit dans notre chalet. Ni un être humain, ni un animal. Je n'ose plus appeler son prénom, par peur d'être repéré. La lumière est allumée. Je passe le pas de la porte et trouve Emil.

                 Il est seul.

                 Debout, devant les tiroirs et les placards ouverts. Éventrés. Tout est retourné sur le sol. Je reste sans bouger, fixant les débris d'un cadre brisé et les couverts éparpillés. Je relève la tête. Emil ne semble pas me voir. Il ouvre un autre placard et pousse les assiettes. L'une d'elle lui échappe et se brise sur le sol. Je reste à l'observe, incapable de savoir quoi faire et comment réagir. Je remarque du sang sur sa main droite, il a dû se couper. Je murmure son prénom, il n'entend pas. Je me demande s'il est somnambule. Ma sœur Amandine l'était petit. Je sais qu'il ne faut pas les réveiller si c'est le cas, qu'ils peuvent être désorientés autrement.

                 — Emil ? murmuré-je.

                 — Je ne les trouve pas.

                 Il se retourne vers moi. Ses yeux sont vitreux. J'ai l'impression qu'il a pleuré. Oui, il a pleuré, des traces de larmes roulent sur ses joues. Je ne comprends pas. Que lui arrive-t-il ? Je m'avance vers lui, il recule d'un pas. Il n'a pas le regard d'Amandine quand elle déambulait dans la maison. Ses yeux transpirent la panique, des gouttes de sueur coulent sur ses tempes. Enfin, il me reconnaît.

                 — Je ne les trouve pas, Raph, répète-t-il d'une voix aiguë.

                 La détresse transparaît dans sa voix. Mon cœur se brise de le voir dans une telle détresse, sans comprendre de quoi il souffre, ni ce qu'il cherche. Je m'avance prudemment. Il ouvre un autre tiroir.

                 — Emil, calme-toi, chuchoté-je.

                 — OU EST-CE QUE MON PÈRE LES A RANGÉ ?

                 Je recule, étonné et frappé par son ton et la virulence de ses propos. Je secoue la tête, confus. Je ne sais pas ce qu'il cherche. Je ne sais pas ce que son père a rangé, ou mal rangé. Je suis inquiet, dépassé. Emil se met à pleurer à chaude larme, comme un petit garçon. Son corps est parcouru de spasmes, il se laisse glisser contre le mur et prend sa tête entre ses mains. Il tremble. J'avance prudemment et m'agenouille devant lui, en gardant une distance de sécurité.

                 — Dis-moi ce qui ne va pas, insisté-je.

                 J'essaye de paraître doux, de ne pas l'effrayer. Il tremble de tout son corps. Ses doigts viennent se poser sur ses tempes, il appuie très fort, les larmes roulent sur ses joues. Je pose ma main sur son front. Je me demande s'il a de la fièvre. La rivière était gelée, il a peut-être attrapé froid. Est-ce que je dois appeler les pompiers ? Ses parents ? Quelqu'un ? Son front est chaud sous mes doigts.

                 — Emil, dis-moi ce qui ne va pas, répété-je.

                 — J'ai mal à la tête.

                 Ses yeux sont vitreux, il continue d'appuyer sur son front et sa tempe.

                 — Tu as envie de vomir ? demandé-je.

                 — NON ! J'AI MAL À LA TÊTE ! hurle-t-il. J'AI MAL PUTAIN ! TOUT LE MONDE S'EN FOU QUE J'AI MAL ! PERSONNE NE M'ÉCOUTE JAMAIS. PERSONNE NE COMPREND ! MON PÈRE LES A JETÉ ! IL NE VEUT PLUS QUE J'EN PRENNE. MA MÈRE ARRÊTE PAS DE JOUER LES PSY COMPREHENSIVE MAIS ELLE NE COMPREND RIEN.

                 Il cri et panique. Les larmes continuent de rouler. Mon cœur se serre un peu plus. J'essaye de garder mon calme.

                 — Moi, je t'écoute.

                 Je m'avance et pose une main sur son épaule. Il me laisse faire. Les larmes dévalent ses joues, je les essuie.

                 — Tu veux que je te masse les tempes ? proposé-je.

                 — Ça ne marchera pas... ça ne marche pas... J'ai besoin... J'ai besoin...

                 — De quoi tu as besoin ?

                 Il s'interrompt. Je sens qu'il veut me dire quelque chose, mais qu'il n'ose pas. Ses lèvres tremblent. Je ne veux pas insister, mais j'ai besoin qu'il verbalise ce qu'il ressent pour l'aider. Qu'il me dise ce que je peux faire. Je ne supporte pas de le voir dans cet état de détresse, je me sens impuissant. Il pleure dans mes bras en répétant qu'il a mal à la tête. Je le berce doucement. J'ai déjà eu des maux de tête, comme tout le monde. Je sais ce que c'est que d'avoir mal, mais j'ignore ce que cela fait de vivre avec des migraines qui vous dévorent en permanence.

                 — Pleure, si ça te fait du bien... Je suis là.

                 Je l'encourage, l'embrasse, tente de le consoler comme je peux. Je ne peux pas lui retirer son mal, je ne sais pas quoi faire, alors je me contente de le bercer et de caresser ses cheveux.

                 — Tu veux que je te donne un ibuprofène ? proposé-je.

                 — Ça ne marche pas, répète-t-il. J'en ai déjà pris trois.

                 — Trois ? répète-je. Mais... Quand ?

                 Je ne l'ai pas vu faire. Est-ce qu'il en a pris trois ce soir ? Si c'est le cas, cela me semble beaucoup en une seule prise. Je ne suis pas médecin, mais j'ai toujours entendu ma mère dire qu'il ne fallait pas excéder trois comprimés dans la journée, espacés de plusieurs heures, et de préférence en mangeant. Il n'en a pas pris au repas, j'en suis certain. À moins qu'il ne l'ait fait quand il est parti chercher les fruits dans la cuisine ?

                 — Quand est-ce que tu les as pris ?

                 — Il y a une demi-heure.

                 — Les trois en même temps ? m'alarmé-je.

                 — ON S'EN FOU ! ÇA NE MARCHE PAS ! C'EST-CE QUE J'AI DIT À MES PARENTS ! ÇA NE MARCHE PAS.

                 — Calme toi, Emil.

                 Il tremble, il tente de me repousser. Je serre contre moi alors que ses pleurs augmentent en intensité. Il geint comme un petit enfant, il hoquète. J'ai le cœur brisé.

                 — Je veux du tramadol, balbutie-t-il.

                 — Du quoi ?

                 — DU TRAMADOL ! hurle-t-il. JE NE VEUX PLUS AVOIR MAL ! JE NE VEUX PLUS...

                 — Emil, arrête de crier, je t'entends. Ça va aller, ça va aller.

                 Je le berce contre moi. Il inspire, expire. J'accompagne son souffle, je le tiens fort, je le rassure comme je peux. Il se laisse tomber contre moi, toujours en pleurant.

                 — Attends, je reviens.

                 Je me lève, cours dans la salle de bain, fouille pour trouver l'huile essentielle de menthe poivrée que m'a donnée ma mère. J'ai conscience de sa capacité limitée, cela ne remplace pas un médicament, mais je n'ai rien d'autre à proposer Je m'en badigeonne les mains, puis revient dans la cuisine. Il est toujours assis contre le mur, ses deux mains sur son front.

                 Je l'aide à se relever. Il pleure encore, mais se laisse faire. Je ne le quitte pas des yeux tandis que nous traversons le salon pour rejoindre la chambre. Je l'aide à s'allonger dans le lit, il gémit, les mains sur les tempes. Je reviens vers lui, m'assois à ses côtés, pose sa tête sur mes cuisses et mes doigts huilés de menthe poivrée sur ses tempes. Il ferme les yeux, son souffle se fait plus court, ses gémissements et ses pleurs s'apaisent.

                 — Ça va ? osé-je demander à un moment.

                 Il ne répond pas tout de suite. Sa poitrine se soulève par intermittence. Ses mains ne tremblent plus. J'embrasse son front et reprends mon massage. La menthe poivrée pique sur ma langue. Ma poitrine se soulève au même rythme que lui. Je caresse ses cheveux.

                 — Merci..., murmure-t-il du bout des lèvres.

                 — C'est normal.   

                 Sa voix est à peine audible. Il s'endort. Je tire la couverture pour recouvrir ses épaules et l'envelopper. Je ne veux pas qu'il est froid. J'attends qu'il s'endorme contre moi, avant d'éteindre la lampe de chevet et de m'allonger contre lui. Je m'assure qu'il va mieux, j'écoute sa respiration. Ses joues sont encore recouvertes par les traces de ses larmes que je perçois dans la faible lueur de la lune, qui brille à travers la fenêtre. Elle ne comporte pas de rideau. Je caresse sa joue, l'embrasse.

                 Je mets très longtemps à m'endormir et dors d'un sommeil agité, secoué par les paroles d'Emil qui crient qu'il a mal et que personne ne peut l'aider.

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