chapitre 7 : La fuite partie 2
Alors que les rayons du soleil viennent éclairer notre cachette l'atmosphère, elle, est lugubre. Aucun mot, aucune parole, aucun geste depuis plusieurs heures maintenant.
Je n'aurais jamais dû accepter son aide. Enfin.. si je peux appeler ça de l'"aide". A cause de cette de décision pourrie, de lui, de moi, de tout ça, je suis là. Là à me cacher dans ce foutu ravin. En mourant de froid, de faim, de douleur.
Des frissons me parcourent, mon front est brûlant.
Je me redresse et m'assoie contre la paroi humide et gelée. Ce simple mouvement ravive une forte douleur dans tout mon corps. Je grimace et tente de retenir mes larmes n'en pouvant plus.
Lui, il est là, assis en tailleur la tête dans les mains. Il est recouvert de multiples petites plaies. Lui non plus n'a pas dormi.
Pourquoi ne dit-il rien ? Là-bas il trouvait toujours quelque chose à dire, n'importe quoi. Il avait toujours réponse à tout. Ca avait le don de m'énerver mais je préfère encore ça que son ignorance. Surtout que là.. Il y a pleins de trucs à me dire. Il compte faire quoi maintenant ? Comment ? Pourquoi ? Où aller ?
Ce n'est pas à moi de trouver ces réponses, ce n'est pas moi qui nous ai emmené ici.
ATCHOUM
Je compresse ma bouche avec mes deux mains.
"Désolée.., m'excusé-je faiblement sans trop savoir pourquoi."
Sans dire un mot, il se lève.
"Allons-y, lâche-t-il enfin."
Sans difficulté il avance le long de la rivière. N'ayant d'autre choix je me lève à mon tour et, fébrile, avance de quelques pas. Ma cheville me fait un mal de chien. En boîtant j'essaye de le rattraper. Mais mes jambes, qui ne sont plus habituées à supporter mon poids, tremblent et cèdent sous l'effort. Je tombe en avant et réussi à me rattraper avant que ma tête n'atterrisse dans la boue.
Il se retourne et m'observe. Son expression est figée, il doit me trouver tellement pathétique. Peut-être il se retient juste de m'engueuler une fois encore.
Doucement, il s'approche de moi et vient s'agenouiller. Tout en passant une main sur son visage, il murmure un bref "désolé".
Il soupire :
"-J'agis comme s'ils t'avaient pas shootée. Comme si ça faisait pas des jours que t'étais pas clouée au lit. Tes côtes et ta cheville c'est ça, me questionne-t-il tout en me scrutant de bas en haut."
Je hoche la tête tout en fixant le sol.
"-Tu crois supporter la douleur si j'te prends sur mon dos ? 'Toute manière on a pas trop le choix."
Est-ce une question ou un ordre ? Une seconde fois je hoche la tête.
Nous reprenons alors notre route au bord de cette rivière mais cette fois, je suis sur son dos. Le vent souffle en rafale mais ne m'atteint pas, il me sert de bouclier. Je déteste ça mais je suis incapable de marcher seule dans cet état. Il ne me veut pas de mal mais mon appréhension ne veut pas partir peu importe à quel point j'essaye de me raisonner. Tout ce que j'arrive à faire est d'éviter un maximum le contact entre nos deux corps.
Quant à la douleur, elle n'est pas aussi vive que je le pensais. Ou alors c'est que je m'y suis habituée.. Honnêtement je suis incapable de savoir si c'est plutôt l'un ou plutôt l'autre, sûrement un peu des deux. Je ne sais déjà pas dans quoi je m'embarque..
Faisant un maximum pour ne pas le toucher, mes muscles s'engourdissent et les picotements deviennent de plus en plus douloureux.
Je finis par glisser n'arrivant plus à me soutenir. Avant que la chute n'arrive, il donne une légère impulsion et je me retrouve collée à son dos. Il me tient plus fort.
Je retiens un cri et me tétanise. Je sens et entends mon cœur retentir dans ma tête et tout mon corps.
Ses vêtements sont trempés, je ne m'en étais même pas rendue compte jusque là. Cette sensation est si désagréable mais elle est vite estompée par la chaleur qu'il dégage. Mes grelottements s'arrêtent. C'est agréable cette chaleur.. Si agréable..
"Je suis où ?!, hurlé-je tout en me redressant terrifiée."
Aussitôt ma tête se retrouve plaquée contre un mur et ma bouche compressée. Mes yeux sont exorbités. Des larmes dévalent immédiatement mon visage. L'air semble m'étouffer de l'intérieur. C'est eux ! C'est eux ! Ils m'ont retrouvée ! Je le mords violement et donne de violents coups de pieds. Ma cheville craque et me lance fortement mais je ne m'arrête pas pour autant. L'homme fait d'avantage pression sur moi et m'immobilise complètement. Je hurle malgré ma bouche couverte et continue de m'agiter lamentablement.
"-C'est moi bordel calme-toi, chuchote-t-il brutalement sans relâcher la pression sur moi."
Cette voix....
Ma respiration est rapide et saccadée. Je ne me calme pas. Ca ne peut pas recommencer..!
"-Qu'est-ce qu'il te prend ?!, dit-il à voix basse. C'est moi ok ?!"
Avec sa main libre il attrape mon menton et me force à le regarder. Ma vision est trouble mais je le reconnais enfin. Il est si proche de moi que je sens sa respiration effleurer ma peau.
"-Ca va aller ok ? S'te plaît calme-toi..."
C'est lui.. Ce n'est que lui.. Je me le répète en boucle dans ma tête et tente de me calmer. Un silence total s'impose dans cet endroit sombre qui empeste l'essence. Le temps est comme figé, plus personne ne bouge. Je reprends petit à petit mes esprits et mon pouls revient à la normal. Il relâche enfin la pression qu'il exerçait sur moi.
"-Tu ne vas pas recréer hein..? J'peux te lâcher c'est bon ?"
J'agite légèrement la tête, il se recule et s'assoit à un mètre de moi. Je me recroqueville et enfuis ma tête dans mes genoux.
"- Tu t'es endormi quand je te portais, dit-il calmement. Je nous ai emmené dans un garage. Personne viendra nous chercher là, pour le moment du moins. Et puis tu tremblais comme un bébé, je devais trouver un coin abrité histoire qu'tu meurs pas d'un rhume."
N'ayant la force de rétorquer quoique ce soit, je reste là sans dire un mot.
"-On fait quoi.. après ça.., soufflé-je.
-Trouver de quoi s'habiller ? Car si tu comptes faire quoi que ce soit dans cette tenue tu peux oublier Ariel."
Je déteste toujours autant ce surnom. Il le dit exprès pour m'énerver je suis sûre.. Pour quoi d'autre sinon ?
"-Tu te sens prête à marcher, me questionne-t-il en me dévisageant."
Plutôt que de lui répondre, je m'appuie contre le mur en béton et me lève. Tout en m'aidant de cette paroi froide, j'avance sans appuyer sur ma cheville souffrante. C'est alors que sans prévenir il m'attrape le bras.
VLAM
Le bruit retenti à travers tout le garage. Je reste immobile, paralysée, le bras en l'air.
"-Je t'aide et c'est tout c'que tu trouves à faire bordel ?!, s'énerve-t-il."
Sa voix prend d'autant plus d'ampleur avec l'écho. Un fin filet chaud dégouline sur mes joues. Là tout de suite je veux disparaître, j'ai vraiment un sérieux problème.. Je me sens tellement honteuse. Il soupire tout en serrant le poing.
"-J'aurais pas dû être aussi brusque."
"Qu'est-ce que..."
Les mots restent coincés dans ma gorge. Comment peux-tu réagir comme ça !Je viens de te frapper et tu t'excuses presque ?! C'est quoi ton problème à toi aussi hein..?!
"Bon on y va avant de réveiller tout l'immeuble ? Et tu peux marcher seule tu crois, dit-il tout en connaissant d'ores et déjà la réponse."
J'agite la tête de gauche à droite faiblement. Plus doucement cette fois, il se rapproche de moi. Je contiens ma peur et le laisse me soutenir. Toujours incapable de m'appuyer sur ma cheville je boite, ralentissant son rythme.
Nous voilà partis de ce garage, à déambuler dans les allées d'une résidence. La nuit est à nouveau tombée. Mais combien de temps ai-je dormi ? Il fait nuit noire, la lune étant cachée par les nuages. Les seules lumières proviennent des lampadaires.
Toutes les maisons sont endormies.
Il regarde tout autours de lui, comme s'il cherchait quelque chose.
Il me tire et m'oblige à m'assoir par terre.
"-Attends-moi là, m'ordonne-t-il en chuchotant."
Sans réfléchir je lui attrape le bras et le retiens. Il compte faire quoi là ?! M'abandonner après tout ça ?! Je le serre de toutes mes forces.
"Oooh, c'est qu'elle aurait peur sans moi Arielle, dit-il avec un petit sourire au coin des lèvres."
Par fierté je le relâche aussitôt.
"-Clairement pas, rétorqué-je froidement.
-Arf, tu es bien dure avec moi, répond-t-il avec une moue attristée.
Non mais plus sérieusement, regarde-moi, regarde-toi. Tu crois qu'on peut aller où comme ca ?"
Pour la première fois depuis notre fugue je prends le temps de le regarder. Sa blouse d'hôpital, déchirée par endroit, est couverte de boue. Sans compter le fait qu'il ne porte rien d'autre que ce vêtement. Il ressemble vraiment à un évadé d'asile..
"-Et moi je ne suis pas recouvert de bandages, continue-t-il en me regardant de bas en haut. Bref attends-moi là je reviens ok ?"
L'instant d'après le voilà parti escalader une palissade.
Il ne compte pas voler des vêtements ?! Je suis censée faire quoi là ? Et s'il se fait attraper ?! Je m'accroche comme je peux aux lattes de la palissade et l'observe à travers celles-ci. Je vois son ombre se déplacer sur la terrasse et décrocher des vêtements étendus à une corde à linge. Alors qu'il revient, une lumière s'allume dans la maison. Je discerne une silhouette à travers les rideaux.
"-Grouille !!!, je m'écris complètement stressée."
Il se retourne et au même instant la porte-fenêtre coulisse et un homme déboule. Il lui court après et tente de l'attraper. Ma vision devient noir ; il m'a jeté tous les vêtements à la tête. L'instant d'après il m'attrape la main et me tire rapidement loin d'ici. J'entends le propriétaire hurler et nous menacer à travers de sa terrasse.
BAM
La porte coulissante claque une nouvelle fois. Quelques secondes plus tard, je me retourne et voit l'homme nous courir après.
Nous continuons notre course effrénée, moi les bras pleins de vêtements, lui me tirant de toute ses forces. Je me retiens de crier de douleur, seuls des gémissements arrivent à s'échapper de ma gorge. Je suis déjà essoufflée.
Un grand portail se dresse devant à nous. Sans réfléchir il se baisse et me tire à nouveau à lui.
"-Passe !!"
Paniquée je lui obéis et rampe sous le portail avec difficulté. Il en fait de même et ne me laisse pas une seule seconde de répits. Nous voilà reparti dans notre course hors de cette résidence.
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