Chapitre 10 : Ivre

Après cette absence voici le nouveau chapitre. Petit rappel des événements précédents. 
Anastasia s'est enfuie de son hôpital avec l'aide d'un inconnu. Ils ont errés plusieurs jours sans nourriture mais ont trouvé des vêtements. 
Après plus d'une semaine, ils tombent sur un marché : l'occasion parfaite pour se nourrir. Elle se retrouve alors seule à l'attendre sur un banc.








Semblable à un nid d'asticot, cette masse gesticule dans tous les sens.  Les gens se bousculent et avancent comme ils peuvent dans ces ruelles étroites où les stands sont entassés.
Tours parlent plus fort les uns que les autres tandis que certains enfants crient et d'autres pleurent. 
Dire qu'avant j'avais ma place dans tout ce chaos, dans toute cette foule. Mais ce n'est plus comme avant et je doute que ça le soit de nouveau. Je n'ai même plus l'envie d'être mêlée à tout ça.
Sans compter les odeurs de poissons, de fromages et de sueurs mélangés qui m'écœurent au plus haut point.

Comment tout a pu basculer aussi facilement ? Comment ai-je pu autant laisser  ma vie me filer entre les doigts ? Alors que mes ongles s'enfoncent dans ma peau, un sentiment de tristesse, de colère et de regret se mélangent en moi. L'espace d'un instant la voix tremblante de ma mère me revient à l'esprit. Je suis tellement désolée de t'infliger ça maman. Mais je suis censée faire quoi ? Comment je suis censée m'en sortir ? J'aurais dû faire quoi maman..? 
Des larmes dévalent mon visage et rapidement mes sanglots résonnent dans mes oreilles.

Je me lève brusquement. Il faut que je marche, que j'arrête de penser. Je dois à tout prix arrêter de penser. Du revers des mains je balaye mes larmes et me force à m'occuper l'esprit. Ma vue dérive, fixant aléatoirement les vieux bâtiments délavés, les passants pressés, la saleté environnante et les rares arbres qui essayent de survivre dans ce décor. Un pied devant l'autre, ignorant la douleur, j'avance maladroitement dans la rue. 

  -Hey beauté ! Faut pas pleurer voyons ! Tes yeux sont tous rouges !

Je sursaute et me retourne brusquement découvrant un homme qui me fixe avec insistance. Il est adossé au mur sur ma gauche, ou plutôt affalé. Son regard est dérangeant. 

  -Hé .. ! Qu'est-ce qui peut bien faire pleurer une jolie fille comme toi, questionne-t-il en se rapprochant de moi.

Il dégage une aura horriblement malsaine. Je l'ignore et accélère le pas. 

  -Eh chérie ! J'te veux pas de mal je veux juste te consoler t'sais, s'exclame-t-il en me rattrapant.

Une forte odeur d'alcool remonte dans mes narines. Il est complétement ivre. 

  -Laisse-moi.., haussé-je fébrilement la voix.

  -Je sais que c'est pas c'que tu veux dans le fond. J'sais qu'tu veux de la compagnie avoue ! Hein !

En élevant la voix, il m'attrape le poignet et me tire à lui. Je le repousse de toutes mes forces mais son emprise est trop forte. "Laisse-toi aller" vient-il me susurrer dans l'oreille. Aussitôt que je me mets à hurler, il me plaque contre le mur rêche et me gifle. Tout mon être se tétanise.
Une horrible vision me revient à l'esprit.

-Non..! Non !!

Ca ne peut pas recommencer. Je suffoque, mes battements de cœur s'accélèrent.
Un cri de désespoir s'échappe de ma gorge et me lacère affreusement. Ca recommence ! 
Il pose sa sale main sur ma joue et l'autre sur ma hanche. Un relan de dégoût se bloque dans ma gorge. Je tremble, prise de spasmes. Ma vue et mes pensées s'embrument. Il m'attrape par les épaules et m'entraîne avec lui.

-Viens.. Héhé.. Avec moi on va bien s'amu....

Subitement, l'homme qui recouvre ma vue s'écroule sur le côté. 

- Ariel, s'écrit une voix familière ou devrais-je plutôt dire Sa voix.

En me voyant, son regard inquiet se transforme en un regard noir, effrayant. Il se rue sur mon agresseur avant de le marteler à grands coups de pied. Il lui en donne plusieurs dans le ventre avant de le frapper à la tête. L'homme presque inconscient saigne abondamment du nez et de l'arcade. Je me jette sur lui :

- Arrête !!!

Pourquoi ?!, se retourne-t-il rouge de colère.

Je me recule apeurée par l'expression qui le défigure. Je ne l'avais jamais vu comme ça. En lisant la peur dans mes yeux, il s'arrête immédiatement.

Je me recule complètement choquée par sa violence. Jusqu'à maintenant je ne l'avais jamais vu comme ça. Je n'avais même pas imaginé qu'il pouvait être aussi... enragé. 

"Merde !" lâche-t-il sèchement. Il se rapproche de moi rapidement.

- On doit partir maintenant !

Sans attendre d'avantage il me prend par la main et me tire à lui. Des dizaines de regards sont fixés sur nous. Tous parlent, murmurent, s'indignent. Au milieu de tout ce brouhaha je reconnais mon prénom. L'ayant entendu aussi, il se met à courir. Je résiste mais il m'ignore complètement. Les dalles résonnent sous nos pas pressés. Alors que nous dévalons les ruelles, nous apercevons un bus arrêté. 

-Dépêche, s'exclame-t-il.

Mon corps tout entier hurle. Me dépêcher ?! Je fais déjà ce que je peux !
Heureusement, plusieurs personnes empruntent le bus nous accordant quelques secondes supplémentaires. Nous arrivons de justesse puisqu'à peine montés, il démarre. Etant bondé, le chauffeur ne nous remarque pas. L'air y est étouffant et l'odeur de transpiration me pique le nez. 

-J'veux pas qu'tu aies peur de moi, me murmure-t-il.

Je fixe le sol, ne sachant quoi répondre. Je ne devrais pas avoir peur de lui. Depuis ces derniers jours, il est le seul à avoir été là pour moi. Mais toute cette violence qu'il a en lui je ne peux pas l'ignorer.

Nous attendons quelques arrêts avant de descendre et de recommencer le même schéma. Nous devons partir le plus loin possible. Nous prenons les lignes les plus fréquentées afin de passer inaperçus. Et pour éviter tout risque de contrôleurs, nous ne restons jamais bien longtemps dans le même. 

A aucun moment il ne m'adresse un regard ou une parole.

Debout, me tenant à la barrière du bus,  j'observe tous ses mouvements du coin de l'œil. Comment j'ai pu en arriver là ? A avoir peur de l'homme qui tient ma vie entre ses mains ? Cet homme dont je ne sais rien, pas même le prénom. Et il est là le problème. Comment ai-je pu avoir confiance d'un homme dont je ne sais absolument rien ?

Le bus s'arrête et des passagers descendent. Sans le prévenir je lâche la barre et m'apprête à partir sans lui. Avant même que je ne puisse faire un pas, il me retient et me force à m'asseoir sur un siège tout juste libéré. 

- Pas ici, m'ordonne-t-il sans daigner me regarder.

Je reste immobile, n'osant lui répondre. Je voudrais lui parler mais aucun mot ne sort de ma bouche. Je prends une grande inspiration mais le courage repart aussitôt. Et finalement, je ne sais même pas quoi lui dire. Nous restons ainsi, tous les deux silencieux, jusqu'à l'arrêt suivant.

Je regarde les paysages défiler. Les hauts bâtiments laisse peu à peu place à des petites maisonnettes. La végétation quand à elle devient de plus en plus présente. Mais plus nous nous éloignons du centre ville et plus le bus se vide. La seule passagère restante est une vieille dame. Elle nous salue avant de quitter à son tour le bus maintenant désert.

-Au prochain, lance-t-il.

J'appuie ma tête contre la vitre et regarde la petite dame partir. 

Après quelques minutes, le bus s'arrête de nouveau et nous le quittons à notre tour. Nous voilà au beau milieu d'un petit village. Je peux enfin prendre une grande bouffée d'air. Le vent frais me fait un bien fou. Le ciel lumineux contraste avec cette atmosphère maussade.
Il se met en route et, à cinq mètres derrière lui, je le suis. L'endroit est désert mais par réflexe je réajuste ma casquette. Je n'ai rien fais de mal. Alors pourquoi je dois me comporter comme une foutue criminelle en cavale ?

 Nous empruntons une petite route qui nous mène sur un sentier perdu au milieu de nulle part. Nous sommes entourés de vastes champs de maïs. 

Ma cheville craque à plusieurs reprises mais je ne ralentis pas pour autant. Je ne veux pas l'énerver. Combien de temps compte-t-il encore marcher comme ça ?
Subitement, sous la douleur qui s'empire, je chute la tête la première dans les graviers.   

C'en est trop. J'éclate en sanglots.

- J'en peux plus putain ! Je suis à bout bordel ! Je hurle à travers mes pleurs.

Je me recroqueville. Il s'approche de moi et attrape mes mains.

- Tu t'es fais mal ?

- Tu te fous de moi ?! Tu me demandes si j'ai mal ?! 

- Désolé de m'occuper de toi ! 

Mes pensées fusent. Je le revois tabasser ce mec ivre. Toute sa violence. Toute cette violence qu'il porte en lui et dont je n'avais même pas conscience. Qui est-il ?!

- Tu n'as pas à t'occuper de moi ! T'es personne ! Juste un mec dont je ne sais rien !  T'es qu'un putain de monstre qui m'a entrainé dans tout ce bordel !

Aussitôt ces mots sortis de ma bouche je réalise la violence de mes propos. Je relève la tête et m'empresse :

-Je.. Je suis désolée..!

Son visage est fermé. Sa mâchoire serrée. Une aura terrifiante émane de lui. Il s'approche doucement.

-Tu as peur de moi ?

Sa tête est à quelques centimètres de la mienne.

-Bha pars, je ne te retiens pas, lâche-t-il froidement.

Il laisse s'écouler une seconde.

-PARS !

Je sursaute.

-Putain..!

Il s'éloigne brusquement de moi le poing fermé. Il me tourne le dos pour me cacher son visage.

-Tu n'connais rien d'moi ?! Mais est-ce que tu m'as posé une seule question ?!, se retourne-t-il violement en plongeant son regard dans le mien. Rien. Qu'Une. Seule. Fois., insiste-t-il.

Je baisse la tête comprenant alors. Pas à un seul moment je me suis intéressée à lui. Je n'étais focalisée que sur moi.  Je ne lui ai jamais demandé comment il s'appelait ni pourquoi il était là. Pourquoi il m'aidait. Ni même ..comment il allait ..? Jamais je ne me suis préoccupée de lui. Pas une seule fois. Comment je peux lui en vouloir de ne rien savoir sur lui alors que je ne suis qu'une putain d'égoïste.





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Merci d'être encore là ! J'espère que ce chapitre vous a plu !

Si vous avez les moindres remarques ou conseil n'hésitez pas je ne veux que m'améliorer :D

Et merci beaucoup à EdenLdrgnr par sa critique qui m'a permis de rendre ce chapitre encore meilleure. Ainsi qu'à Nico qui m'a redonné l'envie d'écrire. 

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