Le visage d'ange - 34

****Attention ! Ce chapitre est susceptible de heurter votre sensibilité !****

— Mais quelle surprise ! Si je m'attendais à ça ! m'accueille-t-il un sourire machiavélique sur le visage, la très chère veuve Madini éplorée, voyez vous ça ! enchaîne-t-il.

— Tony Feniosso, le plaisir est partagé. réponds-je la mâchoire crispée, la poigne fermement resserrée sur la crosse de mon arme.

— Que me vaut l'honneur de cette visite ?

Je n'ai pas le temps de répondre qu'Andy profite de ma diversion pour s'échapper de l'emprise du bras droit et permet à Andrea de le tuer. La lourdeur de son corps tombant sur le sol vibre jusque sous nos pieds.

— Vous ne finirez malheureusement pas la soirée vivants. exposé-je avant de baisser le chien de mon révolver.

Je n'ai pas le temps de tirer qu'une balle vient se loger dans mon épaule droite me déséquilibrant. Une main sur ma blessure, je me redresse en dissimulant ma douleur et découvre Andrea est en train de maîtriser Tony.

Assis sur le canapé, il a les deux bras maintenus derrière lui et dans un craquement à faire froid dans le dos, Andrea lui casse les coudes. Un hurlement de douleur perce la tension accompagné des cris et pleurs de sa famille. Ses yeux larmoyants dans les miens, il laisse ses bras tombés inertes à ses côtés.

— Qu'est-ce que je t'ai fait putain ?!

Je m'avance doucement vers lui et m'accroupis pour être à sa hauteur, le visage détendu et le ton calme, je lui réponds:

— A toi de me le dire. As-tu quelque chose à voir avec la mort d'Ezio ?

— Quoi ? Mais non ! Même si on était ennemi je n'étais pas assez fou pour me mesurer seul à lui !

— A plusieurs vous auriez pu.

— Je n'étais pas impliqué là-dedans ! Tu dois me croire !

— Alors qui ?

— J'en sais rien ! Peut-être Abiani, il avait l'air mystérieux là-dessus la dernière fois qu'on s'était parlé ! Il doit savoir quelque chose mais je te jure sur la tête de mes enfants que je n'y suis pour rien !

— Oh pas très sympa ça de jurer sur ses propres enfants, dis-je en regardant les visages d'anges déformés par la peur, que tu l'ai fait ou non ne change rien à ta condamnation. Ton monde a détruit le mien, alors je vous rends la pareille.

— Mais t'es qu'une salope psychopathe putain ! Jamais nous ne t'aurions touché !

A ses mots, je laisse échapper un rire sarcastique.

— Peut-être pas au début. Mais une fois que j'aurais repris du service en tant que chanteuse et à cause de ma notoriété menaçante, j'aurai fini par devenir l'une de vos cibles. Ce n'était qu'une question de temps avant que vous ne veniez me tuer pour que jamais je ne parle de toutes vos affaires plus illégales les unes que les autres.

— T'es complètement cinglée, à quoi ça rime tout ça ? Tu crois vraiment qu'une pauvre fille insignifiante comme toi arrivera à nous vaincre ? peste-t-il.

— Vous m'avez pris ce que j'avais de plus cher, rien ne m'importe maintenant à part la vengeance. Je ne vais rien y gagner, je serais toujours hantée par mon passé et par ce que je vous aurai fait subir. Mais de savoir que plus jamais vous ne règnerez sur ce pays suffit à apaiser mon petit cœur endoloris. déclaré-je avec une mine exagérément attristée.

Je me relève en réprimant une grimace de douleur à cause de mon épaule. Je recule de quelques pas et me tourne vers sa femme et ses enfants qui s'enfoncent dans le canapé de peur.

— J'ai une mission pour toi. dis-je en pointant du doigt le plus âgé des deux enfants.

— Non par pitié pas mes enfants, je ferai tout ce que vous voulez mais pas mes enfants. pleure la mère.

Je la regarde désolée mais insensible.

— Si seulement nous avions le pouvoir de choisir lors de situations qu'on ne contrôle pas. annoncé-je en la regardant faussement désolée.

Je me concentre de nouveau sur le petit qui essaie de soutenir mon regard, une tentative courageuse de se montrer fort pour sa famille.

— Quel âge as-tu ?

— Douze ans madame.

— Oh c'est un grand âge ça mon bonhomme ! Est-ce que tu te sens capable d'accomplir une mission ?

Sans me répondre mais tout en soutenant du même regard puissant qu'à l'église, il hoche la tête pour acquiescer.

— Bien. J'aimerais que tu ailles sur le perron de la maison et que tu délivres un message pour moi. Tu verras j'ai fait appel à des caméras et des journalistes, ils te poseront des questions mais tu ne devras pas y répondre. Tout ce que tu devras dire, c'est ce que je vais te dire maintenant okay ?

Il hoche de nouveau la tête mais cette fois avec une mine concentrée.

— Dis leur ceci : j'ai un message pour vous, renaquit de ses cendres et s'élevant en une forme plus forte de lui-même, le phénix répand dès ce soir une vague de flammes et de chaos qui consumera chacune de ses proies. Tu retiens bien d'accord ? Chaque mot a son importance et son propre impact.

Il répète à voix basse les mots pour se les ancrer en tête. Malgré la situation, je me surprends à saluer son courage et faire preuve d'empathie pour lui qui fonde en cette mission les espoirs de sauver sa famille s'il réussit.

— Mon ami va t'accompagner et te donner le courage dont tu as besoin. Une fois que tu as terminé, tu rentres vite dans la maison et tu pourras courir pour rejoindre tes parents. C'est bon pour toi ?

Il hoche la tête, les yeux étincelants de foi. Il disparaît derrière la porte accompagné d'Andrea caché sous une cagoule. Je me retourne avec ferveur vers Andy qui est déjà en train de ligoter les parents au canapé.

— Mais qu'est-ce que vous faites ?! panique la mère. 

Je l'ignore et prends les explosifs rangés dans le sac à dos laissé par Andrea. J'arme la pièce, le couloir et le palier puis vient aider Andy pour finir de ligoter nos victimes. Ils essaient de se débattre mais rien y fait, nous arrivons à les maîtriser.

Le bip d'un message retentit puis Andy me confirme d'un signe de tête la bonne exécution de notre plan. Andrea au rez-de-chaussée piégé par les explosifs qu'il vient de déposer, est maintenant sur le perron avec le petit. La course contre la montre commence, une erreur et tout s'écroule.

Alors qu'Andy se précipite sur Amadeo pour le réveiller, je m'approche doucement, besace en main, du petit resté aux côtés de ses parents.

La serre de la raison s'empare de la seringue mais celle du cœur la maintient à l'intérieur du sac. Les yeux rivés sur l'objet qui remue légèrement sous mes tremblements, je sens ma poigne se desserrer prête à relâcher.

Tu n'es pas obligée d'en arriver là, tu peux encore faire marche arrière.

J'inspire profondément pour chasser la voix d'humanité qui pourrait m'être fatale.

"Tu devras donc être impartiale et aller jusqu'au bout de ton idée sans quoi tu risques d'échouer ou de te faire tuer par vengeance." me reviennent les mots d'Andrea en tête.

D'un geste vif, je m'arrache à l'emprise de mon cœur et retire la seringue du sac puis la montre au petit.

— Ça ne te fera pas mal, promis. Tu risques de sentir une légère piqûre mais ensuite tu sombreras dans un profond sommeil où Morphée viendra te bercer. Puis maman et papa te rejoindront ainsi que ton grand frère et vous serez tous réunis pour l'éternité. lui dis-je tendrement en essayant de dissimuler le trémolo dans ma voix.

Il semble apaisé par mes mots et se laisse faire en douceur malgré une légère contraction. Une fois le nembutal injecté, le petit ferme les yeux pour ne jamais les ouvrir. Face à ce visage d'ange apaisé qu'il demeurera pour toujours, j'étouffe la voix de mon âme qui m'incendie de toute l'inhumanité répugnante dont je viens de faire preuve. De marbre, je ne montre pas le feu de ma haine envers moi-même qui me consume.

Je t'assure bonhomme, si j'avais pu, j'aurais fait autrement. Mais aussi angéliques êtes-vous à vôtre âge, vous ne demeurez pas moins la menace de demain.

Qu'est-ce que je viens de faire ? Je reproche à Ezio son acte monstrueux pour en faire de même quelques semaines plus tard ?

— Qu'avez-vous fait à mon fils espèce de cinglée ?! s'exclame la mère en furie.

— Dans la vie, il faut parfois être cruelle pour pouvoir survivre. avoué-je d'un ton détaché en fixant le petit ange.

Je me relève et dissimule mon émotion dévastatrice alors que les cris et pleurs de la mère ricochent contre les murs de la pièce. Le père quant à lui est de marbre, les yeux légèrement rougis par l'émotion.

Quel connard.

Mes esprits retrouvés, je finis par les bâillonner.

Je me retourne et m'empresse d'aider Andy dans sa tentative de porter Amadeo avachis sur une épaule. Sans un regard en arrière, nous précipitons vers la porte fenêtre qui donne sur le balcon. Par chance, un escalier est raccordé. Nous les dévalons et accélérons jusqu'à la voiture laissée dans le garage avec le van.

Nous installons Amadeo, qui commence à remuer et à papillonner des paupières, à l'arrière aux côtés d'Andy. Je prends le volant laissant la place côté passager vacante pour Andrea. Je sors du garage et à l'aide du bip laissé dans la voiture, j'ouvre le portail. J'accélère et sors de la propriété pour aller me garer à une centaine de mètres plus loin. Tellement absorbés par les propos du petit, personne ne nous a remarqué.

La mort règne en silence dans l'habitacle. Les jambes s'agitent, les dents rencontrent les ongles et les cœurs galopent nous privant d'oxygène.

L'attente est insupportable chaque minute s'allongeant en un éternité.

— Andrea devrait avoir endormi le frère maintenant. L'explosion devrait pas tarder. murmure Andy si bien que je ne sais pas si c'est pour se rassurer ou pour m'informer.

Quelques secondes à peine après, une détonation éjecte des débris qui s'abattent en une pluie violente sur la rue. Absorbée par l'envolée macabre des fragments de vie des Feniosso, je sursaute en contenant un cri quand la tête d'Andrea apparaît à la fenêtre. Il fait le tour et s'installe sur le siège. La portière à peine fermée, je démarre en trombe en direction du port pour échanger les voitures.

En arrivant là-bas, nous constatons que tout est resté inchangé, les corps n'ont pas encore été découverts. Un poids invisible semble se lever de nos épaules alors que nous échangeons un regard rapide.

Nous nous empressons de faire l'échange, mais comme je manque de forces, Andrea se dévoue pour ramener la moto d'Amadeo jusqu'à chez moi, où nous avions prévu de retourner.

L'adrénaline se dissipe laissant l'opportunité à la douleur de me transpercer l'épaule. Me voyant grimacer, Andy prend le volant. Nous filons à toute vitesse loin du chaos laissé par notre passage, mon passage, celui du phénix.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top