Le plan - 32
Guidée par le souvenir du jour de l'enterrement de Raphaël, c'est naturellement que mon choix se porte sur cette famille. Loin d'être les plus redoutables, ils demeurent une menace. Depuis ce jour ma méfiance envers lui et Abiani n'a pas désemplit et a, au contraire, fleuri des doutes quant à leur implication dans mon drame personnel. La voix d'Andrea dissipe le nuage de souvenir qui couvrait mon attention.
— Je sais que Tony réside dans le manoir familial, il ne l'a jamais quitté. Sa mère, femme et enfants y habitent avec lui.
— Okay et tu sais où il se trouve ce manoir ?
— C'est là où ça se complique. Il est en plein milieu de Palerme, il sera vraiment difficile de faire des repérages et d'entrer sans se faire coincer.
— Argh ça ne va pas nous aider mais on en n'est pas encore là. Est-ce qu'on sait autre chose de lui ?
— Il adore jouer au poker. J'avais intégré sa table et jouais régulièrement avec lui jusqu'à la mort d'Ezio. Ensuite je n'ai plus vraiment eu le temps comme tu peux t'en douter. Je peux retourner le voir et avec un peu de chance, récolter quelques informations.
— Bonne idée, il pourrait laisser échapper quelques détails croustillants. Cette fois j'aimerai que tu y ailles avec un de nos hommes. Il est toujours mieux d'avoir un allié dans l'arène.
Andrea me sourit en hochant la tête.
— Qu'est-ce-qu'il y a ?
— Rien, je suis juste impressionné de voir la vitesse avec laquelle tu apprends.
— C'est parce que j'ai eu le meilleur des entraîneurs ou simplement parce que je suis une très bonne élève. réponds-je en lui faisant un clin d'œil.
— Je suis plus convaincu de l'entraîneur , sourit-il en retour, je vais contacter Amadeo pour lui proposer le plan et également Tony. Je vous tiens au courant. annonce-t-il en se levant, le portable dans la main.
Quelques minutes plus tard, Andrea refait surface, un sourire satisfait sur les lèvres.
— C'est réglé, nous allons voir Tony demain soir.
Je soupire en jetant un coup d'oeil à la mer par dessus mon épaule comprenant que ma baignade était la dernière avant un long moment.
***
Sac en main, je le laisse tomber avant de m'affaler sur ce lit inconnu qui accueillera mon sommeil pour les prochains jours. Le silence des vagues a laissé place à la cacophonie des klaxon qui rugissent dans les rues nocturnes de Palerme.
— Andrea et Amadeo sont partis rejoindre Tony, annonce t-elle en laissant la porte de ma chambre claquer derrière elle, attention j'arrive !
Elle n'a pas fini sa phrase qu'elle s'étale déjà à mes côtés me percutant de son bras las. Trop fatiguée, je ne réagis même pas et m'endors sans m'en rendre compte bercée par les problèmes de manucure d'Andy.
Le lendemain, nous apprenons qu'il faudra s'armer de patience le temps de faire plusieurs séances avant de récolter quelconque information. De nature méfiante et ne se dévoilant pas facilement, Tony nous donne du fil à retordre.
En attendant, il est également impossible de faire des repérages car n'ayant aucune information sur notre porte d'entrée, nous ne pouvons entamer quelconque investigation.
Je profite de cette pause pour contacter Callegrio. L'option Isabella n'ayant pas encore révélé son potentiel, je joue mon joker dans l'espoir qu'il nous assure le succès.
— Et qu'est-ce que vous attendez de moi ? demande t-il après que je lui ai expliqué le dilemme de Nume.
— J'aimerai que tu recherches dans vos archives des enquêtes qui pourraient être liée à la mafia, surtout à Ezio. Apparemment ce ne serait pas le seul corps qu'il aurait dissimulé là-bas mais le seul qui serait d'une famille mafieuse. Ce qui veut dire que des familles lambda ont du signaler la disparition de leur proche sans jamais le retrouver. Il y a certainement plus d'une disparition qui peut être reliée à mon mari. Rassemble ce que tu as de suspect et on croisera les informations. Oh et ce que tu dois faire je veux que tu le fasses le plus rapidement possible.
— Ok mais ça prendra quand même quelques jours voire semaine ce n'est pas si simple car je dois...
— Je m'en fiche, fais le au plus vite c'est tout, imposé-je avant de raccrocher, du temps, du temps, comme si j'avais le luxe d'attendre. marmonné-je en faisant valser mon téléphone sur le lit.
Au moment où je relève mes yeux sur Andy qui rit avec Andrea, mon coeur se serre. Les poings fermés sur on souffle se renouvelle plus ma vision se trouble si bien que je me rends compte qu'Andy est à mes côtés seulement quand je sens sa main se poser sur mon bras.
— Hé May, qu'est-ce qui t'arrive ? me questionnne t-elle tout bas.
— J'ai pas envie de te perdre. sangloté-je en m'asseyant sur le lit.
— Pourquoi tu me perdrais ?
— Rien ne va ! Je ne contrôle plus rien ! Ton avenir dépend d'Isabella qui reste muette et de Callegrio qui doit déterrer des squelettes d'il y a des années ! L'échéance est super courte alors que toutes nos solutions demandent du temps ! Je peux rien faire, je dois subir cette période de merde ! Même pour Feniosso on est coincé pour l'instant !
— Je suis d'accord être impuissant c'est de la merde mais tu as fait tout ce qui était en ton pouvoir pour agir !Pour le moment oui on stagne mais je sais que dès qu'on aura de nouveaux éléments tu te dépasseras pour réussir. Profite de ce moment pour te reposer ou autre chose car ensuite tu ne sais pas quand tu auras de nouveau cette occasion. Tu ne peux rien faire de toute manière alors autant mettre cette période à profit.
Je hoche de la tête tout en la serrant fort dans mes bras.
Sous les conseils d'Andy, je trompe mon impatience en travaillant sur de nouvelles chansons. Les années passées m'ont permis de d'étoffer mon inspiration à tel point que l'écriture devient facile et fluide.
Les jours s'étirent en semaines. J'alterne entre écriture et entraînement physique avec Andy alors qu'Andrea et Amadeo font tout leur possible pour entrevoir une brèche pour s'y engouffrer.
Ce temps passé aux côtés d'Amadeo m'a fait découvrir une facette plus loyale et domptable que ce à quoi je m'attendais. Même si je reste sur mes gardes, notre contact est moins conflictuel que notre rencontre. Loin d'être un ami, il se révèle être un bon homme de main.
Assises dans le salon de ma chambre, Andy pose son cerveau en parcourant les réseaux sociaux alors que je fais fumer le mien en noircissant ma page des paroles qui me viennent à l'esprit.
Soudain, la porte résonne de coups toqués chassant le calme ambiant.
— T'attends quelqu'un ? demandé-je à Andy.
Elle fait la moue tout en haussant les épaules alors que je vais ouvrir.
Je me tends en découvrant le sourire dément de Gioele, l'oeil brillant de sa folie.
— Mayina te voilà !
— Gioele ? Que fais-tu ici ? questionné-je d'une vois forte pour alerter Andy.
— Je devais te voir. Mon amie à la réception t'a reconnu et m'a dit que tu étais là.
Mon pouls s'accélère et mes yeux s'écarquillent. Il doit s'en rendre compte puisqu'il ajoute:
— Ne t'inquiètes pas, je lui ai fait promettre de ne rien dire, je te veux rien que pour moi. Nous devons parler seuls à seuls. lâche t-il en poussant la porte pour regarder derrière moi.
— Désolée mais ce n'est ni le moment ni l'endroit. S'il te plaît, pars. intimé-je fermement.
Il me saisit le bras la lueur de désespoir dans le regard.
— Je ne peux pas vivre sans toi, Mayina. Tu ne comprends pas ?
— Lâche là espèce de psychopathe ! T'as pas entendu ? Casse toi !
Andy s'interpose et arrache mon bras de son emprise.
— J'hésiterai pas à te l'enfoncer dans l'oeil ! menace t-elle son talon dans la main.
— Un problème gamin ? questionne Andrea en se plantant derrière lui.
Je laisse échapper un léger soupire, les épaules soulagée d'un poids, je serre la main d'Andy qui se referme sur la mienne.
Impassible, ses yeux ancrés dans les miens, il laisse échapper un "A bientôt" avant disparaître.
Je m'effondre dans les bras d'Andy. Les esprits retrouvés, je remercie Andrea qui m'enlace de son réconfort.
— Ce mec est cinglé, t'es pas seule on est là. me rassure t-il en me frottant le dos.
Je me détache de lui et inspire profondément pour chasser ce mauvais moment.
— Aller passons à autre chose, il ne mérite pas mon anxiété. Dites- moi que vous avez avancé.
— En effet. Depuis la guerre en Ukraine, Tony est un défenseur actif de leur cause. Ca ne m'étonnerait pas qu'il baigne dans le trafic illégal d'armes pour leur en importer. nous informe Andrea en enlevant sa veste.
— Alleluiah ! Au bout de quinze jours il en a mis du temps avant de dire un truc intéressant ! intervient Andy.
— Parfait ça nous fait une piste à explorer et à creuser, avec un peu de chance ce sera notre porte d'accès. dis-je enthousiaste.
— C'est prévu. Dans la conversation, il a sous entendu avoir besoin de renfort pour je cite " alimenter le grenier à blé". Je vais me porter volontaire prétextant avoir besoin d'argent, que les temps sont durs depuis la mort d'Ezio. Il comprendra certainement et malgré la rivalité Feniosso Madini qu'il a pu y avoir, il a toujours reconnu la qualité de notre travail. Je pense qu'il me considérera comme un atout plutôt qu'une menace. précise Amadeo en s'installant dans le fauteuil face à moi.
— Le grenier à blé ? l'interrogé-je sceptique.
— C'est le surnom de l'Ukraine, c'est le grenier à blé de l'Europe plus précisément.
— Super boulot ! Suivant les détails que tu obtiendras nous pourrons ensuite agir et prévoir un plan.
Le reste des détails ne se fait pas attendre. Dès le lendemain, Amadeo retourne auprès de Tony pour lui proposer son aide et revient avec un sourire triomphale.
— Il a accepté que je fasse partie de son équipe pour transporter les armes.
— Génial, t'en sais plus sur le déroulement ? Combien ? Où ? Qui ? m'empressé-je de l'interroger.
— Wow wow tout doux j'ai rien de tout ça. Tout c'que j'sais c'est qu'il m'enverra les données géographiques du point de rencontre avec les vendeurs seulement 30 minutes avant la livraison, le temps de la route.
— Ça nous donne déjà une idée du périmètre qu'on va devoir quadriller. Il faudra qu'on se tienne près à tout moment. conclus-je.
— Je vais demander à Luis de faire les recherches nécessaires pour nous donner une liste des lieux susceptibles de correspondre à celui de la transaction. dit Andrea.
Luis est l'un des cinq hommes à m'être loyal, de loin le meilleur pour localiser un lieu. Ezio faisait toujours appel à lui lorsqu'il avait besoin de données géographiques et aussi bon qu'il l'était c'était pour son efficacité et sa précision qu'Ezio le missionnait. Peu importe la difficulté de la tâche, il parvenait toujours à l'accomplir avec brio. C'est donc en toute confiance que j'accepte qu'Andrea lui confie cette mission.
Après quelques heures de travail acharné, nous recevons un message de Luis avec les informations que nous lui avons demandé. Une liste exhaustive de lieux propices à un tel trafic avec une note personnelle:
" J'aurai une petite préférence pour le port à conteneurs, ce genre de lieu est très prisé pour la discrétion qu'il confère."
Malgré son avis, nous parcourons la liste et concluons que le port est en effet très probablement le lieu de prédilection sans pour autant faire une croix sur les autres.
— Nous n'avons plus de temps à perdre. N'ayant aucun indice sur le jour du trafic, nous devons agir dès maintenant et faire des repérages sur le maximum de lieux, dont le manoir Feniosso. Dans tous les cas, nous devrons nous y rendre pour tuer le reste de la famille. avertis-je d'un ton sévère.
J'ai à peine le temps de terminer ma phrase que déjà Amadeo et Andrea s'activent. Restée jusque là sagement rangée dans l'armoire, Andrea s'empare de la malette grise.
— Voici l'un de nos meilleurs atouts, le drone thermique. Grâce à lui nous allons pouvoir prendre des images des lieux et également prendre connaissance de ce qui nous attend. Il détecte la présence d'humain grâce à nôtre température corporelle. Ce qui signifie que nous connaîtrons le nombre exact d'ennemis sur le territoire. présente-t-il.
— Grand atout pour ce qui concerne le manoir. précisé-je en fixant le drone.
— Exactement. s'enjoue-t-il en souriant.
Sans perdre plus de temps, je suis Amadeo et Andrea qui me retient.
— Désolé mais c'est sans toi May.
— Comment ça ? demandé-je surprise.
— Tu ne peux pas venir avec nous, ta notoriété est dangereuse.
— T'es sérieux là ?! J'ai pas réduit Raphaël en cendres pour entendre de nouveau ses paroles !
— Ce n'est pas dans le même sens. Là, ça pourrait mener à mal notre plan. Tu as beau faire une pause, ton visage reste connu, bien trop connu pour passer inaperçue. Que tu le veuilles ou non, tu restes ici et on s'occupe de ça. C'est à ça que sert un bras droit tu ne peux pas tout faire. ordonne Andrea.
Sans pouvoir ajouter quoi que ce soit, ils disparaissent derrière la porte.
Ce n'est qu'en fin de soirée que le duo revient à l'hôtel. En passant le pas de la porte, ils affichent une mine vaincue et déconfite.
— Qu'est-ce qui vous arrive ? m'inquiété-je.
— On nous a détruit le drone. répond Andrea sur le même ton que celui d'un enfant à qui on aurait cassé son jouet préféré.
Je réprime un sourire face à son ton enfantin ne voulant pas aggraver la situation.
— Ne t'inquiète pas nous avons assez d'informations pour agir. Nous connaissions le risque que nous encourions en survolant le manoir Feniosso. Malheureusement ce qu'on craignait est arrivé. précise Amadeo laissant Andrea à ses pensées endeuillées.
— C'est-à-dire ?
— Ils ont remarqué notre drone et l'ont tout de suite neutralisé mais nous avons pu enregistrer des images et savons combien ils sont.
— Parfait, vous avez pu tout faire du coup ?
— Nous sommes allés à l'essentiel c'est-à-dire le port, un immeuble désaffecté, une carrière, un parc et enfin le manoir. Nous avons pu y distinguer quatorze personnes dont quatre gardes dont on est sûrs puisqu'ils avaient des places stratégique aux quatres points cardinaux. Ils avaient le même pas que lorsqu'on fait une ronde et lorsque l'un deux a abattu le drone, nous en avons eu la certitude. expose Amadeo.
Je n'ai pas le temps de répondre que le bruit d'un sms se fait entendre. Il regarde son téléphone. A la mine sévère qu'il affiche, je comprends que Tony en est l'auteur.
— C'est pour ce soir, Luis avait raison, ce sont les coordonnées du Port de Palerme.
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