Le feu aux poudres - 48
A la fin du dessert, un orchestre prend les commandes de la soirée. De nombreux couples se lèvent pour aller danser et Enoro en profite pour me tendre sa main.
— Allons enflammer cette piste. me sourit-il.
Je lui souris en retour et accepte sa main. Nous gagnons la piste de danse plongée dans une lueur tamisée. Alors que les couples autour de nous se pressent les uns contre les autres, se mouvant lentement au rythme de la musique douce qui flotte dans l'air, Enoro me tire à lui et m'enserre de son bras. Une main au creux de mes reins et l'autre dans la mienne, j'essaie de calmer les battements de mon cœur dynamisé par l'excitation. Je tente de me ressaisir ne voulant pas dévoiler mes émotions.
Au fil des notes musicales qui nous enveloppent comme une étreinte invisible, nous synchronisons nos mouvements alors que nos corps se rapprochent dangereusement. L'atmosphère s'électrise lascivement au gré de nos mouvements, faisant progressivement monter notre chaleur corporelle. Nos regards échangés deviennent brûlants et chargés de désir. A mesure que la danse progresse, chaque effleurement, chaque contact devient un jeu de séduction silencieux et trahit notre embrasement. Les mains d'Enoro parcourent suggestivement mon corps, explorant mes courbes dans une tendresse feinte. Son toucher est un mélange de délicatesse et de pression qui ne fait qu'augmenter notre attraction et l'électricité sexuelle qui en devient presque palpable. Nos respirations s'accordent au rythme de la musique, nos souffles se mêlent dans l'air chargé de luxure. Nous nous rapprochons davantage, nos lèvres se frôlent presque et nos regards s'ancrent l'un dans l'autre avec une intensité dévorante. La tension sexuelle, bien installée, atteignait maintenant son paroxysme. Malgré ma détermination, je sais que je ne pourrais résister plus longtemps. Le souffle irrégulier, je m'apprête à succomber à la passion qui me consume. Prête à m'abandonner à mes désirs les plus profonds, la musique s'évanouit et nous fait sortir de notre transe érotique. Nous revenons à la réalité en nous séparant laissant flotter dans l'air une promesse de plaisir et de désir inassouvi.
D'un commun accord, nous décidons de sortir prendre l'air pour reprendre nos esprits. Ne voulant pas parler de ce qui vient de se passer, je décide d'amener un tout autre sujet de conversation.
— Honnêtement, quel est l'intérêt de ce dîner ? Je m'attendais à une remise de prix, ou récolte de dons ou je ne sais quoi. Pas un simple dîner qui regroupe tous les nombrilistes et arrogants de ce pays. questionné-je.
Ma phrase le prends certainement par surprise car il a un mouvement de recul et une mine hésitante.
— Comme vous avez pu le comprendre, je ne suis pas seul dans l'aventure. Des investisseurs sont à mes côtés. Ce genre de dîner regroupe non pas tous les nombrilistes du pays mais toutes les personnes influentes qui peuvent vous faire briller ou vous éteindre en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. A notre table étaient regroupés les cinq investisseurs de Dottrece production. Ayant toujours des doutes sur leur bon placement d'argent, il faut souvent leur prouver que je suis à la hauteur et qu'ils ont raison de me faire confiance. D'où l'importance de vous avoir à mes côtés ce soir, vous êtes mon plus grand atout et un talent indéniable qui ne peut que les rassurer.
— Donc vous vous servez de moi ? Je ne suis qu'un trophée que vous exhibez pour vos affaires ? m'offusqué-je.
J'essaie de partir mais il me retient et me ramène à lui. Son parfum fait monter le désir en moi qui se mêle à ma rage. Tous deux valsent dans mon ventre tentant de prendre le dessus sur l'autre sans y parvenir.
Alors que je contiens tant bien que mal le combat intérieur qui sévit en moi, la voix d'Enoro s'élève :
— Ne dites pas ce que je n'ai pas voulu dire. Vous n'êtes pas un trophée. Je vous respecte trop pour vous réduire à ça. Si je vous ai emmené avec moi c'est que j'ai confiance en vous, que je crois en vous et que je sais que vous irez loin. Vous méritez le triomphe que vous connaissez car vous êtes talentueuse et que vous avez travaillé dur pour ça. Vous emmenez ici est une récompense car c'est une opportunité pour vous. De nous voir alliés, ça élèvera votre carrière, élargira le champ de vos horizons, vous serez encore plus en vogue que maintenant et l'international vous tendra les bras. Grâce à ce soir, votre vie prend un tournant et dorénavant vous jouez dans la cour des grands. Alors oui honnêtement ça me sert aussi mais c'est pour vous que je vous ai amené ici car j'aurai pu choisir d'autres de mes talents qui auraient parfaitement fait l'affaire mais c'est vous que j'ai choisi car c'est vous qui méritez le plus d'accéder aux étoiles.
Je ne réponds rien me sentant soudainement idiote et reconnaissante. Après quelques secondes, je plonge mon regard dans le sien.
— Merci Enoro, je n'avais pas conscience de tout ça. le remercié-je sincèrement.
Il a à peine le temps de me sourire qu'entre en scène Franco.
Il s'interpose entre nous avant de me réclamer une danse, moment dont profite également Rafia pour en faire de même avec Enoro comme si les deux étaient de mèche. Ne pouvant pas refuser, je me retrouve dans les bras nonchalants de Franco qui fait à peine ma taille, à fouler la piste de danse accompagnée d'une boule de jalousie. Dépitée et agacée, je refoule mes sentiments et prie pour que la chanson se termine vite.
— May, May, May, vous me décevez.
— Quoi donc encore ? soufflé-je déjà lassée de sa compagnie.
— Je vous pensais honnête et vous me mentez droit dans les yeux.
— Je ne vous suis pas. rétorqué-je en fronçant les sourcils.
— Je sais que vous êtes le phénix je vous ai démasqué. me chuchote-t-il à l'oreille alors que je me contracte de dégoût et d'effroi.
Je jette un coup d'œil à Enoro qui n'a pas l'air d'apprécier la proximité entre Franco et moi. Je ne réagis pas et me reconcentre sur Abiani qui me dévisage.
— Tiens donc et qu'est-ce qui vous fait dire ça ? demandé-je sans convictions en étouffant ma crainte.
— Il y a quelque temps, je suis parti pour New York. Dans mon jet privé, se trouvaient deux magnifiques oiseaux bien roulés si vous voyez ce que je veux dire.
Je vois parfaitement et me tends en sachant qu'il parle d'Andy ce qui m'énerve encore plus.
— Sans comprendre pourquoi, à un moment donné, elles se sont pris le bec et puis la plus bandante des deux m'a baratiné. Je sens le mensonge comme le requin sent le sang. Alors j'ai décidé de les pister et savez-vous où elles m'ont amené ? A vous ma belle intrépide. révèle-t-il en arborant un sourire déformé.
Je canalise mes émotions pour rester le plus neutre possible alors que le chaos et l'angoisse commencent à s'affoler en moi.
— Ça ne prouve rien du tout Abiani. dis-je d'un ton sec.
— En effet, mais la patience et la persévérance sont deux de mes qualités, très chère. Tout vient à point à qui sait attendre.
— Et bien bon courage pour avoir quelconque preuves.
— Oh mais je les ai déjà. J'ai reconnu Ginevra qui était avec la bimbo et je sais ce qu'elle manigance. Votre alliance est loin d'être de bonne augure.
— Donc c'est tout ce que vous avez ? Une amitié avec Ginevra et deux hôtesses de l'air se prenant le chou ? Un peu léger pour accuser aussi promptement. le défié-je.
— C'est mal me connaître ma belle. J'ai vu l'un de vos hommes de main ou dirais je plutôt celui de feu Ezio, rôder autour de chez moi. Je l'ai ensuite suivi et l'ai surpris à aller dans un endroit désert avec un cabanon. Je sais que c'est là où vous projeter de me tuer alors j'ai tout détruit, tout ce qu'il y avait à l'intérieur également. J'ai des preuves de ce que j'avance et je saurai m'en servir. Je ne sais pas encore quand mais je vous aurai avant et serai prêt à vous accueillir comme il se doit. Je sais que vous êtes le phénix et je saurais vous coincer car contrairement à vous j'ai bien plus de contacts et de pouvoir que vous n'en aurez jamais.
— Vous êtes tristement pathétique. Affabuler juste pour vous rendre intéressant et vous croire redoutable. Peu importe ce que vous croyez avoir sur moi, ce ne sont que des mensonges ou le fruit de votre paranoïa. Sincèrement la mafia est loin d'être mon ambition. Vous êtes bien tous trop insipides pour que je m'intéresse à vous et que je perde mon temps à planifier une pseudo vengeance. Vous êtes si insignifiant que même les vers ne viendraient pas grignoter votre cervelle.
— Je sais ce que j'avance et rien de ce que vous pourrez dire ne me fera changer d'avis.
— Vous êtes sûr ? Car je sens le doute s'immiscer en vous et ronger votre crédibilité. Vous voulez simplement préserver votre dignité mais vous savez que vous venez de vous ridiculiser. Car quand bien même je serai ce phénix, dire à votre ennemi que vous l'avez démasqué est loin d'être un plan intelligent. Et si vous pouvez être aussi con alors votre parole n'a plus aucune crédibilité et ce que vous avancez n'a plus aucune vérité. rétorqué-je avant de quitter la piste de danse sans attendre la fin de la musique.
Je quitte la salle de réception pour contacter Andy. Cachée dans les toilettes, je lui envoie un sms expliquant la situation et lui demande où ils en sont et s'ils ont été confrontés à des obstacles. Sa réponse ne se fait pas attendre.
" Plus de monde que prévu à son domicile, Abiani a embauché plus de personnels pour sa sécurité et celle de sa famille. Andrea avait des doutes sur notre couverture depuis la sortie en avion. Alors il a demandé à Amadeo d'aller au manoir et de se faire voir pour voir la réaction d'Abiani. Ensuite Amadeo a faussé les pistes pour qu'Andrea détecte si oui ou non Abiani nous suivait et il s'est avéré que c'était le cas. Nous ne t'en avons pas parlé car nous savions que nous maîtrisions la situation. Tout est en ordre, nous n'attendons plus que tes directives."
Agacée par le manque de transparence, je suis à deux doigts d'exploser mais me contrôle. Je lui réponds en allant droit au but en lui disant de rappliquer avec Andrea pour se débarrasser au plus vite d'Abiani craignant qu'il ne parle à qui que ce soit de ses doutes. Une fois la confirmation d'Andy reçue, je sors des toilettes et tombe sur Enoro dont l'épaule est appuyée contre le mur. A sa vue je me sens tout de suite soulagée comme si le poids de mes épaules était soudainement plus léger.
— Tout va bien ? me demande-t-il sincèrement en se redressant, le regard inquiet.
Toutes les émotions alors contenues jusqu'à maintenant prennent le dessus et font surface. Sa question a l'effet d'un coup de massue qui vient démolir le rempart que j'avais érigé. Les larmes montent et commencent à couler, je prends aussitôt mon visage dans les mains ne voulant pas exhiber ma perte de contrôle. Je sens l'étreinte réconfortante d'Enoro m'entourer et me recouvrir d'un halo de chaleur.
— Tout va bien, je suis là, tu n'as rien à craindre. me réconforte-t-il en me caressant tendrement le dos, sa joue contre ma tête.
Je me ressaisis et me redresse en essuyant mes larmes. Je me détache de l'étreinte d'Enoro qui pose ses mains sur mes hanches. Je lui souris timidement, soudain gênée d'avoir été si vulnérable face à lui.
— Désolée, ce n'était pas censé arriver. m'excusé-je.
— Tu as le droit de craquer, vu comment Franco s'est acharné sur toi ce soir, c'est le contraire qui aurait été plus surprenant. me rassure-t-il en me séchant une dernière larme de son pouce.
Son sourire me réchauffe le cœur et je lui souris en retour avant de m'éloigner de lui.
— J'y retourne, je dois faire disparaître le panda qui a pris possession de mon visage. dis-je en étouffant un rire.
— Tu fais un très beau panda. me complimente-t-il avant que je ne lui tourne le dos pour disparaître dans les toilettes.
Mon maquillage n'étant pas le premier de mes soucis, je retourne en cabine et jette un coup d'œil à mon portable. Un message d'Andy m'annonce leur arrivée imminente.
" Foutez le feu au bâtiment, la panique générale vous donnera la couverture parfaite pour que personne ne vous remarque et que vous puissiez vous charger de Franco. Avant ça vous devrez vous débarrasser de son chauffeur sinon ça fera tout capoter. Une fois tout ça fait, je vous retrouve au hangar avec Ginevra pour la mise à mort. En attendant, je m'occupe de mon alibi. Bonne chance."
Je sors et me pomponne vite fait avant de quitter les toilettes.
Cette fois Enoro n'est plus là. Je rejoins la salle de réception puis retourne à ma table pour qu'on me voit et ne pas avoir de comportement suspect. Je suis accompagnée de quatre personnes à ma table, je me mêle à leur conversation pour attirer leur attention et agir normalement.
Le temps passe et mon stress monte craignant que le plan tombe à l'eau. Au bout d'une bonne demi-heure, l'alarme incendie retentit et la panique générale s'installe. Un homme d'âge mûr nous crie de rester calme et de sortir par le balcon qui donne dans les jardins grâce à un escalier. Évidemment personne ne l'écoute et c'est dans des hurlements que j'essaie de suivre la foule dont le mouvement devient vite dangereux. J'essaie de trouver Enoro mais en vain, la mer de personne m'emporte et je ne peux qu'avancer si je ne veux pas finir sous leurs pieds. Une fois à l'extérieur, le monde afflue mais toujours aucune trace d'Enoro ni de Franco. L'angoisse m'envahit jusqu'à ce que j'entende le bip de mon téléphone annonçant un message.
" On l'a on part au hangar." lis-je soulagée en partie et toujours inquiète de ne pas voir Enoro.
Au bout de vingt minutes, tout le monde est dehors mais pas lui. Je commence à paniquer et à vouloir rentrer pour aller le chercher mais on me retient en disant que c'est trop dangereux. On nous demande de contourner le manoir pour regagner nos voitures qui sont sur le départ à l'avant pour nous évacuer. Je suis le mouvement n'ayant pas d'autres choix. Une fois à l'avant du manoir, j'entends une voix familière m'appeler. Je me tourne vers la source et découvre, soulagée, Enoro qui me fait signe depuis la voiture. Je cours le rejoindre en laissant derrière moi les vestiges de mon passage.
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