Le colosse - 28

Je roule alors sous le lit pour remettre de la distance entre nous et me donner du temps pour réfléchir. Un éclair de lumière apparaît et je comprends qu'il vient d'allumer la chambre.

Tapie sous le lit, je regarde où sont ses pieds pour me donner une idée de sa position. Je les vois tournés vers moi sur ma gauche. Je roule alors sur ma droite et à toute vitesse, je me relève, tire la lampe de chevet vers moi, arrachant sa prise et la lui lance dessus.

Pris par surprise, il protège son visage de ses bras sans vaciller. J'en profite pour courir vers le bureau et cette fois lui jeter une chaise à la figure. N'ayant pas encore retrouvé ses réflexes, il chancelle après avoir reçu la chaise en pleine tête.

Je m'arme du coupe papier posé sur le bureau puis cours vers mon agresseur avec la volonté de lui asséner un coup. Dos à moi, je lui saute dessus pour le menacer de mon arme sous la gorge. Il attrape mes mains, repoussant le moment de son exécution et dans un élan, il me plaque de toutes ses forces et de tout son poids sur le mur derrière nous. Mon dos craque au contact de la pierre ce qui m'arrache un cri de douleur. Sous l'effet de son attaque, je lâche mon arme qui tombe dans un clinquement sur le sol et m'affale par terre de tout mon poids. Je me ressaisis rapidement pour ne pas lui laisser le temps de riposter.

Toujours à terre, je repère le coupe papier sur le parquet et jette un regard au colosse qui est prêt à revenir à la charge. Je me précipite vers la lame mais il m'attrape par la taille et me fait voler par-dessus sa tête pour me claquer au sol.

La respiration coupée par le choc de l'action, je mets trop de temps à récupérer ce qui lui permet d'enchaîner et de me chevaucher armé du coup papier qui cette fois vient se loger sous ma gorge. Mon cœur s'accélère au contact de la lame froide sur ma peau.

Les mains sur ses poignets pour le retenir, je rassemble mes forces pour le faire chanceler mais il est bien trop lourd. Je m'empare alors de ses doigts et dans un mouvement bref et vif, je lui en retourne deux. Un craquement suivi de ses hurlements résonnent dans la pièce. Déstabilisé par la douleur, il laisse échapper son arme et se maintient la main blessée. J'en profite pour la récupérer et lui assène un coup dans l'épaule gauche. Mon attaque le fait perdre l'équilibre et dans un mouvement de hanches, je le pousse sur le côté.

Assis, la main sur l'arme blanche, il me regarde les yeux injectés de sang, la bouche crachant de la salive à chaque expiration qui paraît douloureuse.

Je me précipite alors vers la salle de bain mais sens une main s'empare de ma cheville ce qui me fait tomber face contre terre. Allongée sur le sol, je me retourne pour lui faire face et esquive une attaque en serpentant sur mon côté droit. Le coupe papier planté dans le sol, mon agresseur au-dessus essayant de le retirer, je profite de son immobilité pour agir.

Dos à lui, je saisis une ceinture qui pend sur un crochet de la salle de bain et lui passe autour du cou. Je tire de toutes mes forces, prenant appui sur mes jambes, les pieds ancrés dans le sol. Il a le réflexe de porter ses mains à son cou et essaie de me faire chanceler pour sortir de mon emprise. Je tiens le coup jusqu'à ce que je glisse sur l'eau qui est en train de déborder de la baignoire.

Affaiblis par mon étranglement, mon agresseur gît au sol en toussant pour reprendre sa respiration. Je me précipite sur le robinet pour l'éteindre et je sens une poigne s'emparer de ma nuque et me plonger la tête dans l'eau. Je me débats et essaie de lui mettre un coup dans les bourses mais n'y arrive pas. Voyant que mes débattements sont vains, j'essaie de me calmer et de me concentrer sur ma respiration sachant que plus je m'active plus je m'approche de la mort.

J'arrive à calmer les battements de mon cœur ce qui me permet de prendre la décision de retirer le bouchon et de me glisser dans la baignoire. M'arrivant juste à mi-cuisse, j'arrive à placer mon genou sur le rebord et à prendre appui pour me faire glisser dedans. L'action me permet de me détacher de la prise du colosse. Trempée et dans un mouvement rapide, je me relève et attaque mon agresseur. Je prends sa tête et lui donne un violent coup de genou puis je le relève grâce à son col et lui donne un coup de poing. Pour finir, je reprends sa tête et dans un élan violent je lui ouvre le crâne sur le rebord.

Complètement assommé, il s'effondre inconscient. Je sors du bassin complètement vidé de son eau et m'empare du coupe papier. En un coup précis et brutal, je le lui plante en plein dans le cœur.

Dans un dernier soupir, une tâche rouge déteint peu à peu son t-shirt autour du couteau. L'eau présente au sol se mêle à son sang colorant de rouge le blanc immaculé du carrelage de la salle de bain.

Epuisée, je m'affale contre la baignoire les yeux rivés sur cet inconnu dont notre première rencontre aura été la dernière. Un coup de téléphone me fait revenir à la réalité. Ne sachant pas combien de temps je suis restée là à regarder le cadavre, je panique devant la scène qui se joue devant moi. Je me dépêche d'aller répondre.

— Oui ? dis-je essoufflée.

— May, c'est Andrea je ne te dérange pas ?

— Non pas du tout. menté-je en essayant de dissimuler mon anxiété.

— J'ai pu contacter les hommes d'Ezio, ils sont prêts à te rencontrer demain. Tu seras prête?

— Parfait ! Oui bien sûr, je sais comment les convaincre mais avant j'aurai besoin de votre aide avec Andy. admets-je en regardant le corps gisant dans une mare de sang. 

Chargée de mon paquet entre les mains, la boule au ventre et l'angoisse au cœur, j'entre dans la pièce où sont réunis les hommes d'Ezio. Derrière moi, me suivent comme mes ombres Andy et Andrea qui sont tout aussi tendus même s'ils tentent de le dissimuler.

— Bonjour messieurs. salué-je en essayant de calmer la tempête qui fait rage en moi.

Tous se lèvent de leurs chaises pour me saluer en retour dans un concert de voix. Je réprime un sourire quand je reconnais un invité surprise mais pas moins désiré parmi les hommes. Sergio Bartoni, le père de Paola, me regarde avec fierté, un léger sourire aux lèvres.

Je prends place en bout de table et dépose avec soins ma boîte surprise devant moi. Andrea et Andy ont pris place de part et d'autre de la table en compagnie des sept autres hommes.

— Bien, je sais que vous êtes tous très occupés et que votre temps est cher alors j'irai droit au but. Si Andrea vous a réunis ici à ma demande c'est pour une chose. Vous allier à moi comme vous l'aviez fait pour Ezio.

Je sens déjà certains se tendre et reculer dans leur chaise les bras croisés et d'autres rester impassible, curieux d'entendre la suite.

— Je souhaite venger la mort d'Ezio en réduisant à néant la mafia sicilienne. Je veux tuer chaque famille une par une et ne plus jamais en entendre parler.

Je suis interrompue par le rire d'un homme. Je le fusille d'un regard noir et l'accable d'un air sévère. Les cheveux de la même couleur que le feu de fureur que son rire attise en moi, il a l'air d'être l'une de ces brutes épaisses dont la masse musculaire est plus importante que la matière grise.

Loin d'être intimidé, il me défie de son regard émeraude.

— J'ai dis quelque chose de drôle ? cinglé-je.

— C'est vous qui me faîtes rire. Vous vous croyez sincèrement assez forte pour annihiler la mafia sicilienne ? Vous croyez vraiment que de vaincre les familles, si vous y parvenez, empêchera d'autres familles de voir le jour après ça ?

Je lui offre un sourire franc.

— Puis-je connaître votre nom d'abord ?

— Amadeo madame.

— Cher Amadeo, lorsque le cerveau meurt, toutes les connexions sont touchées. Une par une elles s'éteignent car elles ne peuvent pas subsister les unes sans les autres. Lorsque le cerveau meurt, c'est tout le réseau qui s'effondre, quand bien même certaines essaieraient de survivre ou de prendre la place du cerveau, elles n'y parviendraient pas car elles sont loin de pouvoir le remplacer. Sans ses capacités, sa force et ses compétences, rien ni personne ne pourra prétendre au rang du cerveau. Je ne dis pas, il pourra bien y avoir des petits gangs comme dans tout pays mais jamais ils n'auront l'ampleur de la mafia et vous savez pourquoi ? Parce que dès l'instant où ils comprendront que la mafia a pu être réduite en cendre malgré son importance et sa stature, ils sauront qu'ils ne feront jamais le poids et préfèreront rester à leur place plutôt que de perdre la vie.

Il pouffe de rire clairement sceptique de ma réponse.

— Désolé mais je ne crois pas en vous, ni à votre histoire de vengeance. Vous pensez pouvoir arriver sur vos hauts talons, votre petit cul et votre sourire et qu'on vous fera allégeance parce que vous êtes la veuve d'Ezio et avez de grands rêves de gamine ? Désolé de vous dire ça mais redescendez sur terre et regardez la vérité en face parce que votre rêve est irréalisable.

Je baisse la tête et sourit suite à ses mots qui résonnent d'une étrange familiarité en moi. Mon esprit rajeunit d'une dizaine d'année lorsque mes parents m'avaient craché à la figure ce même genre de discours. La musique était le sujet de discorde mais la même lueur de doute brillaient dans leurs yeux avant que je ne les quitte définitivement. Le temps s'est écoulé mais ce regard lui n'a pas vieilli. Seulement aujourd'hui est différent, loin de moi l'envie de fuir pour leur prouver leur tord, je suis bien décidée à les confronter face à face et à sortir en laissant des regards confiants derrière moi.

Je relève la tête puis fixe un à un les autres hommes. Certains se rangent du côté d' Amadeo et d'autres sont encore indécis, seul le regard de Sergio est éclairé d'une lueur d'espoir et de foi. Galvanisée par son sourire de soutien, je reprends:

— Evidemment, je ne m'attendais pas à ce que vous me suiviez sans émettre des doutes. Comme l'a si bien dit Amadeo, mon statut de veuve ne me donne aucune légitimité auprès de vous. Je me bats depuis maintenant un an contre moi-même. Je repousse mes limites mentales et physiques. Si je suis restée dans l'ombre tout ce temps, c'était pour m'entraîner à ma vengeance. Andrea que vous connaissez bien, a particulièrement veillé à ce que chaque petite cellule d'humanité quitte mon corps, pour que face à mon ennemi je ne devienne plus qu'un robot dont l'objectif est de survivre. Pendant cette année, j'ai travaillé pour atteindre l'excellence, pour devenir redoutable. Je ne parais peut-être pas comme ça mais croyez-moi si un ennemi se dresse devant moi je sais le maîtriser.

La bouche encore ouverte, des applaudissements s'élèvent et étouffent ma voix.

— C'est ça ce que vous attendiez non ? Qu'on vous applaudisse pour votre parcours ? Qu'on vous donne une médaille parce que vous croyez avoir accompli l'exceptionnel en une année ? Vous pensez réellement que de vous venger comme vous le souhaitez vous conduira au bonheur ? Vous vous rendez vraiment compte de ce que tout ça implique ? Le nombre de morts, de violence qui règnera ? Avez-vous seulement déjà tué ou ce ne sont que des belles paroles que vous nous vendez ? me défie Amadeo en se penchant en avant sur la table.

— Je ne recherche pas le bonheur, juste la satisfaction. lui réponds-je droit dans les yeux, de marbre ne voulant pas lui donner le plaisir de distinguer l'agacement qu'il nourrit en moi.

Je détache mon regard de lui pour le poser sur les autres hommes.

— D'autres ont des doutes ?

Des mains se lèvent et d'autres restent baissées.

— Très bien.

J'ouvre la boîte et dépose mon premier joker sur la table.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top