L'interlude - 39

Le bruit d'Andy qui toque à ma porte de chambre me fait relever la tête de mes chansons.

— May faut te préparer, t'es attendue dans une heure. annonce-t-elle en ouvrant la porte.

— Oui cheffe laisse moi cinq minutes et je fonce.

A grandes enjambées, elle rejoint mon lit et me retire mes notes puis commence à partir avec.

— Hé mais qu'est-ce que tu fais ? J'en n'avais que pour cinq minutes ! m'exclamé-je.

— Oui oui et moi je suis le pape, j'ai dit va te préparer. T'es dessus depuis que t'es revenue de ton entretien hier, je pense que t'es prête. affirme- t-elle avant de sortir dans un claquement.

Je soupire en jetant mon stylo sur le lit puis pars me préparer.

Vêtue de ma petite robe noire, je sors enfin de ma caverne et retrouve tout le monde dans le salon.

— May sérieux, tu vas pas à un enterrement. souffle Andy en me dévisageant.

— Quoi ? Je vais pas me mettre sur mon trente et un non plus, soirée décontractée on a dit alors voilà un incontournable.

— T'es sûre qu'avec cette robe, c'est bien pour ta voix que les gens vont se retourner sur toi. pique Amadeo dont le rire se mêle à celui d'Andy.

Fiers d'eux, ils échangent un check sous mon regard dépité.

Malgré son faux pas lors de notre dernière mission sa présence reste appréciable. Longtemps ami avec Andrea, ils s'étaient perdus de vue après la mort d'Ezio et depuis leur retrouvaille rares sont les jours où l'un n'est pas sans l'autre. Il fait maintenant partie de notre bande, même si tous mes doutes envers lui ne sont pas totalement dissipés. Je dois bien admettre qu'un homme supplémentaire dans le groupe ne peut que renforcer notre sécurité.

— T'inquiète pas May, c'est pas grave on t'aime même si t'es irrécupérable. enfonce Andrea en entourant mes épaules de son bras.

— Pff l'élégance est une notion qui vous échappe de toute manière. me rebellé-je en souriant.

Dans une symphonie d'éclat de joie, nous rejoignons la voiture d'Andrea, tous volontaires pour venir me soutenir. 

En une poignée de minutes, nous arrivons au centre ville puis au Dahlia noir où je laisse mes trois compères derrière moi pour rejoindre les coulisses.

L'atmosphère est déjà chargée d'excitation, tous plus désireux les uns que les autres de vivre une soirée si inoubliable qu'elle leur fera oublier leurs problèmes. La musique bat par écho dans nos corps appelant notre passager débauché à prendre vie. 

J'atteins avec difficultés les coulisses, me faisant bousculer par des femmes ou hommes déjà trop ivres pour tenir debout ou en rencontrant des couples prêts à se sauter dessus dans la pénombre.

Après quelques obstacles, j'arrive enfin à atteindre mon objectif. Je retrouve un homme à la cinquantaine aux allures faux mafieux, la chemise ouverte laissant respirer ses poils manquant d'étouffer entre sa chemise trop serrée et sa peau boudinée. Chaînes et bagues en or ressortent de sa peau bronzée. 

J'en déduis que c'est le directeur du bar. Assis dans le fauteuil de la pièce ou plutôt du placard qu'ils appellent loge, il m'attend les traits tirés.

— May Torre ! Quel plaisir de vous avoir parmi nous ce soir ! s'exclame-t-il en se levant soudain détendu.

— Monsieur ?

— Pellitone Madame. se présente-t-il avec un sourire fier.

— Monsieur Pellitone, merci à vous de m'accueillir ce soir. réponds-je en lui rendant son sourire hypocrite.

Un silence gênant commence à s'installer. Sans comprendre ce qu'il attend, je le brise en lui demandant un peu d'intimité avant de monter sur scène. Intimité qu'il me laisse sans hésiter.

Au bout de quelques minutes de préparation, je suis prête à me baigner de la lumière de la scène.

Dans l'obscurité, j'observe la foule qui est déjà en feu. L'adrénaline et le stress montent en moi. Je calme les centaines de questions qui se bousculent dans ma tête en prenant une profonde inspiration. Plus prête que jamais, je me lance sachant qu'une fois sur les planches je serai dans mon élément laissant tous mes doutes s'envoler à mesure que ma voix vibrera en chacun.

Mon apparition sur la petite scène du bar provoque une agitation générale. Tous m'acclament, enfiévrés par l'atmosphère et la surprise que mon retour suscite. Galvanisée par leurs acclamations, j'assouvis leur désir et leur offre le show qu'ils méritent. Au fil de mes chansons, la foule devient de plus en plus surexcitée et en délire. Aucun doute n'est permis, je triomphe. 

Pour tenter de savoir si mon objectif premier est atteint, je cherche du regard Enoro à travers la foule mais la pénombre dominant, je ne peux reconnaître personne. Je laisse vite tomber, me concentrant de plus belle sur mes chansons. Après un rappel général, je quitte malgré moi la scène. Plus qu'un métier, elle demeure ma passion et une fois sur les planches, tout devient facile, évident. Tout n'est que joie et fête, plus rien n'a d'importance. Procurer autant de bonheur en un si court instant n'a pas de prix.

Je me dirige vers le bar assoiffée, où je suis vite alpaguée par une foule de fans demandeur de photos et d'autographe. Ce n'est qu'après une bonne demi heure que je me retrouve enfin seule et libre de commander à boire.

Après quelques gorgées, mon corps se tend sans que je ne le contrôle, lorsque je sens un parfum familier. Sans avoir besoin de me retourner, je sens aux papillons qui s'agitent dans mon ventre, qui arrive derrière moi. Alors que j'essaie de me détendre, sa voix chaleureuse me fait frissonner.

— Bonsoir May. dit-il posément.

Je me tourne pour lui faire face et sens mes joues se teindre de rouge à la vue de son sourire dévastateur. Je remercie la lumière tamisée du club, mon complice du moment, pour dissimuler la trahison de mon corps. Je lui souris en retour avant de répondre sur un ton désinvolte:

— Vous êtes venus voir par vous même l'étendue de votre défaite ?

Il paraît amusé de ma question puis réprime un sourire.

— Je dois avouer que je suis agréablement surpris. répond-il en s'installant sur le tabouret à côté de moi.

Il lève le doigt pour appeler le barman et le laisse commander son poison avant d'enchaîner, un sourire en coin des lèvres:

— Vous vous attendiez à un registre noir, empli de tragédie, de larmes et de souffrance avouez.

Il étouffe un léger rire avant de boire une gorgée de son verre.

— Pour être honnête, oui. Et à plus de curiosité malsaine. Mais tous ont l'air trop soulent pour se rappeler que vous êtes une meurtrière présumée. dit-il en effleurant de son regard la foule en effervescence.

— Ne soyez pas soulagé, j'ai des dizaines de titres sombres avec lesquels vous faire saigner les oreilles. Et pour ce qui est de ce scandale, il sera très vite derrière moi.

— Je n'en doute pas, j'espère qu'il en sera de même dans la mémoire des gens. Nous ferons un merveilleux travail ensemble. rétorque Enoro en me tendant sa main.

Je lui offre un grand sourire et lui prends la main pour conclure le marché. A son contact, mon cœur s'emballe et nos regards se verrouillent. Le temps semble s'arrêter et plus les secondes passent, plus j'ai l'impression de sombrer dans les profondeurs ténébreuses de ses yeux. Une main posée sur mon épaule m'extirpe soudain de ma noyade. Je romps le contact visuel et physique avec Enoro pour me concentrer sur Andy qui, les yeux pétillants, trépigne d'excitation de rencontrer Dottrece.

— Enoro je vous présente Andy, mon agent et meilleure amie. en la désignant de la main.

— Enchanté Andy. la salue-t-il cordialement d'un hochement de tête.

— Pareillement enfin seulement si vous avez revu votre arrogance à la baisse et que vous acceptez May dans votre label. Car croyez moi vous perdrez plus à la laisser s'en aller qu'à la garder. J'espère que votre réputation de connard n'est qu'une rumeur infondée. termine t-elle avec un large sourire.

Je regarde Andrea aussi gêné que moi. Nous avons beau connaître Andy par cœur, son imprévisibilité et sa franchise auront toujours l'effet d'une bombe.

Je pose ensuite fébrilement mes yeux sur Enoro qui paraît plus intrigué qu'énervé devant une Andy impassible.

— Je pense que vous êtes assez intelligente pour ne pas croire aux rumeurs et établir votre propre vérité. déclare-t-il en se levant avant de s'excuser et de disparaître parmi la foule.

Je soupire déçue que notre tête à tête ait été raccourci. Je regarde Andy d'un air désabusé.

— Oh t'en fais pas poulette, s'il n'a rien à se reprocher et que tu lui plais assez, il reviendra.

— Je croyais qu'on devait faire en sorte qu'il accepte la collaboration.

— Comme tu as essayé de le faire pendant ton entretien ? Cherche pas je sais très bien que tu ne t'es pas montrée docile malgré mes avertissements. Et puis tu n'as plus rien à craindre il a accepté de travailler avec toi non ?

— Oui mais rien n'est signé encore. souligné-je en finissant cul sec mon verre.

— Allez viens, on va s'oublier sur la piste de danse. me dit-elle en me tirant de mon tabouret.

Je n'ai pas le temps de dire quoi que ce soit que nous sommes déjà au milieu de l'affluence dansante. Nous nous déhanchons sur le tempo de la musique, dans une ambiance effrénée où sueur, alcool et parfums en tout genre se mêlent et s'entremêlent.

Perce alors une fragrance familière, la même que j'ai pu sentir plus tôt dans la soirée; la signature d'Enoro. Alors qu'il est dans mon dos, je sens mon corps se raidir et palpiter sous l'effet de son invitation à danser qu'il murmure à mon oreille. Je tourne ma tête en sa direction ce qui rapproche considérablement nos lèvres qui ne sont plus qu'à quelques centimètres l'une de l'autre. Le souffle court, le pouls à vive allure, je me fais violence pour faire un pas de côté et m'écarter de lui alors que mon corps me crie de m'emparer de sa bouche.

Maintenant face à lui, avec un grand sourire, je réponds favorablement à sa demande.

Portés par la musique pop latine, nos corps se déhanchent lascivement pour très vite ne faire plus qu'un. Chaque mouvement devient plus torride que le précédent. Le contact de sa peau chaude fait frémir la mienne, n'ayant qu'une envie, la goûter. Chaque partie de mon corps où ses mains se posent, devient brûlante de désir. Son toucher délicat mais ferme intensifie chacun de mes mouvements le suppliant de me couvrir encore et encore de ses caresses passionnées. L'atmosphère s'électrise à mesure que le besoin de sentir le contact de l'autre grandit. Face à face, le temps est suspendu, tout autour de nous s'évanouit pour ne laisser que le bruit de mes battements de cœurs s'harmonisant aux siens en toile de fond. 

Une main derrière sa nuque, l'autre sur son torse, je ne peux nier notre attirance mutuelle. Effleurant sa chemise à travers ma robe, mes tétons pointent d'excitation, mon intimité logée sur sa cuisse mouille de désir alors que mon autre cuisse presse son érection pulsante. Le souffle court, nous rapprochons lentement nos bouches jusqu'à ce qu'il effleure mes lèvres des siennes.

Soudain, sans rien comprendre, il éclate la bulle dans laquelle nous étions en partant d'un pas vif sans se retourner me laissant coi sur la piste au milieu de tous ces corps qui se déchaînent.

Frustrée et hébétée, je reprends doucement mes esprits et pars retrouver mes trois acolytes pour leur demander de partir. Les trouvant chacun très occupés soit dans les bras d'une fille aux mœurs légères pour Amadeo soit dans une position à en faire pâlir le Kâmasûtra pour Andy et Andrea, je décide de prendre un taxi pour rentrer. 

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