La pizza dégoulinante
Il se retourne et je le découvre torse nu ses muscles saillants et bien dessinés me faisant face. Je détourne le regard puis le pose sur son visage. Ses yeux sont petits, rouges et bouffis.
— Alors tu as pris ta décision. Tu pars réellement ?
— A moins que tu ne sois décidé à tout m'expliquer, je ne peux faire autrement.
Il baisse son regard sur le sol, la lutte au creux de ses poings verrouillés. Il est sur le point de céder et s'ouvrir puis sans le comprendre il se referme et me regarde tristement.
— Je suis désolé May. Je ne peux pas. J'ai donné ma parole et tu sais ce que ça signifie pour nous.
— Bien je comprends, on a tous nos priorités.
Il soupire, visiblement tourmenté.
— Tu sais très bien que c'est plus complexe que ça.
— Non justement Ezio je ne sais pas. Mais si ce secret est plus important à tes yeux que notre semblant de couple alors je m'en vais sans regret.
Je commence à partir mais il me retient, pensant qu'il va enfin s'ouvrir à moi je me retourne, mais au lieu de ça il me tend une enveloppe.
— Prends ça, ce sont les informations récoltées par le détective. S'il-te-plaît avant de prendre une quelconque décision, viens me voir et nous agirons ensemble. Je t'ai dit être à tes côtés et te soutenir dans ton dessein je le ferai.
Je regarde l'enveloppe et la prends sans rien dire. Ne pouvant pas le regarder une dernière fois, je me retourne les larmes aux yeux et disparais derrière les portes de l'ascenseur.
Il devient alors le témoin de ma perte de contrôle sur mes émotions. Je m'effondre quelques secondes ne comprenant pas comment notre histoire peut se terminer ainsi. Rappelée à la réalité par le "ding" de l'ascenseur annonçant mon arrivée au rez-de-chaussée, je me reprends vite avant l'ouverture imminente des portes.
Dans un bruit mécanique hostile, elles s'ouvrent sur un visage familier, Paola.
Putain il ne perd pas de temps.
Envahie de rage, j'essaie de me contrôler.
— May ! Quelle plaisante surprise de vous trouver ici ! Vous habitez dans l'immeuble ?
— Plus maintenant, je m'émancipe de mon cousin.
— Oh dommage nous aurions pu nous voir plus régulièrement. Je vais justement voir Ezio pour le convaincre d'emménager ensemble. N'est-ce pas excitant ?? demande-t- elle en sautillant et en applaudissant.
— Très ! Désolée je dois y aller je suis attendue. réponds-je froidement sans pouvoir contenir mon agacement.
— Oh pardon de vous avoir retenu, j'espère à bientôt May !
— Bonne journée !
Je pars sans même attendre sa réponse. En sortant je vois Salvatore et me précipite à sa voiture.
— Allons au centre ville s'il-te-plaît, c'est virée shopping ce matin.
— Bien mademoiselle May allons-y.
Tout le long du trajet se passe dans le silence alors que je reste les yeux rivés sur cette enveloppe pleine de promesses. Nous arrivons au centre ville et je cache l'enveloppe sous mon siège dans un compartiment prévu à cet effet.
Je passe le reste de la matinée à papillonner de magasin en magasin les bras chargés de sacs. Le shopping est la plus merveilleuse des thérapies. Comme beaucoup de femmes, il me permet de ne plus penser à rien, d'oublier mes problèmes et d'être simplement heureuse. De temps à autre je croise un fan qui me réclame photo et autographe que j'accepte volontiers. Une fois les achats terminés, je retourne à la voiture et demande à Salva de nous emmener à l'adresse d'Andy.
— C'est dorénavant là que j'habiterai.
Il me regarde de ses yeux ronds à travers le rétroviseur mais ne me demande pas plus de détails.
— Bien mademoiselle May, acquiesce t-il en démarrant, je tenais à vous présenter des excuses pour avoir parlé du baiser échangé avec l'inconnu à Ezio. Sans ça votre situation serait certainement différente.
Je le regarde en fronçant les sourcils, étonnée par ses excuses.
— Tu n'as pas à t'en excuser. Tu as fait ton travail et même sans ton intervention, les dés étaient déjà jetés. D'ailleurs ta loyauté allant vers Ezio, tu peux arrêter d'être mon chauffeur après cette course. Je me débrouillerai.
— Don Ezio tient à ce que je continue à être votre chauffeur. Alors sauf si vous me virez pour faute grave, permettez-moi de rester.
— Bien, je crois que je n'ai pas le choix de toute manière. Et j'imagine que je ne peux pas te demander de préserver mon intimité ?
— Si Don Ezio me demande, je serai obligé de lui rendre compte de vos faits et gestes.
— Evidemment. soupiré-je dépitée.
Nous nous garons et il m'accompagne jusqu'à chez Andy. Elle habite dans une ruelle pleine de charmes, étroite où tous les bâtiments sont de couleurs différentes, du jaune du rose, du vert avec de belles arches ornées d'Olivier et de plantes. Les balcons en fer forgé nous offrent un parfum des plus délicieux grâce aux fleurs qui s'y épanouissent. Le charme typique sicilien.
Arrivés devant chez elle nous frappons à la porte qui s'ouvre sur son visage angélique éclairé d'un sourire.
— May te voilà ! Entre vite ! Salva vous pouvez entrer également si vous le souhaitez.
Je me retourne et suis témoin de leur alchimie naissante. Malgré son professionnalisme, Salva se perd dans ses yeux émeraude. Il se ressaisit et acquiesce en hochant la tête. Je réprime un sourire et Andy se racle la gorge.
Je monte les escaliers et nous arrivons dans une grande pièce de vie baignée de lumière. Décoré avec goût dans le style sudiste avec pleins de plantes, des couleurs chaudes. Ses meubles sont tous différents, chinés aux quatre coins du monde, ils offrent à eux tous une harmonie et une personnalité à l'appartement.
— Je vous offre quelque chose à boire ?
— Avec plaisir ! réponds-je en posant mes trouvailles dans un coin.
Nous nous asseyons au bar de sa cuisine où Andy nous sert de la citronnade.
— Je meurs de faim t'as rien à grignoter ? questionné-je Andy
Elle me sourit et sort de son frigo des club sandwich.
— Oh t'es la meilleure !!
— Evidemment pour qui me prends-tu ? répond-elle orgueilleusement.
Nous discutons quelques minutes et j'écoute Andy draguer par ci par là Salva qui n'ose pas entrer dans son jeu par pudeur ou professionnalisme je ne sais pas trop. Malgré mes doutes sur lui, je ne peux que constater sa droiture, son respect et sa loyauté. Son travail pour la famille Madini doit être, au demeurant, une vraie fierté.
Mes yeux rivés sur lui, je continue mon analyse à l'affût du moindre indice qui le trahirait. Ce dernier ne se fait pas attendre. La sonnerie d'un téléphone retentit. Ce n'est qu'au bout de quelques secondes que Salvatore s'agite comme s'il venait de comprendre que c'était le sien qui sonnait. Mes yeux s'écarquillent quand je distingue la coque du portable qu'il sort rapidement de sa poche. Parti se retirer pour répondre, je n'ai pas le temps d'en parler à Andy qu'il revient déjà vers nous.
— Merci mesdemoiselles pour cette parenthèse, Andy merci pour ta citronnade elle est très bonne. Je dois partir du travail m'attend. Mademoiselle May si vous avez besoin n'hésitez pas à me joindre. déclare t-il en se dirigeant vers la sortie sans attendre de réponse.
Andy le raccompagne me laissant seule avec mes pensées fertiles qui fleurissent des hypothèses toutes plus folles les unes que les autres. Son soupir me sort aussitôt de mes pensées.
— Putain qu'il est canon ce mec, il me le faut !
Je ris d'un éclat encore teinté de réflexion.
— Oh toi je t'ai coupé en plein ébat intellectuel ! me charrie-t-elle.
— Son téléphone, il a la même coque que celui de Valentina. Je suis maintenant sûre à 90 pourcent que c'est le sien.
— C'est quoi comme genre de coque ?
— Jaune avec une part de pizza dégoulinante.
— Ils ont peut-être les mêmes goûts. Y'avait peut-être une promo, pour une coque de merde achetée l'autre est offerte ? se moque-t-elle.
— Tu m'épuises, tu ne peux pas maintenir ton sérieux deux secondes ?
— Oh la rabat-joie c'est bon je me branche au mode triste et ennuyeux de May. rétorque-t-elle en posant sa joue sur son poing.
— Et si il n'était pas loyal qu'envers Ezio ? Et si ce deuxième téléphone n'avait jamais été celui de Valentina ? Et s'il avait été à Salvatore depuis le début ? Et si ...
— May, arrête, tu te montes la tête toute seule.
— Mais tu ne trouves pas ça bizarre qu'il ait ce même téléphone avec cette même coque et qu'une fois qu'il décroche il dise avoir du boulot ?!
— Tout ça n'est peut-être qu'une énorme coïncidence...
— Et comment les frères Condore nous ont trouvé au bar ? Seul Salva savait où nous étions ce soir-là.
— Tu te trompes, c'est Ezio qui est venu te chercher, il savait donc aussi où tu étais.
— C'est Salvatore qui le lui a dit.
— Alors quoi ? Il travaille pour une sorte de Moriarty qui veut nuire à Ezio ou toi ? Vous mettre des bâtons dans les roues ?
— Qui te dit que ce n'est pas lui le Moriarty ?
— Honnêtement, tout est possible et rien ne l'est en même temps. Tout ça paraît si irréel.
— Bienvenue dans le monde de la mafia, ironisé-je. Que ce soit Valentina ou quelqu'un d'autre, il y a une taupe, ce qui veut dire qu'il y a une main qui lui donne à manger. L'ignorer est dangereux car on ne sait pas quelle avance ce Moriarty a sur nous.
— Ecoute, comme prévu je vais tenter de glaner des informations pour t'aider à y voir plus clair mais en attendant s'il-te-plaît épargne-moi la migraine. me sourit-elle.
Je lui souris en retour puis lui raconte la raison de mon soudain squattage.
— Aïe je savais que ça avait un rapport avec ça. Elle s'absente quelques minutes et revient avec un magazine dans les mains.
En couverture on voit Paola au bras d'Ezio tous deux souriant et en gros titre :
« Le plus convoité des célibataires Sicilien aurait il été dompté ? »
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