Dangereuse loyauté
Face à face, canon contre canon, nous nous égarons dans une bataille silencieuse de pouvoir. Ses yeux perdus dans les miens, il ne remarque pas Paola gigoter. Ce n'est que lorsqu'elle lui mord la main en lui arrachant un bout de peau et un cri de douleur au passage, qu'il détourne son attention et lâche sa prise.
Libérée, Paola en profite pour s'échapper et courir en direction de la table de nuit de Mario. Fabio tire alors un coup de feu et la touche à l'épaule ce qui la fait tomber. Je m'empresse de tirer sur lui mais dans la panique je le touche au torse à sa droite. Mon tir le déséquilibre mais il me tire à son tour dessus à la jambe avant de tomber. De douleur je crie à travers ma mâchoire serrée et par perte de tonus je m'effondre par terre.
Envahie par l'adrénaline, je garde l'esprit clair et roule sous le lit de Mario pour me donner un peu de temps de récupération et d'analyse. Sur le ventre, j'arrive à voir Paola encore inconsciente sur le sol et Fabio reprendre ses esprits. Je vois une paire de baskets arriver en panique et à la voix je comprends que c'est Enrico son frère. Il jure en voyant Fabio à terre et demande où je me trouve.
Comprenant qu'il va me balancer, je prends mon courage à deux mains et roule de l'autre côté du lit puis me relève et fuis par la fenêtre du balcon que Paola avait ouverte plus tôt.
J'entends Enrico me poursuivre et sans hésiter je suis mon instinct et enjambe la balustrade. Je lui fais alors face, le visage voilé de rage et de désespoir, il pointe son arme vers moi. Soudain, Salva apparaît derrière lui et étrangle Enrico ce qui le déséquilibre et tire dans le vide.
Je profite de cette occasion pour m'enfuir. Je me baisse et alors que je pends mon corps dans le vide retenu par la force de mes mains accrochées à la rambarde, j'entends un nouveau coup de feu retentir suivi d'un corps tomber puis un deuxième coup de feu. Les jambes dans le vide, je fais un mouvement de balancier avec mes pieds pour me donner de l'élan. Je relâche ma prise et atterris sur le balcon à l'étage inférieur. Ma blessure par balle ayant affaibli ma jambe, je me retrouve par terre et mets du temps à me redresser. Face à moi se trouvent de grandes fenêtres. D'un coup l'une d'elle s'ouvre sur un homme grand et menaçant. Je commence à dégainer mon arme quand j'entends un coup de feu. L'homme s'écroule alors devant moi inerte.
— May ? Tout va bien ?
Andrea accourt vers moi, je pâlis à la vue de son visage tuméfié.
— T'en fais pas pour moi, il m'en faut plus pour être mis K.O. me rassure-t-il.
Il m'aide à me relever puis je le suis à l'intérieur. Nous nous retrouvons dans un salon d'hiver, décoré avec goûts dans des tons chaleureux et garni de plantes bien entretenues, ce lieu dénotant du reste du manoir.
— Paola est blessée, je l'ai laissée à l'étage et j'ai touché Fabio mais ne l'ai pas tué. informé-je Andrea.
Il n'a pas le temps de répondre qu'Enrico entre avec fracas dans la pièce. Je comprends alors que Salva n'a pas survécu à leur altercation. Bouleversée, je sens mes larmes troubler ma vue et mon coeur manquer un battement. Ne pouvant pas me permettre de pleurer sa mort maintenant, je rassemble mes forces pour réprimer le chagrin qui naît en moi.
A la vue d'Enrico, Andrea me pousse si fort que je tombe derrière le divan. De son côté, il s'empresse de se couvrir derrière un fauteuil. Des balles fusent mais personne n'est à terre. De là où je suis, j'arrive à voir Andrea et me rends compte qu'il est à court de munitions.
— May, je sais que tu es là. Sors qu'on puisse en finir une bonne fois pour toute.
Sans parvenir à le voir, je devine qu'il sillonne la pièce pour me trouver. Je regarde autour de moi et repère la cheminée à côté du divan où je suis cachée. J'aperçois le tisonnier et rampe jusqu'à lui pour m'en emparer. En tendant la main, je remarque Enrico debout sur ma droite et dos à moi. Je m'empare rapidement du tisonnier et me relève. Le cliquetis du fer qui s'entrechoque le fait se retourner mais je ne lui laisse pas le temps de tirer que je lui transperce le ventre. De douleur, il lâche son arme qui tombe à terre et prend le tisonnier entre ses mains. Son visage est déformé par la souffrance et la surprise. Il me fixe avant de s'effondrer par terre. Le calme étant revenu, je décide de ne pas utiliser mon pistolet pour l'achever. Je retire d'un coup sec le tisonnier de son ventre ce qui lui arrache un cri de douleur et une giclée de sang. Je me tiens au-dessus de lui, le tisonnier entre les mains, mais son regard m'arrête. Il commence à me supplier du regard, il relève ses mains pour se protéger et d'une voix faible implore :
— May, s'il-te-plaît ne fais pas ça, je n'étais pas d'accord avec mon père et mes frères, je voulais te laisser vivre. Nous avions tué ta grand-mère ça devait s'arrêter là, sa vie pour la vie de nôtre frère et c'était tout. Ils m'ont obligé sinon ils me tuaient, je t'en prie tu dois me...
Je ne le laisse même pas finir sa phrase que je lui plante le tisonnier dans le crâne de toutes mes forces. Instantanément, ses mains retombent sur son corps sans vie. Je me redresse et vois Andrea surpris par ma violence.
— Quoi ? Il n'avait pas à raviver le souvenir de Nonna. Il aurait même mérité que je chauffe le tisonnier dans le feu avant de l'achever mais on n'a pas le temps.
Je m'accroupis à côté de lui et prends son arme puis la donne à Andrea. Il la prend et passe devant moi. Il arrache ensuite un bout de rideau et me le tend.
— Met ça autour de ta cuisse pour te faire un garrot, ça évitera que ça ne s'aggrave.
Je m'exécute puis je le rejoins d'un pas boiteux vers la porte. Il regarde si la voie est libre puis me fait signe de le suivre. Je retiens son bras et lui chuchote:
— Je dois retourner en haut et retrouver Paola, elle a besoin de notre aide.
Andrea soupire mais ne me retient pas, il me suit et me couvre. Nous montons les escaliers qui trahissent notre présence par leur cri grinçant. Une fois sur le palier, nous nous assurons que la voie est libre puis nous enjambons le corps de Léo. Je retrouve Paola qui s'est redressée et adossée à la table de nuit, l'arme de Mario dans les mains.
— Paola ! Tu es en vie ! m'écrié-je en accourant vers elle.
— Plus pour longtemps si on n'en finit pas vite et qu'on me soigne. souffle-t-elle en grimaçant de douleur.
Sa blessure est plus proche du cœur que ce que je pensais. Sa respiration est faible et saccadée et semble lui faire plus de mal que de bien. Andrea s'approche d'elle et la relève doucement. Elle crie de douleur et lutte pour rester consciente.
— Paola reste avec nous, on va te sortir de là.
Soutenue par Andrea, nous arrivons à sortir de la chambre et nous commençons à descendre les escaliers quand Agnès vient à notre rencontre. Elle se fige, un pied sur la première marche. J'empoigne mon arme dans ma poche. Les recommandations de Paola me revenant à l'esprit vis à vis d'Agnès, je me prépare à dégainer si besoin. Je baisse ma garde en la voyant émue aux larmes en nous voyant.
— Oh miss Paola et miss May vous êtes blessées ? Laissez-moi arranger ça... La mort vous siérait à merveille.
Elle termine sa phrase en dévoilant son arme cachée sous son tablier puis nous tire dessus.
La balle érafle les cotes d'Andrea ce qui le déstabilise. Il tombe avec Paola et m'entraîne dans sa chute. Nous dévalons les escaliers et nous nous retrouvons tous les trois sur le palier. Agnès ayant disparu.
Je me relève tant bien que mal, la douleur électrisant mon corps. Je me tourne vers Andrea qui est déjà debout comme s'il ne ressentait rien et découvre Paola affaiblie à ses pieds. J'essaie de la redresser avec l'aide d'Andrea mais elle gémit tellement de douleur que nous préférons la laisser allongée.
— Laissez-moi là et allez-y. Je suis juste un poids mort, je suis foutue de toute manière.
Nous nous regardons avec Andrea dépités.
— C'est hors de question. se résigne-t-il en la prenant dans ses bras malgré ses gémissements.
— Je vais vous couvrir le temps d'arriver jusqu'à la cuisine puis tu la mettras en sécurité dans le passage dérobé. annonçé-je.
Nous descendons du premier étage et arrivons dans l'entrée silencieuse du manoir.
Nous progressons doucement et lentement dans la pièce d'à côté. Il s'agit du salon. Lugubre et sombre, je me concentre pour distinguer ce que je vois devant moi et en oublie de regarder où je marche. Je trébuche sur quelque chose que j'ai du mal à analyser au premier abord. Je regarde plus attentivement et comprends que c'est un corps. Je m'écarte rapidement et frissonne à l'idée de lui être rentré dedans. Je me penche au-dessus de son visage de peur que ce soit Ezio puis soupire de soulagement quand je me rends compte que ce n'est pas lui. Son costume noir et son oreillette encore insérée dans l'oreille laissent peu de place au doute quant à sa fonction.
Sûrement un des gardes qui surveillaient les caméras.
Nous continuons d'avancer et débouchons sur un couloir. J'entends quelqu'un courir et en pointant mon arme, je me tourne vers l'origine du bruit puis tire sans réfléchir. Nous entendons un bruit lourd lorsque le corps tombe au sol. Je le regarde de mes yeux pupilles dilatées quand je comprends que j'ai tué un domestique.
— Oh merde, merde, merde, je ne voulais pas, je suis désolée. paniqué-je avec un trémolo dans la voix en le retournant face à nous.
— May on n'a pas le temps de s'épancher sur son corps, on doit avancer.
Je me reprends et me relève. Nous continuons notre avancée, cherchant désespérément la cuisine.
Nous la trouvons enfin quand j'entends un bruit sourd derrière moi. Je me retourne et vois Andrea et Paola, inconscients, à terre. Debout derrière eux, avec son arme à la main, se trouve Agnès qui me transperce de son regard assassin.
— Comme on se retrouve, mais cette fois je ne te louperai pas.
Sans attendre, elle pointe son arme sur moi et tire.
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