Chapitre 68 • Qui aime bien châtie bien

Réveillée par la sonnerie de mon téléphone, je tends le bras pour mettre un terme à cette musique irritante, quand je réalise que ce dernier est bloqué par celui de Simon. Allongé sur le côté, l'une de ses jambes est emmêlée entre les miennes et sa tête est posée sur ma poitrine, m'obligeant à saisir mon portable avec mon autre main qui est par chance restée libre.

Une fois que j'ai fait taire mon réveil, je passe mes doigts dans ses longs cheveux bruns afin de le réveiller tout en douceur. Après quelques secondes, il se met à cligner des yeux pour s'adapter à la lumière du jour. Lorsqu'il les lève vers moi et que son regard se pose sur mon visage endormi, un de ses sourires qui font battre mon cœur plus vite se glisse sur ses lèvres.

- Bonjour, toi. (Il se redresse pour atteindre ma bouche, avant de m'embrasser avec tendresse.) Quel bonheur de se réveiller à tes côtés.

- Je sais, fais-je d'un air taquin. On me dit souvent qu'il n'y a rien de mieux comme petits plaisirs de la vie.

- C'est plutôt à moi qu'on dit souvent ça, ouais.

Simon se met à rire en nichant son visage dans mon cou, tandis que ma bouche s'ouvre en grand. Ma phrase était marrante parce qu'elle était fausse, ce qui n'est pas le cas avec la sienne. Vu que l'ironie ne fonctionne pas du tout sur ce coup là, je me dépêche de virer ses sales pâtes de mon corps.

Sans surprise, ma tentative pour l'éloigner de moi se termine en un lamentable échec. Alors que je le pousse au niveau du torse, il saisit mes poignets pour les placer au dessus de ma tête et il vient s'allonger de tout son long sur moi.

- Tu es jalouse ? (Je réponds à son sourire fier en lui jetant un regard noir.) Je prends ça pour un oui.

- Tu ne peux pas savoir à quel point ça fait mal de me dire que des dizaines de filles ont posé leurs mains sur toi avant moi, étant donné que moi personne d'autre que toi ne m'a jamais touchée.

Ses traits deviennent graves, comme s'il se mettait enfin à ma place et ne supportait pas non plus le fait de m'imaginer avec une autre personne.

- Si je pouvais remonter le temps, je sortirais de ma vie toutes les filles sans importance qui ont partagé mes nuits. (Sa voix est rauque en cette heure matinale, me donnant des frissons.) Parce que si j'avais su que j'allais te rencontrer, je t'aurais attendu. Et je te suis reconnaissant de l'avoir fait de ton côté, même si c'était inconsciemment.

La tête sur l'oreiller, je plonge mes yeux dans les siens alors qu'il plane au-dessus de moi. Sa sincérité ne fait aucun doute, à l'instar du sentiment qui transparaît de son regard lorsqu'il se pose sur moi : l'amour. Simon est encore moins prêt que moi à m'en faire part à voix haute, mais j'ai la sensation qu'il est en train de se l'avouer à lui-même au fil du temps.

- Embrasse-moi, lui demandé-je d'un ton enjoué. Montre-moi à quel point tu m'es reconnaissant de t'avoir attendu.

Il ne me le fait pas répéter deux fois. Sans attendre, il plaque ses lèvres contre les miennes, et nous fermons au même instant les paupières. Il lâche mes poignets, et je pose mes paumes sur ses joues. Nous nous abandonnons à ce baiser, qui dans le fond vaut beaucoup plus que des mots. Je suis contrainte de passer mes chevilles derrière ses genoux quand ses hanches écrasent mon bassin. Je pousse un soupir d'excitation en sentant de nouveau mon petit ami durcir contre moi, que ce dernier aspire en enroulant sa langue autour de la mienne. C'est une danse lente, sensuelle, chaude et humide à laquelle nous nous adonnons désormais.

- Le baiser est la plus sure façon de se taire en disant tout, chuchote-t-il en se détachant de moi pour citer Guy de Maupassant.

Mes yeux fixent sa bouche, devenue rouge et gonflée à force de m'embrasser avec tant d'ardeur. Je ne lui réponds pas par la parole, au lieu de quoi je glisse l'une de mes mains entre nous. Il s'est montré si attentionné avec moi que, l'esprit floué par ce que je ressens pour cet adolescent en pleine reconstruction, je me sens prête à vivre une autre première fois avec lui.

- Éla... commence-t-il, la voix peu assurée à cause de la direction que prennent mes doigts. Tu n'as pas à te forcer à faire quoi que ce soit tout de suite si tu n'en as pas envie pour le moment.

- Justement, fais-je en suivant la ligne de poil qui part du bas de ses abdominaux avec le bout de mon index. J'ai envie de te rendre la pareille, maintenant.

La respiration de Simon devient saccadée tandis qu'il m'observe passer la main sous l'élastique de son jogging. Je m'apprête à faire de même avec son caleçon, déterminée à lui faire plaisir tel qu'il le mérite, lorsque le bruit familier du métal qui s'entrechoque me parvient aux oreilles.

Je ne réalise que mon père est en train de tourner ses clés dans la serrure qu'au moment où sa voix résonne depuis l'entrée.

- Éla ? m'appelle-t-il d'une voix fatiguée. Simon ? Je viens de rentrer du boulot.

Mon regard croise celui du garçon encore allongé sur moi qui, au bout des quelques secondes lui étant nécessaires pour comprendre ce que cette arrivée soudaine signifie, pousse un profond soupir avant de se laisser retomber à côté de moi sur le dos.

- On vient juste de se réveiller ! crié-je, retenant avec difficulté un fou rire. On va pas tarder à venir prendre le petit déjeuner !

Je penche la tête sur le côté pour observer le profil de mon copain. Alors qu'il fronce les sourcils en fixant le plafond, frustré et terriblement déçu, je me mords les lèvres pour m'empêcher une nouvelle fois de rigoler.

- Tu me tues... souffle-t-il, l'air désespéré, avant de se tourner vers moi. Et arrête de te marrer parce que ce n'est pas drôle. Tu auras ma mort sur la conscience.

Un rictus persistant au coin des lèvres, je me lève pour aller rejoindre mon père dans la cuisine. Avant d'ouvrir la porte, je me tourne vers Simon qui lui n'a pas bougé du matelas.

- Viens. On risque d'être en retard si on continue de traîner au lit.

- Laisse-moi le temps de... redescendre, dit-il en montrant la bosse à son entrejambe. Ne t'en fais pas, j'arrive.

Les joues teintées de rouge, je sors de ma chambre à l'instant où mon père s'apprête à entrer dans la sienne. La main sur la poignée, il attend que je vienne le saluer d'une mine épuisée.

- Bonjour, ma chérie. (Je lui fais un bisou sur la joue, et il embrasse mon front.) Tu m'excuseras auprès de Simon mais je ne tiens plus debout, je file me coucher tout de suite.

Il s'engouffre dans la pièce sans me laisser le temps de répondre, tombant de sommeil après une nuit passée sur les routes.

Je commence à préparer le petit déjeuner dans la cuisine, à savoir deux bols de céréales puisque je n'ai que ça à proposer ce matin. Simon me rejoint une minute plus tard, encore légèrement serré dans son caleçon, ayant de toute évidence entendu les paroles de mon père dans le couloir.

- Deux fois en moins de 24h que je me retrouve avec une trique de malade à devoir attendre qu'elle passe sans pouvoir me soulager, se plaint-il en se laissant tomber sur une chaise. C'est une véritable torture de venir dormir chez toi, il n'y a pas d'autre mot.

Je rougis de nouveau en sortant les bols remplis de lait du micro-ondes. Quand je pose le sien devant mon petit ami, il fronce les sourcils de manière exagérée.

- En plus, tu fais partie de ces personnes chelous qui mettent le lait avant les céréales. (Je roule des yeux en m'asseyant en face de lui.) Pourquoi ai-je accepté de sortir avec toi ?

Je ne relève pas le fait qu'il me qualifie pour la énième fois de « chelou », ni qu'il utilise le mot « accepté » comme si je l'avais supplié de se mettre en couple avec moi des jours durant.

- Parce que tes sentiments avaient atteint un pallier trop élevé pour qu'entretenir un autre type de relation que celui-là avec moi ne te convienne sur la durée.

- Des quoi ? m'interroge-t-il en remplissant son bol de céréales à ras bord. Sentiments, t'as dit ? Je ne sais pas ce que c'est. J'en ai jamais entendu parler.

Il secoue la tête, prenant un air faussement confus. Je me marre, puis je lui prends le paquet des mains pour ne pas qu'il le vide sans m'en laisser.

- Ces derniers jours, j'ai eu l'impression que tu en avais, pourtant.

Je lui adresse un sourire malicieux, suite à quoi il hausse les sourcils en avalant une première cuillerée.

- Ah ouais ? demande-t-il, faisant semblant de ne pas être convaincu. Comme quoi, l'intuition féminine n'est pas toujours vraie.

Je lui mets un coup de pied sous la table, et nous finissons par rigoler tous les deux en continuant à se lancer des vannes.

Au bout d'un moment, Simon remarque que le bol face à lui est personnalisé avec des dessins d'enfant. Je lui dis que, comme je l'ai écrit dessus quand j'étais petite, ce dernier était un cadeau pour la fête des pères. La conversation prend alors une tournure moins amusante tandis qu'il me raconte que, de son côté, soit il offrait les créations qu'on lui faisait faire à l'école à son oncle, soit il les jetait dans une poubelle de rue en rentrant chez lui. Il me demande si ce n'était pas aussi un casse-tête pour moi lorsque la fête des mères arrivait, et je lui explique qu'avec mon père nous allions déposer chacun de mes présents sur la tombe de la mienne. Je lui avoue que j'ai gardé cette habitude en grandissant, même si désormais c'est une unique rose rouge que je lui apporte en cette occasion.

***

Une demi-heure plus tard, nous sommes tous les deux assis dans le pickup de Simon, garé sur le parking du lycée. À cause du retard que nous avons pris en restant au lit et en nous chamaillant dans la cuisine, nous avons été obligés de nous préparer en vitesse et de griller quelques feux rouges sur la route. Résultat, nous sommes déjà arrivés alors que la sonnerie ne se fera entendre que dans quelques minutes. Ouf.

- Tu es prête ?

Simon se tourne vers moi après avoir retirer les clés du contact, tandis que je prends une grande inspiration avant de lui répondre d'un ton plutôt confiant.

- Si tu ne lâches pas ma main jusqu'à ce que j'arrive devant ma salle de classe, oui.

Suite au calvaire qu'a été mon arrivée au lycée hier matin, en raison des chuchotements incessants des élèves sur mon passage, à propos de mon altercation avec Pénélope, de ma relation avec Simon ou de ma soi-disant hypocrisie envers Izzie, j'appréhende ma venue en cours d'aujourd'hui. J'ai décidé d'appliquer soigneusement les conseils que m'a prodigués Charlie, c'est-à-dire garder la tête haute en toute circonstance parce que faire le contraire reviendrait à admettre que j'ai quelque chose à me reprocher.

- C'est promis. (Il met une paume sur ma cuisse, puis il y exerce une légère pression.) Toi et moi contre le reste du monde, tu te souviens ? On en a rien à foutre de l'avis des autres, la seule chose qui compte c'est nous.

Je hoche la tête, avant de poser ma main sur sa joue pour lui donner un chaste baiser sur les lèvres.

- Merci, fais-je en souriant. De m'accompagner. Grâce à ça, j'espère que tout le monde va réaliser que c'est à ton bras qu'est ma place.

Déterminée à affronter les conséquences de ma récente popularité, je me tourne pour ouvrir la portière. Simon fait le tour de la voiture pour me rejoindre, et c'est avec un sourire franc qu'il glisse ses doigts entre les miens.

- Ça y est, déclare-t-il d'un ton encourageant. L'heure de ton entrée officielle dans le monde des populaires a sonné.

*****

Comme d'habitude, j'espère que le chapitre vous a plu. N'hésitez pas à me donner votre avis !

Qu'aimeriez-vous qu'il se passe à l'avenir ? Peut-être que vous voulez du drama étant donné que tout va à peu près bien depuis pas mal de temps 😅

Charleen,
XO
💋

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