Chapitre 53 • Karma

Contrairement à tous les autres lundis matins, je passe la grille du lycée avec un certain enthousiasme. Après tout ce qu'il s'est passé au cours du week-end, je ne peux qu'être de bonne humeur. Notamment car avec Simon nous allons cette semaine chacun de notre côté honorer nos parts du contrat, à savoir arrêter de fréquenter Pénélope pour lui et préciser à Elliot que nous ne pourrons qu'être de simples amis pour moi. Je ne sais pas ce qu'il en est pour lui, mais moi j'ai décidé de le faire aujourd'hui. Je suis bien trop impatiente de former un couple avec lui pour attendre ne serait-ce qu'un jour de plus.

Avant de me rendre en cours de mathématiques, je passe par mon casier pour récupérer un compas, une équerre et tout le matériel qui pourrait m'être utile pour faire de la géométrie. Alors que je m'apprête à l'ouvrir, il me semble reconnaître la voix de Pénélope non loin de moi.

- Tu ne veux pas changer de disque, pour l'amour de Dieu ? demande-t-elle d'un air exaspéré. Ça fait deux jours que tu n'arrêtes pas de radoter à ce sujet.

De si bon matin, j'aurais pu me passer de sa voix de crécelle. Par chance, elle ne s'adresse pas à moi et je comprends que c'est à Andréa sans avoir besoin de me retourner pour voir leurs visages peinturlurés, c'est déjà ça.

- Je sais, pardonne-moi. C'est juste que je m'attendais à avoir de ses nouvelles dans les heures qui ont suivi, au moins recevoir un message de sa part par exemple.

Je ne mets pas longtemps à capter qu'elles ont un débat au sujet de Jay. Comme je m'en doutais, Andréa ne pensait pas n'être qu'un coup d'un soir à ses yeux, et elle attend qu'il lui prouve qu'elle avait raison.

- À quoi est-ce que tu t'attendais ? C'est de Jay qu'on parle, le plus grand coureur de jupons de La Sidoine. Tu n'étais qu'un numéro de plus à cocher sur sa liste.

La virulence des propos de Pénélope me fait mal au cœur pour Andréa. Bien sûr qu'elle dit la vérité, mais elle pourrait le faire avec plus de tact. Elles sont censées être amies, non ?

- Je... bafouille-t-elle. Je me suis dit que peut-être il... J'imagine que tu as raison, j'ai été conne de croire le contraire.

En entendant sa voix enrouée, je ne peux m'empêcher de jeter un coup d'oeil par dessus mon épaule. Adossée à un casier de la rangée opposée à la mienne, mon ancienne meilleure amie se passe une main sur le visage pour l'aider à contenir ses émotions.

- Et puis même, de toute façon je ne vois pas où est le problème. (Son interlocutrice hausse les épaules après avoir récupéré un de ses manuels.) Tu t'es envoyée en l'air avec l'un des meilleurs coups de ce lycée. C'est ce que tu voulais, non ?

- Ouais, ment-elle avec aplomb. C'est clair que vu comme ça, il n'y a pas de quoi s'en plaindre.

Andréa émet un léger ricanement, dans lequel une pointe d'amertume est perceptible. Elle tente du mieux qu'elle peut de garder la tête haute devant Pénélope, mais je la connais assez pour savoir que ce n'est qu'un sourire de façade.

- Au fait, je ne serai pas là pour manger avec toi et les filles à la cantine. (Mon ennemie jurée claque la porte de son casier.) Simon veut qu'on déjeune tous les deux. Apparemment, il aurait des trucs à me dire. Je suppose qu'il compte s'excuser pour vendredi soir.

Pénélope énonce ces propos avec une telle certitude que j'en viendrais presque à douter. Malheureusement pour elle, Simon semble avoir aussi hâte que moi d'officialiser notre relation puisqu'il a l'intention de remplir sa part du marché dès ce midi.

- D'accord, pas de souci. C'est génial pour toi.

Sans même prendre le temps de saluer Andréa, elle part en direction de son premier cours de la journée en faisant du bruit avec ses hauts talons sur le carrelage des allées. Tandis que la brune reste immobile après son départ, je me dépêche de prendre les affaires dont j'ai besoin dans mon casier afin de filer en toute discrétion. Je réajuste mon sac sur mon épaule et je commence à m'éloigner quand quelque chose dont je ne me serais jamais douté se produit.

- Éla ? m'interpelle la voix de celle qui était ma meilleure amie. Est-ce que je pourrais te parler juste une minute ?

Elle a certainement dû prendre le fait que je m'arrête pour une invitation à me rejoindre étant donné qu'elle traverse le couloir. Sauf que si je suis restée plantée là, c'est à cause de l'effet de surprise. Est-ce qu'elle m'a remarquée en train de les écouter ?

- Ça fait très bizarre, constate-t-elle dès qu'elle se retrouve en face de moi. J'ai l'impression que ça fait une éternité qu'on a pas discuté toi et moi.

Elle me parle d'une voix douce, alors que je m'attendais à ce qu'elle me crie dessus pour avoir espionné leur conversation. Mais qu'est-ce qu'elle peut bien me vouloir d'autre, bon sang ?

- Si on omet les fois où tu m'as traité comme une moins que rien, c'est vrai que ça fait longtemps que tu ne m'as pas adressé la parole.

Méfiante, je réponds avec le mode de défense que j'emploie le plus souvent, à savoir le sarcasme. Elle accuse le coup en dansant d'un pied sur l'autre, visiblement tout aussi mal à l'aise que moi.

- Je la méritais, celle-là, avoue-t-elle. Écoute, je suis consciente de ne pas avoir été sympa avec toi ces derniers temps et j'ai honte de te demander ça après tout ce que je t'ai fait mais je... Je voulais savoir si Jay t'avait parlé de moi ?

Évidemment, soupiré-je pour moi-même. J'aurais dû me douter que si elle venait me parler, c'était uniquement pour servir ses intérêts. Je me sens terriblement bête d'avoir cru pendant un centième de seconde qu'elle souhaitait se racheter une conduite auprès de moi sans arrière pensée.

- Pas sympa ? C'est comme ça que tu qualifies le comportement que tu as eu envers moi ? (Je rejettes la tête en arrière, médusée.) Tu t'es montrée odieuse, tu veux dire. Et encore, ce terme est un euphémisme.

Andréa baisse les yeux sur ses chaussures, accablée par le poids de la culpabilité. Même si ce qu'elle est en train de vivre par rapport à Jay me fait beaucoup de peine, je ne peux pas passer l'éponge sur tout ce qu'elle m'a balancé et la prendre dans mes bras pour la rassurer, si c'est à ça qu'elle s'attendait.

- Comment oses-tu venir me demander une chose pareille ? Tu viens de dire que tu en avais honte mais si c'était vraiment le cas, tu te serais abstenue. (Vu que je suis blessée, mon ton est froid.) Mais bon, rien que pour saluer le culot que tu as, je vais quand même te répondre. Pénélope a vu juste, pour Jay tu n'étais qu'un passe temps lors d'une soirée trop arrosée.

Je vois dans son regard que mes paroles lui font du mal, mais elle m'en a tellement fait par le passé que je ne les regrette pas. D'autant plus que je me contente de lui dire la vérité.

- C'est juste que je ne sais plus quoi faire, ajoute-t-elle, les yeux embués de larmes. Je n'arrêtes pas de lui envoyer des textos, mais il m'ignore. Je ne peux pas croire qu'il se soit servi de moi.

- Ce n'est pas que tu ne peux pas, mais que tu ne veux pas, la corrigé-je. Pourtant, il va falloir te faire une raison. Jay a toujours été comme ça. Dis-toi que tu n'es pas la première à être tombée dans son piège.

Quelques larmes commencent à rouler sur ses joues, ce qui attire les regards de certains élèves déambulant au milieu des allées de casiers. Andréa les essuie d'un vif revers de la main, n'ayant de toute évidence aucune envie d'attirer l'attention sur elle, pour une fois.

- À force d'essayer de tout avoir, je me retrouve avec rien. Et toi qui ne voulais rien, tu finis avec tout. (Elle rit en battant des paupières afin de refouler ses pleurs.) C'est ironique, non ?

Je reste sans voix quelques instants face à la vérité retentissante que contiennent ses mots. Andréa s'est éloignée de moi et de Charlie dans le but d'atteindre la popularité, d'obtenir une certaine réputation faisant d'elle un personnage incontournable de l'école. Elle nous a tourné le dos pour rejoindre Pénélope dans ses rangs, mais tout ce qu'elle a récolté en le faisant c'est des amitiés superficielles, un bourreau qui la méprise et une partie de jambes en l'air avec un garçon qui n'arrive même pas à retenir son prénom. Quant à moi, je suis devenue un membre à part entière de la bande des populaires de notre lycée, de qui je partage la table au centre des ragots tous les midis. J'ai gardé à mes côtés l'amie la plus loyale que je n'ai jamais eu et je m'apprête à sortir avec le mec dont toutes les élèves de La Sidoine sont folles. Je ne suis pas sûre qu'ironique soit le bon mot, en tout cas il est certain que rien ne s'est pas passé comme elle l'avait prévu, sinon aucune de nous deux ne tiendrait les rôles que nous avons à présent. Le karma a une fois de plus rendu à une personne le mal qu'elle a fait, ici en lui prouvant qu'elle s'est trompée de camp dès le départ.

- Je suis sincèrement désolée pour toi, Andréa. (La sonnerie retentit, m'annonçant qu'il est temps de rejoindre ma salle de classe.) Mais ça marche ainsi avec les regrets, Quand on en a, c'est qu'il est déjà trop tard.

*****

Voilà pour cette partie qui retranscrit un des messages que je souhaite faire passer à travers mon histoire !

Pensez-vous qu'Andréa va rester aux côtés de Pénélope ou que ça y est elle se rend compte qu'il faut qu'elle se reprenne en main ? En gros, est-ce une cause perdue selon vous, ou peut-elle se racheter ?

Vous n'êtes tellement pas prêtes pour les chapitres qui arrivent. Oh mon Dieu, je suis tellement impatiente de les poster ! Avez-vous des pronostics sur les événements qui vont avoir lieu ?

J'ai une question à vous poser qui me trotte dans la tête depuis le début de l'histoire. Est-ce que vous préférez qu'elle contienne du lemon (des scènes osées pour celles qui ne connaissent pas le terme) ou pas ? Je suis en pleine hésitation donc votre avis sera déterminant.

Charleen,
XO
💋

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