Première partie - ➎
Une bande de loups excités se mit à me tourner au tour frénétiquement, provoquant une légère frayeur chez moi. Ils n'étaient pas agressifs, mais s'agitaient beaucoup trop pour que je puisse être sereine.
Un museau prit place contre mon fessier.
Ce geste me fit bien entendu sursauter et me détourner de l'individu qui l'avait commis. Un loup gris très clair avec de grands yeux noirs, sa langue pendouillait hors de sa bouge alors que ses oreilles étaient bien droites sur sa tête, il semblait particulièrement excité, laissant échapper des petits bruits. Je n'eue pas le temps de m'attarder plus sur son cas que une nouvelle truffe se montra indiscrète. Un nouvel fois un petit cri de surprise m'échappa, je m'esquivai en posant mes deux mains sur ma croupe, cette fois-ci, le fautif était un loup noir, mais avec le ventre blanc, étrange robe qu'il avait là. De nouveaux nez se posèrent contre mes mains, ce qui me poussa à aller me plaquer contre la parois rocheuse, histoire de les empêcher d'avoir accès à cette partie de mon corps.
Ils m'encerclèrent tous, m'observant de manière curieuse, reniflant l'air en tendant le cou dans ma direction. Je pus ainsi les observer bien plus facilement, il y avait déjà les deux de tout à l'heure, puis un loup à la robe brune presque dorée avec des grands yeux bleus intenses, plus foncés que ceux de l'alpha. Un autre quasiment de la même couleur, mais un ton plus clair avec des yeux semblables à ceux que possédait l'alpha noir. Il ne parut point ravi de me voir par contre, il était curieux, mais son attitude général dégageait de l'agressivité envers ma personne. Du coin de l'oeil, je vis un dernier loup émerger du fond de la grotte. J'eue soudainement des frissons et détournai vivement le visage dans sa direction.
Le loup gris de l'autre fois.
Un mouvement de recul incontrôlable me prit. Bien que trop soudain car j'en perdis mon équilibre et tombais sur les fesses. Mon geste avait fait sursauté les autres membres de la petite meute, mais mon regard était entièrement diriger vers l'animal qui m'avait agressé sans raison lors de notre première rencontre. Il ne tarda d'ailleurs pas à montrer des signes d'agacement et d'agressivité face à ma présence en ce lieu. Si j'avais su qu'il était là, je ne serai pas venue. Il ne bougea pourtant pas de sa position, ne faisant que m'observer sévèrement de ses yeux dorés.
Les autres oublièrent rapidement se comportement, visiblement habitués à la mauvaise humeur de cet animal. Le loup bicolore vint me renifler le visage avant de le léchouiller, me tirant un grognement qui le fit reculer avec la tête un peu basse. Bien que ce comportement, venant de moi, me laissa une fois de plus sceptique.
Pourquoi grogner me paraissait quelque chose de si naturel ?
Ça ne l'était pas il y a à peine quelques heures.
Je ne fus pas préparée à la suite, le loup gris – avec des reflet plus claire maintenant que je faisais attention – bondit soudainement pour grogner de manière menaçante sur celui que je venais de recadrer. Il n'avait pas hésité à marcher sur moi, me surplombant de son imposant corps, prêt à sauter au cou du malheureux qui avait osé me faire une léchouille sur la joue. Je n'étais nullement d'accord avec cela, il n'avait pas à intervenir de cette façon et encore moins à s'en prendre au bicolore. Je le repoussai durement à l'aide de mes deux mains, grognant de manière caverneuse, ce qui ramena directement son attention sur moi. Retroussant férocement les babines, il me bondit dessus, ses deux pattes avant appuyées contre mes épaules, me forçant à m'allonger sur le dos.
Un nouveau son bestial m'échappa, je lui lançai un regard furieux, dents dehors, comme lui. Bien que l'effet ne devait pas être le même. Pourtant je n'avais pas l'impression qu'il ne prenait pas cela au sérieux. Il suffisait de regarder dans ses yeux pour voir que ça ne lui plaisait pas du tout. Il ouvrit un peu plus grand la gueule, visiblement prêt à me mordre à nouveau. Cela me fit légèrement paniquer, même si je ne me démontais pas pour autant. Heureusement, le loup noir intervint en le repoussant brutalement. Les poils hérissés, il grognait de manière si menaçante que l'autre n'eut pas le choix que de se soumettre, même si il avait toujours les babines retroussées. Je me remis en position assise, mon sang pulsait rapidement, tout comme mon muscle cardiaque.
Je me sentais bizarre quelque chose grattait en moi. La femelle alpha vint frotter son museau contre ma joue, tentative pour me rassurer certainement. J'y fus sensible, sans pour autant bouger, je n'avais pas si peur que ça. Juste une légère crainte. La situation fut assez rapidement désamorcée. La louve s'éloigna de moi alors que son mâle se retournait dans notre direction, ne voulant certainement pas recevoir une correction aussi. Je posais mes yeux sur l'imposant mâle et ses yeux bleus trop expressifs.
— Pourquoi vous m'avez amenée ici ? demandai-je soudainement, perdue.
Je ne comprenais effectivement pas ce que je faisais ici. Pourquoi m'avoir entraînée ici ? Me présenter leur meute ? J'étais humaine.
Non !
Un long frisson parcourut ma colonne vertébrale pour exploser subitement dans ma nuque. Mon instinct avait protesté à cet instant. Je ne comprenais pas. Pourquoi nier l'évidence ? Et si s'était moi qui niait l'évidence ? cogitai-je, une main venant se poser sur le coin de ma tête. Depuis que j'avais rencontré ces loups, tout était devenu étrange. Et puis ce qu'il s'était passé avec Méphisto un peu plus tôt n'avait rien de normal non plus. J'avais toujours été du genre à répliquer en criant quand quelque chose ne me plaisait pas et parfois avec la violence, mais jamais en grognant comme l'aurait fait une louve en colère. C'était pourtant ce qu'il s'était passé.
Je ne comprenais plus rien.
Il fallait que l'on m'explique.
Je savais pourtant que ces loups ne pourraient me donner les informations dont j'avais besoin. À moins qu'ils ne se mettent soudainement à parler le langage des hommes pour mes beaux yeux. Je ne me sentais pas bien, je commençais à sentir une migraine me marteler le crâne. Mais qu'est-ce que je foutais bon sang ?! Je n'arrivais plus à réfléchir correctement. Je me remis sur mes pieds, non sans tituber, mes yeux passant d'un loup à l'autre.
— C'est n'importe quoi, murmurai-je pour moi-même.
Je tournais finalement les talons pour m'éloigner et rentrer chez moi, ça ne servait à rien que je reste ici. Une résistance au niveau de mon chaperon me fit pourtant jeter un regard par dessus moi. La louve blanche me retenait, ne voulant pas me laisser partir. Serrant les dents, je lui arrachait le pan de tissu qu'elle tenait dans sa gueule. La faisant couiner tristement.
— Je suis désolée, je n'ai rien à faire ici.
Non rien du tout.
Alors pourquoi avais-je la désagréable impression de me leurrer complètement ? Serrant les dents, je traversai la clairière à grandes enjambées. Je voulais rentrer chez moi, maintenant. Je fis donc le chemin inverse que nous avions fait pour arriver dans cet endroit, non sans m'égarer deux ou trois fois. À mi-parcourt, de longs hurlements raisonnèrent dans le silence des bois. Mon estomac se contracta à l'entente de ces appelles, mon corps voulait faire demi-tour, mais j'ignorais ses plaintes et supplications pour que j'y retourne. Obstruant mes oreilles à l'aide de mes mains, je fis en sorte de ne pas les écouter. Il ne fallait pas les écouter. Je devais juste quitter cette forêt au plus vite.
Avant de réaliser, je m'étais mise à courir pour m'éloigner le plus rapidement possible. Ce fut le souffle court et les poumons en feu que j'arrivais à l'entrée du village. Je rêvais de retrouver ma maison, pourtant ce ne fut pas le chemin de mon chez moi que j'empruntai, mais celui de la maison de ma tante. Frappant vivement à sa porte, j'attendis qu'elle vienne m'ouvrir. Même si la douleur qui me démolissait la tête ne voulait pas cesser. À peine la porte fut-elle ouverte que je me glissai entre la mère de mon cousin et le mur, voulant me planquer à l'intérieur.
— Mais enfin, qu'est-ce qu'il t'arrive Luci ?
— Je ne sais pas...
Face à mon comportement, une mine inquiète apparue sur le visage de ma tante. Elle referma la porte et s'approcha de moi pour déposer une de ses mains sur mon front. Sa peau était fraiche, ça me faisait un bien fou, je ne pus contenir un soupir d'aise.
— Tu as de la fièvre, constata-t-elle calmement, tu devrais ren...
— Y s'est encore passé quelque chose avec les loups et aussi avec Méphisto.
Je la vis subtilement froncer les sourcils alors qu'elle retirait sa main de ma peau moite.
— J'ai grogné sur Méphisto, expliquai-je, honteuse, au lieux de crier, je lui ai grogné dessus. Mais il l'a fait aussi juste avant. Après ça, les loups que j'avais rencontré précédemment sont quasiment venus me chercher pour aller me présenter à leur meute. Et j'ai suivi en toute confiance. À l'heure où je te parle, je sais plus où j'en suis, parce que je sais plus ce que je dois faire. Alors, Céleste, soit honnête avec moi, s'il te plait. Je te le demande : est-ce que toute ses histoires de métamorphoses sont réelles ?
— Penses-tu que ça le soit ?
Ça ne répondait pas à ma question. Ce qui m'arracha un grognement de frustration accompagner d'un claquement de dents. Et ça recommençait. Je recommençais. Je ne pouvais pas continuer d'adopter ce comportement comme si de rien n'était, ça n'avait rien de normal. J'étais fatiguée, j'avais besoin de dormir. Me décidant à abandonner, je contournai ma tante pour quitter sa maison, mais elle me conseilla quelque chose de surprenant alors que j'allais passer la porte.
— Luci, interroge l'animal qui est en toi.
Je restai à la fixer. Encore plus perdue qu'avant. Baissant lentement la tête, je quittai finalement la demeure de la mère de mon cousin, désemparée et fiévreuse.
***
L'orage grondait dehors, lors que la pluie s'abattait avec fracas. Même si dans ma chambre, la chose qui faisait le plus de bruit, c'était ma respiration saccadée. J'étais totalement en sueur et dans un état de demi-sommeil qui m'empêchait de réellement savoir si j'étais dans la réalité ou dans un rêve. Depuis que j'étais rentrée et m'étais mise au lit c'était ainsi, c'était une sensation extrêmement désagréable. Je me redressai soudainement alors qu'un énorme coup de tonnerre éclata dans le ciel.
Sortir.
Il fallait que je sorte.
Sautant de ma couche, je m'emparai de mon chaperon que je passais aisément avant de non pas sortir par la porte, mais sauter par la fenêtre de ma chambre pour atterrir parfaitement sur mes pieds un peu plus bas. L'eau qui coulait sur ma peau, planquant le tissus de ma robe de chambre contre cette dernière, ne me perturbait pas plus que cela. Je m'élançai alors pour rejoindre la porte du village, personne ne surveillait et même si c'était le cas, je n'en avais rien à faire.
Je voulais juste courir.
Etre libre.
Tout me semblait si clair malgré l'obscurité qui était parfois déchirée par un éclair. Traçant à travers les bois comme si je les connaissais par coeur, un sentiment de plénitude m'envahi, la fièvre me quittant à chaque pas que je faisais. Je ne savais pas pourquoi c'était aussi libérateur, mais je ne regrettais rien du tout. Et je savais très bien où ma course nocturne me menait. Il n'y avait pas d'autre option possible. Esquivant souplement les obstacles sur mon chemin, je fus rapidement à l'entrée de la clairière où je m'étais retrouvée un peu plus tôt dans la journée. Mon coeur pulsait à toute vitesse alors que des frissons d'impatience apparurent sur ma peau trempée. Levant les mains vers mon visage, je les positionnais de chaque côté de ma bouche pour qu'elles servent à amplifier ce que j'allais faire.
Prenant une grande inspiration, je relâchais ensuite tout cet air en un long hurlement qui ressemblait véritablement à celui d'un loup. Il raisonna longuement entre deux coups de tonnerre.
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