~52~
(Misha)
Tout le long du chemin, je me culpabilise. Je connais suffisamment Josef pour savoir que son exigence à me faire venir seul n’est pas un caprice. Mais je suis très mal à l’aise dans le rôle du menteur.
Le signe de Joachim lorsque j’arrive à l’accueil m’envoie vers le bureau. Mon estomac se serre. Ce lieu sert la plupart du temps pour des rendez -vous où il est préférable de ne pas être dérangé. De toute évidence, quoiqu'il se soit passé, les nouvelles ne sont pas top.
Je n’ai même pas l’occasion de pénétrer dans le bureau, Josef m’attend au milieu du couloir.
— J’ai été aussi vite que possible, dis-je comme si je m’excusais. Rolf ne bossait pas, il tient compagnie à Ivan.
— Je ne te reproche rien. J’ai besoin de te parler avant que tu n’entres. Deux personnes attendent derrière cette porte.
— Tu avais dit… Nous avions convenu qu'il serait question d'une seule prise de renseignements.
Je bafouille, je tremble, je ne veux pas qu’Ivan disparaisse à nouveau.
— Misha. Calme toi. Il n’y a aucune embrouille, aucune prise de risque.
— Mais qu’en sais-tu enfin ? Si tu te trompes, c’est lui qui en subira les conséquences ! Pas toi, Josef ! Tu m’as obligé à lui mentir pour venir.
— Je comprends ce que tu peux ressentir mais je t’assure qu'il n’y a aucun danger. Suis-moi.
Je lui emboîte le pas en silence jusqu'au bout du couloir où il ouvre la porte du bureau. Deux hommes sont debout, près du bureau.
— Misha, voici Piotr, dit Josef en me désignant le plus balèze des deux.
— Celui des carnets d’Irina ?
— Exactement, réplique l’homme. Si vous voulez vérifier en me questionnant, ne vous génez surtout pas.
L’autre homme s'approche et me tend sa main.
— Je suis Aslan. Je me prêterais, moi aussi, au jeu des questions si vous le désirez.
Je ne réagis pas. Je connais chaque mot des carnets d’Irina. Il est évident que j’ai la possibilité, en les questionnant de découvrir s'ils mentent. Mais je suis quasi certain que c’est la vérité.
— Votre silence me rassure. Mon nom ne vous est donc sans doute pas inconnu. Dans un des carnets d’Irina peut-être ? Je vais être honnête, j’espère du fond du cœur que cela soit Mikail qui l’ai prononcé en premier !
— Il redoutait qu'un contact puisse vous mettre en danger.
—Je m’en doute, je lui rabâchais assez souvent d’ être prudent. Je suis conscient de la peur qui doit vous oppresser. Comment puis- je faire pour vous assurer que nous avons pris toutes les précautions pour ne mettre personne en danger ?
— Ce n’est pas pour moi que j’angoisse. Nous n’avons pas le droit à l’erreur. Si Ivan prend peur, il disparaîtra et cette fois, nous ne le retrouverons pas.
— Je ne souhaite en aucun cas qu'il le fasse et Josef vous a demandé de venir pour cette raison.
— Merci Aslan, reprend Josef. Ma peur était la même que toi, Misha. Je pense que j’ai trouvé la solution pour éviter une fuite. Serais-tu d’accord pour qu’Aslan et Piotr nous suivent chez toi ?
Bien entendu, la proposition de Josef est la meilleure. Pour nous. Mais, une fois encore, qu'en pensera le principal concerné ? Nous avons très peu parlé d’Aslan. Impossible pour moi d’oublier que c’est aussi ce qui a provoqué son départ. Et si cette réaction dissimulait une raison plus grave dont il n’a pas encore eu l’occasion de parler. Ivan cache tant de souffrances en lui dont il n'arrive pas à se libérer.
— Je vous sens hésitant et je peux le comprendre. Je ne pensais plus le retrouver vivant, vous savez ! Piotr comme moi, sans nous concerter, avons remué ciel et terre afin de le retrouver. Josef représentait ma dernière carte. Après tout, lui seul avait côtoyé Irina et ce jeune homme à qui elle a offert ses carnets. Il m’était inconcevable de ne pas discuter avec lui, l’occasion était trop belle. Et complètement sécurisée, je vous l’assure. Vous seul avez la possibilité de me laisser le voir. Je ne forcerais pas votre décision.
Je n’ai pas droit à l’erreur mais refuser me met tout autant mal à l’aise.
—J’accepte car je me vois mal refuser à Ivan de vous voir. Vous faites partie de son passé. Le mieux est peut-être que tu les accompagnes, Josef. Moi, je rentre et je vous attends.
(Ivan )
Je regrette d’avoir cédé aux arguments de Rolf. J’ai tout d’abord réussi à me contrôler en fumant sur la mini terrasse mais le besoin de bouger m’a entraîné dans des aller-retour.
— Tu sais que tu es impressionnant ainsi.
— Parce que je marche ?
— Ton allure générale en fait. Les yeux noirs, la démarche vive comme si tu te préparais pour un combat, tes cheveux hirsutes à force de fourrager à pleine main dedans. Enfile chaussures et blouson, je t’y amène.
Je fonce vers la chambre avant qu'il ne change d’avis mais au même moment, j'entends du bruit dans la pièce de vie. Rolf est tout aussi surpris. Sans plus me préoccuper de mon objectif précédent, je file tout droit vers la voix de Misha.
Celui-ci accroche son manteau à la patère lorsque j’entre dans la pièce.
— Et bien, tu me guettais ?
— Pas vraiment, non. Rolf avait décidé de me déposer à l’association. Qu’a dit Josef ?
— Il a été si pénible que cela, demandé-je à Rolf ?
— Je redoutais qu'il finisse par laisser des marques à vie sur ton magnifique plancher.
— Tais- toi, Rolf, dis-je fermement. J'ai posé une question à laquelle je veux une réponse.
— Et tu vas l’avoir dans quelques minutes. Josef nous rejoint…
—Pourquoi m’avoir dissimulé sa présence ? Quelles sont les nouvelles ?
—Je te jure qu'il répondra à toutes tes questions. Et cerise sur le gâteau, il pourra admirer tes magnifiques pieds nus !
— Ne tente pas de noyer le poisson, dis-je en le prenant dans mes bras.
— Je ne mens pas, il me suit.
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