Chapitre 12: Le parapluie et Applebaum

J'ai pu remarquer que plusieurs personnes avaient commencé à s'intéresser à cette histoire dans les derniers jours. Ça m'a grandement remonté le moral par rapport à celle-ci et ça m'a donné envie de poster la suite, alors je n'ai plus qu'à vous souhaiter une bonne lecture! :3

Chapitre 12. Le parapluie et Applebaum

- 9h00 AM, Campagne londonienne-

John n'avait vu que trois fois cette expression sur le visage de Sherlock. La première fois, c'était quand il avait été attaché sur le toit du Tower Bridge par Feilong. La deuxième, c'était quand ils avaient été forcés de se tirer dessus par Moriarty en haut de l'Empire State Building. La troisième, c'était aujourd'hui.

De l'inquiétude, voilà ce que c'était. C'était comme si le Grand Sherlock Holmes n'avait, pour une fois, aucune certitude ; comme s'il ne savait pas s'il s'en sortirait, ce qu'il ferait et quand il le ferait. Comme s'il n'avait pas de plan.

John n'avait jamais senti son cœur battre aussi fort dans sa poitrine. Il fit ses valises (et celles de Sherlock qui paraissait trop sous le choc pour les faire) en deux temps trois mouvements et, en un rien de temps, ils se retrouvèrent sur le pas de la porte, prêts à dire au revoir aux parents de Sherlock. John embrassa — ou plutôt se fit embrasser par — les Holmes de baisers chaleureux sur les joues et de grandes accolades étouffantes. Sherlock le tira presque des bras de sa mère, semblant pressé d'en finir au plus vite. Ce mouvement brusque, s'il parut insultant pour John, les Holmes ne parurent pas s'en soucier, probablement habitué à un tel comportement.

— Aller, allons-y, John, ne perdons pas une seconde de plus!

Sherlock le poussa sans vergogne vers la sortie, ramassant le parapluie de sa main libre. La porte claqua derrière eux, faisant presque sursauter le docteur.

— Nous devons partir, vite! Continua de le presser le détective, une main dans le creux de son dos.

Il ouvrit le portail de fer, puis le poussa en direction de la route campagnarde qui bordait la maison de ses parents.

— Où allons-nous, Sherlock, bon sang?! Répond-moi! Insista fortement le médecin.

Comme le détective s'obstinait à demeurer muet, John freina brusquement, arrêtant de marcher. Il tira sur son poignet, obligeant Sherlock à arrêter de marcher. Ce dernier se stoppa d'un seul coup, puis se tourna dans sa direction, l'air choqué.

— Quoi ?!

Leurs yeux se croisèrent.

— Je te suivrai où que tu ailles, Sherlock Holmes, mais dis-moi d'abord où nous allons !

Sherlock soupira, ferma les yeux, puis les rouvrit. Il se résigna.

— D'accord, fit-il, las. Là, nous marchons jusqu'à ce que l'on croise un taxi : j'en ai appelé un pendant que tu faisais nos valises, il devrait arriver dans moins d'une quinzaine de minutes. Ensuite, ce taxi nous amènera à Applebaum où nous ferons un pacte avec le diable.

— Le diable ? releva John.

— Avec Magnussen, si tu préfères.

— D'accord, très bien. Et... et pourquoi faisons-nous cela ?

— Parce que Mycroft et Lestrade sont là-bas et qu'il va leur arriver quelque chose si nous ne faisons rien.

— Comment sais-tu cela ?

Sherlock désigna le parapluie qu'il tenait dans une de ses mains.

— Mycroft a laissé ça en partant, il ne l'aurait jamais oublié : son bien le plus précieux. Il ne l'aurait jamais fait s'il n'était pas persuadé que quelque chose lui arriverait.

Le détective jeta un nouvel coup d'œil à sa montre à gousset qui contenait une photo de John à l'intérieur.

— Assez discuté, nous allons être en retard pour notre taxi.

Et ils reprirent leur marche, leurs valises claquant dans les nids de poule de la rue.

Comment l'avait prédit Sherlock, le taxi fut là exactement quinze minutes plus tard, pile à un croisement de rues. Ils posèrent leurs bagages dans la valise arrière, puis prirent place sur la banquette, côte à côte.

— Applebaum, signifia Sherlock au conducteur en se penchant un peu vers l'avant, une main sur le dossier du siège conducteur pour s'appuyer. Et je vous donnerai un bon pourboire si nous y sommes en moins de trente minutes.

Le taxi démarra. Au bout de dix minutes seulement — un vrai record ! —, Sherlock pesta contre le conducteur :

— Vous n'allez pas assez vite ! se plaignit-il.

— Mais, monsieur, je suis au maximum que le permet les limitations de vitesse !

— Vous êtes un idiot si vous suivez les limites ! Elles sont là pour être dépassées !

Là-dessus, Sherlock passa par-dessus la console de l'automobile et prit place sur le siège passager avant. Puis, il passa sa jambe par-dessus bord et appuya son pied par-dessus celui du conducteur, enfonçant la pédale de vitesse au fond.

— Hey, qu'est-ce que vous faîtes !?

— Contentez-vous de garder le volant en place et accrochez-vous bien !

— Ne vous en faîtes pas, tenta de le rassurer John en criant, la main crispée sur la poignée de porte, il fait toujours ça !

— Vous êtes fou, complètement fou ! répéta le conducteur tout en serrant malgré tout le volant jusqu'à ce que ses doigts en blanchissent.

Malgré tout, il fit de son mieux pour garder la direction. Il préférait clairement vivre, plutôt que de mourir. John était assez d'accord avec lui.

***

-10h00 AM, Applebaum-

Ils venaient tout juste d'arriver dans les temps à destination : une immense maison ultra-moderne qui avait une forme plus ou moins octogonale. Sherlock tapota l'épaule de leur chauffeur.

— Bon, vous voyez quand vous voulez.

Il se tourna vers John :

— Allons-y, il n'a pas une seconde à perdre !

Il s'étira pour attraper le parapluie de Mycroft laissé sur la banquette arrière, puis descendit de la voiture, John le suivant. Le conducteur du taxi baissa la vite de sa fenêtre à ce moment-là :

— Et ma paie ? J'exige au moins le double de ce que ça vous coûterait habituellement !

— Restez-là et vous l'aurez à notre retour ! promis Sherlock.

— J'exigerai le triple !

Le détective ne parut pas s'en soucier. À vrai dire, il courait déjà en direction de la maison, John sur ses talons. Ils arrivèrent en un rien de temps à la porte pour voir par la fenêtre Mycroft assis sur un luxueux divan blanc, un air soucieux sur le visage, Lestrade près de lui, une main sur sa cuisse comme pour le rassurer, paraissant tout aussi inquiet. En se décalant un peu, John put voir qu'ils parlaient avec un homme à petites lunettes au physique des plus atypiques : il avait un visage et un crâne plat, comme celui d'un requin et il vous regardait avec ses touts petits yeux plissés comme s'il pouvait tout savoir de vous d'un seul regard. John se sentit parcouru de mille et un frissons.

— Et maintenant, qu'est-ce qu'on fait ?

Il regarda Sherlock qui haussa les épaules avec nonchalance.

— On sonne.

Et c'est ce qu'il fit en appuyant son doigt ganté noir sur la sonnerie qu'il enfonça sans effort. Un lent « ding, dong » retentit, résonna, puis finalement, John vit l'homme qui parlait avec Mycroft s'excuser auprès de ses invités et venir dans leur direction. La porte s'ouvrit sans même un grincement. L'homme leur fit face. Un lent sourire éclaira son visage de requin marteau.

— Je vous attendais.

Il fixa toute suite le parapluie noir dans les mains de Sherlock, puis se décala sur le côté :

— Allez, je vous en prie, entrez, votre frère est déjà là.

Sherlock plissa les yeux, mais il entra, faisant signe à John de le suivre.

— Je sais, lâcha-t-il en détaillant les lieux du regard.

L'endroit était propre, trop propre, si propre qu'il en avait même du mal à en déduire des choses. Pas même un grain de poussière ne traînait. Magnussen les dirigea dans le salon où ils rejoignirent Mycroft et Lestrade. Le visage du politicien blêmit aussitôt qu'il vit le parapluie.

— Sherlock..., murmura-t-il.

Magnussen ne parut pas l'entendre.

— Allez, assoyez-vous, il y a de la place pour tout le monde.

Prudent, Sherlock prit place près de Lestrade, puis John à côté de lui.

— Alors, de quoi parlions-nous donc ? demanda Magnussen en s'assoyant sur son propre fauteuil en face d'eux.

Il était clair qu'il jouissait d'avoir devant lui, en sa possession, tous les Holmes et leur point de pression en bonus avec eux.

— À ce que je vois, vous avez le parapluie, fit remarquer Magnussen en regardant Sherlock. Si vous l'avez, c'est que vous devez être prêt à faire un marché, je me trompe ? Si ce n'était pas le cas, vous ne l'auriez pas amené.

— Je vais vous le donner, mais vous devez me donner quelque chose en échange.

— Bien sûr, que voulez-vous ?

— Montrez-moi Applebaum.

Mycroft se prit la tête entre les mains et Magnussen se mit à rire.

— Eh bien, voilà, c'est fait, dit-il.

— Que voulez-vous dire ? l'interrogea Sherlock en fronçant les sourcils.

— Mycroft, mon cher, voulez-vous bien expliqué à votre frère ce que vous saviez déjà en venant ici, la raison pour laquelle vous vous soumettez à moi comme un petit chien ?

Mycroft sembla lutter contre la furieuse tentation de balancer son poing dans la figure de l'homme, mais il se contint et expliqua calmement :

— Es-tu idiot, Sherlock ? Je t'avais dit de ne pas venir ici, de ne pas te mêler de mes affaires avec Magnussen ! Qu'est-ce que tu croyais ? Que tu allais pouvoir me « sauver » comme tu n'as pas pu le faire avec Sherrinford ? Il est temps de grandir un peu, Sherlock. Tu n'es plus un enfant, il faut arrêter de croire aux contes de fées ! Applebaum n'a jamais existé, ce n'est qu'une invention. Tout est dans la tête de cet homme, absolument tout, il mémorise chaque information, chaque petite donnée dans une sorte de « palais mental » comme le tiens, sauf que dans son cas, il s'agit d'une salle d'archives, comme une immense bibliothèque. Il pourrait faire tomber le pays seulement avec ce qu'il sait et, toi, tu viens ici avec les derniers plus grands secrets d'États qui lui ont échappés sur toi !

Magnussen sourit.

— Bien. C'est vrai, tout est vrai.

Il se tourna vers Sherlock.

— Il vous a dit ce que je pouvais faire d'un pays, alors imaginez ce que je peux faire à un simple humain, un poisson rouge prisonnier dans son bocal. D'un claquement de doigt, je pourrais détruire la vie de notre brave inspecteur Lestrade ou faire basculer la carrière médicale de ce brillant John. Alors, qu'est-ce que ça vous fait ?

Sherlock crispa la mâchoire.

— John est votre point de pression, n'est-ce pas ? Vous avez été habile, monsieur Holmes, pendant un moment, j'ai cru que c'était la drogue. Vous avez bien manqué me tromper. C'était astucieux. Mais vous avez failli, tout comme votre frère, d'ailleurs. Vous voulez savoir pourquoi, comment ? Eh bien, regardez-vous. Cette expression que vous affichez sur votre visage, elle n'apparaît que lorsque John Watson est en danger : une fois sur le toit du Tower Bridge, l'autre tout au sommet de l'Empire State Building, puis maintenant. Je vous ai observé, monsieur Holmes.

Il prit une pause, puis poursuivit :

— Et maintenant que j'ai trouvé votre point de pression, que vous êtes là et que vous avez le parapluie, vous allez me laisser gagner. Je vous ai à ma merci. Vous n'êtes pas plus malin qu'un autre, finalement et, si je le voulais, je pourrais vous donner des pichenettes sur le visage comme je pourrais le faire avec des centaines et des centaines d'autres personnes. Ne vous en voulez pas, tout le monde à son point faible ou ses points faibles, rajouta-t-il en jetant un regard appuyé à Mycroft. Dans le cas de votre frère, c'est vous et, plus récemment, monsieur Lestrade, ici présent.

Magnussen se releva.

— Tout était déjà calculé d'avance. J'ai menacé la sécurité de Londres — je me suis même associé à Moriarty pour le faire (quel étrange hasard que j'ai été le propriétaire de l'immeuble de Sherrinford à New-York, non ?), mais même lui, j'avais trouvé son point de pression : une stupide amourette avec son sniper, un certain Colonel Sebastian Moran — , j'ai fait exécuter un meurtre pour attirer l'attention de Mycroft et, par la même occasion, éloigné Lestrade de sa maison le temps d'engager quelques personnes pour fouiller et réunir les informations dont j'avais besoin pour faire pression. Le jeu fut facile après ça. J'ai menacé de détruire la vie de John, ce qui aurait des impacts sur votre vie, Sherlock, pour convaincre votre frère de venir ici. Je savais déjà qu'il n'amènerait pas le parapluie contenant les codes de la bombe nucléaire ici, qu'il préférerait vous le laisser, mais je savais aussi que vous viendriez pour protéger votre frère que, mine de rien, vous affectionner tout de même. Ainsi, j'évitais de me faire duper par un faux modèle. Ensuite, je n'avais plus qu'à utiliser votre point de pression et, maintenant, nous devrions normalement arriver à l'étape où vous me tendez gentiment le parapluie.

Magnussen, sûr de lui, tendit la main à Sherlock, prêt à recevoir l'objet. Le détective parut hésiter.

— Ne lui donnez pas ! intervint soudainement Gregory.

Mycroft se contenta de garder la tête entre ses mains, l'air désespéré, comme si sa vie défilait devant lui. Sherlock soupira, regarda tout le monde, puis lentement, horriblement lentement, tendit le parapluie. Ses doigts frôlèrent ceux de Magnussen quand il déposa l'objet dans ses paumes ridées. Un sourire apparut sur les traits du requin.

— Merci bien, vous faîtes le bon choix, monsieur Holmes. Mais avant que vous repartiez, assurons-nous qu'il s'agisse bien du bon.

L'air expert, Magnussen cogna le parapluie contre le sol, puis tira sur le manche. Le pommeau incurvé s'arracha facilement. Il le retourna dans sa main et Gregory et John, les seuls tenus dans l'ignorance, purent voir qu'il s'agissait, en réalité, d'une sorte de clef USB.

— On dirait bien que c'est le bon, commenta Magnussen tout en le caressant de ses doigts.

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