Chapitre 4 : Encore elle ?
Ce même soir, Tristan avait rejoint son ami Ethan afin de partager un verre pour fêter son retour. Ils se connaissaient depuis la fac, mais contrairement à lui, Ethan n'avait jamais eu l'esprit aventurier et avait préféré rester dans la région. Il occupait actuellement un poste de journaliste de terrain auprès du « Quotidien d'Opale », un journal assez connu et reconnu dans la région, suffisamment pour proposer des reportages plutôt intéressants. C'était grâce à lui que Tristan avait obtenu un entretien d'embauche auprès du rédacteur en chef qui avait semblé impressionné par son CV ce matin.
En effet, à presque vingt-sept ans, il avait envie de voir ce qu'on pouvait lui offrir ici. Depuis quelques temps déjà, dépendre de projets qui arrivaient au compte-goutte commençait à lui peser et, même s'il adorait voyager, il se demandait si sa place ne se trouvait pas auprès de sa famille maintenant. Et pourquoi pas se poser enfin avec quelqu'un ? Ces six derniers mois seul, loin d'ici, n'avait fait que renforcer son idée de retour définitif. Alors, quand Ethan avait proposé d'appuyer sa candidature, il avait sauté sur l'occasion.
Pourtant, quand il avait rendu visite à sa mère cet après-midi, il avait préféré ne pas lui en parler. Il ne voulait pas lui donner de faux espoirs car il savait très bien à quel point elle n'aimait pas le voir partir et qu'elle serait trop heureuse de la nouvelle. En plus, elle l'avait bassiné tout l'après-midi avec le fait qu'il cohabitait avec Lou... Décidément, elle n'avait toujours pas abandonné son projet de les marier un jour ! Lui et Lou, franchement, quelle idée ! Il y a quelques années, il n'aurait pas dit non, mais depuis, de l'eau avait coulé sous les ponts ! D'accord, physiquement, c'était tout à fait son type de femmes, mais sa manière de le prendre de haut, ça, il ne pouvait pas la supporter !
Après un bon repas dans une brasserie du coin, Ethan l'avait trainé dans un bar branché où ils avaient retrouvé quelques connaissances. Ce dernier l'avait rapidement lâché pour aller draguer une belle brune. Elle semblait beaucoup lui plaire et ça lui paraissait réciproque vu qu'elle était revenue vers lui pour leur proposer à tous les deux de se joindre à elle et sa copine pour prendre un verre. De dos, il vit juste que l'autre était blonde.
- Allez, mon vieux ! Tu ne peux pas manquer ta chance sur ce coup-là, avait dit Ethan en sachant très bien qu'il adorait les blondes.
Amusé et curieux, il avait hoché la tête et, empoignant son verre, les avait suivis. Amandine – c'était le nom de la brune – fit les présentations. Quand la blonde se retourna, elle sembla tout aussi étonnée et embêtée que lui.
« C'est pas vrai, se dit-il en soupirant de dépit. De tous les bars de la ville, il a fallu qu'elle vienne boire un verre pile au même endroit que moi. »
- Vous vous connaissez déjà ?!, s'exclama Amandine. C'est cool, ça !
- Ouais, trop cool, grommela-t-il en s'asseyant à la seule place disponible, à côté de Lou forcément.
- Tu me présentes ?, lui demanda Ethan.
- Lou... Ethan. Ethan... Lou, dit-il rapidement comme pour se débarrasser de la corvée.
- Oh ! La fameuse Lou !, s'exclama Ethan.
Tristan lui jeta un regard noir. Il ne pouvait pas se taire, non !
- Pourquoi « fameuse » ?, s'intéressa-t-elle évidemment.
Ethan se gratta la tête en se demandant ce qu'il pouvait bien lui répondre.
- Oh, Tristan m'a juste parlé de sa nouvelle colocataire, répondit-il évasivement.
- Vous êtes colocataires ?, demanda la brune.
- Malheureusement, répondirent-ils tous les deux en même temps.
Ethan et Amandine se jetèrent un regard mi-gêné, mi-amusé.
- En attendant de trouver une solution pour l'appartement, j'habite chez une amie... qui est aussi sa cousine.
- Disons plutôt qu'elle squatte ma chambre, rectifia Tristan sous le regard courroucé de Lou.
- Et il a fallu que tu viennes boire un verre dans le même bar que moi alors que la ville en est pleine, se plaignit-elle.
- Je ne pouvais pas savoir, grogna-t-il.
- Il fallait bien qu'on fête la magnifique offre d'emploi qu'on lui a faite ce matin !, s'exclama Ethan pour détendre l'atmosphère.
- Offre d'emploi ?, demanda Lou, les sourcils froncés.
- Je travaille pour le « Quotidien d'Opale », précisa Ethan.
- Alors tu es journaliste ?, l'interrogea Amandine avec intérêt.
- Oui, et mon rédacteur cherchait un nouveau membre pour l'équipe. J'ai immédiatement pensé à Tristan !
Ce dernier soupira : Ethan était décidément trop bavard. Il fut soulagé quand il décida enfin d'emmener Amandine danser pour pouvoir discuter un peu avec elle, laissant Lou et Tristan en tête-à-tête. Ils les regardèrent s'éloigner avant de se concentrer sur leurs verres. Tristan vida sa bière d'une traite avant d'en commander une autre. Pour briser le silence dans lequel ils s'étaient murés, il lui demanda :
- Tu veux boire quelque chose ?
- J'ai ce qu'il me faut, merci, répondit-elle en désignant son verre à moitié vide.
Il soupira encore et regarda autour de lui à la recherche d'une échappatoire.
- Alors comme ça tu parles de moi à tes amis ?, le provoqua-t-elle soudain avec un petit sourire en coin.
- Figure-toi que j'ai d'autres sujets de conversation plus intéressants, lui rétorqua-t-il sur la défensive. Mais oui, je leur en ai touché un mot pour savoir si l'un d'entre eux pouvait m'héberger quelques temps. Mon dos ne va pas supporter très longtemps le canapé du salon.
Son mince sourire disparut immédiatement.
- Je suis désolée, dit-elle en baissant les yeux vers son verre qu'elle tritura du bout de ses petits doigts fins.
Il voyait bien qu'elle l'était : c'était bien la seule chose qui le retenait de la mettre dehors. Il profita du fait qu'ils étaient seuls pour l'interroger.
- Pourquoi tu as dit que tu attendais une solution pour ton appartement ?
Elle se redressa sur sa chaise en se dandinant. Il avait apparemment touché un point sensible.
- Avec Marc, on avait acheté ensemble un bel appartement dans le centre. Après le confinement, on avait pensé que ce serait mieux d'être tous les deux. Tu sais : compte commun et tout, et tout... Depuis qu'on s'est séparé, il refuse de me donner ma part et a bloqué le compte. De cette façon, il espère qu'un jour ou l'autre, je serais obligée de rentrer. Il sait que je suis trop fière pour demander de l'aide à mes parents...
- Ok, je comprends mieux, se radoucit-il. Un beau connard, quoi ! T'inquiète pas, je vais m'y faire. Et au besoin, je compte sur toi pour me faire un massage.
Il haussa les sourcils de façon subgestive.
- Compte là-dessus !, rit-elle en se détendant enfin.
Elle tourna son beau visage vers lui. « Ça lui va bien mieux de sourire », pensa-t-il contaminé lui-même. Profitant de cet instant de grâce entre eux, elle le questionna :
- Tu vas travailler pour le "Quotidien", alors ?
- Je ne sais pas encore, avoua-t-il. S'il te plait, n'en parle à personne. Si ma mère l'apprenait, elle ne me lâcherait plus.
- Je comprends. Lucia serait trop ravie que tu reviennes t'installer définitivement à Saint-Omer.
Ils furent interrompus par Amandine qui se précipitait vers Lou d'un air angoissé.
- Je suis désolée, Lou. Il a dû entendre au bureau que j'allais te voir ce soir. Je te jure que je ne lui ai rien dit.
Lou jeta un regard derrière elle et se crispa. Elle rassura son amie :
- Ça va aller, ne t'inquiète pas.
Tristan se tourna vers l'entrée du bar pour y apercevoir la silhouette longue et maigre de Marc. Il ne l'avait rencontré qu'une fois, lors d'un repas de Noël il y a deux ans, mais il ne pouvait pas oublier son nez proéminent et son sourire faux, le même qu'il arborait maintenant après avoir aperçu leur table.
A ses côtés, Lou ferma les yeux et prit une profonde inspiration pour tenter de garder son calme. Amandine semblait bouleversée et Ethan n'y comprenait plus rien.
- Bonsoir tout le monde, attaqua Marc d'un air sûr de lui. Louise, si je m'attendais !
- Salut Marc, répondit-elle du bout des lèvres, pas convaincue du tout que ce soit le fruit du hasard.
- Tiens, mais on se connait, dit-il en le regardant. Tu es... Conan, c'est bien ça ?
- Tristan, le corrigea-t-il dans un grommellement.
- Tristan, c'est ça ! Ça fait longtemps. Louise, est-ce que je peux en profiter pour te parler deux minutes... vu que tu passes ton temps à éviter mes messages et mes appels... Je crois qu'on a des choses à se dire.
Le ton condescendant et moralisateur qu'il utilisa ne plut pas du tout à Tristan. Lou aurait dû l'envoyer promener, mais elle se contenta de soupirer avant d'accepter de le suivre plus loin.
- Lou, la supplia Amandine.
- Ne t'inquiète pas, ça va aller, la rassura-t-elle avec un sourire crispé.
A peine s'étaient-ils éloignés qu'Ethan demanda :
- C'est qui ce type ?
- Son ex, répondit Amandine dépitée.
- Un beau salopard, si tu veux mon avis, ajouta Tristan.
- Pourvu que Lou ne se laisse pas faire. Il a plus d'un tour dans son sac.
- Tu sais ce qu'il s'est passé entre eux ?, lui demanda-t-il.
- Oui, mais... Lou n'aime pas qu'on en parle.
Tristan jetait des regards discrets vers le couple plus loin. Il ne pouvait pas s'en empêcher. Il voyait que Marc tentait de convaincre une Lou complètement fermée. Cela ne semblait pas lui plaire car plus leur conversation se poursuivait, plus il s'énervait. Son sang ne fit qu'un tour quand Marc haussa le ton et l'agrippa par le bras. Ok, entre lui et Lou, c'était souvent la guerre, mais pas au point de la laisser se faire maltraiter par un individu de cette espèce-là !
- Je vais voir si tout va bien, dit-il en se levant précipitamment, laissant les deux autres interdits.
Il se dirigea vers le couple et surprit les propos de Marc :
- Ok, j'ai fait une « petite » erreur. Mais ça arrive dans tous les couples. Alors maintenant, cesse de faire l'enfant ! Il est temps que tu rentres à la maison.
- Tout va bien ici ?, les interrompit-il.
- Oui, très bien, répondit Marc. Tu peux nous laisser.
- Ce n'est pas à toi que je parlais, répliqua-t-il calmement mais fermement. Lou, est-ce que ça va ?
- Je... oui..., répondit-elle.
On voyait qu'elle ne savait plus où se mettre et qu'elle était surprise par son intervention.
- De quoi il se mêle celui-là ?, s'énerva Marc.
Tristan sentit la colère monter en lui et s'apprêtait à lui dire sa façon de penser quand une petite main se posa sur son bras.
- C'est mon petit-ami, annonça Lou, laissant les deux hommes estomaqués.
« Hein ? Quoi ? Qu'est-ce qu'elle vient de dire ? », pensa Tristan, sidéré.
Elle le supplia du regard et il n'eut pas d'autre choix que d'entrer dans son jeu.
- Heu... Ouais... C'est ça... son petit-ami... alors maintenant, tu la laisses tranquille, dit-il en plaçant un bras possessif autour des épaules de la jeune femme.
- Ne me dis pas que tu sors avec ce raté ?!, persifla Marc après avoir repris contenance.
- Raté !? Non mais, pour qui il se prend, lui ?!
Heureusement pour Marc, Lou le retint et répliqua :
- Tristan n'a rien d'un raté, il a très bien réussi dans la vie et lui, au moins, il me respecte.
Et toc ! Tristan était fier d'elle.
- Tu devrais revenir à la raison, Louise, grinça encore Marc. Tu sais que l'avenir de la boite en dépend...
Ces quelques mots ébranlèrent Lou. Tristan la sentit trembler dans ses bras.
- Maintenant, je crois que tu devrais partir d'ici avant d'avoir des ennuis, conseilla-t-il à l'homme en face de lui.
Outré mais vaincu, Marc réajusta son costume et sortit non sans jeter une dernière fois son fiel :
- Je me demande ce que ton père en pensera !
A peine avait-il franchi le seuil du café que Tristan sentit Lou se laisser aller à respirer à nouveau. Il remarqua alors que son bras entourait toujours ses épaules et s'éloigna bien vite.
- Je suis désolée de m'être servie de toi, s'excusa piteusement la jeune femme, mais je ne savais pas comment l'obliger à me laisser tranquille.
- Ne t'en fais pas pour ça.
Amandine se précipita aux nouvelles et la prit dans ses bras.
- Ca va, ma belle ?
- Oui, oui... je... Il est parti...
- Tant mieux ! N'écoute pas ce qu'il t'a dit ! Tu vaux mieux que ça !
Il vit les larmes perler au coin des yeux de Lou et se dit qu'il aurait dû envoyer son poing dans la figure de l'autre connard !
- Je crois que je vais rentrer, dit-elle d'une voix tremblante d'émotions contenues. J'ai besoin d'être un peu seule.
Elle leur dit rapidement au revoir avant de partir. Tristan ne pouvait pas la laisser ainsi, alors il courut derrière elle et la rattrapa dans la rue.
- Attends, je te raccompagne, lui proposa-t-il.
- Non, Tristan, je préfère rentrer seule, répondit-elle sèchement.
- Arrête, c'est bon. Il est tard et je ne vais pas...
- Tristan, s'il te plait !, s'énerva-t-elle. Tu m'as bien aidée, merci, mais là, je n'ai plus besoin de toi. Alors laisse-moi.
Le ton qu'elle employa le fit bouillir de colère. Encore une fois, elle l'avait utilisé et maintenant qu'elle n'avait plus besoin de lui, basta !? Il n'allait pas se laisser faire !
- Pour qui tu te prends à me parler comme ça ?! Si j'avais su, je t'aurais laissée te débrouiller avec l'autre con ! Mais ça, tu vas le regretter, je te le promets !
Et il la planta là pour partir dans la direction opposée. Non, mais c'est vrai, quoi !
----------------------------------
Lou n'aurait pas dû jouer à ça avec Tristan. Elle risque de bien vite le regretter...
Qu'avez-vous pensé du personnage de Marc ?
La suite très vite !
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top