12 // Draco
J'observais la pièce avec un agacement et une impatience grandissante.
Certains meubles avaient été recouverts de tissus blancs pour les protéger de l'usure et de la poussière. Mais, cela ne s'appliquait qu'aux meubles particulièrement nobles et précieux. J'observais la grande bibliothèque grisée de poussière, les dos des livres avaient pâlis avec le temps et les titres étaient majoritairement illisibles.
Je quittais le salon pour inspecter le reste du Manoir. Mes parents avaient réellement pris soin de protéger les objets précieux mais le reste était dans un état lamentable. En explorant les cuisines, je constatais qu'aucun elfe de maison ne servait plus la demeure.
Je notais donc en premier sur ma liste mentale de me procurer un nouvel elfe de maison, peut-être deux pour m'assurer que le Manoir soit rapidement remis sur pied. Avec le nouveau décret de régulation pour les créatures magiques de service, il était particulièrement compliqué de se procurer des elfes de maison à un prix décent. Je devrais donc puiser dans la fortune familiale, ce qui ne me réjouissais pas le moins du monde.
C'est avec un pincement au cœur que je visitais mon ancienne chambre. Rien n'avait bougé, tout était comme le jour où je l'avais quitté, si ce n'est la couche de poussière qui recouvrait les meubles. Je me souvenais de l'amertume et de la tristesse qui m'habitais le jour où j'avais quitté le Manoir avec la ferme intention de ne plus jamais y remettre les pieds, dégouté de qui j'étais, dégouté de ce pays, dégouté de cette vie qui m'avait été imposée.
Je n'étais encore qu'un adolescent.
Avec un coup de baguette déterminé je fis disparaitre une première couche de poussière, mais la chambre restait froide et visiblement inhabitée depuis des années. Même la magie avait ses limites, et rien ne valait un bon coup de torchons. Il était hors de question que je me salisse les mains avec du nettoyage uniquement pour passer la nuit dans une chambre lugubre.
Je terminais mon tour du Manoir pour constater que le restant de la demeure était dans le même état que ma chambre et le salon : seul les objets de valeurs avaient été soigneusement conservé, le reste avait dû subir les ravages du temps.
C'est avec un agacement perceptible et une liste de taches mentale déjà bien remplie que je transplanais.
Je me retrouvais au beau milieu de Londres. Je fronçais les sourcils en constatant l'agitation de la rue dans laquelle j'avais atterri. Je ne m'étais en aucun cas trompé d'adresse, je ne me trompais jamais. Et je doutais que Harry soit dissipé au point d'en oublier sa propre adresse. Il s'agissait donc sans doute d'une demeure magique.
12, Square Grimmaud.
Je m'avançais vers l'immeuble qui devait être le numéro 12, pour réaliser qu'il s'agissait du 11, la maison suivante portait le numéro 13. Il habitait donc réellement une maison magique. Avec un soupir agacé, j'attendis patiemment devant les deux immeubles, pile à leur intersection.
Je n'avais pas revu Harry depuis son départ de la Roumanie trois semaines plus tôt. Je ne l'avais pas accompagné pour son retour car j'avais trop d'affaires à régler là-bas avant de pouvoir revoir mon pays natal. J'avais dû, non seulement, rentrer ma démission auprès de l'agence qui m'employait mais aussi auprès du MMR, qui nous subsidiait. J'avais également dû clôturer le contrat de location du petit appartement où je logeais en dehors des missions et faire acheminer mes effets personnels jusqu'en Angleterre.
Tout cela aurait pus être réglé en une semaine si je n'avais pas du m'en remettre à des incapables terriblement lent et incompétents. Le résultat final était déplorable : mes effets personnels avaient quitté la Roumanie une semaine avant moi et n'étaient toujours pas arrivé au Manoir familial. Je n'avais pas eu l'intention de profiter de la proposition de Harry dés le premier jour mais m'y voilà contraint.
Alors que je continuais à fixer l'intersection des deux immeubles, je vis un troisième apparaitre. Une vieille porte délabrée surgit de nulle part entre les numéros 11 et 13. Des murs décrépis aux fenêtres crasseuses apparurent à leur tour. C'était comme si une nouvelle maison avait soudainement écarté les deux autres pour se glisser entre elles.
Je m'avançais jusqu'à la porte avant de toquer doucement. Je ne dus pas attendre longtemps qu'on vienne m'ouvrir. Une jeune femme au visage rond, des boucles brunes sauvage et un regard particulièrement perspicace, m'ouvrit.
- Bonjour, je peux vous aider ?
- Je suis là pour Harry.
Avec une certaine nervosité, elle passait d'un pied à l'autre. Demander le célèbre Harry Potter a son domicile privé était peut-être une situation délicate, mais j'espérais que le brun aie prévenu ses colocataires de mon éventuelle présence .
- Monsieur, vous devez comprendre que Harry est...
- Hermione ? Si c'est encore la Gazette tu peux leur jeter un sort de coupe jar-
Je sentis les frissons me parcourir alors que la voix grave et suave du jeune homme me parvint. Je n'avais pas besoin de voir son visage pour savoir qu'il s'agissait du sorcier chaotique et dissipé que je cherchais. Mon cœur manquait un battement alors que sa silhouette apparut derrière la jeune femme. Ses cheveux en désordre, ce regard vert et cette démarche assurée. Cet homme était-il réellement à moi ?
- Draco ?
Je serrais les lèvres sans répondre. Il semblait bien trop étonné à mon gout. Un silence gêné s'installait alors que le regard intelligent de la sorcière passait de Harry à moi.
Je pouvais voir une certaine joie sur le visage du brun, ainsi que l'hésitation. Je laissais mon regard glisser sur son pull délavé, son pantalon troué et ses pantoufles dépareillée. Il respirait encore plus le désordre qu'en Roumanie. Je voyais sa crainte de mon jugement, aussi je m'abstins de commenter sur sa tenue.
Avec des mouvements lents et mesuré, atypique pour lui, il s'approcha de moi en dépassant la sorcière. Il semblait à la fois déterminé et hésitant : il voulait me prendre dans ses bras. Je serrais donc les dents et attendis qu'il soit à ma hauteur pour laisser mon regard se perdre dans le sien.
C'était étrange. Ses airs désinvoltes, son sourire confiant, ses yeux verts si intenses lorsqu'ils se concentraient enfin sur un objet, ses grandes mains, son torse large, ses cheveux en bataille. Trois semaines sans sa présence ne m'avaient pas parues particulièrement insupportable. Je n'avais pas ressenti de manque non plus. Mais maintenant qu'il était face à moi, je regrettais presque de ne pas être rentré plus tôt.
Avec une douceur déstabilisante, il glissait ses mains chaudes sur mes bras avant de m'attirer contre lui. Je laissais mon menton se poser sur son épaule en inspirant son odeur de café froid et de sève. Je me sentais choyé dans ses bras chauds et doux. Je sentais ses mains chercher à se poser dans mon dos sans s'y résoudre, avant de se poser sur mes hanches. Ce geste me semblait presque familier, comme une habitude.
Je fus bien incapable de lui rendre son étreinte et il ne semblait pas en prendre ombrage. J'ignorais comment faire pour lui transmettre la sérénité qu'il me procurait.
Je profitais donc silencieusement de son geste, jusqu'à ce que je croise le regard curieux de la sorcière. Avec une pression déterminée sur le torse de Harry, je le forçais à me lâcher.
- Tu avais proposé de m'héberger, et il se trouve que la situation actuelle ne me permet pas de dormir chez moi.
- J'avais déjà oublié que je t'avais proposé ça, avoua-t'-il.
- Dans ce cas je vais aller dans un hôtel.
Il glissa sa main sur mon poignet comme s'il craignait que je m'en aille immédiatement. Son regard suivis le geste, comme s'il n'y avait pas totalement réfléchis.
- Je ne vais pas laisser mon petit-ami dormir dans un hôtel, viens.
Avec un sourire confiant, il me tira dans le hall sombre de la maison. La porte se referma par magie dans mon dos et nous plongea dans une pénombre vacillante et un silence étouffant qui semblait trop lourd pour ne pas être magique. Malgré l'éclairage bancal je pouvais voir le papier-peint décrépi qui recouvrait partiellement les murs. Je sentis l'agacement m'envahir en observant les peintures mal entretenues qui couvraient les mûrs, ainsi que les rideaux mangés par les mites qui en masquaient certaines. Le Manoir était dans un état impeccable en comparaison à cet endroit.
- Harry ? Tu as l'intention de me présenter à un moment donné ? Chuchota une voix féminine
- Ah heu... en fait.
- Allons dans le salon. Je ne veux même pas savoir ce que Ron pense de notre longue absence.
- Hmmhmm
La main chaude de Harry me forçait à le suivre dans le couloir lugubre. Je tirais ma baguette pour faire de la lumière, mais le brun intercepta mon geste.
- Pas de magie dans les couloirs, me dit-il en se penchant vers moi plus que nécessaire.
Ça me paressait étrange qu'il soit si tactile. Je n'étais pas tactile et avait énormément de mal à comprendre les gestes doux qu'il avait envers moi, lui rendre la pareille était à chaque fois un combat intérieur terriblement long et éprouvant. Mais pour lui cela semblait si naturel. Sa main qui tenait fermement mon poignet, son visage qui se penchait vers moi pour me parler, son corps qui effleurait le mien en marchant, rien ne semblait forcé, simplement naturel. C'était agréable et m'aidait à accepter cette proximité.
- Le salon est au premier étage, m'informa la voix suave du brun alors que sa main glissait dans la mienne.
Je ne répondis pas et suivit les deux sorciers dans les escaliers grinçants.
Cette maison commençait à déclencher un agacement non négligeable en moi. J'avais l'impression que personne n'avait pris soins du bâtiment depuis des décennies. Nous finîmes par rentrer dans une pièce bien plus lumineuse et un court instant j'eus l'espoir que cet espace soit plus propre.
Malheureusement, je fus vite déçu. La pièce était vaste, éclairée par un lustre visiblement vieux et usés. Elle était dotée d'un plafond haut et de murs couleur vert olive ornés de tapisseries sales. Les fenêtres n'étaient pas protégées par des rideaux, ce malgré les barres à rideaux évidentes. Si ce n'est pour les meubles qui semblaient neufs, la pièce semblait aussi mal entretenue que le reste de la bâtisse. Je retins avec grande peines les remarques amères qui me brulaient la langue.
- Un invité ? Demanda une voix masculine.
J'avisais un sorcier roux affalé dans un des fauteuils. Il avait les mêmes cheveux roux flamboyant que Charlie, et une ressemblance indéniable avec ce dernier. Je ne doutais pas un instant qu'il s'agissait d'un de ses frères. Il avait un long nez disgracieux et des taches de rousseurs éparpillées sur ses joues. Je notais également quelques cicatrices sur ses bras, dévoilées par les manches de son pull remontées.
- Un invité de Harry, annonça la sorcière qui s'installait à côté de lui en glissant sa main dans ses cheveux roux.
- Oui, hum, c'est Draco.. Mon heu...
- Tu as parlé de petit-ami, intervint la sorcière visiblement curieuse en évitant néanmoins très poliment de fixer nos mains liées.
Une décence que le roux n'avait pas, car ses yeux ronds observaient attentivement les doigts de Harry enlacés aux miens. Je pouvais voir qu'il se retenait de justesse de faire un commentaire. Avec agacement, je me dégageais de la poigne du sorcier chaotique, pour tendre ma main vers les deux autres.
- Je m'appelle Draco, Harry a travaillé avec moi en Roumanie avant que je ne démissionne.
- J'espère que tu n'as pas démissionné pour lui, dit le roux en acceptant ma poignée de main, parce qu'il n'en vaut vraiment pas la peine.
- Je sais, répondis-je en essuyant ma main humide de sa transpiration sur mon pantalon, j'avais mes raisons de quitter mon travail, Harry n'en faisait pas partie.
- Il me plait, souffla le roux à la sorcière qui souriait doucement. Moi c'est Ron Weasley, mais tu dois l'avoir deviné. Tu as travaillé avec Charlie, c'est ça ? Et elle, c'est Hermione Granger, la sorcière la plus brillante d'Angleterre et ma fiancée ! Tu as surement déjà entendu parler d'elle, c'est elle qui a introduit le nouveau décret de régulation pour les créatures magiques de service...
Il ne semblait même pas attendre de réponse de ma part alors qu'il continuait à parler, posant des questions et annonçant des évidences. Je vis le regard de sa compagne de faire légèrement las. Elle tira sur sa manche avant de dire d'une voix pleine de sous-entendu et d'avertissement :
-Harry n'a pas vu son petit-ami depuis trois semaines. Ils ont surement beaucoup à se dire. Et si on allait chercher à manger à China Town ? Ça nous dégourdirait un peu les jambes en prime.
- Hein ? Mais je pensais qu'on allait...
- Viens, Ron.
Sans plus, elle tira son fiancé par le col de son pull pour quitter le salon à une vitesse hallucinante. J'observais la porte se refermer avant de remarquer que je retenais ma respiration. J'expirais en observant le sorcier brun qui rangeait distraitement la table basse chargée de livres, tasses de thé et de biscuits à moitié entamé.
Je me remémorais la dernière nuit que nous avions passé ensemble avant son départ.
Il avait surpris ma conversation avec Charlie, m'offrant l'opportunité de ne pas prolonger le dialogue avec le roux balafré. J'avais immédiatement remarqué la nervosité de Harry, comme si l'énergie débordait de son corps. Ses mains et ses jambes semblaient peiner à tenir en place, son regard passait d'un objet à l'autre Lorsqu'il m'avait rejoint dans ma chambre, j'avais décidé de lui donné l'opportunité de se dépenser, je n'avais aucunement eu l'intention d'avoir une conversation aussi... intime avec lui.
Je n'avais pas eu l'intention de lui faire part des raisons de mon départ, je n'avais pas non plus eu l'intention de le laisser entrevoir mes doutes. Mais sa douceur et son attention m'avaient pris de court et les mots m'avaient échappé. Plus tard, il m'avait embrassé avec tellement de passion, je n'avais pas eu l'envie de résister, j'avais même eu envie de plus. Lorsqu'il n'avait pas dégagé sa main et qu'il avait semblé se poser un million de questions, je m'étais jeté à l'eau et il avait répondu avec une simplicité déroutante.
Mon regard fut attiré par un mûr couvert d'une tapisserie étrange. Je m'approchais en sentant le regard du brun se fixer soudainement sur moi.
- Oui, hmmm. Cette maison est un peu particulière...
- Tu as un lien de famille avec les Blacks ? Demandais-je étonné d'avoir sous les yeux un arbre généalogique complet.
La tapisserie paraissait très ancienne. Elle était décolorée et on aurait dit que les l'avaient grignotée par endroits. Mais le fil d'or avec lequel elle avait été brodée continuait de briller suffisamment pour qu'on puisse voir un arbre généalogique aux multiples ramifications qui remontait (autant que je pouvais en juger) au Moyen Âge. Tout en haut de la tapisserie était écrit en grosses lettres : La Noble et Tres ancienne maison des Black , toujours pur.
Je laissais mes doigts glisser sur le tissus alors qu'un étrange sentiment de malaise m'envahissait. Il y avait le nom de Bellatrix Lestrange, suivit d'une étrange brulure là où aurait dû figurer le nom de Andromeda. Avec une appréhension grandissante, je laissais mes doigts glisser sur le nom de ma mère : Narcissa Malfoy. Un fil d'or reliait son nom à celui de Lucius Malfoy. La tristesse m'envahis alors que ma mains caressait presque avec douceur les deux noms qui surplombaient le mien.
- Elle est un peu lugubre, dit la voix de Harry dans mon oreille, mais impossible à retirer.
Je tournais le regard vers lui pour constater que cette tapisserie ne lui inspirait rien de bon. Il la regardait comme si elle renfermait quelque chose de maléfique qui se nourrissait de son regard.
Puis son attention fut attirée par mes doigts sur mon nom.
Je vis son trouble.
Il n'avait donc pas fait le rapprochement ? Surtout en sachant qu'il avait cette tapisserie sous le nez quotidiennement ? Il n'avait sincèrement pas deviné qui j'étais ?
- Oh, tu es...
- Draco Malfoy, dis-je froidement en retirant ma main du tissu. Il vaut mieux que je prennes un hôtel.
- Je t'ai déjà dit que je ne laisserais pas mon petit-ami prendre un hôtel.
Mais sa voix avait perdu son assurance et sa chaleur habituelle. Je pouvais voir le malaise que sa réalisation provoquait.
Son "petit-ami" était un Malfoy, un mangemort, fils des plus fervents serviteurs du Seigneur des Ténèbres. Alors que lui était l'Élu, le héros des temps modernes du monde des sorciers. Il devait comprendre petit à petit que son attachement pour moi ne pourrait jamais surmonter ce passé, rien ne le pourrait jamais. J'avais été stupide de penser qu'il savait, j'aurais dû me douter qu'il ne remarquerait pas ce détail avant de se retrouver nez-à-nez avec.
Son regard passait de mon visage à mon avant-bras à la tapisserie comme si les liens se formaient dans son esprit et que les questions fusaient. Ses mains jouaient distraitement avec une sous-tasse, et je craignais qu'il ne la laisse tomber lorsqu'il aura oublié qu'il l'avait en main.
Je sentais la culpabilité m'envahir alors que je réalisais comment il devait se sentir. Il devait penser que je l'avais délibérément séduit en omettant de mentionner mon identité, mon passé et cette erreur insurmontable. Il devait penser que je l'avais berné pour profiter de lui.
Je réfléchis un instant à la meilleure façon de procéder à présent.
Je savais évidement que je ne pouvais pas m'excuser bêtement de mon passé, faire comme si c'était résolu et que cela ne comptait pas. Il comptait encore pour moi et me hantait presque quotidiennement, il faisait partie de moi. Même si Harry avait peut-être tiré un trait sur les ressentiments de la guerre, ce n'était pas mon cas. Je devais au moins lui expliquer, faire preuve d'honnêteté pour reconstruire la confiance qu'il venait de perdre, par simple malchance.
Alors que je relevais ma manche pour exposer mon avant-bras, ses yeux verts se posèrent immédiatement sur ma peau pâle. Je voyais la question lui bruler la langue : n'avais-je donc pas de marque des Ténèbres ?
Je tirais ensuite ma baguette sous son regard attentif, alors qu'il cessait de faire tourner la sous-tasse dans sa main.
- Revelio, dis-je en posant le bout de ma baguette sur ma peau.
La marque apparut. Aussi sombre et nette que le jour où je l'avais prise.
Le dégout me saisit en observant les lignes du tatouage qui marquait mon avant-bras. J'aurais aimé pouvoir lui expliquer ce que j'avais fait à l'époque, pourquoi je l'avais prise... mais ma gorge était tellement serrée d'écœurement que je n'y parvins pas. Je tendais simplement mon bras vers lui, incapable de détacher mon regard des marques qui zébraient ma peau. Mes poumons me brulaient sous l'effet de l'émotion alors que mes doigts commençaient à trembler.
Soudainement, ses doigts virent se poser sur mon bras, évitant de toucher les lignes du tatouage. Avec douceur, il me forçait à baisser le bras, et je relevais le regard vers lui. Il souriait simplement, avec une candeur déconcertante, comme si tout cela ne signifiait rien. Ses lèvres pulpeuses dévoilaient ses dents blanches en un sourire asymétrique qui ne m'avait jamais paru aussi parfait. J'enviais cette confiance en lui presque inébranlable.
Sa main vint se perdre sur ma joue avec une caresse et je fus tenté de repousser sa main, mal à l'aise de ce contact doux que je ne méritais pas. Mais avant que je ne puisse agir, ses lèvres s'étaient écrasées contre les miennes pour m'offrir un baiser dévastateur.
Sa chaleur et sa douceur me firent instantanément oublier la douleur du passé. Ses lèvres pressantes contre les miennes me forçaient à suivre son rythme, me forçaient à accepter son contact. Ses mains glissaient sur mes côtes vers mes épaules pour m'attirer contre lui alors que j'étais incapable de faire le moindre geste. Ce n'est que lorsque sa langue glissa sur mes lèvres que je le repoussais.
C'était trop et trop vite pour moi.
- J'ai fais des erreurs durant ma jeunnesse, dit la voix suave du brun alors qu'il reculait, me laissant mon espace. C'est étrangement rassurant de savoir que tu en as fait aussi. Ça (il désigna mon bras dénudé), c'est le passé. Et un jour, quand on sera pret, on en parleras. Maintenant, dis-moi ce qu'il te faut pour que tu sentes à l'aise ici ? Je sais que cette maison n'est pas très accueillante...
Sa voix était toujours marquée de malaise et d'une certaine tension, mais il se forçait à passer outre. Aussi, fis-je l'effort de faire de même. Je rabaissais ma manche avec la ferme intention de recouvrir la marque par magie à la prochaine occasion. Je reboutonnais soigneusement ma manche en évitant de croiser le regard emeraude du brun.
- Un bureau et une chambre me suffiront amplement.
- J'imagine que tu pourrais te servir de la chambre du premier étage comme bureau. Viens, je vais te montrer.
Je le suivis à nouveau dans le couloir lugubre de la maison et il m'invita à entrer dans une chambre visiblement inutilisée depuis des années. Deux lits jumeaux ainsi qu'une énorme garde-robe ornaient la pièce. J'étais particulièrement agacé que la seule pièce à ma disposition soit cet endroit miteux.
J'agitais ma baguette et avec un nuage de poussière un lit se métamorphosait en un bureau somptueux mais néanmoins poussiéreux. Je jetais un nouveau sortilège pour faire disparaitre la première couche de crasse dans la pièce.
- Ça fait des années que cette maison est impossible à nettoyer et ranger, me dit le brun alors que je continuais à secouer ma baguette pour arranger la pièce à mon gout. Parfois, j'ai l'impression que la maison elle-même ne veut pas de nous ici.
- Certaines anciennes maisons ont assimilé tellement d'énergie magique qu'elles peuvent manifester une volonté propre.
- Tu essaies de me dire que cette maison ne veut pas de nous ici ?
- Peut-être.
Je secouais une dernière fois ma baguette et je vis la pièce prendre des couleurs plus accueillantes. Le papier peint repris une couleur verte et argent plus vif et les trous se colmatèrent pour créer une image plus harmonieuse et plus propre de l'endroit. Le lit se fit avec des draps clairs et visiblement douillet. Je soupirais doucement, satisfait d'avoir un endroit acceptable dans lequel passer la nuit.
J'allais me diriger vers mon bureau lorsque Harry me tirait par la main, me forçant à quitter la pièce.
- Cette chambre n'a jamais été aussi belle ! Et ça alors qu'Hermione s'y est essayée à plusieurs reprises !
- Il suffisait d'un bon coup de magie, dis-je doucement en lui suivant dans le couloir et dans les escaliers.
- Non, ta magie.
- Où est-ce-que tu m'emmènes ? J'ai des affaires à régler.
Je pensais déjà aux lettres que j'allais devoir envoyer a l'agence qui s'occupait de mes bagages et de mes autres effets personnels. Je devrais également envoyer une note à la secrétaire générale de l'entreprise familiale pour l'informer de mon retour et de mon intention de reprendre les affaires.
- Dans ma chambre, pour y déposer tes affaires.
- Je n'ai pas de...
Je m'arrêtais en comprenant où il voulait en venir. Il voulait que je dorme avec lui ? Est-ce-qu'il réalisait que 10 minutes plus tôt il avait vu ma marque ? Est-ce-qu'il réalisait que c'était une intimité que je n'étais pas certain de pouvoir tolérer ? Est-ce-qu'il réalisait ce que cela impliquait ? Il voulait partager son espace aussi naturellement avec moi, aussi spontanément. Je sentais mon cœur s'emballer un instant avant que son regard m'interrogea silencieusement.
Sans un mot, je lui fis signe que je le suivais et il reprit sa route alors que je sentais le malaise me serrer la poitrine. Depuis longtemps, je n'avais plus accepté d'intimité avec quelqu'un. Harry avait réussi à me faire apprécier ses gestes doux, son abandon et sa spontanéité m'avaient énormément aidé, mais dormir avec lui c'était une autre sorte d'intimité.
Je doutais. Cela signifiait me déshabiller sous son regard, cela signifiait me coucher à côté de son corps, cela signifiait le laisser me voir endormi, le laisser voir mes dernières faiblesses, abaisser mes dernières barrières et chasser mes derniers doutes. Je n'en étais pas capable, pas maintenant.
- C'est un peu le désordre mais je vais ranger pour que tu aies de la place !
Nous avions atteint le dernier étage. Je jetais un coup d'œil à la chambre qu'il me présentait, légèrement embarrassé en passant sa main dans ses cheveux. La pièce était spacieuse avec un grand lit au cadre de bois sculpté, une fenêtre couverte de rideaux en velours, un lustre antique et une grande armoire de bois. Les mûrs étaient dans un état misérable avec des parties de papier-peint entièrement manquante.
Ce qui me dérangea le plus c'était le désordre. Des vêtements, des papiers et des objets de toute nature, jonchaient le sol, le lit ou pendaient misérablement de l'armoire. Si je ne connaissais pas le sorcier chaotique qui habitait cette chambre, j'aurais pus jurer qu'un adolescent colérique vivait ici.
Mes mains devinrent moites lorsque je notais à quel point le lit, pourtant prévu pour deux personnes, semblait étroit et petit. Pareil pour le reste de la pièce, j'avais l'impression qu'une personne avait à peine assez d'espace pour y évoluer librement. Je tentais de m'imaginer retirer ma chemise avec le brun assez proche de moi pour pouvoir voir chaque sillon sur ma peau, chaque marque de malheur que le temps y avait laissé. Je tentais de m'imaginer me glisser sous les draps défait du lit à côté du brun, essayant de faire abstraction du désordre ambiant pour m'endormir à côté d'une personne qui m'était presque inconnue.
Non, je n'y arrivais pas.
- Draco , ça ne va pas ?
- Non !
Je posais ma main sur son torse en le voyant s'approcher encore de moi, provoquant une impression d'étouffement insupportable. J'inspirais profondément, fermant les yeux, en tentant de ne pas saisir ma baguette pour ranger la pièce d'un coup de magie désespéré. Pas ma chambre, pas mon problème.
- Je vais ranger, m'assura la voix suave du brun.
- Ça ne suffira pas, je vais redescendre à l'étage. J'ai des affaires à régler. Merci de m'héberger.
Je le repoussais rudement avant de redescendre au premier étage, la tête haute et la démarche calme. Je refoulais la sensation d'étouffement que j'avais ressenti quelques instants plus tôt et fermais bruyamment la porte dans mon dos.
Je m'assis silencieusement au bureau en faisant apparaitre d'un coup de baguette du matériel de bureau comme des parchemins, des encres et des plumes. Je me mis au travail en retrouvant un calme apaisant dû à ce travail monotone.
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Petites informations :
- Les passages en italiques sont tiré du tome 5 de la saga Harry Potter de J.K.Rowling.
- J'ai été chercher les informations sur la maison sur le site Wiki Harry Potter pour avoir une idée de l'agencement et du look originel des pièces.
J'espère que vous avez aimé ce petit chapitre. J'ai vraiment eu du mal à l'écrire mais je suis contente du résultat final et j'espère qu'il tient la route !
Laissez-moi votre avis j'adore savoir ce que vous pensez !
Bises sur vos fesses
-Lily
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