Chapitre 4

Il n'y avait pas une seule cloison à l'intérieur de la maison. C'était une seule pièce, immense. Une maison pour une unique personne. Le salon, la cuisine, la chambre et la salle de bain se reconnaissaient aux équipements, qui ne pouvaient provenir que de Poudlard. Des mètres et des mètres de meubles noirs, tellement sculptés et ornementés que ça en devenait oppressant. La seule chose qui empêchait Harry de faire une crise de claustrophobie était le plafond d'une dizaine de mètres de hauteur. Et excepté pour les quelques espaces concédés à la baignoire, aux toilettes et à la cuisine, chaque centimètre de mur était couvert de bibliothèques pleines à craquer de livres.

Au milieu de tout ça - comme une tarentule sur un gâteau de mariage - trônait une vieille télévision, accompagnée de son lecteur DVD.

"Fermez votre bouche, Monsieur Potter. Les règles de base." Il pointa la baignoire contre le mur dans un coin. "Je me douche deux fois par jour. Le matin et le soir, quand je rentre. J'imagine que vous voudrez faire de même. C'est ma maison, je me douche en premier."

Harry acquiesça. Pas de problème.

"Je ne cuisine pas. Je mange des yaourts, de la salade, des fruits, des noix, des amandes... La dernière chose que j'ai envie de faire après une journée passée derrière un grill est de me retrouver derrière un autre grill. Je suggère que quels que soient vos besoins diététiques, ils s'accordent sur les miens."

Harry hocha de nouveau la tête, ricanant intérieurement de l'utilisation du terme 'accorder'. Comme si 'ils s'accordent' n'était pas la manière roguienne de dire 'Ntm c'est du yaourt ou rien.'

"La machine à laver est ici." dit le cuistot en pointant en direction de la cuisine, près de la porte arrière. "A côté vous trouverez le sèche-linge. Utilisez-le dans cette chaleur et je vous étripe. Vous étendrez vos habits dehors. Il y a un fil tendu, vous pourrez..."

"Pourquoi est-ce que je ne peux pas utiliser le sèche-linge ?" demanda Harry. La question semblait innocente.

"Parce que, espèce d'imbécile fini, les espagnols qui ont construit cette maison-école ont oublié de mettre la climatisation. Allumez cette satanée machine et l'air de cette pièce montera à 150 degrés en moins de cinq minutes. Voilà pourquoi. Le canapé est ici, vous dormirez..."

"Pourquoi y a-t-il une gazinière si vous ne cuisinez pas ?" Le meuble avec ses six plaques de cuisson était plutôt impressionnant.

"Je fais bouillir de l'eau pour le thé et je brasse occasionnellement des potions – et, avant que vous ne repreniez espoir, je précise que ce ne sont que des potions médicinales à partir de plantes. Notre routine se construira ainsi. Je vais me réveiller à trois heures trente et prendre ma douche. Vous vous lèverez à trois heures trente-quatre pour prendre votre douche. Nous irons..."

"Vous prenez des douches de quatre minutes ?"

"Trois minutes trente. Vous pourrez avoir cinq minutes, pas plus. On prendra une tasse de thé rapidement puis nous irons au magasin. Vous prendrez le petit-déjeuner au diner. Chaque jour sera identique au précédent jusqu'à ce que McGonagall daigne répondre à mon message. Une fois le restaurant fermé, on revient ici, douche, un dîner léger puis nous lirons ou regarderons un film. Le diner est ouvert du mercredi au dimanche. Les dimanches après-midi après le boulot sont sacrés. Je regarde le football. J'aime bien voir les gens se battre entre eux. C'est un pauvre substitut au Quidditch, mais je dois admettre que les états-uniens ont beaucoup de talent pour mettre en scène la violence. Le lundi est réservé au rangement, au ménage et aux courses. Dans cet ordre. Vous ferez votre part. Le mardi est mon jour de repos. Je ne veux pas vous entendre." Rogue fit une pause. "Pas vous entendre." répéta-t-il. Il montra la pièce d'un large geste. "Il n'y a absolument aucune intimité. Vous avez vécu dans un dortoir aussi bien que moi. On se débrouillera. Ça ne durera pas éternellement."

Harry acquiesça. Il pouvait tout accepter si c'était seulement pour quelques jours.

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Connaissant leur ancienne hostilité, Harry était surpris que les choses se passent aussi bien. Ça avait peut-être à voir avec le fait que Harry n'avait jamais travaillé aussi dur dans sa vie. A la fin de la journée, rien que parler lui demandait un effort trop important pour l'énergie qu'il lui restait. Il se couchait chaque soir à vingt heures, et bien que le canapé de Rogue soit inconfortable, il s'endormait à peine sa tête avait touché l'oreiller.

Et il y avait le facteur Rogue.

Pas le facteur Rogue habituel, qu'il avait accepté comme étant 'Je suis un énorme connard 24/7' ces quatorze dernières années. Aujourd'hui c'était plus 'Je suis toujours un connard, mais peut-être pas un énorme connard 24/7.'

La première soirée que passa Harry dans cette ancienne école, il débarrassa la table et commença à faire la vaisselle. Soudainement, il réalisa que la lettre de McGonagall pouvait révéler deux trois informations sur lui que Rogue pourrait être désireux de connaître. Puisqu'ils vivaient avec autant de promiscuité.

Putain de merde.

"Euuh, Rogue ?"

L'ancien Mangemort ne baissa pas le journal qu'il tenait devant son visage. "Je pense qu'il vaudrait mieux que vous m'appeliez Mr Smith."

"D'accord. Smith." Il fit exprès de laisser de côté le mister pour appuyer son propos. "Juste pour que vous sachiez, histoire que ce ne soit pas comme... euh... une surprise."

"Oui ?"

Le journal ne bougea pas d'un centimètre.

Putain.

"Alors eum..."

Rogue n'avait toujours pas interrompu sa lecture. "Monsieur Potter. Articulez. Je sais que faire des phrases complètes est souvent au-dessus de vos capacités, mais j'apprécierais au moins un sujet et un verbe."

Putainputainputain.

"Je suis gay. Euh, je me disais qu'il valait peut-être mieux que vous soyez, euh, au courant... Puisqu'on partage... ça." Harry regarda partout sauf en direction de Rogue.

"Et cette révélation vous donne le droit de défoncer mon torchon ?"

Il soupira, daignant finalement baisser son fichu journal. Il ne regardait pas Harry avec un air de dégoût sur le visage, mais il fixait ses mains. Harry baissa le regard et réalisa qu'il avait déchiré le torchon en deux.

"Oh merde désolé. Je vous en rachèterai un. Désolé."

"J'espère bien." fût son seul commentaire, et il retourna à son journal.

"Vous êtes ok avec ça ?"

Rogue soupira, secoua son journal pour en aligner les plis, le plia soigneusement et le plaça sur la table basse. Il avait l'air neuf, comme s'il n'avait jamais été ouvert.

"Monsieur Potter, prévoyez-vous de m'agresser sexuellement dans mon sommeil ?"

L'estomac du jeune homme tomba - métaphoriquement - sur le sol.

"Quoi ? Non, non, non ! Bien sûr que non !"

"Epargnez-moi vos cris hystériques. Je crois comprendre que c'est la vraie raison derrière votre rupture avec Miss Weasley et non la perte de votre magie ? Ou était-ce les deux ?"

"Un peu des deux, en quelque sorte." admit Harry. "Mais c'est le fait de préférer les hommes qui a fait pencher la balance un peu plus fort."

"C'est une révélation récente ?"

"Hum, non pas vraiment. Après la guerre il y eut beaucoup de fêtes..."

"Ça veut dire que vous n'avez pas été sobre pendant des mois."

Harry haussa les épaules, parce qu'effectivement c'était plutôt ça. Une longue cuite de deux ans, où ils buvaient parce qu'ils étaient soulagés que tout ça soit enfin fini, où ils buvaient pour oublier tout ce qu'ils avaient dû faire, mais surtout où ils buvaient pour oublier ceux qui n'avaient pas survécu.

Un soir, alors que Ginny s'absentait pour rendre visite à sa mère, Harry et Ron étaient allés faire une tournée des bars, dans l'objectif bien précis de s'arracher la gueule. Jusque-là rien d'inhabituel, ils faisaient ça presque chaque soir. Ils burent au point de vomir leurs tripes. Encore une fois, la routine. En revanche, ce qui sortit de la trame habituelle fût le baiser, rapidement suivi de jeux de mains et de bouches mutuels. Le sauveur du monde sorcier se réveilla le lendemain matin, un bras passé autour du torse de son meilleur ami, le mot 'formidable' à la bouche. Malheureusement, Ron ne trouva pas ça aussi formidable.

« Putaine de merde. Plus jamais. On oublie tout. On en reparle plus jamais. Jamais ! Tu as compris ? » Et comme pour ponctuer sa déclaration, Ron se leva d'un bond et courut jusqu'aux toilettes pour vomir.

Harry n'était pas sûr que ce soit dû aux restes d'alcool dans son sang ou aux réminiscences de cette nuit de sexe. Il eut sa réponse le lendemain quand Ron décala chez George pour y passer ses nuits. Et ensuite, au cas où Harry n'aurait toujours pas compris, il demanda Hermione en fiançailles la semaine suivante et lui proposa d'emménager ensemble.

Pourtant le jeune sorcier n'arrivait pas à oublier la sensation délicieuse d'avoir la bite de Ron entre ses mains, combien ça lui semblait juste et évident de caresser les fesses d'un homme. Du coup, à la soirée suivante, il s'éclipsa dans une buanderie avec Zacharias Smith pour quelques bonnes pipes dans les règles de l'art. Il avait à peine bu, donc il ne pouvait pas remettre le plaisir que lui procurait la bouche de Zach sur le compte de l'alcool. Ce qui l'avait poussé à boire jusqu'à l'ivresse quand ils refermèrent leurs braguettes et retournèrent dans la grande salle.

Quand il ouvrit les yeux après une courte nuit de sommeil, il arriva à la conclusion qu'il avait apprécié les fellations de Ginny et qu'il l'avait aimée elle, mais ça n'avait absolument rien à voir avec l'orgasme que lui a procuré Zacharias. Il détestait cet enfoiré.

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« Vous êtes sûr ? »

« Ouais. »

« Entendu. Le courrier et le journal sont livrés au restaurant. Je lis deux journaux par jour. » Rogue pointa une pile parfaitement alignée sur la table basse : « Le New York Times et une feuille de chou locale. Je vous propose de faire de même. J'ai eu pas mal d'accrochages quand je me suis installé ici parce que je n'avais aucune idée de la culture et de la politique étasunienne. C'est un exercice ennuyant, certes, mais nécessaire. »

Mon œil, t'as eu 'pas mal d'accrochages' parce que t'es un connard insupportable et que tu peux pas t'empêcher de dire à chaque personne qui croise ta route à quel point ils sont nuls et incompétents.

« D'accord. Mais vous êtes sûr que... »

« Monsieur Potter, cessez de tergiverser. Vous êtes homosexuel. J'ai entendu. J'imagine que vous me l'avez dit par peur que McGonagall ne le révèle dans sa lettre, et non pas parce que vous éprouvez une soudaine envie de vous confier. J'ai raison ? »

« A peu de choses près. »

« C'est bien ce qu'il me semblait. Maintenant, je suis épuisé, j'aimerais bien aller dormir. D'autres révélations qui vont changer la face du monde ? »

« Non, non c'est à peu près tout. Mais euh... est-ce que je dois faire attention à ce que je dis... eum... je suis un peu inquiet avec le staff. Ils, euh... ont l'air... ils étaient... Ils ont vraiment tous fait de la prison ? » bégaya Harry. Il y avait pensé toute la journée, surtout avec tous ces couteaux autour et le peu de sorts qu'il lui restait. Bizarrement, il ne pensait pas que Mr Morales serait clément si Harry le stupefixiait.

"Non. Même si je dois admettre que Mr Morales aurait été incarcéré s'il s'était fait prendre. Les trois autres n'ont pas vraiment commis de crimes majeurs selon mon point de vue. Du moins si l'on se base sur leur casier judiciaire."

Harry réfléchit quelques secondes, puis il fit peser dans la balance le fait que Rogue avait été un Mangemort. Et pas un de seconde zone.

"Définissez 'crimes majeurs'."

"Tuer pour de l'argent. Torturer pour de l'argent."

"Mr Morales ?"

"Je ne saurais pas dire."

"Super, merci, c'est rassurant. Maintenant je vais passer une bonne nuit de sommeil."

Rogue agita la main en l'air, comme si tout ça n'étaient que des broutilles. "Une grande partie du monde magique pense que je suis un criminel."

Véridique. Les juges n'étaient toujours pas fixés sur ce point lorsque Harry avait fui.

"Et vous les avez engagés pour..."

"Mr Vasquez, Mr Perez et Mr Gutierrez sont des bosseurs. Je les paye le double du salaire habituel. Je les traite avec respect." Rogue marqua une pause. "À ma façon. Je leur redistribue les bénéfices. Je m'attends à ce qu'ils se tuent au travail en échange. Ils ne me déçoivent pas. Leurs activités passées n'ont aucune importance pour moi." Par exemple travailler dans la cantine de la prison. "Mr Morales... Je l'ai engagé parce que j'avais besoin d'une masse de muscles. Je me suis finalement rendu compte que c'était un excellent serveur, associé avec cet amour de la bagarre c'était la combinaison parfaite. Il m'a raconté un truc comme quoi il avait dû quitter Los Angeles parce que ça devenait un peu trop chaud. Je vous suggère donc de ne pas mentionner Los Angeles devant lui. J'imagine que ça n'avait rien à voir avec le climat, parce que je doute qu'en été l'été il fasse 40 degrés à l'ombre comme c'est le cas ici. Vous devrez les traiter avec respect. Je vais maintenant aller me coucher. Je ne veux plus entendre aucun mot. Les nouvelles révélations et questions attendront demain."

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Merci pour vos premiers retours sur la trad <33

On va ralentir deux secondes le rythme de publication c'est un peu chaud niveau taf en ce moment pour moi :(

et merci à Diane qui a assuré la bêta de ces premiers chapitres !

Bisous sur vos deux joues et bon courage pour cette fin d'année 🫶

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