La Guirlande | 8 décembre

Aubin s'empressa de s'extirper du confortable canapé et entreprit de lisser ses branches d'un air coupable. Il se prosterna ensuite plusieurs fois devant cette dame divine, qu'il n'avait jamais eu l'occasion de voir en chair et en os. Seule la Neigivision diffusait les annonces officielles du Royaume des Cieux et par conséquent les discours de la Reine en personne, mais cela était assez rare. Et puis, la dernière fois qu'il avait dû livrer un colis à l'attention de Sa Majesté, un des gardes avait intercepté le paquet, empêchant le flocon d'entrer dans la demeure royale.

Il se tint alors aussi droit que possible pour faire face à la Reine. Celle-ci se mit à rire avant de tapoter gentiment la tête d'Aubin.

— Pas besoin d'en faire autant, lui sourit-elle alors que le petit flocon se consumait de l'intérieur.

— Je me dois de vous couper dans vos salutations, avança Etienne d'un air embarrassé. Nous sommes venus pour une affaire des plus urgentes. Le Général Gelé a pris Odélia en otage afin de te soutirer ton trône !

La Reine des Cieux fronça les sourcils, plissant son nez et assombrissant ses yeux.

— C'était donc ça, cette drôle de sensation... s'enquit-elle, le visage inquiet. Je me doutais qu'il y avait un danger qui rôdait non loin de ma famille.

Sa Majesté se dirigea vers un fauteuil cotonneux et s'y installa le temps de mettre les choses à plat dans son esprit. Sa robe bleutée, qui reflétait généralement le temps et la couleur du ciel selon les saisons, tirait aujourd'hui légèrement sur un gris funeste qui n'augurait rien de bon. Pourtant, rien de cette situation n'abîmait sa beauté : ses cheveux perlés tombaient longuement en cascade tout le long de son dos, se confondant avec une cape floconneuse tissée de fils d'argent. Sur sa tête se dressait fièrement une fine couronne ornée de pierres précieuses – les mêmes que celles qui avaient l'habitude d'orner la toge d'Aubin – et une nuée de minuscules paillettes de givre s'agitaient et sautillaient joyeusement autour d'elle.

— Nous n'allons clairement pas nous laisser faire, affirma-t-elle finalement après un moment de réflexion. Si le Général veut la guerre, alors il l'aura ! Personne n'a le droit de s'en prendre à ma précieuse création, ni à aucun autre de mes chers sujets !

— Bien dit, Votre Majesté ! s'exclama soudainement Aubin, avant de cacher sa timidité sous ses petites mains cristallisées.

La Reine des Cieux regarda le petit flocon avec tendresse. Elle avait toujours su garder son sang-froid dans les situations délicates, et Odélia comme son peuple avaient besoin d'elle. Il était donc hors de question de décevoir qui que ce soit ! La femme se drapa dans sa cape, réfléchissant à un moyen de faire tomber le Général à genoux.

— Rassure toi, petit flocon, je ne me laisserai jamais destituer par une vilaine sculpture de glace, et je ne laisserai jamais mon Royaume aux mains d'un tyran pareil ! affirma-t-elle d'un air déterminé.

— Qu'est-ce qu'on peut faire ? s'enquit Etienne, visiblement prêt à en découdre avec n'importe quel ennemi qui passerait par là.

— Face à une armée, il n'y a qu'une seule chose qui peut rivaliser, répondit-elle simplement.

— Une autre armée ? demanda Aubin, un peu innocemment.

La Reine planta son regard bleu glacé dans les iris argentés du jeune flocon.

— Dans le mille, mon petit. J'espère que toi et tes camarades êtes prêts, parce que je vais avoir besoin de tous les flocons possibles pour créer une armée digne de ce nom !

Un éclair de défi passa dans les yeux d'Aubin à mesure qu'il prenait conscience des paroles de Sa Majesté. Il fallait défendre son royaume, sa Reine et sa princesse face à un soldat au cœur de glace ? Son cœur frétilla à cette pensée héroïque. Aucun doute, il se sentait définitivement prêt à plonger dans la bataille !

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