MONSIEUR

Body, SYML.

•°• ✾ •°•

— Qu'as-tu dit ? Violé ?

— O-oui.

— C'est que... c'est que je n'avais jamais vraiment pensé avant que les hommes pouvaient...

L'homme retira sa main droite de dessous celle de sa sœur et la passa dans ses cheveux, machinalement, comme un moyen de ne pas céder à sa détresse.

— Eh bien, les hommes aussi peuvent l'être.

— Mais comment est-ce arrivé ? Je veux dire, qui a fait une telle chose ?

La jeune femme clignait des yeux bien plus que d'ordinaire, comme si ses globes s'altéraient de stupéfaction. La nouvelle était surprenante, mais elle savait qu'elle l'était d'autant plus qu'un homme était la victime.

— Je ne sais pas si je peux t'en parler avec précision. Tout ce que je peux te dire c'est que cela remonte à plusieurs mois et que c'était une femme.

— Plusieurs mois ? Mais je... je lui ai parlé pas plus tard qu'hier, et depuis tout ce temps même, sans qu'il ne me semble particulièrement affecté...

— Croyais-tu qu'il se confierait aisément ?

— Non, enfin, je ne sais pas. C'est juste que je n'avais rien vu...

— Il faut le comprendre. C'est que l'on n'admet pas facilement qu'un homme soit violé. Il y en aura toujours pour le décrédibiliser en le traitant de faible, sans virilité, en le regardant d'un mauvais oeil, comme si c'était à lui de s'en vouloir...

L'homme laissa échapper un sanglot, dissimulé derrière un soupir. Il peinait à parler, à retenir ses larmes. Il ne voulait pas pleurer, il ne le devait pas. Devant sa sœur, il lui fallait tenir.

— Le fait est que... que nous sommes vus comme des machines au lit, comme si nous en avions toujours envie, constamment en manque. Alors, à partir de là, comment un homme pourrait-il être violé, puisqu'il ne cesse de souhaiter faire l'amour ? Il faudrait que ces... ces... conneries soient régulées, que soit admis le fait que les hommes restent humains, qu'ils n'ont pas toujours envie, comme les femmes, comme les personnes non-binaires.

Le jeune homme passa une main sur son front brillant de sueur. Son visage était échauffé, rougi sous la colère qui l'animait, sous la fatigue et la peine.

— Merde !

Le jeune adulte rassembla ses mains sur son visage, au creux desquelles il enfouit son nez et sa bouche. Ses paupières étaient closes, la lumière de la pièce était bien trop forte pour ses iris et pour son état mental.

À sa gauche, la jeune femme, de même bouleversée, sentait que son frère l'était bien plus encore, entraîné dans un ouragan d'éclats d'émotions.

— Je suis désolée. Je n'avais jamais songé à tout cela auparavant... Je pense aux femmes qui le sont, mais les hommes... J-je ne sais pas... Peu en parlent, à vrai dire. C'est comme si... c'était un tabou, c'est affligeant.

— C'est un tabou justement. Je suis juste... tellement énervé et épuisé par ce qui se passe, par les gens, par leurs opinions qui empêchent les uns et les autres d'obtenir justice à cause de la peur et de la honte. Pourquoi ne sont-elles pas dans l'autre camp ? Pourquoi faut-il subir la double peine quand nous sommes violés ? D'autant plus lorsque hommes ?

— Les gens, les gens ne pensent pas assez, c'est ainsi. Je ne sais pas si cela pourra un jour être résolu.

— Cela peut s'améliorer, pourtant. Il le faut, il le faut vraiment.

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