Partie 7
Bonjour bonsoir à tous~
J'espère que vous allez bien :3 (ce ne sera peut-être plus le cas dans peu de temps)
J'ai une petite annonce à faire : la suite ne sortira non pas la semaine prochaine mais dans deux semaines, c'est à dire le dimanche 3 novembre (mon dieu je serai rentrée en France). La raison : cette semaine, et même depuis un certain temps, j'ai travaillé sur un OS School life, qui sera posté mercredi sur la FluffSoukokuAgency si tout se passe bien~ étant donné qu'il est trois fois plus long que mes chapitres habituels, dire que mon temps libre y est passé serait un euphémisme- je n'ai donc pas eu le temps de m'avancer sur la suite, malheureusement.
Bref, je vous invite à suivre la week school life que l'on organise sur la FSA, et puis ça vous fera de la lecture :3
Sur ce, bonne lecture de cette partie~
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Les jours s'écoulèrent, puis les semaines, puis les mois. La vie était vraiment agréable ici, même si elle était probablement un peu plus compliquée que dans le monde du dessous.
Chuuya avait finalement fini par comprendre comment fonctionnait la société humaine, enfin tout du moins pour cette partie-ci de la région et par rapport aux conditions de son hôte.
Ce dernier avait en réalité hérité du titre de garde-côte, et c'était pour cette raison qu'il s'absentait de temps à autre lorsqu'un problème survenait au large ou même sur la plage. C'était ce qui lui permettait d'avoir un peu de revenu, et en même temps beaucoup des pêcheurs des environs le connaissaient et partageaient régulièrement leur butin avec lui.
Il cultivait également un jardin, de taille assez imposante tout de même pour une seule personne, et, comme sous la mer, le petit village à proximité fonctionnait au troc, ainsi qu'avec une monnaie qui était courante dans tout le pays. Ces deux méthodes de paiement étaient toutes deux plutôt importantes et permettaient de faire prospérer la population. La récolte qu'Oda parvenait à avoir était souvent trop élevée, et il l'échangeait donc alors contre des vêtements ou d'autres rations moins périssables.
De plus Dazai avait hérité du bateau de pêche de son père, mais, ne l'utilisant pas, il le louait. Enfin, c'était également Oda qui gérait tout cela, car le brun s'en fichait un peu et était bien incapable de gérer ce genre de chose seul.
Le rouquin avait aussi fini par découvrir le mode de communication, à savoir la plupart du temps des oiseaux d'un peu toutes espèces, tant qu'ils pouvaient supporter le poids des lettres ou colis qu'on leur accrochait aux pattes.
Il l'avait découvert en surprenant un matin de bonne heure l'auburn envoyer une lettre à ses parents. Il avait certes déjà vu le brun écrire quelques fois des lettres mais il semblait se cacher pour les envoyer. Oda avait alors souri et lui avait expliqué comment l'on pouvait dépêcher un oiseau messager -grâce à un sifflet souvent- car il y en avait plusieurs dans chaque ville.
Cela avait étonné Chuuya qu'un système plutôt complexe comme celui-ci puisse exister, puis il s'était rappelé que son village à lui était relativement petit, et que donc il était inutile d'envoyer une lettre lorsque l'on pouvait se rendre totalement à l'opposé en à peine une dizaine de minutes.
Il arrivait désormais régulièrement qu'Oda ait des rendez-vous relativement tard le soir, bien qu'il refuse d'en expliquer les tenants et les aboutissants, et que son expression à ces moments avait tendance à être gênante, surtout pour le rouquin, qui rougissait régulièrement.
Ainsi, un quotidien plutôt paisible s'était installé dans la maisonnette, les deux énergumènes continuant de temps à autre de s'entraîner, mais c'était le plus souvent pour se défouler plus qu'autre chose, car ils étaient désormais de forces égales.
Lorsqu'ils ne s'occupaient pas de cette manière, ils tâchaient d'aider leur hôte. Ils jouaient régulièrement les gardes côtes, mais autrement ils lui compliquaient plus la tâche qu'autre chose et se faisaient très souvent mettre à la porte. Enfin, Chuuya essayait réellement d'apporter son aide, mais pas son compagnon. Ce qui faisait que tout tournait mal, d'une manière ou d'une autre.
Comme par exemple le jour où absolument toute la maisonnette s'était retrouvée inondée, juste parce qu'il y avait eu une fuite d'eau et que le rouquin avait insisté pour s'en charger. Sans compter, évidemment, que Dazai viendrait lui mettre des bâtons dans les roues.
Ou encore la fois où cette même petite maisonnette avait failli exploser car ils s'étaient essayés à la cuisine. Depuis, Oda se chargeait en seul et unique maître des fourneaux, même si de temps en temps il acceptait Chuuya, qui montrait une réelle envie d'être autonome. Mais uniquement lorsque lui-même était présent pour superviser et le brun, le plus loin possible.
Enfin, aujourd'hui était un jour un peu spécial, ce qui faisait que c'était plutôt l'inverse. Après que Dazai soit allé chercher tous les éléments nécessaires à la réalisation de leur projet -plus des limaces que son ami l'avait immédiatement exhorté à jeter- ils s'étaient arrangés pour éloigner le rouquin.
Car ils étaient le 29 avril aujourd'hui, c'est-à-dire le jour de l'anniversaire du plus petit. Ce dernier leur avait révélé cette information l'année précédente suite aux invectives du brun, bien qu'à ce moment il avait insisté pour qu'on ne le lui fête pas. Mais il semblait lui-même l'avoir oublié, ce qui tombait plutôt bien.
Oda lui avait fait croire qu'il y avait une urgence sur la côte, ce qui était faux. D'ailleurs il avait un peu honte d'avoir menti, mais le lieu qu'il lui avait indiqué était à facilement deux heures à pied d'ici. Et comme il arrivait régulièrement que l'auburn confie ce genre de tâches aux deux énergumènes qui lui servaient de colocataires, il n'avait pas protesté et s'était immédiatement mis en route.
Ils avaient décidé d'inviter à peu près tous les gens que le rouquin avait rencontrés jusque-là, ce qui n'était pas énorme en soit. Et lorsqu'il reviendrait -probablement énervé d'être allé aussi loin pour rien- alors ils devraient tous être arrivés.
Dazai s'approcha de la plaque de gaz allumée, un peu trop près d'ailleurs. Son ami le retint par une de ses bandelettes.
-Ohé, qu'est-ce que tu fais ? Tu sais que le feu mettra tellement de temps à se propager que tu souffriras le martyre, et que tu n'es même pas sûr d'y passer ?
-Oh... dis l'autre, comme réellement surpris. C'est dommage ! sourit-il ensuite en se retournant vers son ami.
Oda vit immédiatement que quelque chose n'allait pas. Néanmoins il savait que cela ne servait à rien de demander, aussi ne posa-t-il pas la question -son ami parlerait quand il en aurait envie, et puis c'était un jour de fête.
-Toujours est-il que tu ne touches pas à la cuisine, Dazai, soupira l'auburn en voyant son compagnon soupeser les paquets de sucre et de farine qu'il avait ramené du village.
-Et pourquoi donc ? bouda le brun. J'ai bien le droit de lui faire une surprise aussi, nooon ?
-Rappelle-moi les seules choses que tu as réussi à cuisiner avec succès ?
L'autre mis la main sous son menton, comme en proie à une réflexion intense. Tout ce qu'il avait tenté de faire en cuisine s'était en effet transformé soit en substance carbonisée immonde, soit en pâte visqueuse dégageant une odeur plus qu'inquiétante.
-Et rappelle-moi la majorité des choses que tu as tenté de cuisiner ? ajouta encore Oda, histoire d'être sûr que l'autre ne tenterait définitivement rien.
Son interlocuteur soupira. En effet, la majorité du temps, il avait tenté des recettes de poisons. Certes. Mais il n'avait que très rarement réussi, on n'imagine pas comment cela peut être compliqué d'en créer un.
Il s'avoua vaincu et alla s'installer à la petite table du salon, fixant son regard joueur sur le maître de maison, tandis que ce dernier lui lançait un regard suspicieux, enfilait un tablier et commençait la préparation du gâteau d'anniversaire.
De toutes manières les pensées du brun étaient occupées par toute autre affaire. Et justement, il aurait préféré trouver quelque chose pour se défaire de ses idées noires, car même s'il en avait la nécessité, il ne voulait absolument pas y réfléchir. Surtout pas aujourd'hui.
~
Chuuya marchait sur la côte d'un pas plutôt rapide. Apparemment il y avait un problème avec des animaux marins aux alentours d'une baie qui se situait relativement loin, car presque à la limite de ce sur quoi Oda devait veiller. Et il n'avait pas envie de s'y attarder plus que de raison, bien que ce genre de travail lui convenait plutôt.
Il adorait toujours autant le bruit des vagues s'écrasant contre la digue alors que la marée était haute, tandis que les oiseaux marins survolaient l'étendue bleue limpide en émettant des sons si particuliers. Et puis il y avait l'odeur salée aussi. Tout cela lui rappelait son chez-soi. Enfin, son ancien chez-soi maintenant.
Il évoquait de temps en temps son passé avec ses deux amis désormais, plus pour se rappeler qu'autre chose. Et puis, c'était majoritairement des bons souvenirs dont il parlait. Cela l'aidait à se détacher petit à petit de celui qu'il était avant. De dédramatiser de sa situation en laissant derrière lui ce qu'il avait vécu, comme de simples vestiges.
C'était quelque chose qui fonctionnait à peu près, car il se sentait plus à l'aise, mais cela prendrait probablement encore pas mal de temps. Et il ne savait pas encore s'il s'agissait d'une bonne ou d'une mauvaise chose.
Et puis au moins cette tâche lui permettait de souffler un peu loin de la présence d'un certain suicidaire plus que casse-pieds. Il l'aimait, certes, mais il pouvait vraiment être envahissant parfois. C'était aussi l'une des raisons pour lesquelles il évoquait régulièrement son passé devant lui. Il s'agissait des rares moments où il pouvait avoir la paix, même s'il ne savait pas pourquoi. L'autre semblait l'écouter d'une oreille attentive, ce qui était très rare.
Chuuya avait d'ailleurs totalement oublié la date d'aujourd'hui, pourtant il savait qu'on lui cachait quelque chose. Il n'était pas dupe et Oda ne savait absolument pas mentir, aussi voulait-il rentrer vite pour en avoir le cœur net.
Il arriva enfin, après environ une heure et demie de marche, à la baie indiquée. Et, évidemment, il n'y trouva strictement rien d'autre que des rochers, de l'eau et quelques poissons vaquant à leurs occupations. Il soupira, il s'y attendait mais cela n'en restait pas moins vexant. Et énervant, surtout pour quelqu'un d'impulsif comme lui.
Il repartit donc d'un pas encore plus rapide qu'à l'aller, bien décidé à s'expliquer avec ceux qui l'avaient éconduit.
Lorsqu'il rentra enfin, énervé d'avoir été roulé dans la farine, surtout par Oda, et ayant eu largement le temps de ruminer sur le chemin, il trouva la maisonnette calme, comme habituellement... Lorsque Dazai ne s'y trouvait pas.
Était-il encore parti faire une de ses tentatives de suicide, ou bien avait-il enfin décidé de s'assagir ? Non, quand le rouquin le vit arriver par le jardin, un grand paquet lui encombrant les bras, il se dit que le plus probable restait qu'il ait attendu qu'il revienne pour lui faire une farce.
Il le fusilla du regard et n'aperçut pas l'étincelle étrange qui brillait dans le regard de son amant, bien vite remplacée par un sourire enfantin, prouvant bel et bien qu'il manigançait quelque chose de louche.
-Tiens, ma limace préférée ! Tu ne voudrais pas attendre encore un peu ici ? Demanda-t-il innocemment.
-Et puis quoi encore crétin doublé d'un imbécile maniaque du suicide ?! Pour que je te laisse encore foutre n'importe quoi et me faire une crasse ?!
-Oui~
Le rouquin fut d'abord décontenancé, il ne s'attendait pas à une réponse sincère, c'était rare. Mais le but était évidemment de le faire encore plus sortir de ses gonds.
-Rah, tu m'agaces, maquereau deux fois trop grand !
Il se dirigea à pas lourds vers la porte, avant de l'ouvrir violemment sous le regard encore enfantin du brun. Allait-il mûrir un jour ou devrait-il toujours le supporter en tant que tel ?
Toujours. Il arrivait à envisager son futur ici désormais... Son mal du pays commençait définitivement à s'envoler petit à petit, si bien qu'il arrivait presque à s'imaginer vivre ici pour toujours désormais.
Et au fond, ce n'était peut-être pas si dérangeant, ce trait de caractère. Après tout il avait appris à le supporter comme cela ... Mais il aurait probablement des cheveux blancs avant l'âge. Très sûrement même.
D'ailleurs avaient-ils tous les deux la même espérance de vie ? Probablement pas, mais il était sûrement trop tôt pour y réfléchir. Le rouquin se reprit et regarda enfin à l'intérieur de la maison, la trouvant vide alors qu'à cette heure-ci Oda devrait déjà avoir commencé à préparer à manger -il était un peu comme la maman ici en fin de compte.
De plus une odeur sucrée se dégageait de l'intérieur. Il décida donc d'entrer et, soudain, il se rappela enfin la date en même temps que tous ceux cachés derrière le mur surgissaient sur son chemin.
Il écarquilla en grand les yeux, reconnaissant brièvement des visages familiers, avant de se retrouver totalement nez contre le sol, percuté par une masse plus grande que lui qui lui avait enlacé le cou avant de le faire basculer.
Et qu'il supposait être Dazai, évidemment. Il grogna sous le poids de l'autre, qui l'écrasait totalement, tandis qu'un "joyeux anniversaire" fut lancé par tous ceux qui venaient de sortir de l'ombre.
-Bon sang crétin de maquereau bouge de là ! pesta le rouquin, un peu honteux d'être dans cette position devant autant de gens et toujours énervé.
-Et pourquoi donc ? Je suis bien comme ça moi ! sourit l'autre tout en étranglant sa victime affectueusement.
Chuuya ne voyait pas son visage mais il savait qu'actuellement, si c'était le cas, il le frapperait pour lui enlever son expression satisfaite.
-J'aurais ta peau si tu ne bouges pas rapidement de là enfoiré ! grogna le manipulateur d'eau entre ses dents, commençant à manquer d'air. Le problème étant qu'il ne pouvait justement pas utiliser son pouvoir devant autant de gens.
-Ouh j'ai peur~ Dis-moi, on ne t'a jamais appris la politesse le nain ?
Le rouquin soupira. Qu'est-ce qu'il pouvait être gamin par moment. Enfin, il avait tout de même un peu muri depuis qu'il était arrivé ici, tout comme lui-même. L'effet de l'âge probablement. Ils continuaient de toujours se chercher des embrouilles, mais au moins arrivaient-ils de temps à autre à faire preuve d'un minimum de maturité.
De temps à autre. C'était le problème avec Dazai, cela restait toujours très variable. Chuuya continua de se débattre en l'insultant de tous les noms qui lui vinrent, jurant même dans une autre langue que personne à part lui ne comprenait -c'était la langue antique de sous la mer, peu la maîtrisait mais elle était relativement utile en botanique-.
Ils avaient tous les deux oublié qu'ils n'étaient pas seuls, visiblement. Tous les autres présents assistaient donc soit dépités, soit amusés, soit indifférents, parfois en détournant le regard, à la scène.
Le rouquin finit par cesser. Tant que l'autre n'aurait pas décidé de bouger, il ne le ferait pas. Il prit donc énormément sur lui et tenta de respirer malgré qu'il étouffait toujours.
-S'il te plaît Dazai, murmura-t-il à contrecœur.
-Hmm ? Je n'ai pas bien entendu, tu es trop près du sol ~
-S'il te plaît, crétin de maniaque suicidaire bousilleur de bandages ! pesta Chuuya, se jurant de lui faire payer par la suite.
L'autre inclina la tête, semblant réfléchir, puis commença à se relever.
-Si c'est demandé si...
Sa phrase fut interrompue par le coup de coude que le rouquin lui envoya aussi fort qu'il put dans le ventre dès qu'il fût suffisamment loin pour le lui permettre. Le brun se retrouva alors couché sur le flanc à côté du plus petit qui venait de se relever, se tenant le ventre et le souffle coupé l'espace de quelques instants.
-Ne me dis pas que tu ne l'avais pas vu venir, tu te ramollis, abruti, dit le manipulateur d'eau avec un regard glacial.
-Pas aussi rapidement de la part d'une limace, sourit tranquillement le suicidaire tandis qu'il commençait à reprendre contenance.
Evidemment qu'il l'avait prévu, il s'était fait frapper en connaissance de cause car il souhaitait lui-même se remettre les idées en place. Néanmoins il avait espéré que l'autre le ménagerait un peu, il avait l'impression qu'on venait de lui broyer l'estomac.
Chuuya se tourna alors enfin vers les autres personnes présentes, prenant enfin le temps d'être surpris par un si grand comité. En même temps, une sorte de chaleur agréable commençait à se répandre en lui. Il observa les visages qui l'entouraient, plus nombreux qu'il n'avait eu l'occasion d'en voir rassemblés jusqu'à présent -sauf peut-être les quelques fois où il était allé en ville.
Il y avait Oda, évidemment, dont l'expression était dépitée et en même temps souriante. Il avait l'habitude mais devait un peu avoir honte, ce que le rouquin comprenait aisément.
Il y avait également Kouyou et Yosano, la première avec toujours son allure si altière et imposante, un léger sourire raffiné sur les lèvres, tandis que la deuxième souriait également, mais presque de manière sadique, comme si elle souhaitait juste étudier les organes de Dazai là où il avait été frappé. Et elle semblait également un peu dépitée, comme si elle aurait préféré que le rouquin s'étrangle réellement pour qu'elle puisse intervenir.
Enfin il y avait Tachihara, qui souriait largement tout en se grattant le menton comme s'il était gêné, et le frère et la sœur Akutagawa.
Si l'aîné les fixait tous les deux d'un regard qui semblait froid comme l'argent et les transpercer complètement, avec une moue indifférente qui lui était propre, la plus jeune avait légèrement détourné le regard, elle aussi affichant un visage qui se voulait sans émotion, malgré qu'elle ait les joues un peu roses.
Enfin la crédibilité de tous était mise à rude épreuve, car ils avaient tous des traits de maquillage : moustaches de chat pour les Akutagawa, yeux de panda pour Tachihara et Oda, de petits papillons un minimum raffinés tout de même sur le visage de la médecin et seulement un très léger pour Kouyou -ce qui valait mieux pour tout le monde, ce n'était pas le genre de personne que l'on ridiculisait avec ces bêtises.
Néanmoins chacun avait une sorte de petit chapeau en cornet multicolore et pailleté.
Chuuya les regarda tous, ému et amusé en même temps, oubliant complètement et pour la première fois qu'il n'était pas chez lui. Il aida même le brun, probablement responsable de ces maquillages douteux, à se relever, signe qu'il était perturbé, et la fête put commencer tandis que l'autre l'embrassait amoureusement, toujours pas gêné malgré que tous détournent subitement le regard, et presque comme pour se faire pardonner de l'avoir lâchement agressé, bien que ce fut peu probable.
La journée passa très vite, le rouquin ayant même oublié la raison de son énervement matinal. Il avait dix-huit ans aujourd'hui, âge où les humains étaient considérés comme adulte ici.
Et puis il n'était pas trop dépaysé, il y avait à peu près le même nombre de personnes présentes les rares fois où il avait fêté son anniversaire. Il préférait un petit comité comme celui-ci, il pouvait parler avec tout le monde et c'était plus convivial.
Il vit Dazai s'éclipser au dehors à un moment avec Tachihara. Il se demanda brièvement ce qu'il tramait encore, et le soupçonnait de vouloir des anecdotes gênantes sur son propre passé. Il serait déçu, les deux rouquins n'avaient jamais été vraiment proches.
Néanmoins lorsqu'il vit son semblable revenir sans le suicidaire, il suspecta quelque chose et alla voir rapidement dehors. Il était simplement en pleine discussion avec Yosano, bien que cela fût à contrecœur car il grimaçait. La médecin l'avait probablement pris pour l'examiner.
Chuuya soupira et reporta son attention sur la fête, se disant qu'il ne voulait pas être à la place du brun. Et s'il avait su de quoi les deux parlaient réellement, probablement l'aurait-il souhaité encore plus.
~
Vint ensuite quelques temps plus tard l'anniversaire du suicidaire, mais il insista pour qu'on ne lui fête pas et, pour marquer le coup, tenta une nouvelle fois de se supprimer, avec un poison qui était visiblement cette fois-ci efficace. Il faisait de plus en plus de tentatives en ce moment d'ailleurs.
Oda et Chuuya avaient paniqué et appelé Yosano en urgence, trop heureuse d'avoir enfin un vrai cas à traiter. Visiblement elle lui avait à nouveau tenu une conversation qui n'avait pas satisfaite le patient. Elle l'avait ensuite soigné, mais il avait mis plusieurs jours à s'en remettre, moment durant lequel il était donc resté alité.
Le rouquin était actuellement sur la côte, les pieds pendant dans le vide et observant la mer à l'horizon. Il venait de régler un énième problème, à savoir sauver des noyés dont le bateau s'était retourné lors d'une tempête puissante.
Le climat se dérèglait un peu moins que le jour de l'arrivée du manipulateur d'eau, mais néanmoins il arrivait de temps en temps des phénomènes étranges dans ce genre-là.
D'ailleurs, dans deux jours, cela ferait deux ans qu'il était arrivé ici. Il les avait à peine vu passer. Et c'en serait probablement pareil des années suivantes. Il était bien ici.
Il soupira, se rappelant qu'aujourd'hui son compagnon devait enfin être remis et allait sortir de son lit. Probablement pour l'embêter à dose égale de ce qu'il n'avait pas pu faire depuis le temps qu'il était condamné à rester dans sa chambre, bien qu'il avait déjà profité de la nuit pour le rattraper.
Il retourna à la maisonnette tranquillement en s'étirant un peu, s'attendant à ce que l'autre demande un combat, juste pour avoir l'occasion soit d'humilier Chuuya en le battant alors qu'il était encore « faible », soit d'avoir une excuse pour avoir perdu.
Néanmoins quand il arriva, Dazai n'était nulle part. Était-il parti se promener, ou en mission urgente sur la côte ? En tout cas lui comme Oda n'étaient pas présents actuellement, ni dans les chambres, ni dans le jardin, ni sur la plage.
Le rouquin se dit qu'il n'aurait peut-être pas à combattre contre le brun, au final, et décida de sortir les attendre sur la petite falaise un peu plus bas.
Oda arriva un peu avant que la nuit ne tombe, seul. Chuuya alla à sa rencontre immédiatement, pensant qu'il savait quelque chose.
-Où est Dazai ? questionna immédiatement le rouquin lorsqu'il arriva à la hauteur de l'autre, une sorte de mauvaise intuition l'inquiétant quelque peu.
-Pas à l'intérieur ? demanda l'auburn, visiblement surpris.
Cette réponse n'était pas celle qu'attendait le manipulateur d'eau, il fronça les sourcils et secoua la tête négativement. Ce crétin suicidaire n'était quand même pas parti faire une énième tentative alors que ses deux colocataires étaient absents ?
Malheureusement, ce serait bien son genre. Le rouquin se hâta de rentrer, et alla directement fouiller dans les tiroirs de la chambre du plus grand -qui était aussi la sienne maintenant.
Et en effet, quelques minutes plus tard, il y trouva les bandages qui, normalement, auraient dû être sur le brun. Il soupira, avant de se diriger vers la porte pour le chercher.
Néanmoins il avait tout de même remarqué autre chose : certaines de ses affaires semblaient avoir disparu. Mais il s'en préoccuperait plus tard, l'autre serait bien capable de réussir son coup dans son état.
Il chercha pendant trois bonnes heures, la nuit déjà tombée depuis longtemps, sans apercevoir une trace de Dazai, nulle part. Pourtant il avait déjà été partout où il avait l'habitude de se jeter, est-ce qu'il avait raté quelque chose ?
Il rentra bredouille à la maisonnette, en même temps qu'un Oda soucieux qui, visiblement, avait aussi cherché un peu de son côté, ce qui n'était pas forcément normal.
-Qu'est ce qu'il a encore fait cet abruti ? demanda Chuuya à voix haute mais plus pour lui-même.
L'auburn ne dit rien, il semblait totalement perdu dans ses pensées. Il lançait d'ailleurs de temps à autre un regard par la porte de la chambre du brun, l'air vraiment soucieux.
-Ohé, il y a un truc qui cloche Oda ? demanda le rouquin, commençant à ne plus supporter le silence pesant qui régnait depuis dix minutes maintenant.
L'autre attendit encore, ignorant son compagnon, voire l'ayant totalement oublié. L'autre rongea son frein, il ne l'avait jamais vu comme cela, alors il attendrait. Un peu. Soudain l'auburn sursauta, comme s'il venait de se rappeler la présence de quelqu'un d'autre.
-Non... Enfin si, mais c'est probablement trop tôt... murmura-t-il.
-Trop tôt pour ... ? commença de nouveau à s'impatienter Chuuya.
-On verra ça demain, peut-être qu'il aura changé d'avis d'ici là, dit l'autre, le regard dans le vide.
-Changé d'avis sur quoi ?!
-Il ne reste qu'un seul endroit où il peut être, surtout au vu des vêtements qu'il a emporté avec lui... Néanmoins je ne comprends pas ses motivations, et c'est trop loin pour s'y rendre maintenant.
Le rouquin le regarda suspicieusement. Il avait toujours le regard perdu, aussi probablement ne répondrait-il pas, mais c'était insupportable pour le manipulateur d'eau de ne pas comprendre quelque chose.
-Où est-ce qu'il est alors ? cria presque le plus petit, se retenant de demander pourquoi car l'autre n'était véritablement pas au courant. Il ne savait pas mentir, alors ce n'était pas compliqué de deviner.
-Probablement de retour chez lui, dit finalement le propriétaire des lieux en tournant son regard perçant vers son invité, qui tressaillit presque.
Puis, comme sorti de transe, Oda secoua la tête, se leva et coupa le débat avant que Chuuya n'enchaîne -ce qu'il allait évidemment faire.
-Il est tard, il est temps d'aller dormir.
Et il partit immédiatement en direction de sa chambre, laissant le rouquin ronger son frein. Ce dernier l'écouta néanmoins, après tout ce n'était probablement qu'une lubie de plus de son partenaire, et il reviendrait même sûrement le lendemain, sans expliquer la raison de son absence, fidèle à lui-même.
Le rouquin trouva difficilement le sommeil cette nuit-là, retrouvant l'étrange sensation d'être seul avec ses cauchemars dans le noir. Bien qu'il n'y en ait plus tant que cela désormais, car il avait finalement réussi à s'en défaire. C'était plutôt seul avec ses interrogations.
Enfin, probablement aucune des hypothèses, même les plus folles, formulées par son subconscient, n'aurait pu ne serait-ce que se rapprocher un tant soit peu de ce qui l'attendait.
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Le lendemain, Chuuya fut debout aux aurores, de toutes manières il ne parvenait pas à dormir, et Oda se leva également à ce moment, bien conscient que l'autre était prêt à faire un tapage tant qu'il ne saurait pas où se trouvait sa moitié.
Il lui indiqua l'adresse d'une maison au village, lui expliquant rapidement son emplacement par rapport à la pharmacie, car lui-même ne pouvait pas l'accompagner, ayant une affaire à régler dans deux heures.
Il prévint le rouquin de s'attendre à absolument tout et d'éviter de tout détruire, ce que ce dernier trouva étrange, avant de le laisser partir. Qu'est-ce qui pourrait bien le pousser à casser quoi que ce soit ? Il avait appris à se retenir quand il s'agissait du brun, tout du moins en public.
La plupart du temps il parvenait à extérioriser lorsqu'ils étaient seuls et gardaient tout pour lui autrement. Enfin, des fois il n'y parvenait pas, mais c'était beaucoup lui en demander déjà. Et il ne voyait pas quelles raisons pourraient le pousser à extérioriser actuellement, l'autre faisait probablement juste une petite crise qui lui passerait bientôt.
Il marcha donc en silence, guettant tout de même des bruits de pas au cas où Dazai aurait la bonne idée de revenir alors que lui partait le chercher, juste pour le faire tourner en bourrique. Il en serait capable, comme il avait sûrement dû deviner quand lui-même arriverait.
Au départ Chuuya se perdit lorsqu'il arriva au village, qui s'avérait déjà beaucoup plus grand que le sien, et il ne s'y était plus rendu depuis presque deux ans maintenant. Heureusement il finit par trouver la petite place possédant une fontaine et un jet d'eau indiquée par Oda.
Elle correspondait à la description, l'eau s'écoulait de quatre bouches de lion aux quatre points cardinaux pour arriver dans un bassin d'environ trois mètres de diamètre. Un énorme jet sortait par le dessus, suffisamment puissant pour s'écouler presque aux extrémités du bassin, pour peu qu'il n'y ait pas de vent trop puissant.
Il fallait juste qu'il ne se trompe pas de maison, il aurait probablement l'air ridicule sinon et il ne voulait pas importuner les habitants. Il frappa à celle qui portait le numéro « 10 » en priant pour qu'Oda ne se soit pas trompé au passage.
Après une trentaine de secondes, la porte s'ouvrit, et le rouquin faillit bien repartir dans l'autre sens. Une jeune fille, au visage un peu rond mais au regard marron plutôt mature, ce qui faisait qu'on ne pouvait pas vraiment savoir si elle avait seize ou vingt-cinq ans, se tenait dans l'entrée. Elle avait la peau pâle et les cheveux mi-long châtain-caramel, avec un mince sourire étirant ses lèvres tandis qu'elle semblait quelque peu surprise.
Chuuya se retint de tourner les talons lorsqu'elle lui demanda ce qu'il venait faire ici. Après tout si l'auburn l'avait envoyé ici, c'était sûrement car il connaissait un minimum ceux qui y habitaient. Bien que l'hypothèse du déménagement subsiste.
Il se retint également de pester car l'autre devait faire environ quinze centimètres de plus que lui, ce qui était plutôt vexant car il devait lever la tête pour la regarder dans les yeux.
-Je cherche un garçon grand et brun, ressemblant plus à une momie, du nom de Dazai, est-ce que par hasard... commença-t-il, une timidité qu'il ne se connaissait pas apparaissant soudain, mais il s'arrêta lorsqu'il vit le regard de son interlocutrice s'allumer, signe qu'elle le connaissait.
-Alors vous avez frappé à la bonne porte, sourit-elle avant de se tourner vers l'intérieur de la maison, laissant apercevoir un couloir avec au bout un escalier. Ohé, Osamu, quelqu'un veut te voir, dit-elle alors suffisamment fort pour se faire entendre d'en haut.
Puis elle se retourna vers Chuuya, qui la regardait désormais un peu surpris. Il savait qu'ici les Hommes possédaient un prénom et un nom, ce qui n'était pas nécessaire car trop peu d'habitants chez lui. Mais lui-même avait toujours appelé le brun Dazai, son nom probablement, car c'était comme cela qu'Oda l'appelait toujours.
Enfin, ses pensées furent interrompues lorsque le suicidaire, toujours aussi discret, descendit l'escalier et prit la place que la jeune fille venait de lui céder en se décalant un peu sur le côté. Le rouquin fut d'ailleurs perturbé, ses deux yeux étaient parfaitement visibles et le fixaient désormais intensément.
-Oh, Chibi, qu'est-ce que tu fais ici ? sourit-il tout naturellement.
-Tu ne penses pas que c'est plutôt à moi de te demander ça, crétin ? rétorqua le rouquin en haussant quelque peu le ton, bien qu'il ne voulait pas s'afficher devant la fille.
-Hmm... C'est vrai, j'avais dû oublier de t'en parler... Autant pour moi ! il attendit quelques minutes, ménageant son effet, avant de reprendre. Dans ma famille, la tradition veut que l'on se marrie l'année de nos dix-huit ans, sourit-il encore.
Chuuya mit du temps à comprendre ce que cela signifiait, restant d'abord sans réaction, son cerveau ayant du mal à traiter l'information. Il cligna plusieurs fois des yeux, regarda tour à tour son amant toujours tout sourire et la jeune fille qui se tenait encore à côté.
-Attends... Quoi ?!
-Ah, je ne te l'ai pas encore présentée... Voici Chei, ma fiancée. On se connait depuis tout petits et ça fait depuis déjà cinq ans que nous avons formulé nos vœux, mais elle était partie faire des études dans sa famille à l'étranger, alors je suis parti vivre chez Oda, après ce qu'il s'est passé avec ma mère, expliqua-t-il d'un ton presque... Joyeux ?
Mais le rouquin n'écoutait déjà plus, il avait l'impression d'avoir pris un coup de poing en pleine poitrine. A moins que ce ne soit son cœur en train de se briser subitement ? Il avait l'impression que ses oreilles sifflaient, il était totalement perdu.
C'était de cela dont Oda parlait la veille ? Et ces lettres envoyées à l'étranger étaient en réalité destinées à cette fille ? Il passa son regard de l'un à l'autre, Chei semblant un peu gênée par la situation. Puis il braqua son regard sur Dazai, la colère commençant à monter, bien qu'il n'y crût pas.
-Tu mens, affirma Chuuya en se redressant un peu et en croisant les bras sur sa poitrine, tentant de calmer sa respiration qui commençait à se faire haletante sous l'émotion.
-Eh bien, désolé mais non. Ces deux années étaient réellement divertissantes, mais je n'ai jamais réellement eu de sentiments pour toi, si ce n'est peut-être de l'attirance physique, sourit encore l'autre. C'est bête si tu pensais le contraire, reprit-il soudainement en mettant la main sous son menton et en inclinant la tête.
Le rouquin encaissa ces mots plein de venin sans vraiment chercher à les intégrer. « divertissantes » hein ?!
-Je ne te crois toujours pas. Cesse ta comédie et reviens maintenant, dit en plissant les yeux le manipulateur d'eau, les rouages de son cerveau tournant à plein régime.
Dazai soupira soudain, détournant son regard pour le diriger vers la fameuse Chei, qui n'avait toujours pas bougé depuis le début de la conversation, ne sachant probablement pas où se mettre. Puis il passa le bras autour de ses épaules pour l'approcher de lui, lui faisant monter le rose aux joues.
-Il va falloir que tu le croies pourtant, car tu vas devoir repartir seul, dit-il en baissant le regard et en secouant la tête.
Puis il ramena son regard sur le rouquin, qui était trop perturbé pour pouvoir l'analyser désormais. Il avait réellement semblé sincère. Ce qui signifiait que depuis tout ce temps, il ne faisait simplement que jouer avec lui et ses sentiments, pour passer le temps, pour attendre celle à qui il était promis depuis plusieurs années ?
Il avala difficilement sa salive, une part de lui se disant toujours que c'était impossible. Il se reconcentra sur le suicidaire, qui l'espace d'un instant sembla afficher un sourire presque triste. Enfin, il n'en était pas sûr, car juste après il s'était penché vers la fille, et l'avait embrassée à pleine bouche.
Chuuya s'était senti basculer, et s'était rattrapé in extremis au grand pot de fleurs à côté de la porte, tandis que des larmes de rage commençaient à se former au coin de ses yeux.
-Comment as-tu osé... commença-t-il d'une voix tremblante de colère froide, ayant besoin d'extérioriser mais ayant l'espace d'un instant oublié comment faire.
L'autre tourna enfin la tête vers lui après avoir laissé la jeune fille rouge se retrancher à l'intérieur, il avait de nouveau esquissé un mince sourire, et immédiatement après refermé la porte, comme si le débat était clos.
Le rouquin resta coi plusieurs minutes, définitivement incapable de traiter ce qu'il venait d'apprendre. Non, c'était impossible... Tout simplement, impossible. Il devait rêver. Il allait rentrer, se coucher, et le lendemain il se réveillerait comme à chaque fois dans les bras de celui qui venait de...
Non. Définitivement. Il était incapable d'aligner deux pensées cohérentes, ne sachant pas comment il était censé se sentir, perdu.
Il secoua finalement la tête quelques secondes plus tard, et parvint à se reprendre à peu près. La personne pour qui, l'année précédente, il avait presque été prêt à abandonner sa famille. Celle à qui il avait sauvé la vie tant de fois malgré que la plupart du temps cela avait été inutile.
Son cœur semblait vide désormais. A moins qu'il ne soit brisé en tellement de petits morceaux qu'il ne le sentait plus. Il tenta d'analyser chacun des gestes, des paroles de l'autre durant ces deux années, pour tenter d'y déceler le mensonge.
Sans succès. Certes il lui avait semblé qu'il commençait à prendre un peu ses distances depuis quelques semaines, mais à ce point-là, franchement ?!
Et si c'était vrai, ce qui était dur à croire, il allait s'en tirer comme cela, si simplement, comme si de rien n'était ? Il allait pouvoir continuer de vivre sa petite vie tranquille, tandis que lui était brisé désormais, et qu'en prime il était toujours coincé loin des siens ?
C'était tellement injuste. Est-ce qu'il avait vraiment menti tout ce temps ?
Oui, Chuuya n'avait plus le droit d'en douter, au risque de réduire les derniers petits morceaux encore viables de son cœur en lambeaux en poussière.
Il recula lentement, puis sentit enfin la haine monter totalement et l'envahir, prenant momentanément le contrôle de son corps. Il avait besoin de le faire payer, ne serait-ce qu'un peu. Il se tourna vers le centre de la place, avisa la fontaine et, d'un mouvement vif et précis, envoya toute l'eau qui s'y trouvait, émanant des cinq jets comme du bassin en lui-même, directement sur la porte qu'on venait de lui fermer. La force envoya cette porte contre les escaliers au bout du couloir, puis l'eau fit un grand trou à l'intérieur, ainsi que le mur derrière, pour ensuite s'élever vers le ciel et retomber en grosses gouttes.
Puis le rouquin repartit immédiatement d'un pas rageur sous la pluie battante désormais, peu désireux de croiser de nouveau le regard de celui qui l'avait trahi. Ou même celui de l'autre poufiasse, pensa-t-il. Certes elle n'y était pour rien, mais il n'arrivait pas à s'empêcher de lui en vouloir, et probablement autant qu'au brun.
Qu'est-ce qu'il allait faire, maintenant ? Il erra dans la forêt plus longtemps que nécessaire, aussi perdu que peu désireux de rentrer pour expliquer la situation à Oda. Franchement, dans quoi est-ce qu'il s'était aventuré ? Les humains étaient donc réellement comme on le lui avait raconté, viles et lâches ? Il le croyait désormais.
~
Il rentra alors que la nuit était déjà tombée depuis quelques heures, Oda l'ayant attendu mais n'ayant rien demandé. Puis il avait encore passé une nuit blanche, des cernes bien visibles apparaissaient désormais sous ses yeux tandis que son crâne bourdonnait par la fatigue, mais ce n'était pas le pire de ses maux actuellement.
Il en voulait tellement au brun, chaque petit détail dans la maisonnette, allant de ses affaires aux petites traces présentes aux endroits qu'ils avaient détériorés et parfois mal restaurés, comme la trace encore présente de son odeur dans la chambre, sur l'oreiller -car le rouquin n'avait mystérieusement pas eu le courage de retourner dans la sienne, probablement aimait-il se faire souffrir- étaient comme une multitude de lames venant le piquer tour à tour et à répétition.
Qu'est-ce qu'il n'aurait pas donné pour pouvoir tout effacer, juste quelques instants, pour pouvoir se reposer un peu ? Mais quand il tentait de trouver le calme, il recommençait à chercher l'erreur dans sa masse grouillante de souvenirs.
Il s'était isolé sur la falaise, assistant au lever du soleil, et, probablement se dit-il, au coucher également, vu comme c'était parti.
Il n'en pouvait plus, au point qu'il finit même par se dire que la mort pourrait être plus douce. Il secoua alors immédiatement la tête, honteux. Ce n'était pas sa manière de penser. Il allait tenir, comme il l'avait toujours fait, et, peut-être, un jour parviendrait-il à oublier.
Il fixa son regard sur l'eau en contrebas, puis sur l'endroit d'où il était arrivé, pile deux ans auparavant. Il soupira, se disant que ce serait tellement bien que le portail s'ouvre, là, maintenant. Cela lui permettrait au moins de fuir, même si en soit ça ne changerait pas grand-chose.
Et pourtant, il ne savait même pas s'il le souhaitait. Une part de lui voulait encore croire que la seule fois où Dazai lui avait menti était la veille, et il espérait encore recoller les morceaux. Tout était-il réellement perdu ? Le pire, c'était peut-être ces interrogations, justement.
Puis soudain, il écarquilla en grand les yeux, et manqua même de basculer dans le vide tellement sa surprise fut grande. Est-ce qu'une quelconque divinité avait décidé de l'entendre ?!
Un tourbillon commençait à se former en contre-bas, prenant de plus en plus d'amplitude, le rouquin ne pouvant désormais en détacher son regard. Puis des dauphins, rouges évidemment, apparurent presque immédiatement après, au nombre de six.
Chuuya les fixa longuement et se frotta les yeux, croyant rêver. L'un d'eux se tourna dans sa direction et le fixa longuement, ce qui permit au rouquin de reconnaître son ami paresseux aux yeux verts dans une éclaircie de son cerveau embrumé.
Puis les dauphins s'éloignèrent finalement, en route pour leur périple ancestral de sept jours. Et donc, au bout de ce délai... Le rouquin serait chez lui ? L'information parvint à nouveau difficilement à son cerveau, hésitant probablement entre les larmes de joie ou de déchirement.
Enfin, mis à part Oda, rien d'autre ne le rattachait plus ici, non ? L'auburn allait se retrouver seul, mais il arriverait probablement à pallier. Après tout, on ne lui ferait pas croire qu'il allait juste jouer aux cartes les soirées où il s'absentait depuis un certain temps.
Après avoir mis ses idées au clair -enfin, autant qu'il lui était possible, c'est-à-dire pas beaucoup- il décida d'aller avertir Tachihara, il fallait qu'ils repartent tous désormais qu'ils en avaient l'occasion. Mais le cœur n'était pas à y aller, et ce n'était pas sûr que ce le soit pour les autres aussi.
Lui-même, aurait-il eu envie de repartir sans les évènements de la veille ? Peut-être, peut-être pas. Mais il tenta de cesser de se questionner là-dessus, se l'interdisant, car cela ne ferait que le torturer encore plus pour quelque chose qui était acté.
Il repartirait. Et bon sang, ce que cela lui faisait mal. Il avait l'impression d'avoir attrapé toutes les maladies qu'il avait jamais attrapées depuis qu'il était né en même temps. Pourquoi donc ce foutu suicidaire avait fait ça ?
Il serait probablement resté pour lui... Il n'arrivait pas à s'enlever cette idée, qui le déchirait encore plus que tout. Si l'autre avait attendu deux semaines de plus, alors il aurait peut-être abandonné sa famille pour lui. Et il s'en serait mordu les doigts, maintenant qu'il y pensait.
Ne devait-il pas le remercier pour s'être révélé à temps pour qu'ils repartent ? Triste ironie tout de même.
Ou peut-être serait-il reparti en laissant une partie de son âme ici. C'était un autre scénario. Et actuellement, son cerveau s'amusait à vraiment tous les visiter. Lui qui pensait avoir senti un déchirement insoutenable l'année précédente... Cela lui paraissait des chatouilles à côté de ce qu'il ressentait désormais. Son cœur n'était plus seulement tiré en deux, il était fractionné en tellement de parties qu'il ne savait même pas combien il y en avait et dans combien de directions les cordes partaient, emportant chacune un petit morceau.
Lorsqu'il arriva enfin chez les Akutagawa, il trouva les trois habitants en plein travail dans la terre. Voyant immédiatement sa mine défaite et fatiguée, Tachihara abandonna momentanément sa tâche pour aller à sa rencontre et lui offrir son bras, car Chuuya donnait probablement l'impression qu'il allait s'écrouler sous le poids de tout ce qui l'accablait, bien qu'il tentait de paraître en forme.
Il expliqua alors à son homologue ce qui venait de se produire -pour le portail, pas ses problèmes personnels évidemment- et le regard de l'autre s'assombrit immédiatement.
-Je... Ecoute, Chuuya... J'y ai réfléchi, et... Je n'ai pas l'intention de repartir, dit-il tout bas en lançant un regard qui semblait coupable vers la jeune fille de la maison. Désolé, tu passeras le bonjour à ma famille ? sourit-il tristement, avant de repartir aussitôt à son travail.
Le rouquin resta encore abasourdi quelques instants, bien que cette sensation commençât désormais à lui être familière. C'en était triste. Il se leva, désormais presque... Blasé ? Il allait repartir, pour sa famille qui l'attendait, parce que celle qu'il s'était construit ici n'était probablement que mensonge.
Mais bon, il était probablement le seul à avoir tout raté de cette dernière année. Il en voulait vraiment au brun, qui lui avait gâché la vie. A cette fille qu'il avait embrassée devant lui. Et maintenant à Tachihara, car lui arrivait à être heureux, ici, et probablement était-il aussi amoureux. Il était légitime là-dedans, tandis que Chuuya se sentait plus bas que terre pour ses faux espoirs, ces morceaux fugaces de futur commun qu'il avait l'espace de quelques instants envisagés aux côtés du brun. Qu'il aimait toujours, pourtant. Pourquoi ?!
Et même l'idée de revoir sa famille n'arrivait pas à le ramener à un état correct. Il avait cherché pendant tant de temps à s'en défaire, à oublier pour ne plus souffrir... Mais la manœuvre se retournait totalement contre lui désormais. C'était un fait, et il était réellement douloureux.
Il dormit si peu durant la semaine qu'il n'était même pas sûr d'avoir réellement trouvé le sommeil à un moment. Il était tellement mal qu'il sentait le temps passer horriblement lentement, comme s'il avait ralenti sa course pour le narguer un peu plus.
Est-ce qu'il parviendrait réellement à se débarrasser de tout cela en rentrant ?
Non. C'était évident, pourtant c'était la seule chose à laquelle il pouvait encore se raccrocher. L'oubli lorsqu'il ne serait plus aussi proche de ce qui le faisait tant souffrir. Ça, et Oda qui, comme à son habitude, était une présence apaisante. Mais plus suffisamment.
D'ailleurs, s'il avait été suffisamment conscient durant cette semaine, probablement aurait-il été en mesure d'analyser le comportement étrange de son compagnon après qu'il lui ait tout raconté. Mais c'était trop lui en demander.
Quand les dauphins revinrent, c'est donc quasiment sans émotion, qui avait toutes été comme passées à la machine à laver, simples tâches tombées sur un vêtement qui n'aurait jamais dû se retrouver là, durant cette semaine, qu'il but la potion et sauta à l'eau. Puis il emprunta le portail, avec tous les autres, se rappelant au dernier moment d'emporter un objet humain.
Pour protéger son frère. Pour remplacer son père. Pour oublier ces magnifiques moments qu'il avait vécus, désormais tous entachés par le sceau du mensonge. Mais, surtout...
Pour ne plus jamais revenir.
A suivre ~
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