- 25 -
À notre âge, on devrait plus se soucier de nos notes que de faire en sorte d'éviter des boulettes de papier jetées sur nos têtes. Surtout si elles contiennent des mots vulgaires et insultants.
Et Brevan, en reçoit beaucoup, des boulettes. Dans son casier, balancées dans les couloirs et durant les cours. Mais il ne dit rien. Alors Romain rit, et moi, je me sens impuissant. J'ai bien tenté de faire en sorte qu'il en parle, mais sa réponse est toujours la même. Romain arrêtera quand il en aura assez.
- Arllem, ça va ? Tu n'as presque rien mangé, s'inquiète ma mère.
Toute ma famille m'observe retourner mes légumes sans vraiment m'y intéresser. Cela doit faire deux bonnes minutes que je ne mange pas.
- Est-ce que vous me trouvez bizarre ? demandé-je en lâchant ma fourchette.
Mes parents s'échangent un regard, puis se tournent vers moi.
- Non, bien sûr que non. Pourquoi tu demandes une chose pareille ? m'interroge mon père.
- Parce que je suis gay...
- Mais jamais de la vie !
- On t'aime comme tu es et peu importe si tu es avec un garçon, tant que tu es heureux, me rassure ma génitrice.
Ils peuvent et doivent tout savoir. Ce sont les seules personnes à qui je fais une confiance aveugle. Même en ce qui concerne les choses intimes.
Je n'avais pas attendu deux jours pour annoncer à ma mère que j'avais passé le grand cap avec Brevan. Elle m'avait simplement demandé si on s'était protégé et comme j'avais répondu par l'affirmatif, elle n'avait rien dit de plus et m'avait simplement annoncé qu'elle était heureuse pour moi.
- Mon chéri, m'appelle ma mère en caressant ma main. Tu sais que tu peux tout nous dire.
Je n'arrive pas à retenir les larmes de me monter aux yeux. Je me sens coupable et inutile. Guylane tire ma chaise vers la sienne et me pousse à poser ma tête sur son épaule. Elle finit toujours par tout savoir elle aussi.
- Il y a un truc qui ne va pas. On le sait tous. Tu as juste à nous dire ce que c'est.
- Ça fait presque deux semaines que Brevan reçoit des insultes dans son casier, déclaré-je après avoir essuyé mes joues. Et je crois que c'est à cause de moi...
Je me détache d'elle et me lève pour sortir plusieurs mots du fond de mon sac. Je ne peux ramasser que ceux que Brevan ne voit pas, ce qui fait un bon petit tas. Et les voir disposer sur ma table de salle à manger me donne un sale coup au cœur.
Ma mère en attrape un et le lit silencieusement.
- Ce n'est en rien de ta faute ce qui vous arrive.
Mon père en prend trois devant lui et se frotte les yeux.
- Qui les écrit ?
- Romain, un garçon de ma classe.
- Encore ce gosse... On va prendre rendez-vous avec ton CPE, déclare-t-il en les repliant proprement. Ça ne peut pas durer.
Je prends ma mère dans mes bras puis mon père en les remerciant. Je me sens soutenu comme toujours avec eux.
- Ne nous remercie pas pour notre rôle de parents, sourit ma mère.
- Aller, assis-toi et mange quelque chose. Tu pourras en parler à ton petit-copain après.
Le nom ''petit-copain'' dans la bouche de mon père sonne comme une promesse. J'ai envie que ça s'arrange. Encore faut-il que Brevan se laisse aider.
Après avoir mangé un peu et pris une douche rapide, je m'affale sur mon lit, portable en main.
''Mes parents vont prendre rendez-vous avec le CPE.'' ''Pour les mots.''
Comme la réponse ne vient pas, je décide de me laver les dents. Mais il n'y en a toujours pas à mon retour. J'ai maintenant peur qu'il m'en veuille pour l'avoir dit à ma famille.
''Tu me fais la tête ? ''
Sa réponse est soudaine.
''J'ai même pas le droit de prendre une douche ? XD ''
''Menteur, tu me boudais... :-( ''
Ce n'est pas un message que je reçois, mais une photo d'une moitié de torse et une serviette bleu sur la partieinférieure. Et c'est particulièrement troublant.
''C'est toi ?''
''Non, c'est Rusky !'' ''Imbécile, bien sûr que c'est moi XD'' ''T'aimes pas ?''
Comment je peux exprimer le fait que j'apprécie tout particulièrement ce que j'ai devant les yeux.
''Si, mais tu n'as jamais aimé que je te prenne en photo...''
''Tout dépend du contexte.'' ''Je sais à quoi tu penses... Je suis conscient de ce que signifie envoyer une telle photo, mais je n'ai pas à avoir peur avec toi.'' ''Parce que je te fais confiance'' ''Et puis, je ne suis pas tout nu !''
Sans répondre, je jette mon téléphone à côté de moi et me retourne sur le ventre en plongeant mon visage dans mes oreillers. Je ne sais pas expliquer ce que je ressens. C'est beaucoup trop complexe. Je ressens du plaisir, je suis heureux, mais je lui en veux de me faire autant confiance. J'ai peur qu'un jour, je le déçoive. Et que ce jour-là, je le perde pour toujours.
Il m'envoie un autre message.
''J'ai parler à ma mère des mots dans le casier.'' ''Elle essaiera de se libérer pour venir au rendez-vous.''
''Merci.'' ''Je serais là aussi avec l'un de mes parents.''
''Sache que je te fais confiance sur tellement de chose, Arllem...''
Je reçois une autre photo. Moins de tissus et plus de peau.
Je décide d'entrer dans son jeu. Je lui en envoie une et le lien de la chanson.
''De quoi te faire patienter jusqu'à vendredi soir...''
Je lance la musique une fois mes écouteurs mis.
''À ce rythme là, je ne tiendrais pas jusqu'à vendredi...''
Cette chanson est la nôtre. Elle renferme tous les souvenirs de cette nuit-là. La pluie contre les volets, le lit qui grince un peu, nos corps l'un contre l'autre et la sensation d'être enfin complet avec lui.
Moi non plus, je ne vais pas tenir très longtemps.
Je ne tarde pas à m'endormir et à rêver de lui. De nous.
J'ai l'impression de sentir réellement ses lèvres contre les miennes, ses mains sur ma peau nue. Mais cette fois, c'est moi qui lui fait doucement l'amour. Sans pour autant le pénétrer. Juste lui contre moi. Moi qui glisse entre ses jambes, son sexe à côté du mien. Il s'accroche à mes hanches et je bouge avec lui. Brevan soupire et je me frotte encore. Ses doigts descendent plus bas et me poussent à bouger tout en l'embrassant. Douceur, chaleur et pression. Je ralentis pour faire durer le moment et il me dévore la gorge avec sa bouche. Sa langue lèche un peu partout et je me sens sombrer plus loin dans ses bras.
Le matin, en me réveillant, je n'ai aucune honte à refermer les yeux et à imaginer ses mains caresser mon corps. Je n'ai aucune honte à penser à lui. Mes doigts trouvent mon sexe.
C'est Brevan qui me touche.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top