1ère lettre à mon Ange.
"Je ne sais pas si tu existes, mais je préfère t'écrire quand même. J'ai beaucoup de choses à dire, mais personne pour m'écouter. Alors j'ai pensé que peut-être... toi tu voudrais bien porter une oreille à mes propos.
Si tu existes et que tu veilles sur moi, tu dois probablement déjà savoir pas mal de trucs... mais c'est différent si ça vient de moi, non ? Et puis, de toute façon, j'ai simplement besoin de l'exprimer. C'est trop dur de tout garder pour soi-même. C'est trop lourd.
Je m'appelle... Papillon. Disons que pour toi, je suis Papillon. Ce n'est pas mon vrai nom, mais tu le sais déjà, pas vrai ? Mais j'aime bien les papillons. Avant, ils étaient des chenilles, et puis ils se sont libérés de leur prison pour s'envoler et découvrir le monde... exactement ce que j'aimerais faire. M'appeler Papillon me donne un peu l'impression que cela pourrait m'arriver un jour.
Je suis donc Papillon. Et j'ai un certain nombre d'années derrière moi... dix-sept, pour être précise. J'aimerais pouvoir me décrire, mais comme tu dois me voir tous les jours, tu sais déjà à quoi je ressemble. Et puis, je ne trouverais rien d'autre à dire sur mon physique que "moche", "repoussant" et "honteux".
Je n'ai pas envie d'en dire plus pour l'instant. Tu as simplement besoin de savoir également que je ne m'aime pas, et que je hais mon caractère. Trop timide, trop réservée, trop seule, trop peu confiante, trop perdue, trop petite, trop sensible, trop naïve, trop coincée, trop silencieuse. Trop moi, en fait. Ça fait beaucoup de trop. Ah, trop stupide aussi... Stupide d'avoir cru que les gens pouvaient être gentils et tolérants.
Mon enfer sur Terre a débuté il y a déjà pas mal d'années, quand mon père s'est mis à frapper ma mère, jusqu'à ce qu'elle demande le divorce. Depuis, je ne vis qu'avec elle. Et même si je suis soulagée d'être loin de cette brute, il reste mon papa... et ce manque se fait cruellement ressentir, même après dix ans de séparation.
Je dirais que c'est à partir de cette période que j'ai commencé à me renfermer sur moi-même. Et à attirer les ennuis. J'étais apparemment trop discrète et silencieuse pour mes camarades de classe, qui espéraient m'entendre au moins une fois ouvrir la bouche pour leur dire d'arrêter de me lancer des bouts de papier et des cailloux. Mais rien à faire, je n'arrivais pas à ouvrir ma bouche. Alors ma mère a décidé de me faire changer d'école... mais il faut croire que tous les enfants ont la même mentalité stupide.
Enfin bref, depuis mes sept ans, il ne s'est pas passé un seul jour d'école sans qu'on ne me jette quelque chose. Quand ce n'est pas moi qu'on jette.
Et puis, après, il y a eu cette fille, que je vais appeler Vipère, non sans raison... qui a balancé à ma classe de lycée, l'année dernière, que j'étais homosexuelle. Comment l'a-t-elle su, je ne sais pas. Tout ce que je peux dire, c'est que si je pensais déjà vivre l'enfer avant, je me trompais lourdement.
Enfin, je vais m'arrêter là, tu dois en avoir marre de lire mes plaintes. En tout cas, je pense t'écrire régulièrement. J'espère que ça m'aidera à sourire un peu plus. À sourire tout court en fait...
Je t'embrasse depuis la Terre, ami des cieux (ça te va si je t'appelle ainsi ?),
Papillon."
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