16. Toucher végétal



Taehyung se réveilla en sursaut lorsque son alarme sonna (alarme qu'il avait oublié de déprogrammer). C'était les vacances, et même s'il n'était pas un gros dormeur, il avait tout de même prévu de faire la grasse matinée. Il n'était qu'à peine sept heures du matin. Une ou deux de plus n'auraient pas été de refus, surtout après la courte nuit qu'il venait de passer.

Les muscles endoloris, il s'étira en baillant comme un lion, le dos droit sur son siège de bureau. Il s'était endormi au beau milieu de ses recherches, la joue écrasée contre sa feuille griffonnée de mots clés et d'informations diverses et variées. Il ne serait pas étonné de trouver des traces de stylo sur sa peau.

En voyant toutes ces pages remplies, il se fit la remarque qu'il avait vraiment bien bossé. Pourtant, étrangement, il n'était pas plus avancé sur comment aider Jungkook concrètement. Peut-être parce que son esprit était encore trop embrumé ?

– Chocolat, grogna-t-il.

Sa voix était rauque, sa langue pâteuse et sa gorge si sèche qu'elle le piquait. Il lui fallait son lait au chocolat, ou bien il ne serait pas en mesure d'attaquer sa première journée de vacances comme il se devait. Il avait faim aussi.

Dans un effort presque surhumain, il étendit ses jambes et fit craquer ses articulations avant d'abandonner son fauteuil et de se rendre dans la cuisine. Il ne fut pas surpris de n'y trouver personne. Ses parents partaient beaucoup plus tôt au travail le samedi. Tranquillement, il prépara son petit-déjeuner mais fut vite dérangé par le manque de distraction sonore. La maison était bien trop silencieuse à son goût.

Un petit détour au salon et il alluma la télé pour mettre une chaîne de clips musicaux au hasard, et son corps commença automatiquement à se balancer alors qu'il retournait à ses occupations, bien plus motivé qu'il ne l'était au départ.

Son bol de riz fut englouti en quelques minutes. Il termina par sa boisson cacaotée, qu'il but cul-sec tout en se dandinant sur sa chaise et en chantonnant sur les tubes à la mode qui passaient dans la pièce à vivre. Malgré son réveil imprévu, c'était une bonne journée qui commençait. Il pouvait voir dehors le ciel dégagé et un petit brin de soleil taper contre les carreaux de la cuisine. Un sourire rêveur se dessina sur son visage.

Est-ce que Jungkook aussi regardait le ciel, actuellement ?

Non, sans doute devait-il encore dormir à l'heure qu'il était. Taehyung eut envie de vérifier en lui envoyant un message, mais il se ravisa en se rappelant les mises en gardes de son cadet lorsqu'il avait accepté de lui donner son numéro.

« N'en profite pas pour me déranger toutes les cinq minutes, sinon je te mets sur liste noire. »

Un frisson lui parcourut la nuque. Jeon Jungkook faisait peur, parfois. Il n'avait peut-être rien d'un moineau frêle et mignon, finalement. Il ressemblait plutôt à un animal féroce, sanguinaire et sans merci.

La comparaison le fit glousser. Il s'essuya les babines et débarrassa la table avant de la quitter pour remonter dans sa chambre. Son écran d'ordinateur et son carnet l'appelaient. Le travail était loin d'être fini. Décidant de se remettre à la tâche, il retroussa les manches de son haut de pyjama et s'assit en tailleur sur son siège. Encore un peu de concentration. Juste une petite heure. Il devait pouvoir le faire !

Assidûment, il reprit ses notes et les étudia longuement, retournant de temps à autres sur internet pour les compléter. Il avançait plutôt bien, mais comme la veille, il se confrontait à un problème assez particulier. Une énigme, un mystère. Selon les différents sites consultés, tous étaient d'accord pour dire que l'haptophobie, cette peur irrationnelle du toucher, n'était pas si impossible que ça à soigner. Par de nombreux moyens, tels que la psychothérapie, des séances d'hypnose ou encore la thérapie comportementale, elle pouvait tout à fait disparaître ou bien ne serait-ce que s'atténuer.

Ça ne faisait aucun doute que Jungkook souffrait de cette phobie et pas d'autre chose, si l'on se référait aux multiples symptômes décrits. Pourtant, il avait pendant longtemps été suivi par des médecins, selon les dires de sa mère, mais pas un seul d'entre eux n'était parvenu à obtenir des résultats concluants. Tous lui avaient rapporté le fait que son fils refusait catégoriquement de s'exprimer et de s'ouvrir à eux. En réfléchissant à cela, Taehyung se demandait comment, lui, pourrait réussir là où des professionnels avaient échoué. Il ne voulait pas perdre espoir ou se séparer de son optimisme, mais il devait se rendre à l'évidence : ce qu'il visait, s'il y arrivait, tiendrait tout bonnement du miracle.

Il n'était pas du tout formé à la psychologie, il n'y connaissait strictement rien. Sans mentionner l'hypnose. Il se rappelait sans mal les séances de relaxation qu'il avait faites, dispensées par une dame qualifiée dans ce domaine. C'était à une époque où son hyperactivité (il préférait parler d'énergie) était si forte qu'il n'en dormait plus la nuit. La pauvre femme s'était arrachée les cheveux avec lui. Incapable de rester immobile plus de deux minutes, le garçon avait passé la totalité de son temps à remuer sur le fauteuil, à pouffer dans sa barbe et à se gratter partout. Son corps entier le démangeait dans ces moments-là. Ça fourmillait dans tous ses membres et lui donnait l'irrépressible envie de bouger.

Il se retrouvait donc face à une impasse. Comment pouvait-il aider Jungkook sans de telles capacités ? Désœuvré, il se frotta le crâne avec le capuchon de son stylo et soupira bruyamment. Quelles autres options avait-il ?

Pendant un bon quart d'heure supplémentaire, il se creusa les méninges tout en épluchant les blogs, les articles de médecine et les témoignages en tout genre. Quand petit à petit, il commença à y voir plus clair. Une direction à suivre, un chemin, certes sinueux et éprouvant, mais qui pourrait peut-être fonctionner. Avec tout ce qu'il avait lu, il avait retenu une chose. Pour combattre une peur, il fallait s'y confronter et non la fuir.

Peut-être qu'elle était là, la solution. Jungkook allait devoir apprendre à se refamiliariser avec le contact physique.

Mais comment ?

Là était la nouvelle interrogation qui ne quitta pas l'esprit de Taehyung.

𓅪

L'idée lui vint sans prévenir, entre deux brioches aux pommes qu'il dévorait goulûment devant sa télé. Les pieds posés sur la table basse, enveloppés dans ses gros chaussons, et toujours en tenue du dimanche (et du samedi aussi, visiblement), elle lui était apparue comme une révélation et il en avait fait tomber son dessert sur le sol en se relevant brusquement.

Cela faisait maintenant une bonne minute qu'il était debout, un doigt posé sur son menton alors qu'il songeait à la meilleure manière de mettre cette idée en application. Connaissant le personnage de Jungkook, il était certain qu'il refuserait d'emblée la proposition de s'attaquer directement à ses plus grandes craintes. Taehyung pouvait déjà entendre sa réponse dans sa tête :

« Et tu peux me dire pourquoi je m'infligerais ça ? »

Il lui fallait donc un plan bien rodé mais suffisamment doux et subtil pour que le garçon aux moineaux puisse se préparer à souffrir psychologiquement. C'était absolument terrible, dit comme ça, mais c'était pour son bien. Jungkook en bavait déjà tellement avec sa condition que s'il pouvait ne serait-ce qu'arrêter de se rendre malade dès que du monde se trouvait autour de lui, ce serait une avancée immense, et un soulagement non négligeable.

Pour se faire, Taehyung avait pensé à une approche très progressive. Tout d'abord, tâter le terrain. Voir jusqu'où s'étendait sa répulsion du toucher. Il savait que les humains étaient tout simplement à bannir. Les animaux, c'était également compliqué. Mais qu'en était-il des autres êtres vivants ?

Sans hésitation cette fois, il s'empara de son téléphone et envoya son tout premier message à son ami, le cœur rempli d'excitation. C'était bête, mais il était content de pouvoir le faire. D'avoir un nouveau moyen de communiquer avec lui. Le sourire aux lèvres, il rédigea quelques mots avant de les envoyer, puis il attendit.

Il attendit longtemps. Très longtemps. Jusqu'à perdre patience et espoir. Il était déjà une heure de l'après-midi, ce qui ne pouvait vouloir dire qu'une seule chose : Jeon Jungkook le ghostait. Déçu et à deux doigts de se vexer, Taehyung décida d'aller faire un tour dans le jardin pour se dégourdir les jambes et les neurones. À trop penser, il en avait mal à la tête.

Enroulé dans son gros pull, il piétina dans l'herbe humide et jeta un œil au ciel au moment où des oiseaux passaient. Il soupira. Que pouvait bien faire Jungkook ? Lassé, il s'approcha des fleurs qui poussaient dans le jardin. Beaucoup d'entre elles avaient perdu leurs pétales avec la saison ; même la main verte de ses parents ne pouvait rien faire contre leur cycle de floraison. Songeur, il tendit l'index vers une des feuilles et la toucha. Il sentit la légère pointe contre sa pulpe, caressa le limbe et retraça les nervures. C'était pour lui un contact agréable. La texture à la fois lisse et épaisse du végétal lui plaisait.

– Vous allez bien fleurir, ce printemps, hm ? sourit-il aux azalées. Pour être aussi belles que l'année dernière.

Sa mère disait toujours que pour qu'une plante s'épanouisse bien, il fallait leur parler. Taehyung n'avait jamais su si c'était vrai ou si ce n'était encore qu'une de ses fantaisies, mais depuis tout petit, il avait pris l'habitude de flatter les végétaux avec de jolis compliments. Cela lui donnait le sentiment de faire quelque chose de bon.

– Toi aussi, tu vas être magnifique, dit-il cette fois au cerisier. T'as intérêt, parce que t'es mon préféré.

L'arbre ne lui répondit pas. En revanche, son téléphone vibra dans sa poche. À la vitesse de l'éclair, il le dégaina et poussa une exclamation de joie en lisant la notification affichée sur l'écran.

De : Moineau
Désolé, je viens de me réveiller. Je ne fais rien aujourd'hui, pourquoi ?
Reçu à 13:42

Jungkook ne l'avait donc pas ignoré, il avait simplement fait un très long dodo. Heureux et rassuré, Taehyung répondit immédiatement :

À : Moineau
J'aimerais t'emmener quelque part, si tu es d'accord.
Envoyé à 13:43

Jungkook lui demanda bien évidemment où il comptait l'emmener. Mais même si Taehyung se doutait que le fait de ne pas savoir le stresserait, il ne vendit pas la mèche et l'informa qu'il s'agissait d'une surprise. Il lui garantit cependant que celle-ci serait sans danger et qu'il ferait tout pour lui éviter la foule des quartiers populaires.

Jungkook accepta sans trop discuter, contrairement à ce que Taehyung s'attendait. La confiance qu'il lui accordait était une chose qui le dépassait. Certes, il ne pensait pas la démériter, il avait tout fait pour l'obtenir et il était ravi que ses efforts aient porté leurs fruits. Mais tout de même, ça faisait drôle de voir tout ce que Jungkook était prêt à faire et à donner pour lui. Ça lui picotait le ventre et le bout des doigts.

Ils se donnèrent rendez-vous à quinze heures chez les Jeon. Tel le preux chevalier servant qu'il était, Taehyung s'était engagé à l'escorter du point A au point B et inversement. Il le ramènerait une fois leur sortie terminée.

Son cœur battait très fort. Il avait hâte. Et en même temps, il appréhendait un peu.

Il n'était pas sûr de comment Jungkook allait réagir.

𓅪

Devant le portail en bois de la maison de son ami, Taehyung attendait en se balançant sur ses jambes. Il était arrivé un peu en avance et le temps commençait à se faire long. C'est vrai qu'il aurait pu prévenir Jungkook de sa présence pour le faire sortir plus tôt, mais il n'avait pas voulu lui mettre la pression et le forcer à se préparer plus vite. L'heure c'était l'heure. Ce n'était ni avant ni après. Alors il patientait en faisant des petits tours sur lui-même, en grattant le sol du bout de sa chaussure ou en observant la petite araignée qui se baladait tranquillement le long de la clôture en bois. Cette dernière avait même écopé d'un nom. Un nom aussi minuscule qu'elle. Mi, pour mimi. Taehyung la trouvait sympathique. Il l'aurait bien prise dans sa main, mais il n'était pas certain que l'arachnide aurait apprécié ce geste intrusif.

Depuis qu'il connaissait Jungkook, sa vision de l'intimité physique avait changé. Il faisait bien plus attention aux différents contacts qu'il pouvait avoir avec les autres. Cela était un peu difficile pour lui qui était du genre très tactile. Avant ça, il n'avait jamais songé au fait qu'une main amicale posée sur une épaule puisse déranger quelqu'un, ou pire : le heurter ou l'effrayer.

Maintenant, il apprenait à se restreindre et ne se permettait ces marques d'affection qu'avec ses proches et ceux qu'il savait d'accord avec ça.

– Tu devrait lui demander son numéro à elle aussi. Paraît que c'est une bonne méthode pour tisser des liens.

Taehyung sursauta et décrocha son regard de Mi pour tomber dans celui amusé de Jungkook. Ce dernier était juste devant lui, de l'autre côté de la barrière, et le scrutait, les bras croisés sur sa poitrine.

– Que- Tu... T'es là depuis longtemps ? bafouilla Taehyung dont le pouls peinait à se calmer.

Il n'obtint aucune réponse si ce n'était qu'un sourire en coin qui voulait tout dire.

« La honte », pensa-t-il, mortifié. Voilà qu'il allait passer pour un idiot à parler à un insecte qui n'en était même pas un.

– Je parle aux oiseaux. Ce n'est pas moi qui vais te juger parce que tu parles aux araignées, Peter Parker.

La référence lui décrocha malgré lui un rire.

– T'imagines si j'avais les mêmes pouvoirs que Spider-Man ? répondit-il. Je pourrais envoyer des fils super collants sur ceux qui t'embêtent et leur faire fermer leurs bouches.

– Pas besoin de ça, tu y arrives déjà bien.

Taehyung manqua de ne pas entendre ces mots chuchotés timidement. Son visage se fit surpris, comme à chaque fois que Jungkook disait ce genre de choses, puis une sensation indescriptible se nicha dans son ventre. Il la reconnaissait, cette sensation, mais il n'arrivait pas à la définir. C'était comme une chatouille, un effleurement ou une caresse.

Un raclement de gorge le détourna de sa piètre analyse et il se rendit compte que Jungkook était gêné.

– Bon, on... on va où ? demanda ce dernier pour changer de sujet.

Un franc sourire s'esquissa sur les lèvres de Taehyung.

– Tu me fais confiance ?

Bien sûr qu'il lui faisait confiance. Comme toujours. La question n'avait même pas besoin d'être posée mais c'était si gratifiant de voir Jungkook hocher la tête, malgré son petit air apeuré.

– Alors en route ! s'exclama-t-il joyeusement. Ne t'inquiètes pas, c'est pas tout près mais on va y aller à pied tranquillement. Je connais des petites rues calmes.

Peu rassuré mais déterminé à faire plaisir à son ami, Jungkook le rejoignit à l'extérieur du portail et ils se mirent en route.

Comme promis, le chemin qu'ils empruntèrent fut relativement sans encombres. Peu de passants traversaient les différentes ruelles dans lesquelles ils vagabondaient, ce qui permit au plus jeune de se détendre et de profiter des rayons du soleil qui réchauffaient doucement sa peau.

– Tu sais, j'ai réfléchi à comment t'aider, commença Taehyung.

Un bref silence s'installa.

– Donc tu étais vraiment sérieux... ?

– Bien sûr ! C'est d'ailleurs pour cette raison que je t'ai fait venir aujourd'hui.

Jungkook se stoppa subitement et le dévisagea avec une expression particulière. Ce n'était pas de l'intrigue, c'était de l'angoisse qui se lisait dans ses yeux.

– Écoute, Tae... C'est très gentil de vouloir m'aider mais je ne suis pas certain de...

Il ne termina pas sa phrase. À la place, son regard monta vers le ciel et il le fixa sans ciller. En ressentant son trouble, Taehyung s'approcha de lui et attrapa le bout de son écharpe pour la secouer gentiment.

– Kookie... Eh, regarde-moi, dit-il avec douceur.

Les pupilles du brun redescendirent lentement vers les siennes. Taehyung lui adressa un sourire tendre.

– On ira à ton rythme. Je te donnerai quelques exercices et on essayera de les réussir ensemble. Mon but n'est pas de te mettre la pression, c'est de te soulager sur le long terme.

Mais bien que ses propos étaient remplis de bonne volonté, actuellement, Jungkook n'était pas soulagé du tout. Il perdait progressivement ses couleurs et ses dents se mettaient à grignoter sa lèvre.

– Tu n'as pas envie de vivre une vie normale ? demanda Taehyung. D'être libre ? de pouvoir profiter de ta jeunesse sans avoir constamment à surveiller tes arrières ? de pouvoir te déclarer à Yoongi ?

Bien sûr que si, il voulait tout ça. Qui ne le voudrait pas ?

– Réfléchis-y. Moi, je te propose de t'accompagner dans cette épreuve.

Durant un instant, Jungkook s'imagina la vie que Taehyung lui décrivait, et beaucoup d'émotions agitèrent ses traits. L'espoir illumina d'abord ses yeux, le besoin fit trembler ses lèvres. Puis la méfiance fronça ses sourcils, et la fatalité ternit son visage entier alors qu'il prenait conscience de tout ce que ça impliquait.

– Tu n'y arriveras jamais...

– Je peux au moins essayer, soutint Taehyung. J'ai enfin la chance de pouvoir faire quelque chose pour toi, alors je dois la saisir et-

– Non.

Jungkook l'interrompit brutalement. Ses muscles étaient crispés, sa gorge nouée et sa respiration se déréglait. Sous couvert d'un ton incroyablement dur, il essayait simplement de masquer son affolement. 

– Pourquoi non ?

En entendant la question, ses poings se serrèrent instinctivement et il explosa :

– Parce que je ne sais même pas ce que tu as en tête !

Son cri soudain résonna dans la rue et la panique se déversa sur lui comme une cascade, dangereuse et puissante. Il fut dès lors incapable de retenir ses pensées qui quittèrent sa bouche sans le moindre filtre.

– Tu vas sans doute me demander de toucher des gens ou les faire me toucher. À quoi bon ? J'en suis incapable ! Je vais juste souffrir inutilement, tout ça pour une pseudo chance qui ne mènera nulle part. Tu ne crois pas que c'est déjà assez dur pour moi ? Pourquoi tu veux me forcer ? Pourquoi tu veux me faire du mal ?

Il n'avait même plus conscience de ce qu'il prononçait. Son esprit avait perdu toute clairvoyance et ses propos irraisonnée tranchaient l'air comme des poignards qu'il lançait à l'aveuglette, espérant toucher quiconque se trouverait sur leur chemin. 

Sentant que la situation lui échappait des mains, Taehyung décida de s'en réemparer immédiatement, avant de, lui aussi, laisser le doute s'installer.

– Jungkook, Jungkook, dit-il précipitamment.

Résistant fortement à l'envie d'attraper ses épaules pour capter son attention, il courba le dos et se positionna à hauteur de son visage, les paumes en appui sur ses cuisses.

– Je veux que tu respires et que tu te concentres.

Jungkook avait toujours eu du mal à canaliser ses émotions. Ce n'était donc pas étonnant qu'il les laisse une nouvelle fois prendre le dessus. Tremblant de tout son corps, il tenta de réguler son souffle comme le lui montrait son ami grâce au semblant de lucidité qui lui restait. C'était difficile. Sa vue était brouillée et son visage lui apparaissait comme une peinture abstraite faite à l'aquarelle. Flou, dilué, sans contours. Il fit néanmoins de son mieux et ils prirent le temps d'inspirer et d'expirer ensemble plusieurs fois.

Quand il fut enfin plus calme et que la crise fut passée, Taehyung le regarda droit dans les yeux et reprit :

– Je ne te forcerai jamais à faire quoi que ce soit qui pourrait te blesser. Tu le sais, non ?

Jungkook acquiesça en silence, honteux. Bien sûr que Taehyung ne le forcerait jamais. Comment avait-il pu penser ça de lui ? Il ne savait même pas pourquoi il avait dit de telles choses aussi affreuses.

– C'est vrai que je peux parfois paraître insistant, mais c'est parce que je veux vraiment t'aider. Seulement, je ne peux pas le faire sans ton accord. C'est important pour moi de l'avoir, tu comprends ?

Il acquiesça une nouvelle fois. Oui, il avait le choix. Taehyung lui laissait le choix. Parce qu'il était comme ça, c'était dans sa nature. Même s'il lui arrivait de foncer tête baissée, il respectait toujours l'avis des autres et savait s'arrêter quand il le fallait.

– Je sais que tu as peur, Kookie, et je sais que ce que je te demande n'est pas facile. Alors je te pose la question : est-ce que tu es prêt à me suivre, est-ce que tu veux essayer de te débarrasser de ta phobie à mes côtés ?

Le silence de Jungkook s'amplifia et il prit cette fois le temps de réfléchir. Il réfléchit sérieusement aux deux options qui s'offraient à lui. Accepter, ou refuser. Dans les deux cas, il subirait.

– Est-ce que... si je disais non, tu m'en voudrais ? demanda-t-il d'une petite voix.

– Comment le pourrais-je ? Tu es mon moineau, et je t'apprécie comme tu es. Je ne t'abandonnerai pas, quoi qu'il arrive, quel que soit ton choix.

Les joues du brun rosirent délicatement mais il ne s'en préoccupa pas. Il continua de peser le pour et le contre dans sa tête. Dans les deux cas, il subirait. C'était une évidence. Mais l'un d'eux permettrait d'ouvrir la porte à un avenir plus radieux. Peut-être. Éventuellement. Ce n'était pas une garantie, et pourtant, Jungkook ne pouvait plus penser qu'à une seule chose à présent. 

Si cette porte s'ouvrait, serait-il un jour capable de prendre son ami dans ses bras pour le remercier ?

Inspirant à pleins poumons, il s'accrocha à ce désir de toutes ses forces et déclara :

– Je veux essayer.

– C'est vrai ? s'écria Taehyung, enthousiasmé.

– Hm. Parce que c'est toi, je... Je veux essayer pour toi.

Taehyung le scruta intensément, les sourcils froncés et en tapant du pied, comme si la réponse donnée était mauvaise et pas celle qu'il attendait.

– Que pour moi ?

Jungkook comprit.

– Non, pour moi aussi.

Le sourire éclatant qui s'inscrivit dès lors sur la bouche de son ami le conforta dans l'idée que la décision qu'il venait de prendre était la bonne. Le sourire de Taehyung n'avait vraiment pas de prix. Il avait le pouvoir de guérir tous les maux du monde. Alors peut-être parviendrait-il réellement à le guérir, lui ?

– Qu'est-ce que tu comptes me faire faire... ?

Jungkook n'était toutefois pas encore tout à fait serein. Mais cela ne freina pas Taehyung dans sa gaieté.

– Pour commencer, je vais t'emmener ici, annonça-t-il fièrement.

Son doigt pointa droit devant lui et Jungkook tourna la tête dans la direction indiquée. En face d'eux, au bout de la rue, se trouvait une boutique à la devanture colorée et joliment décorée.

C'était une boutique de fleurs.

𓅪

Le carillon tinta lorsque la porte s'ouvrit pour laisser entrer les adolescents. Taehyung avança tout naturellement vers le comptoir, là où sa mère se tenait, dos à eux.

– Bonjour et bienvenue à la Fleur d'or ! J'arrive tout de suite.

Occupée à la confection d'un gros bouquet, celle-ci n'avait qu'à peine tourné la tête vers son client pour l'accueillir. Il lui fallut un deuxième coup d'œil pour se rendre compte qu'il s'agissait de son fils, qui souriait avec espièglerie.

– Poussin ? fit-elle étonnée. Mais qu'est-ce que tu fais là ? Nous n'avons pas besoin de toi avant demain.

– Coucou m'man ! Je sais bien mais je voulais te présenter quelqu'un.

Taehyung regarda en direction du petit brun resté près de l'entrée et qui observait tout autour de lui avec un air émerveillé. Ses doigts jouaient entre eux, dénotant une certaine timidité tandis qu'il ne bougeait rien d'autre. C'était comme s'il n'osait pas s'aventurer parmi les multiples pots garnis de fleurs, ou bien encore s'approcher d'eux.

– Kookie, l'appela Taehyung.

– Oh mais... Serait-ce ton ami Jungkook ? s'exclama la patronne en remarquant sa présence.

En voyant que l'on parlait de lui, Jungkook reporta son attention sur les deux personnes et se courba respectueusement.

– Bonjour Madame. Je suis Jeon Jungkook.

Un sourire tout aussi éclatant que celui de son fils apparut sur le visage de la femme. Ce n'était pas exactement le même que celui de Taehyung, mais il était tout aussi solaire. Aux anges, celle-ci déposa devant elle ce qu'elle avait entre les mains et cria en direction de l'arrière-boutique.

– Chéri, viens voir ! Taehyung nous a amené Jungkook !

Un bruit sourd ainsi que des pas précipités se firent entendre, rapidement suivis par une voix grave et affolée :

– C'est pas vrai. Oh mon Dieu, j'arrive !

Nonchalamment accoudé au comptoir, Taehyung leva les yeux au ciel quand il vit son père débarquer comme un tank et manquer de renverser un carton posé en équilibre, des brindilles plein les cheveux.

En prenant conscience de son entrée fracassante, l'homme se racla la gorge et réajusta sa coiffure, le visage aussitôt plus sérieux, comme si rien de tout cela n'avait existé.

– Bonjour, jeune homme. C'est un plaisir de te rencontrer enfin, dit-il à l'attention de Jungkook.

– Eh, j'suis là aussi.

Monsieur Kim ignora son fils et fit le tour pour rejoindre le brun, son épouse sur ses traces. Tous deux s'avancèrent vers lui pour le saluer plus correctement, mais Taehyung les arrêta immédiatement :

– Pas touche ! ordonna-t-il sévèrement.

Ses parents se stoppèrent d'un seul et même mouvement et lui jetèrent un regard en biais.

– On sait, fais pas ta maman lionne, le réprimanda sa mère.

– Qu'est-ce qu'il peut être protecteur, c'est pas possible, commenta son père.

– Il a de qui tenir.

– J'imagine que tu parles de toi ?

Alors que les deux adultes commençaient à se jeter la balle, les yeux ronds de Jungkook jonglaient de l'un à l'autre, sans comprendre ce qui se passait. Il était visiblement tout sauf à son aise. Pourtant, ses lèvres ne pouvaient s'empêcher de se redresser et un minuscule rire vibra dans sa gorge.

Taehyung leur ressemblait beaucoup. Il avait les mêmes traits que son père, et semblait partager le caractère exubérant de sa mère.

– Vous pourriez au moins nous proposer un truc à boire au lieu de vous plumer le bec, non ? gronda le châtain. Bandes de malpolis.

Madame Kim posa une main devant sa bouche, épouvantée.

– Tu as raison, où avais-je donc la tête ? Jungkook, mon cœur, tu veux boire quelque chose ?

– Oh, euh... Un- Un verre d'eau sera très bien...

– Jaehyun, tu le lui fais ? Tiens, enlève ton manteau en attendant, fais comme chez toi !

Toujours aussi intimidé, Jungkook se débarrassa de son vêtement ainsi que de son écharpe et les déposa à l'endroit indiqué par la fleuriste, tandis que Taehyung marmonnait dans sa barbe :

– Quel favoritisme, je rêve.

Comprenant qu'on était jamais mieux servi que par soi-même, il partit se servir son propre verre d'eau et en profita pour enlever celui de son ami des mains de son paternel.

– Vous n'avez pas du travail, vous ? ronchonna-t-il en donnant le rafraîchissement à Jungkook.

Le rappel à l'ordre les fit grogner et ils soupirèrent en chœur avant de retourner à leurs activités, contraints par leur propre progéniture. C'était vraiment le monde à l'envers.

Enfin tranquilles, du moins pas vraiment car la madame continuait de les observer depuis son poste tel un stalker, Taehyung offrit un sourire désolé au plus jeune.

– Fais pas attention à eux, chuchota-t-il. Ils ne savent pas se tenir.

– Ils ont l'air gentil, moi je trouve, répondit Jungkook sur le même ton.

Un peu oppressants, mais gentils. Il n'allait pas avouer qu'il avait eu un petit peu peur en les voyant se ruer vers lui quelques minutes plus tôt.

– Pourquoi tu m'as amené ici ? Ce n'était pas que pour me présenter à tes parents, n'est-ce pas ?

Le carillon tinta une nouvelle fois et les perturba. Une femme, accompagnée d'une petite fille, entra et fit le tour des lieux, à la recherche d'un bouquet à offrir. Madame Kim les prit en charge tandis que Jungkook s'était terré dans un coin du magasin, près d'une étagère pleine de sacs de terreaux en tout genre.

– Panique pas, Kookie. Je suis là.

Un hochement de tête, et Taehyung put enfin répondre à la question qui lui avait été posée.

– Si je t'ai amené ici, c'est parce que j'aimerais te donner un premier exercice et voir comment tu t'en sors.

– Quel exercice...?

– Viens avec moi.

Il l'entraîna vers le fond du magasin et lui montra les pots d'orchidées. Il n'y avait pas une grande variété, car le local n'était pas immense et que ses parents faisaient seulement une sélection des plus belles plantes. Mais toutes étaient vraiment jolies et arboraient différentes couleurs pour satisfaire les goûts de chacun.

– Tu... veux que je la touche, c'est ça ? supposa le brun.

– Est-ce que tu t'en sens capable ?

Taehyung observa la réaction de son ami. Dans un premier temps, celui-ci examina minutieusement les tiges fleuries en approchant son visage mais tout en gardant une certaine distance. Son expression était concentrée, ses yeux plissés, comme s'il essayait de juger l'être vivant qui se dressait devant lui. Après quelques secondes, il secoua rapidement la tête en signe de refus.

– Tu as peur ?

– Je ne veux pas l'abîmer.

– Tu ne vas pas l'abîmer, ne t'en fais pas. Elles sont bien plus robustes qu'elles n'y paraissent, le rassura Taehyung.

– Je t'ai dit non !

Il s'éloigna brusquement de la plante et Taehyung fit un pas en arrière, déconcerté par le ton rude employé.

– Jungkook...

– Je ne veux pas l'abîmer, répéta-t-il. Je ne veux pas lui faire de mal.

– Mais pourquoi est-ce que tu lui ferais du mal ?

Jungkook se mura dans le silence. Il avait les yeux baissés au sol et semblait désormais fermé à toute discussion. Taehyung ne comprenait pas. Et il avait besoin de comprendre.

– Dis-moi ce qui ne va pas. J'ai besoin de savoir exactement ce qui t'inquiète pour pouvoir t'aider, prononça-t-il doucement.

– Je veux pas... E-Elle est belle et... Ses fleurs, s-si elles tombent à cause de moi, je-

Le garçon s'interrompit. Sa respiration s'était accélérée et ses mains tremblaient. Redoutant une nouvelle crise, Taehyung balaya la boutique d'un regard. Même s'ils étaient relativement protégés de la vue des autres par les multiples végétaux de l'allée centrale, ce n'était pas l'endroit le plus adéquat pour ce genre de scène.

Il l'invita alors dans la remise, là où ils seraient seuls. Son père avait dû partir en livraison, il l'avait vu du coin de l'œil avec son casque de mobylette sur la tête quelques minutes plus tôt. En entrant dans la pièce encombrée, il remarqua le petit escabeau placé contre l'un des murs. Il fit s'asseoir Jungkook et s'agenouilla devant lui.

– Kookie, tu sais, un toucher n'est pas forcément brusque et ne fait pas forcément mal. Il faut faire preuve de délicatesse, doser sa force, préciser ses gestes.

– Je ne sais pas faire...

– Et je suis là pour t'apprendre. Est-ce que tu veux apprendre ?

Jungkook acquiesça après une certaine hésitation.

– Super ! Alors attends-moi, je vais te montrer quelque chose.

Taehyung se releva et quitta la pièce en trottinant, et le plus jeune attendit sagement jusqu'à ce qu'il ne revienne avec une sorte de mini cactus dans la main.

– Regarde-le bien et dis-moi ce que tu en penses.

– Je pense que c'est un cactus.

– À part ça ? pouffa Taehyung. Il a l'air comment ?

Jungkook prit le pot en terre cuite et analysa la boule verte cernée de piquants, la mine préoccupée.

– Il n'a pas l'air fragile, nota-t-il. Mais il a l'air de faire mal.

– Tu as raison sur une chose. Il n'est pas fragile. Cependant...

Son souffle se coupa quand Taehyung tendit le doigt et effleura les pointes sans broncher.

– Ce sont comme des poils, en réalité. C'est tout doux.

– Oh...

– C'est exactement ce que je te disais. Certaines choses peuvent faire peur ou laisser penser qu'elles sont douloureuses, alors qu'elles sont inoffensives.

En silence, il continua de caresser le cactus, sous l'œil attentif du brun qui paraissait maintenant très curieux.

– J'ai choisi celui-ci car il est quasi indestructible. Bien sûr, faut pas y aller avec une tronçonneuse, mais avec les doigts, aucun risque de l'abîmer.

Pendant un moment, Jungkook se contenta de fixer la chose faussement piquante, secrètement prêt à s'enfuir si jamais elle tentait de lui sauter dessus pour l'agresser. C'était bête, ce n'était qu'une plante, rien d'autre. Que faisait donc cette goutte de sueur sur sa tempe ? Et pourquoi avait-il envie de vomir ? Sa tête le tournait et son cœur battait fort.

Taehyung voyait bien qu'il mourrait d'envie de le faire malgré tout. De braver ses peurs, d'expérimenter.

De toucher.

– Essaye, l'encouragea-t-il à voix basse.

Cela prit du temps pour que Jungkook décide enfin de se lancer. Mais il le fit.

Parce qu'il se sentait si idiot, à redouter ce qui ne bougeait même pas. Parce qu'il voulait découvrir la texture que son aîné disait douce. Parce qu'il voulait arrêter d'être comme ça. Sans savoir pourquoi, Taehyung lui donnait envie d'être autrement. Il n'avait jamais voulu changer auparavant, estimant que cela serait peine perdue et que de toute façon, il était voué à ce destin bien mérité. Désormais, il le voulait. Car il n'était plus seul.

Alors, craintivement, il raidit son index tremblant et réduisit la distance. Petit à petit. Progressivement. Jusqu'à ce qu'il sente sous son empreinte quelque chose qui faisait penser à la fourrure de l'ours en peluche qu'il avait enfant. Ce contact le surprit, si bien qu'il retira son doigt presque immédiatement et manqua de lâcher le pot.

Le visage blême, il lança un regard désolé à son aîné qui le rassura à l'aide d'un franc sourire. Il n'avait pas fait de bêtise. Il devait juste être plus précautionneux pour éviter d'en faire.

Sa salive s'agglutina sur sa langue. Il déglutit. Tout à coup, il n'était pas convaincu par l'idée de recommencer, ni même par celle de le désirer. Mais Taehyung le félicita. Et peut-être que ce fut ce qui le poussa à réitérer son geste. Les yeux fermés, il accueillit de nouveau la sensation des poils souples du cactus contre son épiderme.

– C'est bien, Kookie. Juste comme ça, doucement. Prends ton temps.

Il essayait. Il essayait vraiment de prendre son temps et de lutter contre ses instincts qui le poussaient à tout arrêter. Mais encore une fois, sa détermination était si fragile. Elle pouvait se briser à tout instant.

– Qu'est-ce que tu ressens ?

Ses sourcils se froncèrent et il se concentra, prenant sur lui pour faire fi du reste.

– C'est bizarre...

– Bizarre comment ?

Ce n'était en soi pas si désagréable. Ça n'avait rien d'humain ou d'animal. Ce n'était pas chaud, ce n'était pas comme de la peau. Ça ne pulsait pas sous les battements d'un cœur. Mais ça restait vivant, et ça le faisait tressaillir. Il tenta de faire évacuer cette pensée et caressa, caressa encore, quelques secondes de plus.

Mais la nausée le reprit et il rompit tout contact.

– Stop ! Trop, gémit-il.

Taehyung retira dès lors le cactus et le déposa à ses pieds sans insister. Il savait que c'était pour lui une véritable épreuve et il ne voulait pas risquer de mettre en péril sa santé. Le pauvre avait passé un après-midi suffisamment pénible comme ça. Il n'allait pas le torturer.

Ils restèrent une bonne minute sans parler pendant que Jungkook se remettait de ses émotions. Plus loin, on pouvait entendre madame Kim discuter avec un client et le bruit du papier de soie qu'elle entourait autour des bouquets. C'était un bruit assez plaisant. Taehyung aimait bien ce papier mais il n'arrivait jamais à le manipuler sans le froisser. Peu importait combien il essayait.

– Tu peux être fier de toi, Jungkook, dit-il au bout d'un moment.

– Je n'ai pas tenu longtemps, déplora ce dernier. C'était nul.

– Ce n'était pas nul, c'est une victoire.

– Une vraiment toute petite, alors...

– Même la plus petite des victoires compte. Un pas après l'autre, Kookie. Ne sois pas pressé, et ne sois pas trop dur avec toi-même. Moi, je suis fier de toi.

– Tu l'es...?

Jungkook leva les yeux dans les siens et Taehyung hocha la tête, le regard tendre.

– Incroyablement fier.

La bouche du plus jeune s'étira et ses joues rougirent au compliment. Il aimait le rendre fier. Et s'il était content, alors il l'était aussi. Cependant, malgré ses mots encourageants, il ne pouvait s'empêcher d'être frustré. L'exercice était si simple, et ce n'était qu'une plante. Et même s'il n'existait pas de petites victoires, même si chaque pas serait un de plus vers l'accomplissement de son but, à ce rythme-là, il en aurait pour toute une vie avant d'être guéri. 

– Tu crois qu'un jour je serai capable de te prendre dans mes bras ? demanda-t-il tristement.

Un sourire illumina soudainement le visage de Taehyung. Un sourire chaud comme l'été et brillant comme le soleil. 

Ému, il contempla son moineau quelques instants, résistant à l'envie de caresser sa joue, puis dans le silence, il répondit en murmurant :

– Définitivement. Et ce jour là, je serai le plus heureux du monde.


𓆩𓆪

Bonsoir, mes oiseaux ! Comment allez-vous ?

Dis-donc, mes chapitres ne cessent de s'allonger avec le temps. Celui-là fait plus de 6000 mots ! J'ai d'ailleurs hésité à le couper en deux, mais finalement je le trouve plus cohérant en un seul morceau. 

Qu'en avez-vous pensé ? Jungkook a été super courageux 🥺. Cette histoire me rend si soft, bon sang ! 

Bref, je vais m'arrêter là pour aujourd'hui, j'vais aller me goinfrer de gâteaux devant le meilleur pâtissier. Je vous embrasse !

Astëlya

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